VersaillesNuit du 5 au 6 octobre 1789
La foule envahit le château
Le calme revenu à l'intérieur et autour du château, La Fayette, après avoir pris quelques dernières dispositions, s'était retiré vers quatre à cinq heures du matin à l'hôtel de Noailles, résidence versaillaise de son beau-père. Une demi-heure à peine s'était écoulée lorsque des cris signalèrent qu’un groupe avait pénétré à l'intérieur du château par une grille.
Les conditions de cette ouverture divisent les historiens: profit de l'endormissement des gens d'armes censés garder la grille, relève opportunément mal organisée... corruption ?
Dirigé par des guides travestis, le groupe parvint jusqu'au grand escalier de marbre qui conduisait aux appartements de la reine. Deux gardes du corps ( Deshuttes et Varicourt) furent tués (leurs têtes accrochées au bout d’une pique furent ramenées comme trophée à Paris); onze autres résistèrent pendant que la Reine se sauvait chez le Roi.
« La preuve que l'on n'avait pris aucune précaution extraordinaire, c'est que les assassins, parvenus au haut de l'escalier de marbre, et conduits certainement par quelqu'un qui connaissait le chemin à suivre, tournèrent dans la salle des gardes de la reine, où ils tombèrent à l'improviste sur le seul garde aposté en ce lieu. Ce garde se précipita à la porte de la chambre à coucher, qui était fermée en dedans, et ayant frappé à plusieurs reprises avec la crosse de son mousqueton, il cria "Madame, sauvez-vous, on vient vous tuer". Puis, résolu à vendre chèrement sa vie, il se mit le dos contre la porte; il déchargea d'abord son mousqueton, se défend ensuite avec son sabre, mais est bientôt écharpé sur place par ces misérables qui, heureusement, n'avaient pas d'armes à feu. Il tombe contre la porte, et son corps empêchant les assassins de l'enfoncer, ceux-ci le poussèrent dans l'embrasure de la fenêtre, ce qui le sauva. Abandonné là sans connaissance jusqu'après le départ du roi pour Paris, il fut alors recueilli par des amis. Ce brave nommé Sainte-Marie, vivait encore à la Restauration »
(La marquise de La Tour du Pin. Dame d'honneur de la Reine)La Fayette, qui accourut enfin à la tête de grenadiers de la garde nationale, réussit à repousser les envahisseurs.
Rassemblée sous les fenêtres du roi, la foule exigea à grands cris que la Reine parut et somma impérieusement le Roi de se rendre à Paris. Après avoir essayé de calmer les cris, La Fayette s'adressa à Marie-Antoinette et lui demanda quelles étaient ses intentions:
« Je sais le sort qui m'attend, mais mon devoir est de mourir aux pieds du roi et dans les bras de mes enfants »La Fayette la conjura de se présenter sur le balcon. Elle y consentit. Le général, ne pouvant dominer les cris de la multitude, baisa sa main, comme pour annoncer au peuple que la réconciliation était complète, et le nom de Marie-Antoinette fut porté aux nues par cette même foule qui, tout à l'heure, la menaçait de mort.
Louis XVI, après une délibération tumultueuse, se décida à se rendre à Paris. Le cortège insurrectionnel se mit en marche, précédé des trophées de la journée, et suivi de la famille royale qu'accompagnaient les gardes du corps humiliés.
Il convient de préciser que les événements de cette journée ont fait l'objet d'une enquête de police, instruite au Châtelet. Les auditions s'étalèrent du 11 décembre 1789 au 20 avril 1790. Aux 170 témoins oculaires interrogés s'en ajoutèrent d'autres qui relatèrent directement cet événement trouble de la Révolution. Les plus célèbres sont La Fayette qui a rédigea deux récits (pages 529 et suivantes de ses mémoires). Il y eut aussi, Mme de La Tour du Pin (citée supra) mais aussi Condorcet, Saint-Priest, Dumas et le Roi Louis XVI lui même, qui dans son "testament politique", laissé au Tuileries pour expliquer son départ de la capitale en 1791, revint sur les journées des 5 et 6 octobre 1789.
Sources:
Memo
Mémoires de la marquise de la Tour du Pin.