Le Boudoir de Marie-Antoinette

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 Marie-Antoinette démaquillée

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de La Reinta

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MessageSujet: Marie-Antoinette démaquillée   Marie-Antoinette démaquillée Icon_minitimeVen 3 Nov - 15:31

Top article !!!  Marie-Antoinette démaquillée 454943

Marie-Antoinette démaquillée
baom baom baom déjà le titre c'est du génie  Marie-Antoinette démaquillée 405462

Aucune figure historique n'a eu plus de surnoms : l'archiduchesse Antoine, l'Autrichienne, l'Autre Chienne, la Bergère royale, Madame Déficit, la Catin royale, Toinette, la Fureur utérine, la Messaline royale, Madame Veto, la Veuve Capet, la Reine martyre... Un foisonnement de représentations s'est immédiatement emparé de Marie-Antoinette (1755-1793). A ces réputations qui ont accompagné son existence a succédé une moisson de reflets jusqu'à nos jours, comme si chaque époque avait voulu construire "sa" reine. Autant elle fut en décalage dans la France de son temps, qui l'a peu comprise, autant sa figure s'est épanouie dans l'imaginaire fantasmatique par la suite, ce qui fait de Marie-Antoinette le personnage historique le plus glosé à l'échelle mondiale, ce phénomène se renforçant depuis une quinzaine d'années. Elle est partout et appartient à tous, biographes, romanciers, cinéastes, publicitaires, créateurs de mode, pâtissiers. Elle est tendance, en version rococo, écolo, BCBG, pop, punk, mais aussi martyre ou pécheresse. Cela s'appelle le kitsch.

La Reine scandaleuse, de Cécile Berly, commente ces "idées reçues sur Marie-Antoinette", comme l'indique le sous-titre d'un ouvrage très stimulant. Dans sa thèse publiée en 2006, Marie-Antoinette et ses biographes. Histoire d'une écriture de la Révolution (L'Harmattan), cette jeune historienne a déjà étudié les multiples interprétations contradictoires de cette existence. Certains insistent sur la vie versaillaise d'une princesse luttant contre l'étiquette de la cour ; d'autres s'attachent à l'opposition à la Révolution, confrontation tragique entre deux légitimités qui conduisent les républicains à exiger sa mort. La tradition royaliste "fabrique", elle, deux Marie-Antoinette : la mère admirable subissant son martyre avec une dignité qui en remontre à ses bourreaux ou la "tête à vent" qui creuse le déficit par ses inconséquences puis précipite Louis XVI vers la chute en se mêlant de politique.

Enfin, il y a tous ceux qui ont tenté de faire coller les réputations avec les faits. Cette historiographie pose des questions à la reine : a-t-elle vidé les caisses du royaume ? A-t-elle eu une sexualité débridée ? Est-elle responsable de la fin de la monarchie ? A-t-elle eu un procès inique ? Cécile Berly tente de répondre à ces questions, parfois avec des éléments concrets - le portrait de "Madame Déficit" est accablant, la reine coûtant environ 50 millions de livres - ou en éclairant ces interrogations d'un jour nouveau : la frivolité de la reine est aussi le point de départ d'une ambitieuse "politique culturelle", finançant selon ses goûts l'architecture, la musique, le théâtre, la mode... Ces relectures d'une vie et de ses éclats multiples confèrent aux représentations historiques de la reine l'aspect d'une installation kaléidoscopique majeure.

De leur côté, Edmond (1822-1896) et Jules (1830-1870) de Goncourt ont publié le premier récit "moderne" de la vie de Marie-Antoinette en 1858, et la réédition de ce texte oublié est une révélation. Car les Goncourt ne sont pas seulement favorables à la reine, s'inscrivant dans l'historiographie royaliste. Ce sont également et surtout des "fans" : ils adorent cette princesse dans ses détails, ses fétiches, sa frivolité même, et en font une "femme-femme" plus déchirante encore dans la tragédie qui l'accable, de la mort de son fils aîné en juin 1789 à sa décapitation en passant par les accusations incestueuses lors de son procès. Les Goncourt sont les premiers à réunir en un seul personnage les deux faces contradictoires de Marie-Antoinette pour faire naître émotion et adhésion de ce jeu de miroirs : une reine légère que le malheur va mûrir. Ils infléchissent le portrait de la martyre créé à la Restauration vers celui d'une "femme aimant la vie, l'amusement, la distraction, une femme un peu vive, un peu folâtre, un peu moqueuse, un peu étourdie, mais une femme honnête, une femme pure". Cette figure est absolument nôtre : c'est cette reine-là que l'on a vu resurgir voici une quinzaine d'années dans un fracas de publications, de films, d'expositions, d'imageries et de gadgets.

Il faut remonter plus précisément à 1997 pour comprendre l'entrée de Marie-Antoinette dans cette gloire postmoderne. Le phénomène prend son ampleur avec Marie-Antoinette. The Journey, biographie de la Britannique Antonia Fraser. Celle-ci l'a écrite avec en tête la disparition de Lady Di (Diana Spencer, 1961-1997). Ce récit en miroir des deux princesses transforme Marie-Antoinette en héroïne parce qu'elle en devient profondément humaine, fragile, tout en restant une mère modèle. Cette figure contemporaine, Sofia Coppola la filme dans Marie Antoinette en 2006 : voici une adolescente retranchée au sein d'un monde clos dont la modernité tient dans le refus de l'étiquette monarchique, la revendication du privé, le souci de soi, la médiatisation de son image à travers son apparence et ses bonnes oeuvres. Où l'on retrouve Lady Di...

En 2002, Chantal Thomas, spécialiste de la littérature libertine, publie son premier roman, Les Adieux à la reine. Le livre est un succès critique et un triomphe public, décrochant le prix Femina, attirant près de 120 000 lecteurs. Les premières pages se situent en 1810, à Vienne, où a émigré Agathe-Sidonie Laborde, ancienne lectrice adjointe de Marie-Antoinette à Versailles. Flash-back : la lectrice se souvient des trois journées, du 14 au 16 juillet 1789, qui ont vu s'effondrer "sa" monarchie. Tout est perçu, parfois mal ou avec de multiples écrans, de son point de vue personnel, celui d'une subalterne du palais, qui vit sous les combles et fait face à l'insalubrité permanente. Ici, Versailles est un miroir aux alouettes pestilentiel, surpeuplé, auquel tous, des princes de sang aux domestiques, veulent appartenir, subissant les cascades de mépris qui dévalent la hiérarchie royale.

Marie-Antoinette démaquillée Zz10

Chantal Thomas voit la reine comme une "personnalité fragmentée, traversant des destins opposés" : "Ce qui me touche, dit-elle dans un entretien réalisé pour la nouvelle réédition de son roman, c'est sa volonté de se former, tant intellectuellement, culturellement que politiquement. Ce qui va à l'encontre de sa personnalité originelle, frivole, évanescente. Elle saute dès lors d'une humeur à l'autre, avec envie, colère, caprice." Le choix de la romancière consiste à jouer sur l'ambivalence de ce caractère, entre innocence et manipulation, énergie et fatalisme, fierté mâle et langueur féminine.

Benoît Jacquot, dans le film adapté du roman qui vient de sortir, a tenu à concentrer son travail sur une vision "sidonienne" : la reine n'existe que dans l'oeil amoureux, désarçonné, finalement déçu, de sa lectrice. Le cinéaste a redessiné le personnage principal : rajeunie de vingt ans, Sidonie/Léa Seydoux est désormais une innocente qui découvre. Le rythme du film tient dans cette captation vive, ses dialogues tendus, la jeunesse des actrices faisant contraste avec les vieux courtisans décatis. Cette vivacité des gestes et des humeurs est la réussite du film.

Ainsi Jacquot fait-il relire le roman autrement : le cinéaste va au plus direct, il propose un film au présent sur l'histoire. Et ce coup de force fait exploser le kitsch d'une représentation de la reine aujourd'hui gorgée de "psychologie féminine" et d'"identification pop". La voici, libérée de ses biographes et de ses fans. Comme amaigrie et épurée, elle erre dans les couloirs de Versailles à la recherche d'une histoire qui lui échappe, toujours mystérieuse mais enfin sans réponse aux questions qu'elle nous pose.
http://www.lemonde.fr/livres/article/2012/03/22/marie-antoinette-demaquillee_1673763_3260.html

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Je dois avouer ma dissipation et paresse pour les choses sérieuses
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