Encore une action montrant la générosité de Louis XVI.
1779 : Louis XVI verse 250 000 livres pour délivrer 57 esclaves corses Le 23 juillet 1779, un navire suédois, le Saint-Octave, arrive à Marseille avec à son bord un convoi inhabituel en provenance de Tunis et d'Alger : cinquante-sept Corses esclaves au Maghreb - pour la plupart originaires de Bastia et de Bonifacio - dont vingt-quatre femmes et enfants. Ces otages qui viennent d'être libérés par la grâce de Louis XVI sont encadrés par Ali-Chiaou, l'envoyé du bey de Tunis chargé d'assurer le bon déroulement de la « transaction ».
Car le Roi de France a payé une rançon de 250 000 livres pour tirer ces esclaves des griffes des Barbaresques.
Pourquoi une telle générosité, dix ans après l'annexion de la Corse ?
Selon l'historien Michel Vergé-Franceschi, « Louis XVI voulut faire un véritable ''coup'' publicitaire en Corse visant à faire naître dans l'âme de ces nouveaux sujets des sentiments d'attachement, de fidélité, de reconnaissance et d'amour». (1)
L'opération a été savamment préparée. À Marseille, le retour des rescapés est marqué par une série de manifestations spectaculaires. On organise des processions sous la bannière des ordres religieux intervenus dans le rachat, les Pères de la Sainte Trinité et les Pères de la Mercy. Des messes d'actions de grâce sont célébrées Hôtel de la Loge et place Lenche « lieux choisis qui ne peuvent que rappeler aux ''captifs'' combien la France de François 1er ou des Bourbons a permis aux Corses de ''réussir'' dans le royaume ». (2)
Le retour dans l'île natale s'annonce émouvant pour ces captifs dont certains n'ont pas revu leur famille depuis une trentaine d'années ! Le 14 août 1779, ils embarquent pour la Corse. Une cérémonie religieuse est célébrée en mer le 15, jour de la Sainte-Marie, et le 19 les captifs débarquent enfin à Calvi.
Quel accueil trouveront-ils ? Toute la ville est là : les religieux, avec les Capucins et Récollets, le clergé séculier, mais également les militaires avec l'état-major du régiment de Beauvaisis, et les notables locaux. Nouvelles processions aux cris de : « Vive le Roi ! »
Le convoi se dirige ensuite vers Saint-Florent où de nouvelles cérémonies ont lieu le 21 août, puis rejoint Bastia, où les célébrations prennent un tour grandiose avec une succession de réceptions et de messes en présence du Comte de Turpin - commandant la place en l'absence de Marbeuf- du chevalier Caraffa et de tous les ordres religieux réunis.
Les captifs sont logés dans les locaux du Séminaire où on leur demande « une fidélité inviolable pour le principe bienfaisant qui avait fait briser leurs chaînes ». Louis XVI espère ainsi transformer des esclaves corses en sujets reconnaissants.
Le 2 septembre, les derniers captifs atteignent Bonifacio où de nouveau, sont orchestrées des cérémonies au milieu des plus hautes autorités de la cité. Ainsi se solde par la seule « bonté » du Roi un chapitre particulièrement douloureux des Corses emmenés en esclavage au Maghreb.
La plupart des esclaves étaient des marins, comme Antoine Agostini et Félix Aitelli de Mariana, détenus chacun depuis 12 et 16 ans, personne n'ayant pu verser la rançon réclamée.
Mais il est des cas plus pathétiques dont celui de Marc-Antoine Bucugnani, 49 ans, marin de Bonifacio, prisonnier avec son épouse Angela et ses cinq enfants dont un nourrisson. Marié au bagne de Tunis au bout de dix ans de captivité, il mourra d'épuisement à son arrivée à Calvi.
Augustin Venturini, 28 ans, de Bastia, décède en retrouvant les siens. Tous ses camarades captifs assistent à ses obsèques en l'église Saint-Jean-Baptiste.
Le triste record de durée de captivité au Maghreb revient à Sébastien Marchetti de Sagone : à 80 ans, il a passé 41 ans au bagne !
(1, 2) Michel Vergé-Franceschi. La Corse, la Méditerranée et le monde musulman. Editions Alain Piazzolahttps://www.corsematin.com/articles/1779-louis-xvi-verse-250-000-livres-pour-delivrer-57-esclaves-corses-130685
Louis XVI fut vraiment un grand roi
encore trop méconnu, mais les historiens commencent à lui rendre justice.