Renforçant les liens entre États, les ambassades aux XVIIe et XVIIIe siècles furent d'un faste inouï.
Résidence officielle du roi de France de mai 1682 jusqu'en octobre 1789, à l'exception de la période de régence (1715-1722), durant la minorité de Louis XV, qui s'installa provisoirement au palais des Tuileries à Paris, le château de Versailles connut de nombreuses ambassades, dont certaines fut particulièrement célèbres, à l'instar de la visite des émissaires du roi de Siam (actuelle Thaïlande). Ces derniers furent reçus par Louis XIV dans la galerie des glaces, parée d'un admirable mobilier en argent massif, le 1er septembre 1686.
Si le château de Versailles connut, également, des ambassades tunisiennes dès le règne de Louis XIV, la première étant celle conduite par Mohamed Boulukbachi et Ali Chaouch, dépêchés en 1690 par le prince mouradite Mohamed Bey (1686-1696), la plus marquante de ces dernières fut la députation de 1777, composée de quatorze personnes, ayant à leur tête le commandant de la cavalerie beylicale Souleyman Agha.
Envoyée par le souverain husseinite Ali Bey II (1759-1782), qui entretenait d'excellentes relations avec la France, l'ambassade tunisienne arriva au château de Versailles le 10 mars 1777.
Louis XVI reçut Souleyman Agha en audience solennelle dans sa grande chambre de parade. Celle-ci, ruisselante de dorures, était la pièce la plus symbolique du palais. Dépassant en importance la salle du trône, une particularité propre au cérémonial de la monarchie française, la grande chambre de parade était le cadre opulent des cérémonies du lever et du coucher du roi, qui rythmaient quotidiennement la vie de la cour.
Après l'audience accordée par Louis XVI, Souleyman Agha fut présenté à la reine Marie-Antoinette dans la galerie des glaces, encombrée des plus hauts dignitaires du royaume et d'une foule de courtisans. Le journal de cette ambassade (conservé dans la Bibliothèque nationale de France) relate qu'en réponse aux gracieux compliments de Souleyman Agha, la reine lui adressa des propos fort aimables.
L'échange de cadeaux étant d'usage, Souleyman Agha offrit au roi de France six magnifiques chevaux avec leurs selles brodées d'or et d'argent, deux lions, des textiles tunisiens, comprenant des habits, des turbans et des couvertures, ainsi que des sabres aux poignées superbement ouvragées. Quant aux présents de Louis XVI, ils consistèrent dans des médailles honorifiques en or, des bijoux, de somptueuses pièces d’orfèvrerie; des montres, de même que des étoffes précieuses.
Le peintre Jean-Bernard Restout (1732-1797) réalisa un remarquable portrait de l'ambassadeur tunisien, œuvre conservée de nos jours au musée des beaux-arts de Quimper.
(par M. Khaled Hizem)
Musée des beaux-arts de Quimper: gros plan sur le portrait de Souleyman Agha, émissaire tunisien envoyé en ambassade à Versailles par le souverain husseinite Ali Bey II (1759-1782)
L’œuvre, une huile sur toile, est datée de 1777
Ce portrait, du au peintre Jean-Bernard Restout, se distingue par son admirable qualité d'exécution.