Un agent secret en jupons : Madame de Bonneuil

Madame de Bonneuil : femme élégante et agent secret ( 1748-1829 ) de
Olivier Blanc
Laffont , 1987 , 285 p


Quatrième de couverture

Aristocrate, dame du monde et courtisane , belle,arriviste , intelligente et sensuelle , Mme de Bonneuil se jette dans le renseignement au service des Bourbons lorsqu’elle sort des prisons de la Terreur. Elle sert tour à tour l’Angleterre contre le Directoire, le consulat contre l’Angleterre , l’Empire. On la rencontre à Madrid, Hambourg, à Londres , à Saint Pétersbourg ( elle est la maîtresse du Comte Rostopchine , premier personnage de l’Etat ) , à Berlin Lisbonne, Amsterdam …
Agent de Talleyrand ou free-lance, elle vend ses renseignements au plus offrant. Traquée par la police de Bonaparte , elle est contrainte de servir l’Empereur . Jusqu’en 1810 où elle s’assagit enfin ( elle a soixante ans , en paraît quarante ) pour se consacrer à sa très nombreuse progéniture , légitime ou naturelle.

Il a fallu à Olivier Blanc une très longue enquête pour suivre Madame de Bonneuil dans ses intrigues , ses voyages et ses amours sous les multiples masques qu’elle a empruntés. Se dévoile ici tout un pan de la politique internationale de l’époque, vue sous l’angle du renseignement , avec des vues surprenantes sur la Société française de la Révolution et sur l’Emigration.

Merci Princesse! On sait comme Olivier Blanc est un bon auteur, ce livre retient donc toute mon attention

Bien à vous.

Je suis dans les agents secrets jusqu'au cou ! Il ne me reste plus qu'à retrouver mon livre sur le comte d'Antraigues pour que le tableau soit complet !

N'y a-t-il pas un Bonneuil qui s'occupe de la Liste Civile de Louis XVI avec une lettre de Marie-Antoinette à celui-ci qui a surgi de l'Armoire de Fer ?

Peut-être. Je vous le dirai au fur et à mesure de ma lecture.

Michelle Sentuary usait du pseudo de Jeanne Riflon pour ses activités d'espionnage. Née en 1748 à L'Ile Bourbon ( La Réunion ), elle s'était mariée à Bordeaux avec Cyrille Guesnon de Bonneuil, premier valet de chambre du comte de Provence , le futur Louis XVIII. Les Bonneuil vécurent à Paris. De vingt ansplus jeune que son mari et après lui avoir donné trois enfants , elle mena une vie de femme galante.

Elle fut l’une des « berceuses « du financier Beaujon , l’égérie d’André Chénier , la maîtresse du marquis de Cubières dont elle eut un fils , le général et ministre Amédée de Cubières qui défraya la chronique sous Louis-Philippe.
Deux de ses filles se marièrent avec des personnages connus , voire célèbres, Regnaud de Saint Jean d’Angély , d’abord journaliste puis conseiller d’état et comte de l’empire et Antoine-Vincent Arnault , journaliste, homme de lettres , chevalier de l’empire. Sa sœur se maria avec le conseiller au Parlement de Paris Duval d’Eprémesnil , considéré comme un adversaire de l’absolutisme monarchique avant la révolution et guillotiné pendant la Terreur.
Mme de Bonneuil vécut donc avant 1789 , dans le milieu qui devait fournir à la Contre-révolution ses partisans les plus zélés. Il est vrai qu’elle est apparentée par alliance à la famille du Baron de Batz ( sa sœur étant la belle-mère du baron de Batz ).

En fait, Mme de Bonneuil ne participa vraiment au mouvement contre-révolutionnaire qu’après avoir fait la connaissance en 1790 de Cazalès , député de Grenade sur Garonne , un des meilleurs orateurs de la droite à l’Assemblée Constituante. Elle devint sa maîtresse et en eut une fille. C’est Cazalès , semble t-il , qui, émigré, lui fit pour la première fois remplir une mission à l’étranger , en Espagne en 1796.
Dans quel but ?
-Gagner à la monarchie l’ambassadeur de la république française, le général Pérignon , dont la famille était originaire de Grenade sur Garonne comme celle de Cazalès ?
-Ou donner des renseignements confidentiels à l’ambassadeur d’Angleterre ?
-Ou encore séduire Godoy , le prince de la paix , pour qu’il rompe l’alliance récemment conclue entre l’Espagne et la France et lui substitue un rapprochement avec l’Angleterre ?

Olivier Blanc présente les différentes hypothèses , mais il est difficile d’apporter une solution précise.

Manuel Godoy

http://fr.wikipedia.org/wiki/Manuel_Godoy


Jacques Antoine Marie de Cazalès


http://fr.wikipedia.org/wiki/Jacques_Antoine_Marie_de_Cazalès

Catherine-Dominique de Pérignon -


http://Wikipédiafr.wikipedia.org/wiki/Catherine-Dominique_de_Pérignon

Pour vraiment tout savoir sur ce général

http://www.napoleon-empire.net/personnages/perignon.php

En tout cas, la mission à Madrid de Jeanne Riflon dut satisfaire les royalistes puisqu’elle fut chargée d’autres missions. La plus importante et la plus curieuse aussi est celle qu’elle remplit en novembre 1797 en Allemagne à Blankenberg , résidence de Louis XVIII. Elle devait , disait-elle , révéler au Prétendant de graves secrets. Or , Louis XVIII refusa avec obstination de la recevoir . Pourquoi ? On peut penser que la publication par le directoire , le 18 Fructidor ( 4 septembre 1797 ), de documents prouvant la trahison du général Pichegru , président du Conseil des Cinq Cents , l’avait rendu méfiant à l’égard des agents de renseignements , des espions. Cette publication était , en effet, la conséquence de la transcription par le Comte d’Antraigues , d’une conversation avec Montgaillard , un agent ( double peut-être ), qui l’avait mis au courant des négociations entre Pichegru , les émigrés et Louis XVIII.
Or, les papiers du comte avaient été saisis par Bonaparte , qui les avait transmis au directoire.
La Restauration qui était sur le point de se faire avait échoué . En fait , elle avait été retardée de dix sept ans. On comprend que Louis XVIII ait rompu avec d’Antraigues et se soit méfié de tout agent secret.

Mme de Bonneuil n’était d’ailleurs pas royaliste au point de refuser tout contact avec un Régime issu de la Révolution . A l’automne 1800 , on la retrouve en mission , cette fois, en Russie à Saint Pétersbourg. Elle y est envoyée , semble t-il par Talleyrand , pour conforter le tsar Paul 1er dans son intention d’abandonner l’alliance anglaise.
Elle doit aussi s’opposer à ceux de ses conseillers qui, tel Panine , veulent la maintenir.
Mais Mme de Bonneuil fréquente aussi les nombreux émigrés français qui résident dans la capitale russe. Elle revoit notamment son ancienne amie , Mme Vigée-Lebrun, peintre célèbre. On peut se demander si elle n’a pas mené alors double jeu ?

On lira avec passion ce que M. Olivier Blanc raconte de la vie trépidante de Mme de Bonneuil. On ne peut qu’être étonné de sa résistance physique , de sa santé de fer qui lui permet d’entreprendre sans cesse des voyages longs , inconfortables , fatigants. Et coûteux.
Ce qui suppose qu’un Etat ou une organisation couvrait ses frais de déplacement car sa fortune personnelle n’y eût point suffi. Les émigrés , le gouvernement anglais sous le directoire ?
La caisse noire du Ministère des Affaires Etrangères sous le Consulat ?
Il n’existe pas de comptabilité des fonds secrets.
Il faut , en tout cas, féliciter M. Olivier Blanc d’avoir levé pour nous un coin du voile qui, pendant longtemps , a caché les activités des agents secrets. Sans doute tous les mystères ne sont point éclaircis . Mais ce livre indique le chemin à suivre. Il fera progresser l’histoire de la diplomatie secrète à l’époque révolutionnaire et impériale. C’est un grand mérite et tous les historiens lui en sont reconnaissants.

Préface de Jacques Godechot.

C'est un livre qui me paraît fort intéressant pour le moment.

Mme de Bonneuil de par son passé et de par son réseau de relations , ne pouvait que choisir cette voie de l'espionnage et le combiner avec la galanterie. Elle sut faire de l'espuinnage une actiovité lucrative.
Elle avait tous les talents pour exercer son nouveau métier. Le Comte d'Artois voyait en elle une véritable comédienne.