Le Boudoir de Marie-Antoinette

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 19 septembre 1754: Carcassonne

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yann sinclair

yann sinclair


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MessageSujet: 19 septembre 1754: Carcassonne   19 septembre 1754: Carcassonne Icon_minitimeDim 21 Mai - 14:27

19 septembre 1754: Carcassonne 13142412
De la difficulté d'être mal mariée : "je suis ton maître !"

Carcassonne, Aude, 1754.

Le 19 septembre 1754, Catherine Vidal et Laurent Faure, maître tanneur, s'épousent.

Et au XVIIIe siècle il est bien rare qu'on se marie par amour. Le père de Catherine, laveur de laine, a arrangé ce mariage, espérant un bon parti (économique) pour sa fille.
19 septembre 1754: Carcassonne 13188912
Las ! Le père lui-même regrette son choix, comme le prouve la plainte du 23 décembre, seulement trois mois plus tard:
" Est comparu Jean Vidal, prenant le fait et cause de Catherine Vidal sa fille aynée quil vient de marier avec Laurent Faure, sadite fille estant hors de paroitre devant nous (lieutenant criminel de la sénéchaussée) par les mauvais traitements qu'elle a reçus de son mary qui n'a cessé depuis qu'il l'a épousée de l'excéder et de la murtrir dans plusieurs parties de son corps, ce que ne pouvant souffrir, elle fut obligée de revenir avec son père, ledit Faure n'ayant pas voulu luy rendre ses hardes, il cherche encore les occasions qu'il peut trouver pour assouvir sa rage et sa fureur, s'étant porté à cette extrémité de vouloir la noyer dans la rivière d'Aude le jour d'hier, environ les quatre heures et demy du soir que sa fille fut par curiosité voir la rivière qui sortoit de son lit, et ledit Faure l'y ayant vue, fut la saisir et fit ses efforts pour ly précipiter, ce qui estoit fort aisé parce que les bords de la rivière s'ébouloient, et sans le secours de plusieurs personnes qui dégagèrent la fille des mains de Faure, il auroit ecécuté son mauvais dessein, écumant de rage, il continua toujours ses menaces, et comme la vie de la fille du plaignant n'est pas en seuretté, il requiert justice luy être faitte".

Les témoins déposent:

Antoine Ressigeac, garçon marchand, 22 ans:
" Hier venant de chez ledit Vidal, il fut avec sa fille le long de la rivière d'Aude et lorsqu'ils furent près de l'eau, Faure seroit venu et auroit saisy brusquement son épouse qu'il vouloit faire passer dans la boue et dans un peu de l'eau qu'il y avoit, de quoy ladite fille se récria disant qu'elle ny vouloit passer, et faure luy dit qu'il estoit son maître et vouloit la luy faire passer, sur quoy elle ayant fait quelque résistance, ledit Faure ayant tombé sa redingote qu'il suivit et s'étant relevé, il reprit brusquement sa femme par le bras, le déposant luy dit qu'est-ce qu'il vouloit faire et l'ayant pris par l'habit, ladite Vidal s'en fut".
Jean Noé, dit David, 21 ans :
" Il a ouy dire à l'épouse du dit Faure que son mary la maltraitoit à tout moment tantôt à coups de poing, tantôt de soufflets et une autre fois, estant couchée, Faure venant de dehors, luy otta toutes les couvertes et draps du lit, de quoy s'étant récriée, il la reprit par les cheveux et luy donna de grands coups de pieds desquels coups elle fut si incommodée qu'elle fut obligée de se faire saigner plusieurs fois.
De plus, hier .... se trouvant avec un de ses amis le long de la rivière d'Aude, il auroit vu Faure qui prit brusquement son épouse, voulant la culbuter dans un bourbier et le déposant luy ayant parlé quelque temps après, elle luy dit que son mary la serroit sy fort à son cotté sur une ancienne murtrissure qu'il luy avoit faite, elle faillit perdre la respiration, l'ayant reprise brutalement par trois différentes fois et, sans le secours de Ressigeac qui les sépara, il l'auroit sans doute plus maltraitée, estant ému et transporté de colère, après quoy il la menassa pendnat le temps que le déposant luy fesoit des représentations de ne pas agir ainsi avec sa femme".
Thomas Sainte-Marie, maître chirurgien, 45 ans :
"Le 8 décembre, il fut appellé pour se rendre chez Vidal pour voir Catherine qu'il trouva dans la maison de son père auprès du feu, et luy ayant demandé de quoy elle se plaignoit, elle luy répondit en pleurant qu'elle avoit receu un coup de pied sur le cotté gauche de la part de son mary, ce qui luy causoit des douleurs fort aigues, ce qui l'empêchoit de respirer qu'avec peine ... et y ayant mis la main, il y trouva une équimose où il fit mettre de l'eau de vie, il l'auroit saigné et le lendemain, il fut la voir et fit continuer le même remède, l'ayant ressaigné quelques jours après à cause que la douleur persistoit".

Le mariage étant indissoluble, il n'y avait d'autre choix que de supporter. Catherine et Laurent auront au moins un enfant. Catherine deviendra veuve quelques années plus tard.

AD Aude, archives judiciaires, B535.

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19 septembre 1754: Carcassonne C_icgp11
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