24 juillet 1685: Mariage du duc de Bourbon et de Mademoiselle de Nantes

Mariage du duc de Bourbon et de Mademoiselle de Nantes

M. de Sainctot, introducteur des ambassadeurs, va chercher, le duc de Bourbon, dans son appartement, et l’amène à celui de Mademoiselle de Nantes. Puis, il les conduit dans la galerie où Mme la dauphine attend le Roi. La compagnie va à la chapelle, chacun à son rang.

L’habit du duc de Bourbon est brodé d’or, sur un fond de gros de Naples noir. Le dessein de cette broderie est une invention toute nouvelle. Un bord d’un quartier de haut régnait autour du manteau. La broderie, en étant fort particulier, et composée de deux manières d’ornements qui se contrastaient, le fond de l’étoffe faisait en quelques endroits le fond des ornements, et en d’autres, l’or faisait le fond, et l’étoffe, les ornements et dans les endroits où elle en servait, elle était ornée d’émeraudes et de diamants chassés dans de petits ornements de broderie. Tous les ornements du rebord de ce manteau sont brodés de perles, et le milieu des grands fleurons sont ornés de plus grosses perles, qui tournent suivant les tiges. Tout le plein du manteau était un ornement pareil; mais un peu plus petit. Le revers est aussi d’une broderie des plus riches. Les chausses sont comme le manteau, et le pourpoint est blanc et brodé d’or, mais plus délicatement. Le cordon du chapeau est de gros diamants.

Mademoiselle de Nantes a un habit de brocard d’argent, chamarré de dentelles d’argent plissées, et tout semé de rubis et de diamants, et le corps et les manches sont entièrement couvertes, de même que celui des fiançailles. La jupe de dessus est de brocard d’argent, chamarrée de dentelles d’argent plissées, entre lesquelles sont des boutonnières d’émeraudes et de diamants. Les parures de tête sont assorties aux pierreries de l’habit.

La broderie de l’habit du Roi est d’or et d’argent, et faite exprès pour placer les pierreries dont il est tout semé, de sorte qu’il paraît être tout brodé de pierreries.

La Musique de la Chapelle chante plusieurs motets pendant la messe et lors de l’offertoire. Le marquis de Blainville, Grand Maître des Cérémonies, avertit le duc de Bourbon d’aller à l’Offrande. Après avoir fait une révérence à l’Autel, et une autre au Roi, il baise l’anneau de Mgr de Coislin, évêque d’Orléans, premier aumônier du Roi, et lui présente un cierge garni de plusieurs pièces d’or, qu’il avait reçu du Grand Maître des Cérémonies. Celui-ci l’avait pris des mains de M. Duché, contrôleur général de l’argenterie en année. Les mêmes cérémonies sont observées pour Mademoiselle de Nantes, qui va ensuite à l’Offrande. Après le Pater, les abbés de Breuil et Milon, aumôniers du Roi, tous deux en rochet et en manteau long, étendent un poêle de brocard d’argent sur la tête di duc de Bourbon et de Mademoiselle de Nantes, pendant que Mgr de Coislin , évêque d’Orléans, achève la cérémonies des épousailles. La messe étant finie, le curé de la paroisse de Versailles présente au Roi, le registre des mariages, qui le signe ; Monseigneur, Mme la Dauphine, Monsieur, Madame, Monsieur le Prince, Monsieur le Duc, Madame la Duchesse, et le duc et la duchesse de Bourbon. Au sortir de la messe, on remonte dans le même ordre qu’à l’aller, excepté la mariée, depuis duchesse de Bourbon, qui prend son rang après Madame la Duchesse.

Après le mariage qui a été célébré entre 12 heures et 13 heures, Louis XIV va dîner, chez Mme la Dauphine, à son ordinaire. Mais, il y a une table plus grande qu’à l’accoutumé : outre Monseigneur, Mme la Dauphine, Monsieur, Madame, la « petite » Mademoiselle et Mme la Grande Duchesse qui y mangent de droit, Madame la Duchesse, la duchesse de Bourbon, la princesse de Conti, Mademoiselle de Bourbon, Mademoiselle d’Enghein et Mademoiselle de Condé (filles de Monsieur le Duc), et Mademoiselle de Blois y mangent aussi.

A 20 heures, Louis XIV se trouve dans son grand appartement, où toute la Cour se rend, et donne une grande musique sur son magnifique escalier de marbre. Toutes les dames se partagent dans les deux tribunes, et tous les hommes sur les rampes. La Musique est en bas, et joue jusqu’à 22 heures qu’on aille souper.

Après la musique, il donne un festin royal dans la salle des gardes de Mme la Dauphine où se trouve la table. Elle est tendue d’une riche tapisserie rehaussée d’or, qui représente l’histoire d’Henri III. Il y a au souper: Louis XIV, Monseigneur, Mme la Dauphine, Monsieur, Madame, M. le duc de Chartres, Mme la Grande Duchesse de Toscane, Monsieur le Duc, Madame la Duchesse, le duc de Bourbon, la duchesse de Bourbon, la princesse de Conti, Mademoiselle de Bourbon, le duc du Maine, le comte de Toulouse, Mademoiselle de Blois, la duchesse de Verneuil et 80 personnes de la première qualité. Il y a 4 services. La marquise de Montespan, mère de la mariée, n’est pas présente au souper, ni la marquise de Maintenon qui donne à souper à quelques amis.

Après le festin royal qui a été extrêmement superbe, on mène les mariées dans la chambre du grand appartement du Roi, où Louis XIV leur a fait dresser un lit tout neuf et magnifique. Mgr de Coislin, évêque d’Orléans, premier aumônier du Roi bénit le lit. On déshabille la mariée en présence de Mme la Dauphine qui lui donne la chemise présentée par Madame la Duchesse. et de toutes les dames, à l’exception des filles qui sont dans la galerie. On déshabille le marié, dans la pièce voisine, en présence du Roi qui lui donne la chemise présentée par Monsieur le Duc. Quand la mariée est au lit, Louis XIV amène le duc de Bourbon, et le fait coucher dans le même lit. Cela ne fût que pour la cérémonie car la mariée n’avait pas 12 ans. Louis XIV leur ayant donné le « bonsoir », Mme la Duchesse et la marquise de Montespan demeurent aux deux côtés du lit, et y ayant passé 30 minutes, on fait lever les mariés, qui sont ensuite conduits chacun dans leurs chambres.