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Sujet: Le Corps de la reine. Engendrer le prince Mar 3 Sep - 8:51
Ce livre est annoncé. J'imagine qu'il est précommandable.
"L’historien Stanis Perez poursuit son enquête sur l’incarnation de la monarchie française. Après Le Corps du roi (Perrin, 2018), voici Le Corps de la reine, volet complémentaire, attendu et tout à fait stimulant. Si le corps du roi, incarnation de l’Etat, est la plus puissante expression de la continuité du pouvoir, celui de la reine est d’abord l’instrument d’une fécondité : il « produit » la descendance ; la survie d’une dynastie passe avant tout par cet engendrement multiple et légitime d’un couple dûment marié.
La loi salique imposait de concevoir un maximum d’enfants pour être certain de disposer d’un héritier mâle le jour de la mort du roi, meilleur moyen d’éviter le fractionnement du domaine. Sans oublier un autre atout essentiel de ce corps féminin procréateur : pouvoir disposer également de filles en bonne santé à marier aux quatre coins du continent afin de négocier des alliances avec les royaumes voisins, amis ou ennemis – ce grand marchandage des princesses de l’ancienne Europe.
La place de l’organe de procréation
Avec une constante ambition synthétique, Stanis Perez montre bien la place de l’organe de procréation dans toutes les représentations de la reine et dans l’ensemble des rites qui fondent son existence, qu’elle soit quotidienne ou rendue publique par l’étiquette de cour.
Cependant, l’enquête souligne également les évolutions du corps de la reine de France, en fonction des contextes et surtout des personnalités de ces princesses, pour la plupart d’origine étrangère, d’Isabeau de Bavière, à la fin du XIVe siècle, à Marie-Antoinette, en passant par Marie de Médicis, Anne d’Autriche ou Marie Leszczynska de Pologne. Et il apparaît vite qu’une reine de France ne se réduit pas à un organe reproducteur.
Car le féminin s’invente un pouvoir monarchique, parfois politique dans le cas de ruptures historiques (régence en 1610 pour Marie de Médicis, ou Révolution de 1789 pour Marie-Antoinette), le plus souvent courtisan – la Maison de la reine emploie des dizaines de « demoiselles aristocratiques », véritable Etat féminin dans l’Etat masculin –, ou encore artistique et culturel. La reine peut légitimement revendiquer la haute main sur l’art, par ses images, ses goûts et les moyens dont elle dispose. Elle devient en quelque sorte le « ministre de la beauté », ce qui est essentiel dans une monarchie française d’apparat et de prestige culturel."
_________________ Mais c'est tout le contraire d'un jeu.
Galaor
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Sujet: Re: Le Corps de la reine. Engendrer le prince Jeu 5 Sep - 11:30
Il est sorti. Il me le faut.
_________________ J’ai mes vieilles idées, je veux mourir avec elles.
globule Administrateur
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Sujet: Re: Le Corps de la reine. Engendrer le prince Ven 15 Nov - 0:32
Galaor a écrit:
Il est sorti. Il me le faut.
et zou
_________________ - Je ne vous jette pas la pierre, Pierre -
globule Administrateur
Nombre de messages : 2236 Date d'inscription : 04/10/2017
Sujet: Re: Le Corps de la reine. Engendrer le prince Mar 23 Mar - 9:56
Critique
Une fois pour toutes, le modèle théorique proposé par Kantorowicz n’est pas du tout opérant dans le cas des reines. L’est-il toujours dans le cas des rois ? Pour l’Angleterre médiévale et son droit successoral, sans doute, mais pas pour les autres royaumes (pourquoi, alors, l’Espagne très catholique n’a-t-elle jamais eu recours à cette « fiction » ?) dans lesquels penser à la fois l’unité et la pluralité ne posait aucun problème. Le dogme mystérieux de la Trinité ou celui de l’eucharistie suffisaient à synthétiser l’un et le multiple. Pour autant, et c’est sur ce point que la confusion est la plus fréquente, cela n’empêchait pas les princes et les puissants, clercs y compris, de s’attribuer des images ou des avatars supplémentaires selon les circonstances. De cette duplication des représentations et des discours, beaucoup de spécialistes ont conclu à un énième truchement de la très galvaudée théorie des « deux corps ». Plus sagement, l’historienne américaine Lynn Hunt a évoqué un corps « pluriel » dans l’étude qu’elle a consacrée à l’épouse de Louis XVI et à ses multiples facettes. Oui, le cas de Marie-Antoinette illustre parfaitement la continuité entre le corps politique invisible de la reine et son corps érotique, sorte de double fantasmé, monté de toutes pièces. Néanmoins, si dans les pages qui suivent deux corps semblent se dessiner, l’un marqué tout d’abord par l’éros, l’autre ensuite par le thanatos, le lecteur devra résister à la tentation de reconnaître là ce qui a fait le succès d’Ernst Kantorowicz…