Le marchand fabricant et l'empereur
Un mascaron de la façade.
Cliché Claude Martinez L'hôtel Roques-Guilhem en 2000.
Cliché Eric Sinatora
Au 42 de la rue Victor Hugo, une imposante façade comportant sur deux étages sept baies aux clefs ornées d'une console attire l'œil du passant.
Ce dernier remarquera en outre un portail décoré d'un masque barbu, les appuis des fenêtres en fer forgé, les volets constitués de panneaux munis de guichets à coulisse et de ferrures, le tout caractéristique du XVIIIe siècle.
Ce bâtiment est l'hôtel Roque-Guilhem, construit de 1735 à 1750 par un marchand-fabricant du textile, François Roques, qui remodela tout l'îlot pour réaliser une demeure couvrant 2 200 m2.
À partir de la rue, un passage couvert donne accès à un escalier dont la rampe en fer forgé est tout aussi remarquable.
Ce passage débouche sur une cour jadis prolongée par un jardin et dans laquelle s'élève un vaste bâtiment.
François Roques était en effet marchand-fabricant en draps, et s'il habitait sur la rue, cette construction servait de dépôt pour les laines, produits tinctoriaux, huile d'olive, nécessaires à la production des tissus de laine.
On avait réalisé un plan en retour d'équerre rappelant l'hôtel de Rolland, sensiblement contemporain.
Étonnante rencontre au petit matin...
La réputation de Jean Roques, fils de François, était assez grande pour qu'en 1 777 il rencontre à sa demande un personnage illustre de passage à Carcassonne, l'empereur d'Autriche Joseph II qui, voyageant incognito, était descendu à l'auberge du Lion d'Or, au 16 de notre rue Aimé Ramond.
Le souverain, qui était venu dans notre ville s'enquérir des techniques locales afin de développer l'industrie dans ses états, reçut toutes les explications voulues à 4 heures du matin le 30 juin.
Dans la salle aux plafonds peints du XVe siècle, étaient étalés des draps de toutes qualités et le Carcassonnais répondit aux questions de l'empereur.
On peut noter toutefois qu'à cette date Jean Roques ne produisait plus de draps, se contentant de placer son argent en propriétés foncières et en rentes au rendement financier garanti.
C'est donc l'expertise à lui reconnue qui explique cette étonnante rencontre au petit matin, décrite par M. J. Rouffet dans les Mémoires 2 000 de
Claude Marquié