Le Boudoir de Marie-Antoinette

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 08 août 1590:

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yann sinclair

yann sinclair


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MessageSujet: 08 août 1590:    08 août 1590:  Icon_minitimeMer 14 Aoû - 13:52

Au cours de la journée des Pains, les Parisiens s'étaient même révoltés pour que la ville se rende

Erreur lourde de conséquence que celle d'Henri IV, puisque la prise de Paris, qui devait asseoir sans contredit possible son autorité sur le pays, allait être repoussée de quatre années, quatre années pleines de chevauchées et de mêlées furieuses

Temps de doute et d'incertitude, et, peut-être, à cause de cela, temps propices au plus fou des amours qu'un roi de France ait jamais conçu pour l'une de ses sujettes

Comme Henri IV et son grand écuyer, deux mois après cette déconvenue, en étaient-ils venus à galoper de la sorte, entre chien et loup, quittant les retranchements où leurs compagnons remâchaient leur colère, chevauchant, contre toute prudence, avec une très mince escorte qui les suivaient à distance?
Il suffisait d'observer leurs mines pour comprendre: Roger de Bellegarde, penaud, enrageant de la balourdise qu'il venait de commettre, Henri, se léchant les babines comme quelqu'un qui ne doute pas de sa bonne fortune ne soit, au bout de son chemin, installée à l'attendre

nul doute possible: il y avait de la femme là-dessous

Monsieur le Grand (Roger de Bellegarde), gascon de naissance et d'humeur, avait vanté au roi les charmes de l'une des filles du seigneur du lieu, Antoine d'Estrées, fausse ingénue de 16 ans dont il avait fait sa maîtresse

Gabrielle, tel était le prénom de cette beauté, était entrée dans sa vie un an auparavant, à Compiègne, avec l'éclat et la soudaineté du tonnerre

Roger de Bellegarde relevait à l'époque d'une fièvre double-tierce qui avait fait craindre pour sa vie

il attendait son rétablissement dans un petit logis des bords de l'Oise, pressé d'un flot d'admiratrices, avides de venir surprendre jusque dans son lit cet impénitent séducteur, dont quelques mèches de la chevelure tigrée de feu tire-bouchonnaient sous l'effet des dernières moiteurs de la fièvre

Soudain, dans ce hourvari femelle, le grand écuyer avait remarqué Gabrielle, entrée dans sa chambre en compagnie de quelques dames titrées du pays et obligée de jouer des coudes avec des haricotières et des marchandes de cresson pour s'approcher

Suggérons la figure de cette jeune curieuse et fions-nous au portrait que fit d'elle l'auteur de "Amours du Grand Alcandre" sa rivale dans le cœur de Roger de Bellegarde, Mademoiselle de guise:
"Son visage était lisse et transparent comme une perle dont il avait la finesse et l'eau

Le satin blanc de sa robe paraissait noir à comparaison de la neige de son beau sein.

Ses lèvres étaient couleur du rubis et ses yeux d'un bleu céleste, si luisants, qu'on eut pu difficilement juger s'ils empruntaient au soleil leur vive lumière ou si ce bel astre leur était redevable de sa clarté, deux autres attributs de la beauté aristocratique du temps: une chevelure relevée et blonde mais aussi un léger galbe de chair qui lui faisait un double menton

Michelet, qui ne l'aime pas, s'inquiète du regard:
"Elle est étonnamment blanche et délicate, imperceptiblement rosée
L’œil à une indécision, une vaghezza qui dut ravir et qui pourtant ne rassure pas.
Objet très poétique sans doute, elle n'en annonce pas moins un moral assez prosaïque; cette belle personne est certainement médiocre, judicieuse et, dans un cercle étroit, assez capable de calcul"


Achevons cette mosaïque par l'opinion d'un inconditionnel, Agrippa d'Aubigné:
"Son extrême beauté ne sentait rien de lascif"

Est-ce à dire que la demoiselle était suffisamment habile pour dominer ses émotions et ne pas laisser trans paraître le vie de luxure ou de cupidité que l'opinion, à juste titre, attachait, comme nous l'allons dire, aux femmes de son lignages?

En 1589, elle avait en tous cas, commencé par répondre avec beaucoup de froideur aux œillades enflammées de Roger de Bellegarde

C'est qu'elle était amoureuse alors, d'un certain Stavay, qui avait obtenu, disait-on, ses premières faveurs

Le grand écuyer n'était pas d'un caractère à s'arrêter à ces détails

Bien que faible encore, il avait entrepris de monter à l'assaut et l'épisode, si galant déjà, de sa convalescence, allait se terminer dans sa petite chambre de Compiègne, vidée sans ménagement de ses autres visiteuses, où il devait retenir Gabrielle deux jours et deux nuits consécutives

Après cela, il était reparu à l'armée en en faisant des gorges chaudes et Henri IV, alors tout à la pensée de Claude de Beauvilliers, l'abbesse de Montmartre, n'avait, à ces fanfaronnades, qu'à demi soulevé la paupière

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MessageSujet: Roger de Bellegarde   08 août 1590:  Icon_minitimeMer 14 Aoû - 14:10

Bellegarde était aimé du Roi Henri IV avec qui il s'entretenaient dans leur commun patois des montagnes des Pyrénées, émaillé de jurons cocasses

Il était issu de la vieille lignée des Saint-Lary en Comminges

Venu à la cour presqu'enfant, il en avait été, dès l'âge de 20 ans, l'une des coqueluches poussé par ses deux oncles, tous deux entièrement favoris d'Henri III: le maréchal de Bellegarde, le "torrent de la faveur", et surtout le duc d'Epernon, l'"archimignon", le "demi-roi"

Roger, aussi radieux et beau qu'étaient ses oncles, avait trouvé le premier levain de son succès dans le goût que le roi d'alors affichait plus qu'ouvertement pour les plus sémillants jeunes gens de son royaume

On sait par Tallemant ce qu'en disait un courtisan du temps à qui l'un de ses amis reprochait de ne pas avancer à la cour aussi rapidement que le grand écuyer:
"Hé! railla-t-il, il n'a garde qu'il ne s'avance, on le pousse assez par derrière"

Cette réputation, malgré les innombrables succès féminins dont on le crédite, ne devait d'ailleurs jamais tout à fait quitter Bellegarde

Tallemant, lui encore, prétend qu'il adopta, sur la fin de sa vie, l'aventurier Souscarrière qui était son giton
Admettons, avec Antoine Adam, que le beau Roger, comme nombre de séducteurs de son temps était, selon le joli mot d'Oscar Wilde: bimétaliste

Quoi qu'il en soit, aux temps qui nous occupent, ce félin, au regard de miel et à la cuisse musclée de centaure, pouvait s'enorgueillir d'une carrière exceptionnelle; il avait été fait à 21 ans, maître de la garde-robe par Henri III, à 22 ans, premier gentilhomme de la chambre, à 24 ans, grand écuyer


Il avait été au nombre des Quarante Cinq, ces gentilshommes dévoués au dernier roi Valois dans sa lutte contre la maison de Lorraine

En 1588, il s'était fait le principal racoleur des assassins du cardinal et du duc de Guise à Blois

C'est encore lui qui se tenait près d'Henri III, au matin du 1er août 1589 et qui s'était précipité, au cri de son maître, pour faire choir le couteau de la main criminelle de Jacques Clément

Après cela, il avait été le premier, au chevet du roi agonisant, à baiser les genoux d'Henri de Navarre et à le reconnaître pour légitime successeur de la couronne

Henri IV lui devait donc beaucoup et, pour lui en témoigner sa reconnaissance, il s’efforçait, malgré le délabrement de ses affaires de lui continuer les mêmes largesses que son prédécesseur

Ainsi, quelques semaines avant les évènements que nous narrons, avait-il repris l'abbaye de Marmoutier à son vieil ami Biron, pour en faire don à Roger

Ajoutons que Bellegarde maniait également la plume

C'est lui qui devait donner, à quatre mains, avec l'aide de son ancienne maîtresse, Mlle de Guise, ce récit des Amours, du Grand Alcandre qui, quelque quarante années après l'évènement, nous livre le récit, plein d'humour et beaucoup plus exact qu'on ne le pense, des amours de Gabrielle et d'Henri IV

La bévue fatale, point de départ de notre histoire, Roger  l'avait commise le 7 novembre, à son arrivée au camp de Coeuvres

Il avait sollicité un congé de deux jours pour revoir sa belle et, cette fois, le roi dont le cœur ne brûlait plus pour l'abbesse de Montmartre, attaqué du vif désir de contempler celle dont son grand écuyer ne cessait de vanter les appâts, s'était tout bonnement invité à le suivre

Henri IV et son grand écuyer s'approchèrent de Coeuvres au galop

Ce qu'en vit le Roi tout d'abord, à peine franchi le pint-levis, ce furent les domestiques qui s'empressaient au devant de lui, des flambeaux au poing et, en arrière, en l'absence du maître des lieux, l'homme qui avait perdu La Fère était un homme disgracié et il avait sans doute craint de se montrer, les enfants de M. d'Estrées.

Aussitôt, il y eut le croisement des regards: celui de braise que le roi porta sur la plus jeune des filles de la maison, celui embarrassé de Bellegarde, enfin celui glacé que Gabrielle lança à son souverain, ce même air de froideur qu'elle avait témoigné à Roger, la première fois qu'elle l'avait vu, alors qu'elle se croyait aimée de Stavay

Le trait qui venait d'atteindre le cœur du Béarnais devait y rester fiché 9 ans

C'était une chose singulière pour un homme qui n'avait jusque-là guère montré de constance dans ses amours, si ce n'est à l'égard de Corisande d'Andoins, Corisande de Guiche, restée en Navarre et avec qui il avait correspondu jusqu'au seuil du dernier été, jusqu'à l'heure où était parvenue à Pau l'incroyable nouvelle que le roi protestant de France occupait le plus clair de son temps, durant le siège de Paris, à forniquer avec deux religieuses: Claude de Beauvilliers, la belle abbesse de Montmartre et Catherine de Vendôme, la non moins langoureuse nonain de Longchamp, professe de l'ordre de l'humilité-Notre-dame, dont le vocable s'accordait si mal à l'envie de plaire qui, chez elle, ne connaissait pas de bornes

Le Roi, pendant plusieurs semaines, avait ainsi caracolé de Montmartre à Longchamp, ou, comme on disait alors, de la "religion" de Montmartre à celle de Longchamp

Biron y avait trouvé l'occasion d'un bon mot:
"Qui peut encore reprocher à Sa Majesté de ne pas changer de religion?"


Henri IV passa-t-il la nuit à Coeuvres comme le prétendent certains?

Se contenta-t-il, comme l'écrit Pierre Mathieu de "prendre du pain et du beurre à la porte du château"?

En tout cas, il ne vida les lieux qu'en prenant bien soin de ramener Bellegarde avec lui

Tout u long du chemin, sans la plus petite apparence de gêne, il disserta en gascon sur son amour tout neuf, ajoutant à l'adresse de Roger "qu'il ne voulait plus de compagnon en son amour... et que sa passion lui était plus chère que toutes les couronnes du monde"


L'auteur du Grand Alcandre ajoute:
"Bellegarde, fort troublé du langage et de l'action avec laquelle il était proféré, promit à son maître tout ce qu'il exigea"

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