Versailles secret et insolite

Tiens, voilà une source !  

Le premier talon rouge

Monsieur, frère du Roi, avait un goût très vif pour la toilette, c’est lui qui, à la Cour comme à la ville, donnait le ton, et quand Philippe d’Orléans adoptait quelque nouveau détail de costume, on était certain que le jour même il avait des imitateurs par dizaines.

Mais Monsieur avait un autre goût qui découlait, il est vrai, du premier : il aimait follement les déguisements. Voilà pourquoi en ce soir de Carnaval de l’année 1662, nous voyons ce jeune prince, qui avait vingt-deux ans, avec son inséparable ami le chevalier de Lorraine et quelques gentilshommes de sa suite costumés et masqués, venir en carrosse de Versailles à Paris.

Les déguisements qu’ils avaient adoptés étaient tous identiques, et avaient été composés par le costumier italien Cipriano passé maître en la matière. Ils étaient, depuis le chapeau jusqu’aux souliers, conçus en tons très clairs. La seule chose qui distinguât Monsieur de ses compagnons était la hauteur des talons de ses chaussures, car étant de fort petite paille quoique très bien fait de sa personne, il recourait à cet artifice pour se rehausser.

La bande joyeuse, une fois arrivée à Paris, se mit à parcourir les, bals publics ; dans quelques-uns ils furent reconnus et les danseurs s’écartèrent d’eux respectueusement, ce qui privait le prince de son plaisir. Il résolut donc d’aller en d’autres lieux où nul ne soupçonnerait sa présence et où il lui serait loisible d’intriguer plus à son aise.

Avec ses compagnons il s’en fut donc au marché des Innocents où se trouvaient alors les abattoirs. Ils allaient de taverne en taverne et parfois il leur arrivait dans leur promenade de traverser ces endroits où l’on tuait les boeufs, les veaux, les moutons et les porcs. Ils firent tant de tours et de détour sur ces dalles maculées de sang que leurs souliers en furent tachés et que les hauts talons de Monsieur en étaient tout rouges.

Il faisait grand jour quand ils reparurent à Versailles. Monsieur, rentré dans ses appartements, trouva un huissier de la Chambre qui l’attendait pour lui transmettre un ordre du Roi de venir prendre place au Conseil. Le prince fit une toilette sommaire, car l’heure fixée par son royal frère était déjà sonnée et Louis XIV n’aimait guère attendre. Conservant sa culotte de satin gris perle ainsi que ses bas et ses souliers, il passa une veste plus foncée sur laquelle tranchait le cordon bleu et un habit bleu ardoise. Cet ensemble ne devait pas être inharmonieux, car lorsqu’il sortit du Conseil, il vit tous les yeux se tourner vers lui avec une attention particulière.

La journée se passa comme toutes les autres. Le soir, Monsieur se rendit au jeu du Roi. Cette fois il avait eu le temps de se changer complètement, il portait une culotte et un habit bleus et avait chaussé des souliers noirs.

Quel ne fut pas son étonnement, en rentrant dans les appartements du Roi, de rencontrer un des gentilshommes de service dont les chaussures se rehaussaient de talons rouges ! Il en vit un second, puis un troisième et même M. de Montboissier dont la tenue, toujours si pleine de réserve, était renommée, venir le saluer dans cet accoutrement.

- Me direz-vous, Monsieur, lui demanda le prince, ce que signifient tous ces talons rouges que je vois ce soir ?

M. de Montboissier parut étonné :

- Mais, dit-il, Votre Altesse, ce matin, en sortant du Conseil n’avait-elle pas des talon rouges à ses souliers ?

Et voici comment, sans le savoir, Monsieur, frère du Roi, lança une mode qui fit fureur à la Cour pendant bien des années pour voir été, une nuit de Carnaval, s’encanailler au marché des Innocents.

par Ch. Quinel et A. de Montgon

Portant talon rouge à Versailles!
Sans parler la langue des Dieux
Ni faire de ces vers pompeux
Qu'on n'écoute point sans qu'on bâille
Ne puis-je au moins , vaille que vaille
Célébrer mon Roi glorieux?

(Abbé de l’Attaignant, Poésies, Éditeur Duchesne, 1756)

Talon rouge .   Synonyme: noble  

 (xix e siècle) Se disait de quelqu’un qui a des prétentions à l’élégance, aux belles manières.

         * Il est très talon rouge.

         * Des manières talon rouge.

         * Il s’inclina, très talon rouge, et cérémonieusement me baisa la main. — (Hélène Jourdan-Morhange, Ravel et nous : l'homme, l'ami, le musicien, Éditions du Milieu de monde, 1945)

         * Celui-ci, galant homme, très talon-rouge, conférencier à ses moments perdus, ne savait plus à quel saint se vouer. — (Louise Weiss, Mémoires d'une Européenne, Éditions Payot, 1976)

Qui sont ces Quinel et Montgon, et d’où tirent-ils cette anecdote ?

Mystère et boule de gomme !
Charles Quinel et Adhémar de Montgon ne sont pas du tout des historiens . Ce sont des auteurs qui rapportent des contes , récits, légendes, de tel ou tel endroit ou pays ..............
Où sont-ils allés pêcher l'histoire du talon rouge que nous rapporte Monsieur de Coco  ?  Histoire en ligne ne le dit pas !

Si l'anecdote est véridique c'est vraiment peu ragoûtant et surtout je trouve cela d'un mauvais goût surtout pour ceux travaillant dans ces abattoirs.

Intéressante anecdote. L'un des tous premiers pamphlets hostiles à la reine s'appelle justement "Portefeuille d'un talon rouge, contenant des anecdotes galantes et secrètes de la cour de France". Coïncidence étrange, un autre frère de roi, le comte de provence, a été soupçonné d'en être le rédacteur, au moins pour partie...

Son sous-titre: La Journée amoureuse; ou, Les derniers plaisirs de M....-Ant.......
comédie en trois actes, en prose

le voici :

Ce sont deux pamphlets différents. Je n'ai pas lu "La Journée amoureuse..." mais je crois comprendre qu'il s'agit d'un pamphlet érotico-pornographique paru en 1793, avec 4 gravures obscènes.

"Le portefeuille d'un talon rouge", saisi en 1783 et dont il ne reste plus que très peu d'exemplaires en circulation, n'est pas un pamphlet érotique. C'est un texte bien rédigé, dépourvu de vulgarités mais perfide, bourré d'anecdotes "plus vraies que nature" sur un grand nombre de personnages de la Cour, dont la reine au premier chef. Ce pamphlet commence par expliquer qu'il faut distinguer les "on-dit" des "ont vu" et réfute certains ragots, comme celui selon lequel la reine aurait eu une liaison sentimentale avec "la Comtesse Jules" (l'auteur laisse cependant planer le doute). Il contient beaucoup d'anecdotes sur la reine, comme celle-ci que je trouve intéressante et dont Mme Campan parlera d'ailleurs plus tard dans ses mémoires me semble-t-il : "La reine distingua parmi les femmes les Siècles, les Collets montés & les Paquets. On appelait Siècles celles qui étaient sur l'âge ; les collets montés étaient les prudes qui font métier de dévotion et de médisance. Les paquets étaient celles qui colportaient les nouvelles & les empoisonnaient." Manifestement, la source de ce tout premier pamphlet semble avoir été quelqu'un d'assez proche de la famille royale.

Oui, la calomnie a d'abord pris source dans le très proche entourage familial de la famille royale . Nous pensons d'emblée à Monsieur et Madame ou au duc de Chartres bien sûr, mais Mesdames tantes, Adélaïde en particulier ( l'Autrichienne ) avaient donné le coup d'envoi .

C'est drôle, paquets me fait penser à cageots ( ), passé de mode aujourd'hui ... mais la signification diffère .

Citation :

Je pense que Louis XIV adopta également cette mode. Voyez le tableau de Rigaud!

Mais également Louis XV au vu d'un tableau de Rigaud également!!!!!

Comme je n'avais pas lu de compte rendu après lecture de cet ouvrage, sorti en librairies le 18 Avril 2012 et que je suis curieuse, je l'ai acheté et déjà en partie lu !!!
les sujets sont traités en une voir deux pages - très divers - le premier concerne les anglaises, le dernier "les maitresses hommes ou femmes de notre Reine avec liste "
mais vous trouvez de tout, recettes de cuisine, textes poétiques, chansons , détails d'étiquette etc.....
c'est un petit livre très amusant, pas très original, pour LES MAITRES ES VERSAILLES que nous sommes, mais on peut trouver une ou deux histoires pas connues !!!!!!et son prix est modeste !!!!
un petit bouquin à lire lors d'un voyage !!!

MARIE ANTOINETTE

Connaissez vous le livre Louis XVI et Marie-Antoinette: les coulisses de Versailles de Jules Maze?

Cela me dit quelques chose...

Je connais Louis XVI et Marie-Antoinette de Jules Mazé mais pas avec ce sous-titre.

Bien à vous.

Il faut avoir les ouvrages du grand JULES !!!!! sous la terreur, louis XVI et MARIE ANTOINETTE les journées révolutionnaires, vieux logis
sur AMAZON la collection est complète à des prix modestes !!!!!!!
lorsque je reçois un livre broché plus ou moins en excellent état, sans remords je le consolide et le couvre avec un film plastique pour l'éternité !!!! c'est propre pour se ranger dans une bibliothèque.

MARIE ANTOINETTE