Première réunion de l'Assemblée législativehttps://fr.wikipedia.org/wiki/Assembl%C3%A9e_nationale_l%C3%A9gislative_(R%C3%A9volution_fran%C3%A7aise)
1er octobre 1791 – 21 septembre 1792
11 mois et 20 jours
Elle est composée de députés assez jeunes (les membres de la Constituante ne sont pas autorisés à se représenter), riches (régime électoral du marc d’argent)
Il n’y a plus de véritables contre révolutionnaires siégeant dans la nouvelle assemblée.
La droite est formée par le club des Feuillants (274 députés), qui suivent les triumvirs (Barnave, Duport, Lameth) et La Fayette.
Ce sont des monarchistes constitutionnels défenseurs de la royauté contre l’agitation populaire. Leurs chefs, La Fayette et Barnave ne siègent pas à l’assemblée.
À gauche, le club des Jacobins et des Cordeliers (136 députés) sont dirigés par Brissot, Condorcet, Vergniaud, Guadet, Gensonné. Ils sont issus de la bourgeoisie cultivée adepte des idées des Lumières avec de grands orateurs comme Jacques Pierre Brissot, Pierre Victurnien Vergniaud, Jean Antoine Nicolas de Caritat, marquis de Condorcet, Maximin Isnard… Les discussions au Club des Jacobins influencent les débats à l’Assemblée (influence de Robespierre qui n’est pas député) Méfiants à l'égard du roi, ils sont partisans d'une guerre contre les souverains européens afin de mettre Louis XVI à l'épreuve, et favorables à la propagation de l'idée de liberté en Europe.
Au centre, une majorité (345 députés) « Indépendants » formant le « Marais », résolus à défendre l'œuvre de la Révolution, ils votent le plus souvent à gauche. Très attachée à la Constitution et à la Révolution, se présente comme indépendante, puisque non affiliée à un club.
Elle inaugure un régime monarchique et parlementaire sur la base de la Constitution rédigée par les députés de la précédente assemblée.
Beaucoup croient que la Révolution commencée deux ans plus tôt prend fin avec la mise en place des nouvelles institutions.
La nouvelle assemblée, qui succède à l'Assemblée constituante, autre nom des états généraux, débute avec un très lourd handicap : ses élus sont tous des novices, les députés de la précédente assemblée s'étant interdit de se représenter sur une proposition de Robespierre, votée le 16 mai 1791. Qui plus est, il n'y a plus parmi eux d'opposition aristocratique, les nobles et le haut clergé ayant dédaigné de présenter leur candidature.
Bien que sans emploi, les députés de la Constituante ne quittent pas Paris. Ils se répandent dans les clubs révolutionnaires de la capitale, à l'image de Robespierre. Ils placent la Législative sous surveillance. Quant au roi Louis XVI, réfractaire à l'idée d'une monarchie constitutionnelle à l'anglaise, il ne songe qu'à paralyser le gouvernement et faire échouer la Constitution dans l'espoir vain d'un retour à l'Ancien Régime, ce qui ne facilite pas la tâche des nouveaux élus.
Un roi sous surveillanceLa Constitution, qui a été votée le 3 septembre 1791, limite considérablement l'autorité du roi. Celui-ci ne tient plus son autorité de Dieu mais de la Nation, autrement dit du peuple. Il n'est plus «roi de France par la grâce de Dieu» mais «par la grâce de Dieu et la Constitution de l'État, roi des Français».
Dans le droit fil de la philosophie de Jean-Jacques Rousseau, l'article 3 de la Constitution énonce : «Le principe de toute souveraineté réside essentiellement dans la nation. Nul corps, nul individu ne peut exercer d'autorité qui n'en émane expressément».
Le roi est tenu de prêter serment à la Constitution. C'est ce qu'il a fait devant les députés de l'Assemblée constituante le 13 septembre 1791. Pour ses besoins matériels, il doit se satisfaire d'une «liste civile» de 25 millions de livres octroyée par les députés.
Les pouvoirs sont assez strictement séparés par la Constitution conformément aux principes édictés un demi-siècle plus tôt par Montesquieu.
– Le pouvoir législatif (la rédaction et le vote des lois) revient à l'Assemblée nationale, mais le roi dispose du droit de «veto» (d'après un mot latin qui veut dire je m'oppose) : il peut suspendre l'application d'une loi pendant deux législatures, soit quatre ans.
– Le pouvoir exécutif (l'application des lois) revient aux six ministres désignés par le roi (Justice, Guerre, Marine, Affaires étrangères, Intérieur, contributions ou Finances), mais ces ministres doivent rendre des comptes aux députés.
Une démocratie limitée
Les 745 députés de l'Assemblée nationale sont élus pour deux ans mais seulement par les citoyens considérés comme assez riches pour avoir le sens de l'intérêt général et être attachés à la prospérité de la nation.
La plupart des contemporains considèrent en effet que les pauvres qui ne possèdent aucun bien et n'ont pas d'attache sociale ne peuvent s'impliquer avec sérieux dans les affaires politiques. Ils considèrent par ailleurs que les domestiques, même aisés, sont sous l'influence de leur employeur et ne peuvent à ce titre voter en toute objectivité.
C'est ainsi que les députés de la Constituante instaurent un mode de scrutin censitaire, dans lequel le droit de vote est subordonné au paiement d'un minimum d'impôt (le cens).
Seuls quelques démocrates tels que l'abbé Grégoire, Robespierre et Duport plaident pour un suffrage universel (à l'exclusion des femmes, ce qui va sans dire à l'époque car les femmes sont considérées comme juridiquement mineures et sont réputées influençables car soumises à leur père ou à leur mari).
Pour compliquer un peu plus l'affaire, les députés adoptent un mode d'élection des députés à deux niveaux : les citoyens de base élisent des électeurs et c'est à ces derniers qu'il revient d'élire les députés qui siègeront à l'Assemblée nationale.
En définitive, les hommes de plus de 25 ans susceptibles de voter sont répartis en trois catégories :
– Les citoyens passifs, au nombre de trois millions, sont exclus du vote,
– Les citoyens actifs, au nombre de quatre millions, sont appelés à se réunir en «assemblées primaires» en vue de désigner un centième d'entre eux comme électeurs,
Pour être citoyen actif, il faut :
- être un homme né ou devenu français,
- avoir 25 ans au moins,
- être domicilié dans son arrondissement depuis au moins 5 ans,
- payer un impôt d'au moins trois journées de travail,
- ne pas être domestique.
- Les électeurs, au nombre de 50.000 pour toute la France, sont désignés par les citoyens actifs. Ils doivent payer un cens (impôt annuel) d'au moins dix journées de travail, ce qui les classe dans la fraction la plus riche de la population. À eux revient le soin d'élire les 745 députés de l'Assemblée nationale législative.
Justice pour tousLes députés de la Constituante ont aussi réformé la justice (le troisième pouvoir selon la définition de Montesquieu). Par le décret du 16 août 1790, ils abolissent la justice coûteuse et compliquée de l'Ancien Régime, avec ses parlements, ses tribunaux de bailliages... Au nom du principe de séparation des pouvoirs popularisé par Montesquieu, ils instituent des magistrats élus par les citoyens actifs.
– Chaque canton a un juge de paix élu pour deux ans et chaque district un tribunal de première instance.
– Chaque département un tribunal criminel. Dans ce dernier, un jury d'accusation de 8 membres décide s'il y a lieu de poursuivre l'accusé et un jury de jugement de 12 membres décide de la peine à appliquer.
Les juges de district siègent aussi dans les tribunaux criminels. Ils sont élus pour 6 ans et obligatoirement choisis parmi les hommes de loi.
– Dans la capitale, un tribunal de cassation veille à la conformité des jugements.
Les députés prévoient par ailleurs d'uniformiser les peines pour tous les citoyens, sans distinction de classe sociale (c'est ainsi que la mort est pour tous les condamnés donnée par la guillotine).
Cette justice démocratique, efficace et peu coûteuse révélera de grandes qualités pendant les quelques mois durant lesquels elle sera pleinement appliquée. Malgré ses qualités ou à cause de ses faiblesses, la Constitution de 1791 va être appliquée pendant moins d'une année. Elle sera avant tout victime de la mauvaise volonté des uns et des autres, en particulier de l'entourage du roi.