Par une faveur particulière et une marque de bonté toute à fait exceptionnelle du roi Louis XVI et de la Reine Marie Antoinette, Mme de Tourzel obtint de garder auprès d'elle sa dernière fille non mariée et non présentée – ce qui était contraire aux usages de l'étiquette de la Cour, où la Gouvernante des Enfants de France – grand officier de la Couronne – abandonnait tout y compris sa propre famille et ses propres enfants, pour se consacrer tout entière, vingt quatre heures sur vingt quatre, aux enfants du Roi, dont elle devenait la garante auprès du roi et de l’État.
Ainsi, Mme de Tourzel dut emménager dans les appartements même du Dauphin et de Mme Royale, au rez de chaussée du corps central, sous les appartements de la Reine.
On connaît grâce aux recherches de JC Le Guillou, l'invraisemblable appartement de fonction qui lui fut aménagé pour son usage particulier, curieusement coincé entre le cabinet intérieur de la fille du Roi, la chambre du Dauphin, les anciens cabinets intérieurs de la comtesse de Provence, les passages sur les cours intérieurs et les entresols pris sur l'ancien appartement de la tante du Roi, Mme Sophie, sur les parterres d'eau.
Contrairement aux modes d'attribution de logements, sa dernière fille Marie Charlotte Pauline Joséphine du Bouchet de Sourches – plus connue dans la famille royale sous le surnom de « Pauline » qui était encore demoiselle, non chanoinesse et non présentée, obtint pour son usage et sa retraite personnelle pendant le service continuel de sa mère auprès des enfants royaux, un petit entresol composé de quatre pièces.
En conséquence, La reine lui fit donner quatre chambres qui dépendaient – vraisemblablement de sa garde robe aux habits ou de sa lingerie, situées entre le plafond du rez de chaussée et le plancher de ses cabinets intérieurs.
On a longtemps crut que ce logement était celui de la gouvernante mais les études de l'éminent architecte JC Le Guillou ont rétablit la vérité confirmé par les souvenirs même de Pauline de Tourzel, devenue comtesse de Béarn pendant la Révolution.
Pauline décrit dans « ses souvenirs de quarante ans » la vie triste et solitaire qu'elle mena dans ce réduit obscur, localise avec précisions sa chambre dans le labyrinthe des entresols et évoque les problèmes phoniques que la promiscuité de tous ces cabinets.
« L'appartement qu'elle occupait se trouvait entre l'appartement de M. le Dauphin et celui de Madame Royale.
Toutes les nuits, ma mère couchait dans la chambre de M.le Dauphin et ne le quittait en aucun moment du jour.
Je menai donc une vie un peu triste et un peu solitaire dans le court espace qui sépara notre installation à Versailles au mois d'août 1789 et les journées du 5 au 6 octobre suivant.
J'étais logée dans un entresol donnant sur une petite cour intérieure (cour de la Reine ou de l'œil de bœuf), fort obscure dés 2 heure de l'après midi, j'étais obligée d'avoir de la lumière, ma chambre se trouvait précisément placée sous le cabinet de la Reine (Cabinet de la Méridienne), qui malgré sa magnificence de dorures et des plus belles sculptures, n'avait pour vue, comme mon entresol, que cette petite cour.
Un inconvénient grave, résultant de la mauvaise distribution de cette partie du château, excita, chez moi, des scrupules faciles à comprendre et ajoutait Encore à l'incommodité de ma sombre demeure: tout ce que la Reine disait dans son cabinet, s'entendait distinctement, dans ma chambre.
Tous les jours, à une heure, le Roi venait chez la Reine et sa voix forte faisait arriver toutes ses paroles jusqu'à moi.
Ma mère crut devoir prévenir la Reine en lui disant que j'avais soin de tenir ma fenêtre habituellement fermée.
Celle ci, avec sa grâce et cette bonté qui se retrouvaient dans toutes ses actions et dans toutes ses paroles, lui répondit
« Qu'importe, je n'ai rien à craindre quand à mes plus secrètes pensées tomberaient dans le cœur de notre chère Pauline »Baudouin Eschapasse a évoqué brièvement ce réduit miraculeusement conservé dans un article d'un numéro récent de Historia sur le sujet " Crise du logement à Versailles":
« Quelques marches après voir passé une porte dissimulée à la gauche du lit de la souveraine, on tombe ainsi sur un le palier où dormait le premier valet du Roi (... ) Sur la gauche, un étroit escalier de service dessert deux autres niveaux. L'appartement de Mlle de Tourzel est l'un des rares à être demeuré en l'état. L'endroit ne doit pas faire plus de cinquante mètres carrés. Un coffre à bois mange une partie de l'entrée, (qui forma probablement l'antichambre) Dans la chambre minuscule où filtre une si faible lumière qu'il faut laisser la chandelle tout le jour, le lit a disparu. Seuls demeurent quelques fauteuils, une commode, un petit bureau en dos d'âne et une horloge dont le tic tac est couverte par le bruit des pas des milliers de visiteurs qui déambulent juste au-dessus. La quatrième pièce, sans doute une garde robe, ne comporte qu'un soupirail donnant sur une petite remise. L'ensemble du logement n'excède à peine la taille de la salle de bains de la Reine qui donne sur la galerie basse et à laquelle on redescend par un labyrinthique réseau d'escaliers »Cet appartement entresolé se visite parfois lors de quelques visites spécifiques.
Tout son décor y est encore préservé, quoique vraisemblablement remanié au XIXe pour l'installation projetée de la duchesse d'Angoulême sous Louis XVIII.
Il est distribué d'une étroite antichambre, éclairée d'une seule fenêtre qui a conservé ses volets intérieurs, des lambris de bois peints en gris, son parquet à la Versailles ainsi qu'un curieux coffre qui semble avoir servi, soit de réserve à bois soit de réservoir pour la chasse d'eau de la garde robe à l'anglaise du dauphin, située juste en dessous.
Le cabinet suivant, la plus grande pièce de l'appartement, était précisément la chambre de Pauline.
L'unique fenêtre, ayant vue sur celles des antichambres du dauphin, du roi et les balcons de la reine, a conservé, là aussi, ses volets intérieurs peints en blanc.
Une partie des murs étaient tendus d'étoffe comme c'était l'usage, aujourd'hui remplacé par du rep jaune.
Le cabinet conserve encore de simples trumeaux de glaces rectangulaires nécessaire à améliorer la lumière de cette pièce très sombre.
Étrangement, on n'y trouve pas de cheminée: cette chambre était probablement chauffée par un poêle.
On trouve ensuite un autre cabinet, plus petit, a une fenêtre
C'est l'unique pièce qui possède une cheminée - un beau chambranle de marbre blanc mais d'époque Restauration, avec une très belle pendulette sous verre sur sa tablette.
Il s'agissait probablement du cabinet de l'appartement où la jeune fille devait se tenir constamment.
On voit aussi l'unique fenêtre qui a conservée ses volets intérieurs et son système de crémones d'époque.
La dernière pièce de la petite enfilade, cabinet noir sans fenêtre, simplement peint et dallé de tommettes rouges, était vraisemblablement une garde robe ou un cabinet de toilette.
On y voit encore une petite porte dérobée dans le mur, qui donnait accès autrefois sur un espèce de grenier, ménagé sous les voutes du bâtiment qui coupa, dés Louis XIV, la grande cour primitive en deux.
Là, on faisait coucher la domestique de la jeune demoiselle toujours prête à ses ordres.
Quoiqu'il qu'il en soit, c'est dans ce petit logement que l'on peut mieux évoqué l'insouciance de la jeune fille, sa vie triste et solitaire qu'elle y mena lorsque sa mère prit la charge, la jeunesse de Mme Royale, les rires et les jeux des enfants de Marie Antoinette, les premières épreuves lors des journées d'octobre 1789 etc....
Le Musée a réuni quelques meubles ordinaires, dons de particuliers faits au château
(chaises, fauteuils, une console, une commode, une pendule Restauration, une banquette de velours) afin de redonner un semblant de vie à ce logement de courtisan exceptionnellement préservé des destructions Louis Philipparde
A droite, l'escalier montant mène à l'Appartement de la Reine, à gauche l'escalier descendant à l'Appartement du Dauphin et à l'extrême gauche l'Appartement de Mme de Tourzel