Je lisais l'autre jour cette nouvelle fantastique d'Alexandre Dumas intitulée La femme au collier de velours, et j'ai relevé le court passage qui raconte le trajet en charrette de Madame Du Barry, je le mets à la suite de ce message. La nouvelle est, du reste, très bien écrite et surprenante, de plus elle est vraiment courte alors pas d'excuse pour ne pas s'y plonger dès ce soir ... ^^
Sur la charrette était une femme vêtue de blanc. Ces cris s'exhalaient des lèvres, de l'âme, de tout le corps soulevé de cette femme.
Hoffmann sentit ses jambes lui manquer. Ces hurlements avaient rompu les faisceaux nerveux. Il tomba sur une borne, la tête adossée à des contrevents de boutique mal joints encore, tant la fermeture de cette boutique avait été précipitée.
La charrette arriva au milieu de son escorte de bandits et de femmes hideuses, ses satellites ordinaires ; mais, chose étrange ! toute cette lie ne bouillonnait pas, tous ces reptiles ne coassaient pas, la victime seule se tordait entre les bras de deux hommes et criait au ciel, à la terre, aux hommes et aux choses.
Hoffmann entendit soudain dans son oreille, par la fente du volet, ces mots prononcés tristement par une voix d'homme jeune :
- Pauvre Du Barry ! te voilà donc !
- Mme Du Barry ! s'écria Hoffmann, c'est elle, c'est elle qui passe là sur cette charrette.
- Oui, monsieur, répondit la voix basse et dolente à l'oreille du voyageur, et de si près qu'à travers les planches il sentait le souffle chaud de son interlocuteur.
La pauvre Du Barry se tenait droite et cramponnée au col mouvant de la charrette ; ses cheveux châtains, l'orgueil de sa beauté, avaient été coupés sur la nuque, mais retombaient sur les tempes en longues mèches trempées de sueur ; belle avec ses grands yeux hagards, avec sa petite bouche, trop petite pour les cris affreux qu'elle poussait, la malheureuse femme secouait de temps en temps la tête par un mouvement convulsif, pour dégager son visage des cheveux qui le masquaient.
Quand elle passa devant la borne où Hoffmann s'était affaissé, elle cria : “ Au secours ! sauvez-moi ! je n'ai pas fait de mal ! au secours ! ” et faillit renverser l'aide du bourreau qui la soutenait.
Votre amie dévouée,
Madame de Polignac