yann sinclair
Nombre de messages : 26592 Age : 66 Localisation : Versailles Date d'inscription : 10/01/2016
| Sujet: 09 avril 1791: Prêtres et religieuses fustigés à Paris Lun 8 Avr - 0:48 | |
| 09 avril 1791 & 17 avril 1791
Prêtres et religieuses fustigés à Paris
Au nombre des premières violences contre les personnes, doivent prendre place d'ignobles excès qui se produisirent non seulement à Paris, mais dans un certain nombre de villes. Nous transcrivons la notice du Dr Robinet. « Toutes les chapelles des couvents et des hôpitaux restaient le lieu d'élection des intrigues et des conspirations catholiques et royalistes. C'est ainsi que le comprit La partie de la population de Paris (et d'ailleurs) qui était attachée à la Révolution ; aussi y eut-il sur plusieurs points de la capitale des religieuses que des femmes patriotes ne craignirent pas de fouetter publiquement. « Ces exécutions populaires, sorte de châtiment civique, eurent lieu du 10 au 17 avril, quoique les ordres monastiques qui en furent atteints se trouvassent assez nombreux : les soeurs de la Visitation Sainte-Marie, rue Saint-Antoine ; les Miramionnes, sur le quai du même nota (aujourd'hui quai de la Tournelle) ; les Récollettes, de la rue du Bac ; les Filles du Précieux Sang ; les Filles du Calvaire et surtout les soeurs Grises, dont les maisons étaient situées dans les paroisses de Saint-Sulpice, Saint-Laurent, Sainte-Marguerite, la Magdeleine et Saint-Germain-l'Auxerrois. « S'il faut en croire les brochures et journaux du temps, trois cents religieuses, y compris quelques prêtres et quelques dévotes laïques, auraient subi cette correction de la part des marchandes de la Halle, du marché de la place Maubert, etc., auxquelles s'étaient jointes, dans les différents quartiers, mais surtout au faubourg Saint-Antoine, des femmes du peuple, voire des héroïnes (1) des 5 et 6 octobre. « Partout le motif de cette répression extra légale était, nous l'avons dit, que ces maisons devenaient ostensiblement le refuge des prêtres non jureurs et des nobles qui conspiraient contre le nouvel état de choses ; les couvents leur étaient ouverts, les premiers y étaient logés et nourris, et y recevaient, sous prétexte de conférences. religieuses, les aristocrates des deux sexes et leurs agents, ainsi que la foule demeurée fidèle à l'ancienne Église et à l'ancien régime. On y prêchait la résistance aux nouvelles lois, la haine et le mépris des prêtres constitutionnels et de l'Assemblée nationale. On y recevait les mots d'ordre de Rome et de Coblentz, que les élèves mêmes des religieuses colportaient dans leurs familles. « La verve gouailleuse et brutale avec laquelle sont rapportées ces violences dans les brochures du temps nous interdit malheureusement d'en donner des extraits.»
BIBLIOGRAPHIE. — Robinet, Le Mouvement religieux à Paris pendant la Révolution, 1789-1801, in-8°, Paris, 1896, t. I, p. 464 sq. — Grand détail concernant les dévots et dévotes qui ont été fouettés par les dames de la Halle, in-8°, Paris [1791], 8 pages. — Détail historique des communautés de soeurs Grises, avec lu liste, les noms et les âges de toutes les soeurs et dévotes qui ont été fouettées, la quantité d'argent qu'ils (sic) avaient à dépenser par jour et leurs manoeuvres criminelles, avec les prêtres réfractaires, in-12 [Paris, 1791], 8 pages, imprimerie de Labarre. — Le fouet donné aux soeurs Grisettes, par la sainte colère du peuple, le 17 avril 1791, pour avoir enseigné de faux principes aux enfants des écoles de charité ; pour avoir refusé la porte à leurs véritables pasteurs qui ont fait authentiquement le serment civique. — Les prêtres aristocrates conseillant les enfants des écoles 1. Mégères suffirait.
à désobéir (sic) leurs pères et mères s'ils sont patriotes, in-8°, Paris, 1791, imprimerie de Labarre, 8 pages. — Liste des c... aristocrates et constitutionnels qui ont été fouettés hier au soir à tour de bras par les dames de la halle et du faubourg Saint-Antoine (réimpression du : Grand détail...), in-8°, Paris, de l'imprimerie patriotique, 1791, 8 pages ; — Ludovic Sciout, Histoire de la Constitution civile du clergé, in-8°, Paris, 1872, t. II, p. 219 sq., auquel nous empruntons les pages qu'on va lire.
FUSTIGATION DES FILLES DE SAINT-VINCENT-DE-PAUL. « Les couvents de Paris refusèrent de reconnaître Gobel (Evêque constitutionnel de Paris) pour leur légitime évêque, et de recevoir sa visite canonique. Il était impossible d'assimiler les religieuses aux prêtres, qu'on qualifiait de fonctionnaires publics ; elles ne faisaient nullement partie de l'Église constitutionnelle ; d'après les lois nouvelles, elles n'étaient que des personnes privées, autorisées par l'Assemblée à vivre ensemble et à continuer leur état pendant le reste de leur vie, si tel était leur goût. Mais on était décidé, dans le parti révolutionnaire, à les traiter comme des esclaves de l'État, destinées à s'incliner devant la religion de l'État, et n'ayant aucun droit à invoquer la liberté religieuse. Leur résistance mit partout les autorités révolutionnaires et les clubistes dans une colère épouvantable. Elles formaient une sorte de classe intermédiaire entre le clergé et les laïques ; elles eurent aussitôt leur part dans la haine que le clergé réfractaire s'était attirée, et cette haine fut d'autant plus forte, qu'on ne pouvait expliquer leur attachement à l'orthodoxie par des motifs intéressés et antipatriotiques qu'on prêtait au clergé. Leur exemple en était d'autant plus dangereux, surtout auprès des classes inférieures. Le parti révolutionnaire était animé d'une rage brutale contre tous les catholiques, prêtres et laïques ; mais ces derniers étaient trop nombreux ; la première fureur de ces fanatiques se passa sur les religieuses ; on était sûr de les trouver dans leurs couvents quand on voudrait ; on était sûr, et c'était un grand point pour la lâcheté révolutionnaire, de ne courir aucun risque en venant les outrager. Un laïque dont on envahirait la maison pourrait, en dépit du nombre des envahisseurs, faire un effort désespéré pour défendre les siens contre leur brutalité ; il y avait encore là une chance de recevoir par hasard une balle de pistolet ou un coup de couteau : on n'avait rien de pareil à craindre quand on venait maltraiter des religieuses ; aussi les révolutionnaires montrèrent-ils tout de suite une prédilection particulière pour ces courageuses expéditions ! « Le 9 avril, une bande de mégères qui faisaient partie de toutes les émeutes, avec un grand nombre d'hommes, les uns habillés en femmes, les autres sans aucun déguisement, envahit successivement les couvents de Paris, se jeta sur toutes les religieuses et sur les personnes qui étaient retirées dans leurs couvents, et s'amusa à les battre et à les flageller en public. La municipalité n'eut garde de les déranger dans cette patriotique occupation. « Voici comment un journal du temps raconte cette ignoble journée : « Nos braves gardes nationaux eurent la douleur de se voir, [faute d'ordres, condamnés à l'inaction au milieu des plus honteux excès. Ils virent des vierges sacrées de tout âge, la jeunesse timide, la vieillesse infirme, des adolescentes, des octogénaires, des dames respectables recluses volontaires, mises toutes nues, battues de verges, poursuivies dans cet état affreux de nudité dans tous les coins de leurs maisons et de leurs jardins, terrassées, meurtries de coups, accablées d'injures plus cruelles que la mort même. Ils virent jusqu'à ces pieuses filles de Saint-Vincent, dont le dévouement est si héroïque et l'humilité si profonde ; ils les virent fustigées, ensanglantées par les mains mêmes de ces hommes et de ces femmes dont elles avaient si souvent nourri la misère, couvert la nudité, soigné les plaies cadavéreuses. Ils eurent en un mot la douleur de voir épuiser sur ces filles innocentes tout ce que la rage d'une soldatesque effrénée pourrait se permettre dans une ville prise d'assaut, et plusieurs heures se passèrent dans ces tourments. Enfin, quand la rage des bourreaux fut épuisée, les profanateurs des couvents défilèrent à travers les haies de soldats sans être troublés dans leur marche triomphante... » « Trois filles de Saint-Vincent-de-Paul, attachées à la paroisse de Sainte-Marguerite, moururent des suites de ces odieux traitements (1).
1. M. D'Hesmivy d'Auribeau, Mémoires pour servir à l'histoire de la persécution française, Rome, 1794, p.825-831, mentionne les mêmes brutalités, mais parmi tant de phrases qu'on n'en peut rien tirer d'utile que ces rares détails : « Deux respectables soeurs de la Charité, dont l'une était âgée de80 ans, moururent à Paris le 19 avril 1791, des flagellations outrageantes qu'elles avoient essuyées » (p. 828-829) ; — « deux dames, dites Miramiones, ont été entre autres si cruelletnent outragées, que l'on craint encore pour leur vie » (p. 826) ; — les dames de Sainte-Marguerite... du faubourg Saint-Antoine » (p. 828) ; — « des femmes et des vierges chrétiennes qui étoffent venues paisiblement entendre la messe au séminaire des Irlandois, en furent chassées, fouettées à coups de verges, traînées dans la boue » (p. 831). — J. Durieux, Tableau historique du diocèse de Lyon pendant la persécution religieuse de la grande Révolution française, d'après des documents authenthiques déposés dans les archives de l'Archevêché, in-8° Lyon, 1869, p. 54-58 : mêmes attentats, à Lyon, le 8 avril 1792, jour de Pâques, dans la chapelle des religieuses de Sainte-Claire (rue Sala), à l'église des Pénitentes (aujourd'hui église Saint-François), aux églises des Collinettes, de la Déserte, des Carmélites (montée des Chazeaux). LE CITOYEN SIMON (Camille Jordan). La Loi et la Religion vengées des violences commises aux portes des églises catholiques de Lyon, Lyon, 1791 ; Cf. C.-A. SAINTE-BEVVE, Nouveaux lundis, 1893, t. XII, p. 259-261.
« L'ordre est donné de ne pas faire de martyrs, pour que la foi n'ait pas à se glorifier de ce triomphe, mais de s'en tenir à cette nouvelle espèce de châtiment, qui d'une part peut opérer le même effet par la crainte, et, de l'autre, jeter plus efficacement du ridicule sur la religion, comme si les opprobres, suivis bientôt de la spoliation et de la faim, n'étaient pas le plus long et le plu s cruel des martyres ! Ce raffinement de cruauté et d'hypocrisie est de l'invention de Condorcet, chef du parti philosophique, qui n'a pas rougi d'ouvrir publiquement cet avis infernal (1).» « On entend dire à ces mégères qui se rendent coupables de telles atrocités, que c'est bien peu de vingt sols qu'on leur donne pour être exécutrices de telles oeuvres (2) »
1. D'Hesmivy d'Auribeau, op. cit., p. 826. 2. Id., p. 831._________________ 👑 👑 👑 ⚜ ⚜ |
|