Le Boudoir de Marie-Antoinette

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 06 octobre 1789: 05H

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yann sinclair

yann sinclair


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MessageSujet: 06 octobre 1789: 05H   06 octobre 1789: 05H Icon_minitimeDim 6 Oct - 21:25

Mardi 6 octobre 1789


A 05 heures

Tout est calme dans Versailles et dans le château.

Les gardes nationaux patrouillent dans la ville, et les Cent Suisses dans les cours du château.



Mardi 06 octobre 1789
St Bruno

A 5 heures du matin

Les grilles du château furent forcées, et les brigands, conduits, à ce que l'on prétend, par le duc d'Orléans lui-même, se précipitèrent droit vers l'appartement de la Reine

La Garde Suisse, qui était au pied de l'escalier et qui aurait pu, si elle avait voulu, leur disputer le passage, lâcha le pied; ainsi les brigands, sans aucun obstacle, pénétrèrent dans les salles des gardes du corps, blessant et tuant tous ceux, qui voulaient s'opposer à leur passage


Deux de ces gerdes, nommé Miomandre de Saint-Marie et Durepaire, quoique grièvement blessés, se traînèrent jusqu'à la porte de ma mère, et lui crièrent de s'enfuir et de fermer les verrous après elle

leur zèle fut bien mal récompensé, les brigands s'étant jetés sur eux les laissèrent comme morts et baignés dans leur sang


Entre-temps les femmes de ma mère, réveillées par le bruit et les cris des brigands et des gardes du corps, s'étaient jetés sur la porte pour fermer les verrous


Ma mère sauta en bas de son lit et à demi habillée, elle s'enfuit chez mon père; mais la porte de l'appartement était fermée en dedans, et ceux qui y étaient, entendant du bruit, n'eurent garde d'ouvrir, croyant que c'étaient des brigands qui voulaient entrer


Heureusement un homme de service nommé Turgy (le même qui ensuite nous a servis au Temple comme cuisinier) ayant entendu la voix de ma mère, lui ouvrit aussitôt


Dans le même moment, les brigands venaient de forcer la porte de la chambre de ma mère, de sorte qu'un instant plus tard, elle y aurait été prise, sans aucun moyen de se sauver


Entrée chez mon père, elle le chercha partout sans le trouver; il avait appris de son côté qu'elle était en danger, et il était couru chez elle, mais par un autre chemin


il y rencontra heureusement mon frère que Mme de Tourzel apportait, et celle-ci l'engagea à retourner chez lui, où ma mère l'attendait dans les plus mortelles inquiétudes


Rassurée sur mon père et mon frère, la Reine vint ensuite me chercher


J'avais été éveillée par le bruit que les brigands faisaient en entrant chez elle et par d'autres dans le jardin, sous mes fenêtres; ma mère me dit de me lever et m'emmena avec elle chez mon père


Mes grand-tantes Adélaïde et Victoire arrivèrent peu après; les brigands avaient forcé la porte du château du côté de la chapelle, où elles demeuraient, et blessé le garde du corps qui était dans leur antichambre


On était très inquiet de Monsieur, de Madame et de ma tante Élisabeth, dont on n'entendait rien


mon père envoya des gentilshommes pour savoir ce qu'il en était


On les trouva tous dormant profondément; les brigands n'étant pas venus de leur côté, ni eux ni leurs gens ne savaient ce qui se passait


Dès qu'ils en furent informés, ils se rendirent tous chez mon père; ma tante Élisabeth était tellement troublée du danger que le Roi et la Reine avait couru qu'elle traversa les chambres inondées de sang et remplies de Garde nationale parisienne, sans même s'en apercevoir


Vers les 8 heures à peu près, toute la famille se trouva rassemblée chez mon père avec ceux de la suite qui pensaient bien


Les deux gardes du corps qui avaient été assassinés à la porte de ma mère n'étaient pas morts; après que la cour fut partie, ils eurent le bonheur de se sauver et de se faire guérir de leurs blessures


il y en eut néanmoins deux autres tués, M. de Varicourt et Deshuttes et quantité de blessés


Les anciens gardes français avaient déjà déserté en juillet et étaient passés dans la Garde nationale; ils étaient venus à Versailles le 5 octobre avec les autres, mais le 6 ayant appris le danger que courait mon père, leur amour pour leur souverain se ralluma un peu, et ils montèrent droit au château en même temps que les brigands, dans l'intention d'empêcher qu'on ne tue le Roi


Ils sauvèrent aussi plusieurs gardes du corps, qu'ils enfermèrent dans une chambre pour les mettre à couvert des violences


La cour du château de Versailles présentait un spectacle horrible


Une foule de femmes presque nues, des hommes armés de piques, menaçant les fenêtres avec des cris affreux


pour les animer davantage, on imagina une ruse qui ne réussit que trop: on revêtit un de ces brigands de l'uniforme d'un des gardes resté mort: on le fit placer à l'une des fenêtres de l'appartement, avec ordre de tirer sur le peuple, et le coup ayant tué un homme, toute la foule se tourna vers la fenêtre d'où il était parti, et y ayant aperçu l'uniforme des gardes du corps, les brigands ne doutèrent pas que cela n'eût été fait par ordre de mon père


Cette illusion mit le comble à leur rage


M. de La Fayette et le duc d'Orléans étaient en haut, feignant d'être au désespoir des horreurs qui s'étaient commises dans cette matinée


Je ne sais qui donna à ma mère le conseil de se monter sur le balcon; elle y alla avec mon frère, mais le peuple exigea qu'elle renvoyât son fils; l'ayant ramené dans la chambre, elle retourna seule au balcon, ce grand courage imposa à tout ce peuple, qui se borna à l'accabler d'injures, sans oser attenter à sa personne

M. de La Fayette, de son côté, ne cessait de haranger les brigands, mais comme ses paroles ne faisaient aucun effet et que le tumulte continuait toujours, il leur dit que mon père consentait à retourner avec eux à Paris puisqu'ils persistaient à le demander, qu'il pouvait les en assurer et que mon père en avait donné sa parole


Cette promesse les calma un peu, et pendant qu'on fut chercher les voitures de la cour pour partir, chacun de la famille retourna chez soi faire un peu de toilette, car jusqu'alors tout le monde était encore en bonnet de nuit


Tout étant arrangé pour le départ, il y eut un nouvel embarras pour sortir du château, parce que l'on voulait éviter que mon père traversât les grandes salles des gardes qui étaient inondées de sang


Nous descendîment donc par un petit escalier, on passa par la cour des cerfs et nous montâmes dans une grande voiture à six places


il y avait dans le fond mon père, ma mère et mon frère; sur le devant, Madame, ma tante Élisabeth et moi; au milieu, mon oncle Monsieur et Mme de Tourzel


Mes grand-tantes Adélaïde et Victoire partirent de leur côté pour Bellevue, leur campagne


La foule était si nombreuses qu'on fut bien du temps sans pouvoir avancer


En avant de ce cortège, on portait les têtes des deux gardes du corps qui avaient été tués


Auprès de la voiture était M. de La Fayette à cheval, entouré des troupes du régiment de Flandres à pied et les grenadiers des Gardes françaises


on partit ainsi à 13 heures


Quoique l'on fasse d'ordinaire le chemin de Versailles à Paris en deux petites heures, nous n'arrivâmes cependant à la barrière qu'à 18 heures


Tout le long du chemin, les brigands ne cessaient de tirer des coups de fusil, et c'était inutilement que M. de La Fayette voulait s'y opposer; on crier aussi beaucoup:

"Vive la Nation! A bas les calotins, c'est-à-dire: à bas les prêtres!"



Enfin, à notre arrivée à la barrière, on y trouva M. de Bailly, maire de Paris, qui conformément à l'ancien usage, présenta à mon père les clefs de la ville, sur un plateau d'or, il fit un grand discours où il témoigna le plaisir  qu'aurait la bonne ville de Paris de posséder son Roi qu'il invitait très instamment à vouloir bien se rendre à l'hôtel de ville


Mon père faisait difficulté de consentir, disant que cela durerait trop longtemps et fatiguerait trop ses enfants


Cependant M. de Bailly insistant toujours et M. de La Fayette étant du même avis, parce qu'il pensait qu'il valait mieux y aller le même jour que d'attendre au lendemain, où l'on serait obligé de s'y rendre, mon père s'y décida enfin


Étant entrés dans Paris, les cris, les clameurs et les injures augmentèrent avec la foule de la populace; l'on mit au moins deux heures pr parvenir à l'hôtel de ville


Mon père avait fait ordonner aux personnes de sa suite qui étaient dans les autres voitures  d'aller droit aux Tuileries: il alla donc seul avec sa famille à l'hôtel de ville où la Municipalité et M. de Bailly le reçurent assez honnêtement encore; on lui fit un nouveau discours sur leur joie de ce qu'il voulait bien s'établir à Paris


Mon père y répondit en peu de mots, à quoi ils purent voir qu'il sentait bien sa position


On l'engagea ensuite à se reposer un instant, après huit heures qu'il n'avait pas quitter sa voiture


Le peuple qui remplissait la place criait beaucoup et demandait à voir le Roi; il se mit donc à la fenêtre et comme il faisait déjà nuit obscure, on y plaça des flambeaux afin qu'on pût le reconnaître


On remonta ensuite en voiture et nous arrivâmes aux Tuileries à 22 heures


Ainsi se passa cette fatale journée, qui fut l'époque de l'emprisonnement de la famille royale et le commencement des avanies et des cruautés qu'elle eut à souffrir par la suite


Le reste de l'année et la suivante de 1790 se passa dans une lutte continuelle entre la puissance royale et celle que s'arrogeait l'Assemblée, cette dernière gagnant toujours davantage le dessus sans qu'il se passât durant tout ce temps des évènements très remarquables relativement à la situation personnelle de ma famille

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