Portrait de Fénelon par Joseph Vivien
Le premier jour de ce mois, le Roi a écrit à l'archevêque de Cambrai, pour lui enjoindre de ne pas aller à Rome, et de se rendre dans son diocèse, avec défense d'en sortir
Fénelon connaît ainsi la disgrâce, après avoir connu la gloire d'être nommé précepteur du duc de Bourgogne, auquel il enseigna avec succès les vertus d'un prince et d'un chrétien
L'archevêque de Cambrai paye chèrement son soutien à la dame Guyon, adepte du quiétisme, cette doctrine mystique qui est condamnée comme hérétique par l'Eglise
Il a trouvé un ennemi implacable en la personne de Jacques-Bénigne Bossuet, évêque de Meau, qui l'avait pourtant soutenu à ses débuts
C'est la publication par Fénelon, au début de cette année, de son Explication des maximes des Saints sur la vie intérieure, qui a précipité sa chute
L'opinion publique lui fut très défavorable, et Bossuet en rendit compte au Roi, promettant qu'il ferait connaître ses remarques à Fénelon
Bossuet tardant à respecter sa promesse, l'archevêque de Cambrai décida, avec l'assentiment du Roi, de soumettre sa publication au jugement du pape
Le mois dernier, la situation devenant pour lui de plus en plus difficile, Fénelon demanda au Roi la permission d'aller lui-même défendre son livre auprès du pape
C'est à cette demande que le Roi vient de répondre par la lettre que l'on sait
Fénelon n'avait aucune chance de se voir autoriser à partir pour Rome, car, quelques jours plus tôt, le roi avait adressé au pape une lettre qu'on soupçonne rédigée par Bossuet, pour dénoncer l'hérétisme de Fénelon
Ce dernier a compris que sa disgrâce était consommée, et a décidé de partir immédiatement pour Cambrai
Comble de l'infortune, il va devoir faire reconstruire le palais épiscopal qui a brûlé en février, consumant tous ses meubles, livres et papiers
Le jeune duc de Bourgogne a eu beau venir se jeter aux pieds du Roi, on lui a défendu toute relation avec son ancien précepteur
Avant de partir, Fénelon s'est épancé sur son triste sort dans une lettre à un ami, datée du 3 août, que le duc de Beauvilliers a fait aussitôt imprimer et distribuer à la cour