Les secrets de la garde-robe de “Marie-Antoinette”
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de La Reinta
Nombre de messages : 1435 Date d'inscription : 15/03/2016
Sujet: Les secrets de la garde-robe de “Marie-Antoinette” Mar 4 Mai - 15:14
Attention émotion attention nostalgie
En 2006, Sofia Coppola dépoussière la légende de Marie-Antoinette dans un biopic punk et décalé. À l’occasion de l’anniversaire de Kirsten Dunst, Vogue se plonge dans la garde-robe de la plus controversée des reines.
Lorsque Sofia Coppola s’empare du mythe Marie-Antoinette, ce n’est pas pour en faire un biopic historique comme on en a vu des centaines. La réalisatrice capte l’essence même de qui était la souveraine à ses débuts : une adolescente de 15 ans, envoyée dans la cage aux fauves pour devenir la femme la plus épiée d’Europe. Sofia Coppola impose le glamour hollywoodien aux couloirs de Versailles et transforme Marie-Antoinette en diva. Le spectacle est jouissif, acidulé et rock’n’roll, même s’il n’est pas 100% authentique. Au milieu des drames de sa vie, de la conquête de son époux et de ses rencontres frivoles, la toute jeune monarque est une délicieuse pâtisserie au milieu de l’impitoyable cour française. En robe bouffante, bijoux scintillants et coiffures façon pièce-montée, Marie-Antoinette a ré-inventé la mode européenne dans une société déconnectée et en constante recherche d’insouciance.
Une garde-robe authentique
À la tête du département des costumes, Sofia Coppola place une pointure qu’on ne présente plus : Milena Canonero. Quatre fois lauréate aux Oscars, la costumière a travaillé sur de nombreux films, d’Orange mécanique à Barry Lyndon en passant par Le Parrain 3. Pour son travail sur Marie-Antoinette, Milena Canonero sera également récompensée de la statuette dorée. La costumière travaille d’arrache-pied à créer un vestiaire fun et crédible pour un biopic historique pas comme les autres. Les prémices de son étude la font se tourner vers les travaux de Rose Bertin, habilleuse et amie proche de la reine de France. Renommée "ministre des modes", Rose Bertin devient indispensable à Marie-Antoinette qui compte sur elle pour l’aider à agrandir sa garde-robe. La marchande de mode lui fait dépenser des fortunes en tissu et parures toutes plus splendides. Le style à la reine voit le jour et se répand à travers le continent. Pour reconstruire ce vestiaire somptueux, Milena Canonero commence par redessiner de véritables robes conservées dans des musées ou vues sur tableaux de la jeune Autrichienne. C’est le cas notamment de sa tenue bleue claire qui s’inspire directement d’un portrait de Jean-Baptiste Charpentier le Vieux. La costumière mélange les sources, copiant même une robe couleur pêche et ornée d’une myriade de froufrous que Marie-Antoinette arborait dans un portrait fait d’elle avant son mariage avec le futur Louis XVI. Interrogée sur son processus créatif, Milena Canonero se confie : « Je voulais créer une garde-robe réaliste mais plus stylisée que la réalité. J’ai donc pris exemple sur la mode de l’époque tout en l’allégeant. »
La reine bonbon
Un seul mot d’ordre suivra la garde-robe de Kirsten Dunst tout au long du tournage du film : le pastel. Malgré l’ambiance presque punk du film, la jeune Autrichienne reste un oisillon tombé du nid. Dans la fameuse séquence du shopping, les chaussures bijoux et robes à froufrous se succèdent, entrecoupées d’images de pâtisseries à la française. Comme un petit bonbon, la Marie-Antoinette de Sofia Coppola s’habille de tissus layettes, matières irisées et légères en taffetas et soie qui soulignent son visage enfantin et sa carrure si menue. Elle est même l’opposée de la comtesse du Barry, interprétée par Asia Argento, représentée comme une courtisane vulgaire et mise de côté par la cour. Cette esthétique renforce l’idée derrière l’œuvre de la réalisatrice : Marie-Antoinette n’était qu’une enfant en quête de divertissements. Délaissée par le roi, elle devient un objet de désir pour le séduisant conte Fersen (Jamie Dornan). D’ailleurs, pour transmettre son concept sucré et mutin à Milena Canonero, Sofia Coppola lui a fait envoyer une boîte de macarons Ladurée aux nuances poudrées. Le message est passé ! La designer donne à Marie-Antoinette le vestiaire royal le plus riche de l’histoire du cinéma, alternant entre jupons retroussés, robes à l’anglaise et chemises de nuit en gaze de soie légère.
Robes d’apparat
Dans l’histoire, l’on a souvent reproché à Marie-Antoinette d’avoir été une reine frivole et dépensière qui ne se souciait pas de la misère de son peuple. Mais entre les soirées d’ivresse et les escapades au Petit Trianon, la reine remplissait aussi son devoir avec une élégance rarement vue à Versailles. C’est notamment le cas lors de son mariage et du couronnement de son époux. Kirsten Dunst porte des robes richement décorées et dont les hanches sont exagérément élargies par une crinoline spécifique. Ce style de robes à paniers larges très populaire à la cour d’Espagne était porté à Versailles lors d’évènements particulièrement solennels et appelé « tenue de cour ». La robe de mariée créée pour le film n’est d’ailleurs pas sans rappeler un tableau de Marie-Antoinette par Elisabeth Vigée le Brun où l’on remarque clairement l’amplitude de sa robe ainsi que les volants et noeuds similaires sur le buste.
Un vestiaire moderne
Pour parfaire le look de Marie-Antoinette, Milena Canonero ne s’arrête pas aux somptueuses robes à volants. Elle fait appel à Manolo Blahnik pour créer les chaussures. Des mules, des petits talons, de la soie, du velours et des boucles ornés de cristaux… le placard à souliers de la reine est une caverne d’Ali Baba. Le créateur espagnol s’est inspiré de peintures de l’époque mais aussi de modèles que l’on trouve encore dans des musées parisiens et londoniens. Pour les précieuses parures, la costumière se tourne vers la maison Fred Leighton. Colliers, bijoux d’oreilles, accessoires pour cheveux scintillants… Près de 4 millions de bijoux et gemmes sont prêtés par la marque à la production. Les couleurs sont aussi douces que pour les robes : du diamant blanc, du turquoise acidulé et du rose bonbon appétissant ornent la gorge de Kirsten Dunst qui se transformerait presque en Fée Dragée. Autre pièce importante de la garde-robe de Marie-Antoinette : le corset. Élément indissociable de la mode de l’époque, le corset est tout autant mis en valeur que les robes qui le recouvrent. De la dentelle, des froufrous et toujours ces nuances poudrées qui adoucissent les formes menues de la jeune monarque.
Quinze ans après la sortie du film et trois siècles après la disparition de la reine, le pastel est toujours en tête sur les podium. Du rose pâle, du jaune poussin, du bleu layette… Les nuances acidulées envahissent la Fashion Week, les réseaux sociaux et la rue. Tout comme ces jeunes aristocrates qui troquaient l’ennui contre les jeux d’argent et les nuits blanches alcoolisées, le pastel apparaît dans le paysage mode comme une bouffée d’air frais au milieu de la morosité de la pandémie. Et même si les robes rococo et les coiffures XXL du XVIIIème siècle ne font plus partie de notre quotidien, Marie-Antoinette reste une inspiration intemporelle. Le look sorbet, tendance phare du printemps-été 2021, le corset, adopté par les grandes marques et les it girls comme un élément d’émancipation, les souliers de princesse comme on les a vu chez Amina Muaddi et Manolo Blahnik… la légendaire reine de France est bien plus moderne qu’on ne le croit.