Venez découvrir le destin de Parkie, l'éléphante exhibée.
Première éléphante exhibée en France, Parkie a fait fondre le cœur des Parisiens dès 1798. Un mystère plane pourtant sur la nature de la relation qu'elle entretenait avec son congénère, Hans…
Propulsée du Sri Lanka à l’Europe des Lumières, Parkie est la première éléphante exhibée au grand public en France. Elle est un objet de curiosité populaire, scientifique et artistique. Avec son compatriote Hans, ils font fondre le cœur des visiteurs qui projettent en eux une histoire d’amour à la française.
“Parkie est aussi un de ces animaux qui devient un personnage populaire, qui fait l’objet de brochures, d’une curiosité du peuple, une curiosité populaire au sens plein du terme", résume Stéphane Audeguy, écrivain et auteur de Parkie, une histoire d'éléphant.
Avant Parkie, les animaux exotiques étaient exhibés dans des ménageries privées, seule l’élite pouvaient les observer. Parkie arrive à la ménagerie du Jardin des Plantes de Paris en 1798. Dans le deuxième zoo public au monde, elle devient vite une attraction, ou plutôt ils, car elle arrive avec Hans, un éléphant mâle, et les visiteurs imaginent immédiatement que les deux pachydermes sont en couple.
Enlevés au CeylanLeur histoire commence au Ceylan, l’actuel Sri Lanka. Parkie et Hans n’ont que 18 mois quand ils sont capturés pour être offerts au gouverneur des Pays-Bas.
Ils ont 4 ans quand ils arrivent au château de leur nouveau maître. Les éléphants passent leur temps à déambuler dans les jardins et les salons. Le gouverneur les met en scène devant ses invités en les nourrissant avec des plats de luxe.
Après la Révolution, Parkie et Hans sont confisqués par les Français. Ils doivent rejoindre la nouvelle ménagerie du Jardin des Plantes.
Les images sont rares, la plupart des Français ne sait pas à quoi ressemble un éléphant. Contrairement au lion royal, l’éléphant est l’animal du peuple. Dès leur arrivée, les Parisiens se précipitent pour les voir, à tel point que la ménagerie installe une billetterie pour réguler les flux.
“Après la Révolution française, on projette sur l’éléphant des qualités plus ou moins républicaines. L’éléphant est un animal qui est sociable, il aime la musique, donc l’éléphant ressemble quelque part à une sorte d’idéal républicain. Il est évident que c’est une présence très très forte d’un animal qu’on ne peut pas facilement aller voir et qui nous renvoie à un monde qui n’est pas le nôtre", développe Stéphane Audeguy.
Des objets de fascinationLes savants du Muséum en profitent pour faire des observations : appétit, sommeil, toilette, lien social, sensibilité, des données capitales. Leur sensibilité à la musique leur vaut d’ailleurs le surnom “d’éléphants mélomanes”. Les Parisiens s’approprient l’image ces pachydermes, ils ont l’impression de les comprendre.
Ils projettent sur Parkie et Hans un idéal de relation : la force et la tendresse.
Jean-Pierre Houël, connu pour ses peintures de la prise de la Bastille, se passionne lui aussi pour Parkie et Hans. Il passe huit semaines pour les observer, les comprendre et les dessiner. Et il veut percer un mystère… Parkie et Hans forment-ils un vrai couple ? Houël note des signes d’affection, une trompe caressant la peau de l’autre, des cris de joie mais n’assiste à aucun coït. Il en dessine alors un simulacre, basé sur les pratiques humaines.
Grand défenseur de la Révolution, Houël déteste les prisons et préfère représenter Parkie et Hans dans leur habitat naturel.
“On les voit se réjouir ensemble de leur bonheur, en s’embrassant étroitement, et en épanchant leur âme l’une dans l’autre”, Jean-Pierre Houël.
“Je pense que le fait que ça soit une paire d’animaux, on a voulu en faire un couple ce qui n’est pas la même chose. Il y a eu cette fantasmatique du couple d’éléphant et c’est très important, ça fait partie de la projection, non seulement l’éléphant serait républicain mais bien-sûr il est sensible à l’amour. C’est l’animal du XVIIIe siècle par excellence parce que sa sensibilité le rend tout à fait exemplaire pour le grand public à ce moment-là", explique Stéphane Audeguy.
Des avancées scientifiquesCes “monstres de matière et miracles d’intelligence” continuent de fasciner les Français jusqu’en 1802, date de la mort de Hans. Parkie est effondrée. Les savants n'avaient pas encore conscience de l’impact des conditions de détention. La dépouille d’Hans est récupérée par les scientifiques du Muséum pour la naturaliser. Une mine d’or scientifique qui permet d'observer l'entièreté de l’éléphant.
Jusqu'à sa mort quatorze ans plus tard, Parkie reste l’une des curiosités les plus célèbres de France. "As-tu vu, au Jardin des Plantes, l’éléphant ?", écrit Napoléon à Marie-Louise en 1813.
Parkie meurt à 33 ans, elle aurait sans doute vécu le double en liberté.
À lire : Parkie, une histoire d’éléphant de Stéphane Audeguy. Editions Musée d’Orsay, novembre 2020
À voir : Les Origines du monde, prochainement au Musée d’Orsay
Derwell Queffelec
Pour écouter https://www.franceculture.fr/histoire/le-destin-de-parkie-elephante-exhibee