Oraison funèbre de Sa Majesté Très Chrétienne le Roi Louis XVI , Roi de France et de Navarre,
prononcée à Romeen présence de Sa Sainteté le Pape Pie VI dans la chapelle Pauline du Palais du Quirinal (le Quirinal était alors la résidence pontificale), en présence du Souveraint Pontife, du Sacré-Collège, de toute la prélature romaine et de Mesdames Tantes du Roi.
C’est Monsieur le cardinal de Bernis qui célébra, entouré des cardinaux Carafa, Altieri et Livizzani.
L’oraison funèbre fut prononcée (en latin) par Monseigneur Paolo Leardi, camérier secret de Sa Sainteté.
Sa Majesté le Roi Louis XVI ayant été mise à mort le 21 janvier 1793, il fallut dix jours à un courrier extraordinaire pour porter jusqu’à Rome la nouvelle de ce crime.
Le 1er février, l’annonce en fut faite dans la presse : l’assassinat du Roi était qualifié de « più enorme de’ deliti » (le plus énorme des délits). Les circonstances et les détails de son exécution furent racontés le 15 février, et le testament du Roi publié le 22 février.
Plusieurs services funèbres furent célébrés à Saint-Louis des Français, et les tantes du Roi – Mesdames Adélaïde et Victoire, réfugiées à Rome depuis 1791 -, menèrent le deuil.
Il faudra toutefois attendre le 28 septembre 1793 pour qu’un service funèbre solennel soit célébré à la chapelle Pauline du Quirinal (le Quirinal était alors la résidence pontificale), en présence du Souveraint Pontife, du Sacré-Collège, de toute la prélature romaine et de Mesdames Tantes.
C’est Monsieur le cardinal de Bernis qui célébra, entouré des cardinaux Carafa, Altieri et Livizzani.
L’oraison funèbre fut prononcée (en latin) par Monseigneur Paolo Leardi, camérier secret de Sa Sainteté. C’est ce texte que l’on pourra lire et méditer ci-dessous.
Au frontispice de l’édition qui fut faite de cette oraison funèbre, une vignette – reproduite ci-dessus – représente un monstre à sept têtes – la révolution – qui renverse les grandes armes de Frances, usurpe leur place, en dévore les lauriers ainsi que le contenu des cornes d’abondance qui les entouraient. Les symboles des arts et des sciences, qui s’étaient épanouies sous la protection de la monarchie, sont pareillement renversés ; la balance de la justice est brisée…
Dans l’angle droit de la vignette, perçant de sombres nuées, on voit une représentation de la divinité dont une main vengeresse brandit la foudre en direction du monstre, tandis que l’autre main semble accueillir un oiseau qui vole vers Elle : peut-être la représentation de l’âme du Roi martyr…
Avant le texte de la traduction de cette oraison funèbre, l’ouvrage est introduit par une dédicace à Mesdames, puis au Pape Pie VI.
L’oraison funèbre est construite autour du thème de la bienfaisance du Roi – qui sacrifia son repos au bien de son Royaume – , et de l’exaltation de sa religion, plus forte que ses hésitations politiques et que la malice de ses ennemis.
Monseigneur Leardi donne un tableau générale du règne de Louis XVI :
Monté sur le trône à l’âge de vingt ans, il a reçu une France en mauvais état politique, économique et moral (la mémoire de Louis XV se trouve donc en quelque manière flétrie…). Louis XVI a relancé le commerce en reconstituant une flotte importante, et a protègé les initiatives de Monsieur de La Peyrouse. La guerre d’Amérique est clairement présentée comme une erreur, parce qu’elle a été la cause de troubles économiques pour le pays, et de troubles politiques en Europe. Contraint par l’état des finances à convoquer les États Généraux, voici que ces hommes censés conseiller le Roi se sont imposés à lui, avec une « multitude nourrie par le vice et l’iniquité de la philosophie ». Au sujet de la constitution civile du clergé que le Roi finit par signer, le prédicateur fait état des pressions subies par le monarque, et fait observer que, s’il avait conservé son autorité, il serait revenu sur la mise en application des réformes. Le Roi se dépouilla de tout : il refusa la guerre, s’enfuit avec sa famille dans le but de calmer les puissances et de reprendre le contrôle de la situation pacifiquement. Il se laissa couronner du bonnet phrygien, car « l’innocence ne craint rien ». Oui, il se dépouilla de tout, sauf de la religion. Le veto du Roi aux décrets de déportation des prêtres est lié à sa prise de conscience du courage des martyrs de l’Église. Il signa là son arrêt de mort, car c’est au titre de sa défense du clergé qu’il fut poursuivi par la Convention. Alors vient le récit de la mort du Roi (avec la mention du rôle de son confesseur), et l’évocation de son testament. Puis, en déplorant le triste état de la France, car l’oeuvre de la république n’est que désolation et ruine, le prédicateur lance un appel aux souverains, non pour une vengeance – selon les vœux du Roi – , mais pour libérer la famille royale. Enfin, le Pape Pie VI est félicité pour avoir défendu l’intégrité de la discipline de l’Église. La conclusion montre, du haut du ciel, Le Roi Louis XVI intercèdant pour le rétablissement de la religion en France.