Portraits en 1732 par Pierre Gobert: Henriette (à droite) et sa jumelle Louise Elisabeth Nées toutes deux le 14 aout 1727, Marie-Louise-Elisabeth et Anne-Henriette de France sont les premiers enfants de France Louis XV et de Marie Leszczyńska, mariés depuis le 05 septembre 1725À la naissance des jumelles, le roi Louis XV de France, père à 17 ans, s'exclama:
"on m'avait dit incapable d'engendrer et j'ai fait coup double"
Henriette de France
(ou Henriette Anne)Henriette-Anne de BourbonAnne-Henriette de France
Anne – Henriette de France, plus couramment appelée “ Madame “ ou Mme Henriette, est la seconde fille de Louis XV et de Marie Lecczinska.
Elle est connue pour une histoire d’amour malheureuse bien étonnante à la Cour de Versailles.
Elle naquit seconde quelques minutes après sa sœur aînée, Louise-Élisabeth “ publiquement ” dans la chambre de la reine le 14 août 1727, au château de Versailles.
Madame SecondeMadame HenrietteMadame
- Née le 14 août 1727 au château de Versailles
- Baptisée le 27 avril 1737 à Notre-Dame de Versailles
Parrain et marraine:
- Louis IV Henri de Bourbon-Condé, prince de Condé 1692-1740
- Louise-Anne de Bourbon-Condé 1695-1758
- Décédée le 10 février 1752 au château de Versailles à l'âge de 24 ans
- Inhumée dans la Nécropole de Saint-Denis à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis)
Parents
- Louis XV le Bien-Aimé de Bourbon, roi de France 1710-1774
- Marie Leszczyńska, princesse de Pologne 1703-1768
- Filleule : Monique de Gouy d'Arsy 1749-1823
- 1744 : Témoin au mariage de Claude Jouvenel de Harville des Ursins, marquis de Trainel 1723-1794 et de Marie-Antoinette Goyon de Matignon 1725-1770
- 1751 : Témoin au mariage de François Martial, comte de Choiseul-Beaupré 1717-1791 et de Charlotte Rosalie Romanet, comtesse de Choiseul-Beaupré 1733-1753
Devenue la fille aînée du roi résidant à la cour, Madame Henriette ne fut plus appelée désormais selon le protocole que "
Madame"
À la différence de sa sœur, elle ne fut jamais mariée, ni même fiancée.
Cette sœur – la seule des filles du roi à se marier - deviendra la célèbre Madame Infante . Mme Henriette est connue pour un roman d’amour malheureux : elle conçut un vif chagrin lorsque son père lui interdira d’épouser son cousin. On attribuera sa fin prématurée à la grande peine qui suivra ce refus royal...
Madame à la Cour:
Louis XV fut, dit-on , “ charmé de son œuvre ” montrant seul une joie énorme dans la déception général de la Cour, qui espérait un Dauphin. Il était deux fois père à 17 ans en dix minutes d’intervalle.
La naissance de jumelles était chose fort rare dans la famille de Bourbon.
La première née reçut le nom de Madame ou de Madame Première - comme l’exigeait l’usage de la Cour.
Henriette, née en deuxième, prit le nom de Madame Seconde.
Elle passera sa petite enfance sous l’autorité de la “ gouvernante des Enfants de France ” au château de Versailles, avec ses deux frères et toutes ses sœurs Mmes Adélaïde, Victoire, Sophie et Louise dans l’aile du midi et au château de Meudon, où les Enfants de France avaient coutume de passer la belle saison – maison jugée plus saine que Versailles.
Elle fut soumise, dés son plus jeune âge, à l’étiquette, qui gérait la vie quotidienne des princes.
Elle sera baptisée le 27 août 1737, avec ses sœurs
Henriette échappa à l’exil forcé de ses sœurs cadettes au couvent de Frontevrault en Anjou imposé par le Cardinal Fleury et restera à Versailles avec sa première sœur cadette, Madame Adélaïde – le seule qui osa – par un caractère affirmé – contrecarrer la décision du ministre et émouvoir son père le jour du départ fatidique.
Louis XV, en père affectueux, passait beaucoup de temps dans l’ appartement de ses filles, jouant et causant avec elles comme il le fera plus tard, dans ses appartements intérieurs où il invitera souvent ses filles à venir le rejoindre, notamment lors de certains de ses soupers.
Madame Henriette par Nattier (1751) Dans ce même appartement, elle donna à 10 ans, son premier bal hebdomadaire et recevait déjà les visites des « présentés » et des ambassadeurs, sous l’autorité de sa gouvernante !
Joie et peine d'une Fille de France:
Madame Henriette était une jeune fille douce, aimable, complaisante et timide, elle s’accommodait avec bonne grâce de cet état d’effacement et d’assujettissement qu’elle trouvait confortable et parfaitement conforme à sa nature timide.
Soumise devant son frère, le dauphin Louis-Ferdinand, elle l’était également devant sa sœur aînée, qui deviendra en 1739 cette fameuse Madame Infante, qui était plus volontaire qu’elle.
Réservée, Henriette ne manquait néanmoins pas d’intelligence, notamment à travers des réparties vivaces.
Les études absorbaient son temps, et tout particulièrement la musique, qui deviendra une véritable drogue pour elle.
Elle deviendra excellente musicienne, jouant « avec fureur » d’innombrables instruments - comme le constatèrent ses contemporains dont un mémorialiste du temps, le Duc de Luynes. Jean-Marc Nattier, célèbre portraitiste du temps, la représentait en pied, jouant de la basse de viole dans un très beau tableau, conservé au Musée National.
En mars 1736, à ses sept ans révolus, le « passage aux hommes » du Dauphin fut le premier bouleversement de sa vie surprotégée, la privant de son frère affectueux et d’un compagnon de jeux, car tel était l’usage
Elle commença dés lors son « Éducation » avec de longues heures de travail, d’études et de solitude car les Enfants de France n’avaient ni compagnons ni jeunes camarades pour stimuler leur émulation: Versailles était une Cour sans enfants.
On enseignait aux filles du roi les mathématiques, l’astronomie, la géographie, le latin, la philosophique grec, les langues.
On y ajoutait les arts d’agrément: la broderie, la peinture, la musique, la danse etc ...
Comme leur père, elles apprirent à tourner le bois, façonnant de menus objets qu’elles offraient ensuite à leur entourage.
Le second bouleversement fut le mariage Élisabeth qui fut un véritable drame pour Henriette: elle versa des flots de larmes et les adieux furent déchirants.
Elle ne savait pas qu’elle retrouverait avec joie cette sœur chérie lors de ses nombreuses venues à Versailles.
La jeune princesse comprit ce jour-là, « qu’en ce pays là » - comme l’on disait pour parler de Versailles, une fille de France n’était rien ...
En 1746, Mmes Henriette et Adélaïde quittèrent l’aile du midi pour laisser la place à leur frère et sa jeune épouse, l’infante Marie-Thérèse-Raphaëlle de Bourbon-Espagne.
Tabatière commémorative du mariage royal
portrait en 1747 par Jean Marc Nattier: "en robe jaune" Elles s’installèrent au rez de chaussée du corps central.
Cette nouvelle installation fit la joie du roi qui ne se priva pas de descendre fréquemment les visiter et les couvrir souvent de nombreux cadeaux.
Leur vie de jeunes filles s’épanouissait: leur premier bal à l’Opéra de Paris se déroula en 1744.
En 1746, Louis XV déclara « l’Education » terminée, en quoi « Mesdames Ainées » - car tel fut leur appellation à la Cour à cette époque-là – reçurent en commun une « maison » avec une dame d’honneur, une dame d’atours et diverses « dames pour accompagner »
Dés lors, elles seront assujetties pleinement à la vie de cour, en obtenant le droit de jouer au « jeu de la Reine » ( ce qui était déjà moins drôle à supporter quant on sait ce que représentait cette corvée ... )
Dorénavant, elles devront porter le Grand Habit, assister à la messe quotidienne, manger en public, assister au débotté du roi comme le révèle Mme Campan, dans ses mémoires, en parlant, plus tard, de ses sœurs cadettes... Quoiqu’il en soit, Madame Henriette s’habitua à cette nouvelle vie avec tant de douceur et de pitié, que la Cour la proclamera bientôt « sainte »
Intrigues de Cour:
Mmes Aînées commencèrent aussi à intriguer contre une ennemie de bonne compagnie que fut Mme de Pompadour.
Groupée avec ses sœurs cadettes, revenues de Frontevrault, autour du Dauphin et de sa seconde épouse, Marie-Josèphe de Saxe, Henriette fit partie du « parti dévot » et chercha en usant tous les moyens protocolaires possibles d’obtenir le renvoi de cette favorite : elle n’y parviendra pas ...
Les mémoires sont pleins d ‘allusions à une lutte que s’élèvera entre Mme Henriette et la favorite pour la possession d’un appartement que la princesse n’obtiendra pas au rez-de-chaussée nord du château ...
Projets matrimoniaux:
Toutefois , la vie amoureuse d’Henriette ne fut pas vide.
On songeait à un mariage avec le fils aîné du prince électeur de Bavière et même jusqu’à l’empereur du St Empire germanique.
Mais elle eut un « coup de cœur » pour un cousin, le duc de Chartres, Louis-Philippe d’Orléans.
Ce fut le seul chagrin de désespoir qui effleura le cercle fermé des princesses.
Ce petit fils du duc d’Orléans, Régent de France, l’avait émue par ses manières charmantes, son teint frais et jovial ainsi qu'un élégant embonpoint
(qui n’avait pas encore tourner à une obésité d’hippopotame qui lui vaudra, plus tard, le surnom de Louis-Philippe le Gros)
Portrait en 1751 par Jean Marc-Nattier, en "Flore" Une passion réciproque se créa rapidement, fort étonnant à Versailles où le bon ton interdisait de s’aimer publiquement de cette manière.
Il était tombé amoureux de la princesse et cette dernière ne l’avait point éconduit.
Un moment, en bon père de famille qui souhaitait le bonheur de sa fille, le roi avait paru favorable pour qu’une union se fasse, car il y avait déjà eu des mariages de cette sorte dans la famille royale.
Soudain, le Cardinal Fleury s’aperçut qu’une telle alliance rapprocherait la branche cadette du trône, au détriment du Dauphin.
Il en démontra les dangers à Louis XV, qui, le cœur navré et pour cause de sécurité dynastique, fut obligé de revoir ce projet.
Madame n’épousera point son bien aimé: c’était une décision arrêtée. Pour être douloureux le refus fut net pour le malheureux prince, malgré des tentatives nombreuses
Un jour que le jeune prince chassait avec le roi, il osa demander au roi de revenir sur cette décision, tellement son amour pour Mme Henriette était trop fort:
Citation :« Sire, j’avais de grande espérance, Votre Majesté ne l’avait pas ôtée à mon père ... Je contribuerais au bonheur de Madame Henriette qui serait restée en France auprès de Votre Majesté... M’est-il permis encore d’espérer ! »Le roi, pour toutes réponses, se pencha alors paternellement vers le Duc de Chartres, et lui serra tendrement les bras par deux fois.
Le Duc de Chartres dut s’incliner, et se laissa marier à Louise-Henriette de Bourbon-Conti qu’il aima éperdument d’abord, et qu’il détestera ensuite odieusement
Le jour du mariage princier, qui eut lieu à Versailles, la ravissante princesse dira à son cousin aimé:
« Soyez heureux, votre bonheur me donnera la force de vivre »... On dira à la Cour, que le jeune prince occupera son cœur toute sa vie jusqu’à la faire mourir dix ans plus tard, mais la réalité en fut tout autre, car Henriette était fort très gourmande
Sa gloutonnerie était immense
C’est probablement à ce régime que plutôt à l’amour, qu’il faut attribuer sa fin prématurée.
[i]Portrait en 1751 par Jean Marc Nattier, "jouant de la viole"
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Sa fin prématurée:
Toujours est-il que jusqu’à sa mort, Madame - car telle fut son titre officiel – ne sembla jamais se consoler de cette terrible déconvenue.
Prudent, Louis XV se garda bien de lui proposer d’autres prétendants que ce fut, elle devra rester vieille fille mais sans devenir revêche et indécrottable comme le deviendront ses sœurs, devenues plus tard, Mmes Tantes sous le règne de Louis XVI.
Madame Henriette deviendra, dés lors, la fille préférée de Louis XV, lui servant de secrétaire, le quittant le moins possible.
Son père l’adorait à un tel point que cela suscita d’infâmes calomnies.
Sa santé délicate depuis son vif chagrin ne s’améliora pas à ce rythme de vie soutenu qu’elle s’imposait pour plaire à son père.
Elle se mit bientôt à cracher du sang, et défendit à sa sœur, de prévenir quiconque.
Brûlante de fièvre, elle accompagnait la royale compagnie dans des courses de traîneaux interminables.
Son état s’aggrava rapidement soudain, une « fièvre putride » l’emporta en quelques jours.
Madame Henriette décéda, prématurément à peine âgée de 25 ans, le 10 février 1752 laissant son père dans une douleur immense.
Elle fut ensevelie à la nécropole royale de St Denis.