Une fuite organisée pour sauver le trésor de la couronne ?

Des questions furent soulevées lors du naufrage d'un navire de la Couronne.

C’est l’histoire d’un naufrage qui a provoqué d’innombrables fantasmes. Pourtant, si l’on s’en fie à la version officielle, la submersion du Télémaque n’a rien de très palpitant. Amarré au quais de l’ancien port de Quillebeuf le 2 janvier 1790, ce navire appartenant à la flotte royale française s’apprête à remonter la Seine pour traverser la Manche et atteindre l’Angleterre. D’après les documents maritimes de l’époque, le bateau n’abrite que des marchandises sans grande valeur : des tonneaux de suif, des clous et du bois. Aussi, quand le bateau est victime d’une énorme déferlante qui le fera couler, on peine à imaginer que des travaux seront entrepris pour son renflouement.


Le Télémaque,
d'après un dessin original du capitaine du navire Jacques-Adrien Quemin.
DR

Pourtant, quelques jours seulement après le naufrage, plus de 300 hommes sont dépêchés de Cherbourg pour remettre le navire à flot. L’initiative est menée « au nom du Roi » et émane du comte de La Luzerne, le ministre de la Marine de l’époque. L’opération durera plusieurs semaines. Toutefois, malgré les efforts déployés, le bataillon de gros bras cherbourgeois ne parviendra à remonter ni le bateau, ni sa cargaison à la surface…

Une fuite organisée pour sauver le trésor de la couronne ?

Pour les observateurs et les locaux qui assistent à cet échec, les motivations liées à cette vaste opération interpellent. Quel besoin avait la royauté de vouloir à tout prix récupérer la cargaison d’un bateau censé n’abriter que du suif, des clous et du bois ? Officiellement, les travaux sont menés en raison d’une « gêne pour la navigation » mais ceci n’explique pas la volonté farouche de remettre le bateau à flot, d’autant que la gêne en question semble très exagérée. Très vite, une rumeur commence à courir : si la couronne souhaite absolument récupérer la cargaison du Télémaque, c’est qu’il abrite quelque chose de très précieux.

Il faut dire que le contexte de l’époque légitime parfaitement cette hypothèse. Après la prise de la Bastille du 14 juillet 1789 qui a déclenché une véritable tempête révolutionnaire, la couronne se sait menacée. Elle est d’ailleurs soupçonnée d’organiser une évasion massive de ses capitaux vers l’Angleterre. Louis XVI n’aurait-il pas tenté de mettre en lieu sûr une partie de sa fortune personnelle ? Plutôt que des matériaux, le Télémaque ne convoyait-il pas en réalité un gigantesque trésor ? Les rumeurs vont bon train… L’année qui suit, le Roi sera finalement guillotiné, la monarchie sera abolie et aucune autre tentative de renflouement n’aura lieu.

Le trésor pourrait se trouver dans un lieu insolite

L’histoire aurait pu en rester là, mais c’était sans compter sur le retour de la royauté. En effet, immédiatement après la seconde Restauration qui place Louis XVIII sur le trône, de nouvelles opérations vont être diligentées pour récupérer l’épave du Télémaque. En 1816, plusieurs gabares fluviales avec de nombreux marins à bord sont envoyées sur les lieux du naufrage. L’objectif : amener la carcasse du Télémaque à fleur d’eau pour procéder à son déchargement. Ce nouvel essai ordonné par le Roi débouchera une fois encore sur un échec. Mais la rumeur, elle, s’enflamme. Après tout, Louis XIII n’est-il pas le frère cadet de Louis XVI ? Si un trésor se trouvait à bord du Télémaque, il est fort probable qu’il en ait eu connaissance. Cela expliquerait pourquoi il ait souhaité repêcher à son tour le Télémaque, vingt-six ans après son naufrage.

Malgré la force des on-dit, les traces matérielles d’un éventuel trésor restent introuvables. Jusqu’à nos jours, plusieurs autres tentatives ont été menées pour récupérer l’épave du Télémaque (voir vidéo ci-dessous). Elles se sont toutes soldées par un échec. Au milieu des années 1980, une étude scientifique va être menée pour tenter de résoudre ce mystère. Deux hypothèses émergent alors. La première est que si la carcasse du Télémaque existe encore, celle-ci se trouverait… sous l’actuel terrain de foot de Quillebeuf ! La révolution industrielle ayant fait son œuvre, le lit de la Seine aurait été profondément modifié et aurait conduit au déplacement de l’épave.

La seconde hypothèse est que ce sont les habitants de l’époque qui auraient récupéré le trésor royal immédiatement après le naufrage. Les Quillebois étaient réputés pour être d’excellents marins, parfaitement aptes à s’acquitter des difficultés posées par l’estuaire de l’époque.


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madame antoine