Mercredi 16 octobre 1793 Ste HedwigeQuintidi 25 vendémiaire an II Bœuf Il est près de 11HLe temps s'est un peu réchauffé10°Il fait beau, une légère brume, cet indéfinissable brouillard parisien, estompe les lointainsElle était prête
Il n'y avait plus qu'à partir pour le supplice
Les assistants s'écartent de la porte
En silence, Marie-Antoinette quitte le cachot suivie du bourreau qui tient en main les bouts de la grosse corde qui tire en arrière les coudes de la condamnée
Entre une double haie de gendarmes, elle gagne le greffe, et soudain ses yeux s'emplissent d'épouvante
Là-bas, au-delà de la grille de la petite cour basse, à travers les deux portes que l'on vient d'ouvrir, elle a aperçu l'ignoble Charrette
Louis XVI était parti à la mort dans un carrosse
Il va lui falloir monter dans cette voiture à fumier !
Une faiblesse la saisit
Elle demande qu'on veuille bien lui délier les mains et là, par terre, dans un coin du greffe qu'on appelle la Souricière, elle d’accroupie...puis, elle va tendre d'elle-même ses mains à Sanson
L'image de l'Archiduchesse, les traits de cette "favorite charmante et dangereuse d'une monarchie vieillie" vont s'estomper et s'effacer
Tout va disparaître et doit disparaître pour ne laisser à la postérité que le tableau d'une femme, en robe blanche, marchant à la guillotine en vraie reine de France...
Dans la cour de Mai, des gendarmes à pied et à cheval, mêlés à des "hommes à piques", entourent la charrette boueuse
ici, même , à l'époque de la douceur de vivre, la basoche plantait chaque printemps un mai enrubanné, un beau chêne que les clercs allaient choisir " en grand appareil de bataille" dans la forêt de Bondy...
Rue de la Barillerie, derrière la belle grille dorée, la foule se presse en silence
La silhouette blanche, qui semble tenir en laisse par le bourreau apparaît sous l'arcade, fait quelques pas et s'arrête devant la charrette
on y a placé une petite échelle de quatre ou cinq échelons
L’exécuteur indique à la Reine où il faut mettre le pied; de la main il la soutient tandis que, tenant la tête bien droite, elle atteint le marchepied
On remarque qu'elle porte un jupon noir sous sa robe blanche
Une planche étroite et boiteuse, assujettie tant bien que mal aux montants, coupe en deux la charrette; elle veut l'enjamber, et s'asseoir face aux deux chevaux de labour attelés en flèche aux limons
Mais le bourreau et son aide l'en empêchent: elle doit tourner le dos à la marche
L'abbé Girard gravit l'échelle à son tour et se place à côté de la condamnée
Derrière eux, debout, appuyé aux ridelles, se tient le bourreau, une main tenant les cordes, l'autre son chapeau à trois cornes
Son aide, également tête nue, est au fond
Il est onze heures et quart