Partants pour une visite sensuelle dans la salle de bain et la chambre secrète de Marie-Antoinette ?
Entre la salle de bain de Marie-Antoinette, située au rez-de-chaussée du château, et sa chambre d'apparat, installée à l'étage, des volées de marches, des enfilades de couloirs se déroulent, semi-obscures, à l'abri des regards de la cour. À mesure que l'on avance dans ce dédale faiblement éclairé, que l'on force les portes de l'intimité de la reine, on se prend à ressentir l'émotion et les pensées de la souveraine lorsque chaque matin, elle s'apprête à paraître en public.
Après la "toilette de propreté", vient la "toilette d'apparat" où chacun vient faire sa cour à la reineCar sous Louis XVI, l'épouse du roi, gagnée par la mode hygiéniste importée d'Angleterre, prend un bain quotidien avant de paraître aux yeux, et aux narines, de ses sujets. Exemplaire, cette habitude n'est pas sans forcer l'admiration: à l'époque, on considère en effet que la peau laisse passer les microbes véhiculés par l'air et par l'eau.
Entre huit et neuf heures du matin, donc, Marie-Antoinette procède à une "toilette de propreté". Dans un bain parfumé, la reine plonge habillée d'une chemise de flanelle boutonnée jusqu'au cou dissimulant son corps, "qu'elle a beau", nous dit Elisabeth de Feydeau, auteur d'une biographie du parfumeur de la reine, Jean-Louis Fargeon.
Pour sa sortie du bain, ses femmes tendent un drap de pudeur derrière lequel la souveraine, chaussée de mules de bassin, une sorte de coton, enfile une tunique et un "manteau de lit en taffetas blanc brodé de dentelle". Pour dissiper les effets du grand "bouillon interne" causé par le bain, une heure de repos est en effet préconisée, que Marie-Antoinette passe allongée dans un lit installé tout prêt de sa baignoire. "Ce temps est dévolu à la discussion, à la tapisserie, mais très peu à la lecture. La reine n'a guère le goût des livres", confie l'historienne.
Marie-Antoinette aimait les roses, le jasmin et la tubéreuseÀ midi, vient le temps de la "toilette d'apparat", où chacun vient à son tour faire sa cour à l'"Autrichienne", cette fois à l'étage, et dans le plus grand cérémonial. Tout le temps de ses apprêts, et depuis l'heure de sa première toilette, la reine n'a qu'une idée en tête: retrouver l'intimité de sa Méridienne, cette pièce qui jouxte, derrière une porte dérobée et un rideau symbolique, la salle de réception qui n'a de chambre que le nom. C'est là qu'au milieu des rires, dans une liberté enfin retrouvée, elle déballe ses robes, reçoit ses fournisseurs, découvre et essaie les onguents et les fards de Jean-Louis Fargeon.
La Méridienne doit son nom au lit de repos où, dans l'alcôve, la reine aimait à se prélasser. Séparée de la chambre d'apparat par une porte dérobée, c'était le lieu de sa liberté reconquise.
Marquée par le temps, la pièce possède un charme envoûtant. Ses tentures d'un bleu passé, ses miroirs patinés, piqués et presque voilés, ont gardé tout leur force. Comme si une présence, un air, un esprit les habitaient encore. Un parfum y flotte curieusement, à base d'iris, de rose et d'entêtante tubéreuse. Marie-Antoinette employait beaucoup l'iris, dans sa poudre à cheveux notamment. La rose, le jasmin et la tubéreuse, dont la reine aimait s'entourer faisaient également partie de la composition de son parfum: la "tête" était très fraîche, le "coeur" très floral, le "fond" à base de musc, d'ambre et de vanille. Un sillage très affirmé...
Par Barbara Lambert
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