La Chapelle Royale
Aussitôt l’Aile du Nord terminée, c’est la construction de la Chapelle Royale qui occupe la plupart des ouvriers du château.
Les travaux du château avaient considérablement été ralentis par une épidémie de paludisme qui tua plusieurs milliers d’ouvriers en 1687, déclenchée par l’assainissement des marais.
Mais c’est surtout la guerre de la Ligue d’Augsbourg, qui durera de 1688 à 1697 qui perturbera la bonne marche des travaux, empêchant Louis XIV de mener à bien les différents projets du château: tout ou presque était alors arrêté.
A gauche, la Chapelle Royale vue de l’extérieur. A droite, l’intérieur Les travaux ne reprendront qu’en 1699, pour finalement se terminer en 1710
Ce fut le dernier grand projet de Louis XIV à Versailles
Cette œuvre de Hardouin-Mansart et finalisée par Robert de Cotte est peut-être celle qui nous est parvenue la plus intacte et sans modifications depuis l’époque du grand souverain.
La Chapelle Royale est un chef d’œuvre en ce début de XVIIIème siècle, avec les peintures et sculptures des meilleurs artistes de l’époque.
Plus d’un tiers du budget total de la chapelle fut alloué à la décoration, qu’elle soit peinte ou sculptée.
Nous sommes ici dans un haut lieu du Classicisme français, ou, oserai-je dire, de « baroque à la française »
La Chapelle Royale présente la particularité d’être plus haute que les bâtiments restants du Château de Versailles.
En effet, c’était la seule concession de Louis XIV, seule la puissance divine pouvait avoir un bâtiment plus haut que sa chambre.
Hardouin-Mansart l’avait d’abord pensé de la même hauteur que le reste du château, mais il fut persuadé d’être plus ambitieux par ses confrères de l’Académie d’architecture.
La
chapelle du château de Versailles est une chapelle palatiale située dans le château de Versailles, près de l’angle que forment l’aile du Grand Appartement du Roi et l’aile nord.
Quatre projets précédèrent la chapelle royale actuelle, plus ou moins aboutis et oubliés au gré des transformations architecturales du château.
La chapelle actuelle fut achevée et bénie en 1710, après un chantier qui dura de nombreuses années, une première ébauche du projet datant en effet de 1687.
Vue intérieure depuis la tribune royale
Historique
Les chapelles précédentes
La chapelle royale définitive, consacrée en 1710, fut précédée par quatre sanctuaires successifs, réalisés à divers emplacements du palais. Les chapelles formèrent le lieu dans lequel se déroulèrent les activités quotidiennes de la cour lors de l’Ancien Régime
(Bluche, 1986, 1991; Petitfils, 1995; Solnon, 1987)
Les débuts (1663-1682)
Pour permettre au souverain d’assister depuis la tribune du premier étage aux cérémonies du culte, toutes les chapelles successives du château de Versailles furent conçues à deux niveaux.
Dès 1663, un premier sanctuaire exigu fut logé au nord-est du château dans le pavillon décroché, à l’emplacement de l’actuel cabinet doré de Madame Adélaïde
(Maral, Alexandre, « L'Émergence progressive d'un modèle », in L'Estampille-L'Objet d'Art, Hors-série no 50, avril 2010, p. 2-7)
L’agrandissement du château profita par la suite à la chapelle qui fut déplacée en 1670 au sud, à l’emplacement de l’actuelle Salle des Gardes de la Reine.
Au rez-de-chaussée existait un espace réservé aux effectifs musicaux.
Deux ans plus tard, en 1672, une nouvelle chapelle fut installée à l’emplacement de l’actuelle salle dite du Sacre.
Elle fut bénie le 03 novembre 1672 et avait une superficie de près de 250 m2
Elle était conçue selon un plan rectangulaire et, au premier étage, une balustrade prolongeait la tribune du roi sur les trois autres côtés.
Les musiciens étaient installés au même niveau que le souverain, dans un espace ménagé à l’est de l’édifice et pour lequel un orgue de grande taille, à deux buffets, fut commandé en 1679.
Sur le mur sud, un important retable dessiné par le Brun reliait les deux niveaux et assurait un lien avec la voûte.
Un projet spectaculaire fut prévu pour la voûte, comme en témoigne une maquette de le Brun de 1675.
D'un seul tenant, elle représentait Dieu le Père dans Sa gloire du côté de l’autel et, à l’opposé mais sans solution de continuité, saint Michel terrassant les anges rebelles.
Ce projet était proche des formules mises en œuvre au même moment à la voûte du Gesù par Giovanni Battista Gaulli; on trouvait le même traitement des masses de figures, de la lumière et des nuées pour creuser l’espace.
Cette voûte, d’un genre nouveau, était unique en France. Une ordonnance de pilastres et de colonnes se développait au premier étage
Un provisoire qui dure (1682-1710)
En 1682, la Cour s'installe à Versailles. Le projet de le Brun est alors abandonné.
L'aile du Midi fut construite et la chapelle se fixa à un emplacement provisoire au nord, contre la grotte de Téthys.
Elle reprenait le plan barlong du sanctuaire de 1672, le principe du double niveau, mais on observait une nette régression par rapport à la formule précédente. Le projet était plus sobre, le décor intérieur concentré essentiellement sur le retable - encadré par deux anges de Noël Jouvenet - et les curieux piliers de la tribune, deux termes angéliques supportant une architrave. Une grande croix fut placée au sommet de la toiture, désignant la fonction du lieu.
L’espace alloué aux musiciens, dans la tribune du premier étage, fut pleinement intégré à la chapelle.
Au rez-de-chaussée furent placés deux autels secondaires, l'un dédié à Saint Louis, le second à sainte Thérèse, saints patrons du couple royal.
Un troisième autel fut installé à la tribune, orné d’un tableau de Pierre de Cortone provenant des collections royales.
La chapelle de 1682 fut richement pourvue en vases sacrés, ornements et livres liturgiques.
Ces trésors ont presque entièrement disparu, à l’exception d’un graduel et antiphonaire, somptueux recueil manuscrit et enluminé réalisé en 1686 par l’atelier des Invalides (Atelier des Invalides, In festo Conceptionis Beatae Mariae Virginis, Graduale et Antiphonale ad usum S. Ludovici Domus Regiae Versaliensis pro solemnioribus totius anni festivitatibus A.D. MDCLXXXVI, recueil manuscrit enluminé, Paris, Bibliothèque nationale de France), ainsi qu’un ensemble de grands livres de plain-chant, exécutés par le copiste Philidor entre 1701 et 1703.
Conçue comme provisoire, la chapelle de 1682 fut utilisée pendant 28 ans; de ce fait, elle constitue l’édifice le plus fréquenté par Louis XIV.
D’importantes cérémonies s’y déroulèrent, comme les grandes réceptions dans l’ordre du Saint-Esprit en 1688-1689 ou le mariage du duc de Bourgogne en 1697
Le dernier grand chantier du Roi-Soleil
La chapelle royale est le monument le plus abouti de Versailles, et le moins modifié par l’Histoire.
Tout au long du chantier, le projet architectural connut une lente maturation et trouva sa forme définitive grâce à Hardouin-Mansart.
Influencé par l’architecture ultramontaine, il s’inscrit néanmoins dans la grande tradition française des chapelles palatines et apparaît comme un manifeste de modernité.
En 1682, la Cour et le gouvernement s’installèrent à Versailles.
À cette occasion, une desserte permanente de la chapelle royale fut instituée.
Louis XIV la confia à une communauté de Pères de la Mission - appelés aussi Lazaristes - fils de saint Vincent de Paul, qui furent logés au château.
« L’édifice définitif du nouveau Versailles, lieu de prière désormais perpétuelle, devait combiner les caractères d’une fondation royale à ceux d’une chapelle palatine »
(Maral, Alexandre, « Le dernier grand chantier de Louis XIV », L’Estampille-L’Objet d’Art, Hors série no 50, avril 2010, p. 8-17)
Un projet inabouti : le dôme inspiré des Invalides
Le premier projet d’une chapelle de plan centré, au milieu de l’aile du Nord, fut formulé en 1679 et mis en chantier à la fin de l’année 1684.
Il rappelait celui de François Mansart pour la rotonde funéraire des Bourbons dans la basilique Saint-Denis, mais plus encore le dôme des Invalides, autre fondation royale confiée aux Lazaristes.
- Citation :
« D’inspiration nettement ultramontaine, évoquant une fonction funéraire, le dôme versaillais constituait une innovation trop radicale pour être accepté. Ce morceau d’architecture autonome et d’une écrasante hauteur eût incontestablement perturbé l’équilibre du nouveau Versailles qui s’édifiait. Le chantier ne fut donc pas mené à terme, mais il devait toutefois laisser une trace dans la topographie du palais, le corps de logis séparant les deux cours de l’aile du Nord, d’une largeur inhabituelle, ayant été construit sur les fondations de cette chapelle »
Le péristyle de Mansart (1687-1689)
L’emplacement définitif de la chapelle fut trouvé en 1687
Le plan de l’édifice était barlong, avec un chevet initialement rectangulaire.
La chapelle comportait deux niveaux; au premier étage, une tribune réservée au roi, face à l'autel, bordait l’ensemble du vaisseau.
La chapelle était précédée de deux vestibules superposés, qui donnaient accès à l’aile nord.
La chapelle fut d’abord conçue pour ne pas excéder la hauteur des toitures du reste du palais. Mais dès janvier 1689, l’édifice était nettement plus élevé.
(Date à laquelle Hardouin-Mansart consulta ses confrères de l’Académie d’architecture pour obtenir leur avis sur les proportions du nouvel édifice (Alexandre Maral, « Le Dernier Grand Chantier de Louis XIV », L'Estampille-L'Objet d'art, hors série no 50, avril 2010, p. 8-17))
La reprise du chantier (1699)
Le chantier de la chapelle fut interrompu pendant dix ans, cet arrêt étant dû à l’effort financier réclamé par la guerre de la Ligue d’Augsbourg.
Le chantier reprit au moment où son architecte accéda à la Surintendance des Bâtiments
La chapelle de Louis XIV (1708-1710)
Assumant les fonctions de surintendant de ses propres Bâtiments après la mort d’Hardouin-Mansart, en mai 1708, Louis XIV, assisté de Robert de Cotte, (Blondel, 1752-1756; Marie, 1972, 1976; Nolhac, 1912-1913; Verlet, 1985; Walton, 1993) mena à terme, en deux années, le chantier architectural de la chapelle, ainsi que l’essentiel du décor peint et sculpté et du mobilier.
Le 05 juin 1710, la chapelle royale fut bénie par le Cardinal de Noailles, archevêque de Paris
(https://books.google.fr/books?id=cSeyAAAAMAAJ&pg=PA563 [https://books.google.fr/books?id=cSeyAAAAMAAJ&pg=PA563#v=onepage&q&f=false])