14 juillet 1622:

"Entrée du Roy Louys le Juste en Carcassonne ... avec applaudissement et triomphe".

Carcassonne, Aude, 1622.

En 1622 le roi Louis XIII mène campagne contre les Protestants révoltés en Languedoc.

Son entrée à Carcassonne, ville catholique et fidèle au pouvoir royal, est un événement pour la population qui accourt de loin pour voir leur jeune roi de 21 ans.

Mais l'événement est aussi incroyable pour le prêtre de l'église Saint-Michel qui fait partie du "comité" d'accueil du souverain.

Voici le souvenir qu'il en a laissé dans son registre:
"Mémoire soit que l'an mil six cent vingt et deux et le quatorziesme jour du mois de juilhet, iour (jour) et feste de St Bonaventure, a faict son entrée heureusement avec grand applaudissement et triomphe, notre souverain prince Louys treiziesme Roy de France et de Navarre surnommé Louys le Juste, dans la ville basse de Carcassonne l'heure de huict du matin au grand contentement et indicible plaisir de toutz les citoiens et grand multitude de gendarmes, soldatz, tant de ladite ville que (des lieux voisins), ayant esté receu (reçu) par Mrs Arnaud Franc, prêtre et recteur de l'église paroissiale St Michel ... et toutz les couvents apportantz toutz chappes en procession et bel ordre dehords laditte ville où il y avoit un très furieux batailhon composé de plusieurs gens de guerre bien dressé et revestus de beaux habits et somptueusement accoustumentz (accoutrés) munis de toutes sortes d'armes de guerre soit de pierre à feu, grandes armes et apprès seroint survenus les consulz (corps municipal de la ville) qui auroint présenté ung toile de velours bleu et rouge artistement élaboré avec de beaux ramages et armoiries de broderye d'or , lequel sadite Majesté ayant veu (vu), il fit advancer ung seigneur de sa suitte pour dire ausdits consulz quil se contentoit de leur bon zèle (fidélité) et que l'on retirast ladite toile ce qui feust faict et apprès Mr de Puynautier (Pennautier), premier consul, luy fist au pied de laditte ville une petite harengue et apprès feust conduict par la porte dicte de (?) qui avoit esté embolye (embellie) d'une belle piramide avec diverses devises au long de la grand rue jusques au coing de l'officialat et de là, se tournat vers l'église St Vincent soubz ung ciel draps de bleu estandu au long dudict chemin en l'aire (en l'air) et estant parvenu au devant lad. église St Vincent et devant la porte dicte de la Parade où Monseigneur le révérendissime messire Vital de L'Estang, évesque de Carcassonne attendoit Sa Majesté où il luy fist une fort courte harengue en laquelle estoint présentz seulement led. illustrissime prélat, le cardinal du Raix, archevesque de Tours et led. sieur Franc, recteur dud? St Michel (le narrateur qui en est encore tout chamboulé) laquelle achevée, Sad. Majesté alla faire son oraison accoustumée devant le grand autel de lad. église à deux genoulx sur deux beaux carreaux (coussins) aussy de velours bleu avec un drap de terre (tapis) le tout bien travailhé, durant laquelle oraison, la musique a chanté et les orgues avec plusieurs autres instruments musiquaux clairons et trompettes et apprès se seroit retiré au lougis (logis) dud. Sr de Puinautier qui luy avoit esté préparé du devant laquelle conduite (en chemin pour le château de Pennautier) tout le puble (peuple) unanimement alloint criant : "Vive le Roy!".
Le lendemain (15 juillet) auroit faict semblablement son entrée en la cité tout autant heureusement et honnorablement qu'il feust possible, ayant aussy les Mrs et citadins (habitants de la Cité) faict ung autre toile de velours rouge tout parsemé de fleurs de liz (lys) et couronné d'or bien riche qu'il refusa ...
Apprès avoir esté faite la harengue par le premier consul selon la coustume qui agréa merveilheusement bien à Sad. Majesté feust conduit en procession par mon seigneur l'évesque de Carcassonne ... en lad. église cathédrale St Nazaire où il a entendu messe basse que Monseigneur a dicte, lad. musique, orgues et instrumantz chantantz et apprès avoir vu le chasteau et autres forteresses, s'en seroit descendu disner (dîner) ayant tout le long dud. chemin lesd. citadins rendre autant d'acclamations louangères et honneur possible audict prince ....
Et le lendemain (16 juillet) auroit lad. Majesté ouy (entendu) messe à quatre heures du matin en l'église St Michel que son ausmonier (aumônier) auroit dicte à laquelle les orgues d'icelle auroint sonné, apprès laquelle Sa Magesté seroit monté à cheval et prins (prit) son chemin à (vers) Narbonne.
Conflagrationn de partie de la présente ville de Carcassonne.
La nuict suivante sur les onze heures environ minuit, se seroit levé ung grand feu à la maison de Mr d'Yzarn à lad. grand rue avec telle vitesse et impétuosité, la conflagration duquel auroit allumé, bruslé et réduit en cendres presque la quatriesme partie (le quart) de lad. ville basse avec une véhémence incroiable, tellement que plusieurs en demeurèrent perdus et ruynés cy ce n'est qu'il plaira à la souveraine bonté, aydes, selon sa coustume, aux pauvres affligés".

AD Aude, registre paroissial de Saint-Michel de Carcassonne, 1622.