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 La conservation des vêtements et accessoires à travers le temps

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Lucrezia P

Lucrezia P


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Date d'inscription : 07/04/2015

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MessageSujet: La conservation des vêtements et accessoires à travers le temps   La conservation des vêtements et accessoires à travers le temps Icon_minitimeJeu 12 Oct - 6:58

Pénétrons à pas de loups dans les secrets de restauration des pièces mode du Musée des arts décoratifs  
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Rencontre avec Emmanuelle Garcin, restauratrice textile au Musée des arts décoratifs qui détaille les enjeux insoupçonnés autour de la conservation des vêtements et accessoires à travers le temps.

À l'occasion du mécénat de la société La Vallée Village, nous avons rencontré Emmanuelle Garcin, restauratrice textile, en charge de la conservation-restauration des collections textiles et mode, service de la conservation préventive et restauration du Musée des arts décoratifs. Elle détaille pour nous les enjeux autour de la fragilité de ces pièces témoins d'une époque, et plus particulièrement des cinq pièces restaurées grâce à ce mécénat, issues des collections du Musée (1) dont une robe de Paul Poiret et une autre ayant appartenu à une lectrice de Marie-Antoinette.

La conservation des vêtements et accessoires à travers le temps 15066910

Lefigaro.fr/madame.– En quoi consiste votre travail en quelques mots ?
Emmanuelle Garcin.– Le restaurateur est chargé de la conservation du patrimoine. Il doit rendre possible l’exposition d’une œuvre aujourd’hui, mais également dans un siècle. Pour cela, il respecte une déontologie stricte et son action se distingue de celle de l’artisan qui remet en fonction, répare, refait. Le restaurateur conserve l’existant, intervient de manière réversible, en respectant la patine d’une œuvre qui est sortie de sa vie matérielle (un costume ne sera pas reporté, on ne pourra se rassoir sur un siège de musée).

Que peut nous dire un vêtement ancien quand on cherche à le faire parler ?
Au-delà de l’histoire formelle de la mode et des silhouettes, le vêtement livre énormément d’informations historiques. La qualité des matériaux, leur durabilité, celle des assemblages, les marques d’usage, les salissures, les transformations sur un habit racontent beaucoup de chose sur la société qui a conçu, produit et porté le costume. La restauration est un moment privilégié d’observation de cette pièce, des détails du décor, des doublures, de l’intérieur des poches… et le restaurateur est un philologue de la matière. Il procède à une exégèse des tissus, des coupes, des finitions de couture. Il se représente la vie du costume : «que s’est-il passé?». C’est une approche technique mais également sensible et totalement privilégiée de ce patrimoine.

Pour conserver une œuvre, il faut l’extraire du monde, la mettre à l’abri des bruits du siècle

Comment conserve-t-on un vêtement au fil des années et même des siècles ?
Pour conserver une œuvre il faut l’extraire du monde, la ranger soigneusement au fond d’une réserve, à l’abri des bruits du siècle, de la poussière, de la lumière et des manipulations. Puis vous perdez la clé de la réserve et dans cinq siècles vous retrouverez le vêtement dans un état inchangé… totalement en contradiction avec notre époque et l'autre mission d’un musée : exposer et transmettre le patrimoine. Il y a donc des compromis subtils à trouver : exposition limitée, lumière très douce, dépoussiérage régulier, mannequinage adapté aux mesures du costume, etc. Le patrimoine de la mode est extrêmement contraignant à exposer et nécessite de nombreuses compétences autour d’une exposition : régie, éclairagiste, historien de l’art, conservateur, conservateur-restaurateur, mannequineur-socleur, scénographe compréhensif, public compréhensif…

Quels sont les tissus qui survivent le mieux au temps ?
D'après mon expérience, les tissus fabriqués avant l’ère industrielle, soit avant 1800, ont une durabilité bien meilleure que ceux produits à partir de l’industrialisation des modes de production. Paradoxalement, sauf accident particulier de l’histoire (guerre de religions, Révolution française ou autre), les vêtements antérieurs au XIXe siècle sont donc de meilleure qualité et se conservent mieux d’un point de vue des matériaux. Ils ont nécessité du temps et un soin à la fabrication (qualité des fibres naturelles, tissage, teinture et apprêt) qui se répercutent visiblement dans le temps. L’économie de ces matériaux à l’époque moderne est d’ailleurs bien différente de celle de nos jours ; pas d’obsolescence programmée au XVIIe ou au XVIIIe : un vêtement se conserve, se transmet, se revend, se donne mais on ne le jette jamais. Néanmoins, le patrimoine textile reste l’un des plus fragiles et des plus difficiles à conserver, les costumes antérieurs au XVIIIe sont, en quantité, beaucoup plus rares dans nos collections françaises dont l’histoire a été assez agitée.

Pensez-vous qu’avec la fast fashion, les générations futures auront moins de témoins de notre époque en raison de la qualité des tissus ?
Je ne suis pas sûre car beaucoup de fibres et de matières textiles produites aujourd’hui ne sont pas, ou partiellement, biodégradables. Paradoxalement ce sont des matériaux qui souvent vieillissent malgré tout mal, les plastiques et fibres synthétiques ou artificielles perdent leurs propriétés, s’altèrent en devenant, par exemple, rigides ou collants. Nous avons progressivement à faire à des collections contemporaines difficiles à conserver. Nous aurons probablement des pièces à transmettre mais difficiles à exposer en raison de leur fragilité et de leur état altéré. Cela raconte également quelque chose à propos de notre époque...

Quels conseils donneriez-vous à des particuliers qui souhaitent conserver une belle pièce et la transmettre à leur descendance ?
La ranger à l’abri de la poussière, des mites et de la lumière, à plat, enveloppée dans du papier de soie. Eviter le fer à repasser, les nettoyages efficaces donc agressifs. Enfin, mettre de l’affectif, conserver la mémoire de ce costume : qui l’a porté, dans quelles circonstances, quels sont les souvenirs associés à ce vêtement pour transmettre sa valeur réelle… Une pincée de fétichisme donc ! Il faut lire à ce propos Le Manteau de Proust de Lorenza Foschini. Plus sérieusement, ce sont des informations dont nous manquons cruellement dans nos collections de mode. Il est rare que nous connaissions le propriétaire d’un vêtement. J’encourage donc le travail de la mémoire.

(1) Les pièces restaurées sont à découvrir au sein du Musée des arts décoratifs. Plus d'infos sur lesartdecoratifs.fr.

Découvrez en vidéo le travail de restauration sur les cinq pièces choisies


http://madame.lefigaro.fr/style/dans-les-secrets-des-conservations-des-pieces-mode-du-musee-des-arts-decoratifs-091017-134666

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