1er juillet 1623: La création du collège des Jésuites à Carcassonne

Saint Ignace de Loyola (1491-1556), fondateur de la Compagnie de Jésus.

Mgr Vitalis de Lestang, évêque de 1621 à 1655 (Trésor à la cathédrale de Saint-Michel)




En 1853, lors de sa création, le lycée de la rue de Verdun engloba l'ancien collège des Jésuites, construit au XVIIe siècle. La mise en place de cette institution nous est connue par un document inédit des Archives départementales proposé lors des cours de paléographie par Mme Françoise Fassina, qui permet de découvrir la complexité de sa naissance.


En effet, le 1er juillet 1623, se trouvent en présence les diverses autorités concernées, avec tout d'abord l'évêque Vitalis de Lestang: alors que s'affrontent les armes à la main catholiques et protestants, le prélat voit avec l'enseignement prodigué par la Compagnie de Jésus le meilleur moyen de maintenir dans le droit chemin les adolescents qui lui seront confiés. Est mentionné ensuite le juge-mage Philippe de Roux, lequel représente Louis XIII, dont le père Henri IV avait autorisé la création d'un collège à Carcassonne. De Roux, président du tribunal local, est bien entendu entouré des «gens du roi», magistrats et avocats.


Après que l'évêque ait donné sa bénédiction et le roi son autorisation, paraissent ceux qui vont payer, c'est-à-dire les représentants de la municipalité.




Les consuls et certains membres du «conseil politique» de l'époque répondent à l'aspiration des familles aisées, désireuses de voir leur progéniture accéder à des fonctions importantes. Or, pour cela, la meilleure solution est de passer par les facultés de droit ou de médecine, ce qui suppose une instruction qualifiée aujourd'hui de secondaire qui comportait l'apprentissage du latin. Les jésuites répondent à cette attente, avec une pédagogie novatrice, mais les dirigeants de la ville hésitent devant le coût annoncé pour la mise en place d'un collège: 50 000 livres pour sa construction, puis 4 500 livres annuelles de fonctionnement.


En effet, une quinzaine de religieux était déjà arrivée, et le «coût» d'un jésuite était estimé à 200 livres par an, alors que les 3 régents de l'école élémentaire se contentaient au total de 300 livres ! Les consuls mettent cependant la main au gousset et allouent 2 000 livres à la Compagnie, au terme d'un contrat dont nous verrons prochainement les termes.

La Carcassonne baroque : la chapelle des Jésuites

Pour commencer un rappel historique: Le Collège des Jésuites est fondé à Carcassonne en 1623.

Les Jésuites réalisent alors d’énormes travaux de construction.

Les bâtiments élevés par les Jésuites abritèrent pendant trois siècles les écoliers carcassonnais, même après l’expulsion de la confrérie en 1762.

La première pierre de la chapelle baroque fut posée en 1640.

Les travaux furent longs, car cette chapelle ne fut consacrée qu’en février 1667.

Elle faisait partie intégrante des bâtiments du collège qui subirent de nombreuses modifications et transformations au cours des ans.

Elle fut utilisée comme « museum » à la fin du 18e siècle, sous l’impulsion du peintre Jacques Gamelin (dont on retrouve nombre d’œuvres au Musée des Beaux Arts ou à l’église St Vincent)

 Des expositions de peintures y étaient organisées.

Pendant de longues décennies, la chapelle resta oubliée de tous, et se trouvait encore il y a quelques années dans un état de délabrement assez avancé.

Elle a été entièrement restaurée, de manière assez remarquable.

Le contraste entre la façade nue et austère et l’intérieur est saisissant, le haut portail très sobre daté de 1720, ne laisse pas présager des petites merveilles qui se trouvent à l’intérieur.

Tous les éléments baroques ont été restitués, en particulier les impressionnants plafonds à caisson, les balustrades et galeries, et le grand retable peint du chœur.

Très caractéristique également, la  » Mirande « , qui est le nom donné au clocher octogonal de style baroque qui surmonte le choeur de la chapelle.

Aujourd’hui, la Chapelle des Jésuites a retrouvé une vocation culturelle et « pédagogique », puisqu’elle est devenue l’auditorium de Carcassonne, pouvant accueillir près de 200 personnes.

Des concerts de musique classique, de jazz y sont organisés, (Les Jeudis de l’Auditorium) et des expos de peintures y sont régulièrement montées, comme au temps de Jacques Gamelin !

Cette petite chapelle est quasiment le seul exemple de cette architecture baroque dans la bonne ville de Carcassonne.

Chapelle des Jésuites / Auditorium de Carcassonne
Rue des Etudes
11000 CARCASSONNE

La création du collège des Jésuites (2)


Sous le Calvaire de la rue Voltaire, les restes de l'ancien moulin (cliché C. Martinez)


Nous avons vu récemment comment, en 1623, l'évêque, le roi et les autorités municipales s'étaient accordées pour souhaiter l'installation à Carcassonne d'un collège tenu par les jésuites.

La ville accorda dans ce but 2 000 livres annuelles prises sur des impôts indirects qu'elle encaissait jusqu'alors: rente sur le moulin à vent qui dominait le bastion occupé actuellement par le Calvaire, et taxes sur la «petite boucherie», soit 6 deniers sur chaque livre de viande, fraiche ou salée, vendue en ville.

Un autre financement fut fourni par les représentants du diocèse civil de Carcassonne, circonscription administrative que l'on peut comparer à un arrondissement actuel, mais distinct du diocèse religieux.

Espérant voir leurs fils profiter de la nouvelle institution, ses délégués lui allouèrent une rente de 1 000 livres.

L'acte fut enregistré par les notaires de Conques, Trèbes, Montolieu, Lagrasse et Saissac, ce qui nous permet d'entrevoir les limites du dit diocèse

Pour leur part, les jésuites avaient délégué le père Barthelemy Jacquinot, pour lors à la tête de la province de Toulouse, assisté de trois autres révérends.

Par ces intermédiaires, la Compagnie de Jésus s'engagea à ouvrir cinq classes et à fournir les enseignants nécessaires à perpétuité, clause très importante pour la municipalité, qui voyait fréquemment les instituteurs de son école élémentaire quitter la ville pour une autre destination.

Le collège devait comprendre trois classes de grammaire correspondant à nos cours élémentaires et moyens, une classe d'humanités pour la culture générale, enfin une année de rhétorique, consacrée à l'apprentissage de l'art du discours, écrit et oral.

Les bons pères pourraient ouvrir ultérieurement une classe de philosophie, ce qui fut réalisé vers 1650, en même temps que fut mis en place l'enseignement du grec.

Aussi, en 1668, dénombrait-on 180 élèves dont une quarantaine d'internes.

L'acte ainsi rédigé fut enregistré par le notaire Jean Aussenac le 09 juillet 1623: restait à construire un nouveau bâtiment, ce que nous évoquerons prochainement.

Nos remerciements à Mme Luce Teisseire qui nous a communiqué ce document.