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 Pourquoi l’esthétique gothique se répand-elle dans nos séries ?

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Doris

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MessageSujet: Pourquoi l’esthétique gothique se répand-elle dans nos séries ?   Pourquoi l’esthétique gothique se répand-elle dans nos séries ? Icon_minitimeDim 29 Jan - 20:35

Je sais que le sujet n'est pas tout à fait en rapport avec Marie-Antoinette mais je suis une grande fan de séries et avec la sortie du dernier film...
enfin bref j'ai envie de vous faire partager cet article d'Héloïse Decarre dans L'éclaireur fnac.

  • Pourquoi l’esthétique gothique se répand-elle dans nos séries ?

    Pourquoi l’esthétique gothique se répand-elle dans nos séries ? Gothiq10

    Qui d’autre que Tim Burton était en mesure de redonner sa popularité au mouvement gothique ? Si sa Mercredi est couronnée de succès, elle est cependant loin d’être la première série à s’imbiber de l’esthétique gothique. Penny Dreadful, Les Nouvelles Aventures de Sabrina, Le Cabinet de curiosités de Guillermo del Toro, et maintenant Mayfair Witches, adaptée des romans de la reine de la littérature gothique, Anne Rice, en sont des exemples récents. Une mode à questionner, alors que cette contre-culture se distingue par son aspect underground et anticonformiste.

    Monstres et sorcières, ésotérisme et paganisme, goût du macabre et de l’épouvante… Le mouvement gothique porte un intérêt à ce qui rebute la plupart des gens. C’est bien pour ça qu’il est, bien souvent, vu d’un mauvais œil. Comme tout ce qui a été défini comme gothique, au fil du temps. « À l’origine, ce mot provient des termes “goth” et “wisigoth”, autrement dit “les barbares” », explique Isabelle-Rachel Casta, professeure émérite de l’université d’Artois et écrivaine, spécialiste des cultures fantastiques et sérielles.

    Au fil des époques, un mouvement à contre-courant de la pensée dominante

    Au XVIIe siècle, les Italiens de la Renaissance nomment ainsi le nouveau style architectural français. Un style gothique, car l’œuvre est celle, pour eux, de barbares et de sauvages, négligeant les canons esthétiques gréco-romains qui dominaient jusqu’alors. Au XVIIIe siècle de nouveau, les architectes anglais du Gothic Revival tentent de promouvoir des architectures opposées aux styles classiques, avec des formes tourmentées et torturées. Peu après, c’est au tour de la littérature gothique de faire son apparition, notamment avec Le Château d’Otrante, écrit en 1764 par Horace Walpole.

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    Selon Isabelle-Rachel Casta, « certains intellectuels anglais s’érigent contre les forces de la raison, ce que l’on appelle en France les Lumières. Ils s’opposent profondément à cette culture qui prône la lumière, l’équilibre, et qu’ils trouvent, d’une certaine façon, très ennuyeuse. » À contre-courant de cette philosophie dominante sont mis en valeur le spiritisme, l’occultisme et la théosophie.

    Au siècle suivant, en 1818, Mary Shelley invente le monstre de Frankenstein, et Bram Stoker, lui, imagine en 1897 un certain Dracula. Des créatures à l’opposé, encore une fois, de la pensée majoritaire de leur époque. « Nous sommes en pleine ère victorienne, qui voit la modernité, l’industrialisation et l’urbanisation éclater, mais Dracula incarne le retour des morts, la prédation, le goût du sang et le surgissement du tombeau… Tout ce qui constituait d’anciennes peurs », précise Isabelle-Rachel Casta.

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    Au XXe siècle, c’est le cinéma qui incarne la philosophie et l’esthétique gothique. « La Première Guerre mondiale a ruiné toute la confiance que l’Europe blanche et chrétienne avait en elle, raconte Isabelle-Rachel Casta. On avait tué des milliers de gens en un instant. C’est pour ça que, dans les années 1920, la culture s’est réfugiée dans des valeurs fantasmagoriques – des valeurs gothiques – pour essayer d’exorciser cette culture de la mort qui avait plongé l’Europe dans quatre ans d’horreur. »

    Des films expressionnistes comme Le Cabinet du docteur Caligari de Robert Wiene (1920), Nosferatu de Friedrich Wilhelm Murnau (1922) ou La Chute de la maison Usher de Jean Epstein (1928) se singularisent par une esthétique du brouillard et du surnaturel, et par une déstabilisation des décors. Tout est filmé de travers : « On éprouve quasiment dans notre chair ce déséquilibre de l’époque, qui est aussi physique que mental », s’émerveille la professeure.

    Un renouveau esthétique et fantastique

    Réaction esthétique, mentale et culturelle, le mouvement gothique est en fait une contre-pensée mettant en scène « des imageries de morts, de tortures, d’orages déchaînés, de brouillards épais et surtout un macabre que l’on retrouve chez nos gothiques d’aujourd’hui, une forme de poésie des tombeaux », glisse Isabelle-Rachel Casta. Le gothique est avant tout « rupturel ». « Ce qu’il exprime, c’est un refus des normes, et surtout des normes établies, qui peuvent devenir la marge de demain… Car les sociétés marginalisent souvent leurs anciennes normes », affirme la spécialiste.

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    Et un mouvement qui se nourrit de la rupture disparaît forcément pour revenir continuellement, lors de cycles réguliers. « Cette notion fonctionne toujours par perte et résurgence, confirme la professeure. On l’oublie pendant des dizaines d’années, voire des siècles, et puis elle revient, avant de se rendormir. C’est un mouvement qui est toujours là, à bas bruit, en périphérie de toutes les tendances depuis le XVIIIe siècle. »

    Un mouvement qui est d’ailleurs déjà apparu dans des séries. En 1964, aux États-Unis, La Famille Addams marque déjà le gothique dans ce format. En France, les années 1960 voient aussi apparaître, coup sur coup, trois séries que l’on peut rattacher à l’esthétique : Belphégor ou le Fantôme du Louvre en 1965, Les compagnons de Jéhu en 1966 et Les Habits noirs en 1967.



    Si, aujourd’hui, le gothique est de retour, c’est parce que nous faisons face à une esthétique dominante en plein déclin, celle du revival des années 1980, porté dernièrement par la série Stranger Things. Expression d’un renouveau visuel, mais aussi fantastique, le gothique succède également à des figures qui se sont démultipliées à l’excès ces dernières années : celle du zombie et celle du vampire. « Comme tout cela est un peu épuisé, on va de nouveau chercher aux marges de ce qui était dominant, dans une nouvelle niche », résume Isabelle-Rachel Casta.

    Des personnages à la marge et aux antipodes des canons WASP des séries pour adolescents

    Une culture de niche à l’opposé de la pensée dominante de son époque, comme elle l’a toujours été. « C’est une forme de rupture avec le matérialisme déchaîné d’aujourd’hui, puisque cela a toujours été une esthétique et une pensée qui faisait primer l’ésotérisme sur le matérialisme, et l’occultisme sur la raison », expose Isabelle-Rachel Casta. Un attrait pour la sorcellerie et le surnaturel très présent dans des séries récentes, comme l’intrigante Penny Dreadful, les passionnantes Nouvelles Aventures de Sabrina ou le grandiose Cabinet de Curiosités de Guillermo del Toro.



    Toujours hétérodoxe, le mouvement gothique, une fois introduit dans les séries, va naturellement se diriger aux antipodes des programmes dont on nous abreuve actuellement. À l’inverse des personnages des teen drama, ou drames pour adolescents, plastiquement superbes et
    parfois indifférenciables de mannequins, les protagonistes de Wednesday sont impopulaires (Wednesday elle-même), laids (Eugène, son ami, et Gomez, son père) et bizarres (à peu près la totalité des élèves de Nevermore).

    « On se trouve devant quelqu’un qui a des habits noirs, des ongles noirs, des cheveux noirs, et un personnage qui a en fait 85 ans !, s’amuse Isabelle-Rachel Casta. [En effet, La Famille Addams est apparue pour la première fois en 1938, dans un cartoon du New Yorker, NDLR] Ce qui me plait dans le personnage de Wednesday, c’est que ce n’est pas une WASP [White Anglo-Saxon Protestant, NDLR] : c’est une latina ! »

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    Si le personnage est si gothique, c’est avant tout parce qu’il est porteur d’une esthétique en rupture avec les canons adolescents WASP. « Il ne faut pas oublier que Tim Burton travaille dans un contexte américain, ajoute l’experte. Il est porteur d’une espèce de revendication des minorités. Et ce sont elles qui prennent la parole et le pouvoir, dans la Famille Addams. Des minorités qui ont besoin de rejeter et surtout de ridiculiser les cheerleaders et leurs équivalents mâles, les quarterbacks. »

    Le gothique à l’écran, des codes constants et reconnaissables entre mille

    Cette recherche de la marge est appuyée par certains codes que l’on trouvait déjà sur grand écran, voire dans la littérature gothique. Le premier élément récurrent, c’est celui des vêtements. « Le code vestimentaire, c’est le noir : la couleur du deuil, observe Isabelle-Rachel Casta. C’est comme si l’on était soi-même un rappel de la mort, et donc du temps qui passe, au milieu de vivants qui n’ont qu’une envie : consommer frénétiquement, et penser à autre chose. » Autre particularité : le traitement de la lumière, en général plutôt faible.

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    « Plus l’image est éclairée en son centre, et plus les contours sont inquiétants, puisque la menace arrive toujours de ces derniers », souligne Isabelle-Rachel Casta. C’est le cas, par exemple, lorsque Wednesday court dans la forêt pour sauver son ami Eugène. Selon la professeure, « elle est éclairée beaucoup plus que toute l’atmosphère nocturne qui l’entoure, parce qu’il faut que notre regard soit focalisé sur elle, et que l’on se mette à craindre le surgissement du fantastique autant qu’elle ».

    Les films et séries dits gothiques ont un autre point commun : l’importance que leurs réalisateurs portent aux génériques. Pour Isabelle-Rachel Casta, « le gothique, c’est aussi le sens du récit dans le récit, de l’image dans l’image : le détail reflète l’ensemble ». L’universitaire émérite prend l’exemple de l’introduction du Cabinet de curiosités de Guillermo del Toro : « Il y a dans le générique de cette série un travail sur la forme, sur l’intérieur et l’extérieur. Et, au fond, le Cabinet est un meuble dont les tiroirs s’ouvrent pour laisser pénétrer le spectateur dans l’intimité de chaque histoire. »



    Autre exemple, le générique de Buffy contre les vampires, la série qui a réveillé le gothique à la fin des années 1990, et qui en réunit tous les symboles. « Au tout début, pendant quelques secondes, on entend quelques notes d’orgue, l’instrument de musique gothique par excellence, se rappelle Isabelle-Rachel Casta. On voit ensuite la Lune, en écho à la déesse païenne Hécate, devant laquelle passent des nuages enflammés : là, on est devant un tableau de Caspar David Friedrich [une référence du mouvement gothique, ndlr]. Puis le cimetière, le lieu même du vampirisme et de la chasse, qui fait partie de l’univers gothique depuis Dracula. Et pour finir, le hard rock, tout à fait lié au gothique. »



    En plus de ces éléments de mise en scène, on peut aussi noter une récurrence scénaristique dans les œuvres audiovisuelles gothiques : celle du monstre enfoui en chacun de nous. « On nous dit que le monstre n’est jamais ce que l’on croit et qu’il se cache derrière le visage le plus respectable, celui de l’Homme de tous les jours », soutient Isabelle-Rachel Casta.

    Le plus monstrueux est bien souvent celui qui n’appartient pas au monde des monstres : c’est le cas dans la plupart des histoires de l’anthologie de Guillermo del Toro, ainsi que dans Les Nouvelles Aventures de Sabrina, où la plus discrète des professeures devient une terrifiante sorcière. Même chose dans Wednesday, où le monstre se révèle être un personnage humain.

    Rendre mainstream un mouvement underground : mission possible, mais à court terme

    Les monstres épouvantables font donc entièrement partie de l’esthétique gothique, sans pour autant être nécessairement très effrayants. C’est ainsi que Wednesday n’est ni vraiment gore ni vraiment horrifique, ce qui a pu décevoir certains fans de Tim Burton. Mais ni le format sériel ni notre époque ne sont à blâmer.

    « Nous sommes devant un spectacle qui s’adresse à des publics ciblés et celui de Wednesday est adolescent. Ce n’est pas le public cible du Cabinet de curiosités, constitué de personnes de plus de 16 ans, par exemple. Chaque public a son code de bienséance et toutes les productions ne peuvent pas tout dire, tout le temps », insiste Isabelle-Rachel Casta.

    « On ne peut pas en même temps faire du Guillermo del Toro, qui montre la mort, le crime, la défiguration, l’horreur claustrophobique, la vieille hantise d’être enterré vivant, et une série pour adolescents », conclut-elle. Chaque série doit donc respecter son cœur de cible, et se placer plus ou moins haut dans l’échelle du gothique.

    Ce qui n’est pas forcément du goût des adeptes de longue date du mouvement, pas franchement ravis que leur culture soit utilisée comme une mode malléable. « Ils étaient propriétaires d’une certaine forme de révolte, de reconnaissance et, d’un seul coup ils sont confrontés à une “mainstreamisation” : ce qui était unique et un signe de reconnaissance entre un petit nombre devient ce qu’il y a dans la rue. Ils se sentent dépossédés, mais cela fait partie du jeu ! », note Isabelle-Rachel Casta.

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    Tout en ajoutant : « Les vogues sont comme les vagues : elles culminent, s’arrogent tout, puis elles redescendent et elles disparaissent à l’horizon. Il en sera de même pour la vogue gothique, qui est pour l’instant porteuse d’amusement, de révolte, d’espoir, de rébellion, du triomphe des minorités et du retour de la marge. Mais à partir du moment où l’on nous inondera de 28 séries du genre, nous serons lassés et ennuyés, et nous irons vers autre chose… » Avant d’y revenir dans quelques décennies, car la mode, et surtout l’esthétique gothique, est un éternel recommencement.
    https://leclaireur.fnac.com/article/227825-pourquoi-lesthetique-gothique-se-repand-elle-dans-nos-series/

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