Le Boudoir de Marie-Antoinette

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 Le Modèle noir, de Géricault à Matisse

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komakoma
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MessageSujet: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeMar 19 Fév - 8:46

Une expo essentielle va s'ouvrir. Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 914132

L’exposition "Le Modèle noir, de Géricault à Matisse", se tiendra au musée d’Orsay à Paris, à partir du 26 mars 2019. Une occasion d’en savoir un peu plus sur la représentation des personnes de couleur noire dans la peinture européenne du XVIIIe au XXe siècle.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 640_ma10
Edouard Manet (1832-1883) Olympia - 1863 Paris, musée d'Orsay
©️RMN-Grand Palais (Musée d'Orsay) / Hervé Lewandowski



Exposée à New-York, Le modèle noir, de Géricault à Matisse posera ses valises en France, au musée d’Orsay à Paris, du 26 mars au 21 juillet 2019, avant de s’exporter en Guadeloupe au Mémoriel de Pointe-à-Pitre. "Que la France s’attribue cette exposition était important", assure Naïl Ver-Ndoye, auteur du livre Noirs, entre peinture et histoire.

Déjà peint au Moyen-Âge, la représentation physique et symbolique du sujet noir a évolué au fil des siècles. "La couleur noire ne reflétait pas les couleurs et le pigment coûtait relativement cher. D’ailleurs, les Noirs étaient tous représentés de la même façon, sans distinctions et avec les mêmes faciès", indique Naïl Ver-Ndoye. Il faudra attendre le XVIIIe siècle pour que de nouveaux pigments permettent de mieux travailler les couleurs et les reliefs des visages.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 640_we10
Peinture de Jean-Léon Gérôme, Le barde noir, sur la couverture du livre de Naïl Ver-Ndoye et Grégoire Fauconnier
/ Omniscience éditions



Symbole de richesse

Au XVIIIe siècle, les œuvres d’art représentant des Noirs apparaissent notamment sur les tableaux de l’aristocratie française. "Cette période est marquée par la fin de l’esclavage. Malgré tout, posséder un jeune noir, dit négrillon, était considéré comme un symbole de richesse", précise Naïl Ver-Ndoye. À cette période, plusieurs tableaux mettent en scène des domestiques dans les portraits de famille. Ceux-ci sont souvent agrémentés d’une tasse de café ou de thé afin de souligner l’aisance familiale. La personne noire était alors considérée comme un élément de valeur. À noter que les Noirs étaient souvent représentés afin de situer l’endroit où la scène se déroulait : sur un bateau avec des Blancs, cela signifiait que l’on était dans les Caraïbes.


Esclavage et émancipation

Étonnamment, l’esclavage n’a constitué qu’une petite partie de la représentation des Noirs sur les toiles, car finalement, peu de peintures figurant l’esclavage ou la colonisation ont été retrouvées.

À partir de 1848, date de l’abolition de l’esclavage, certains artistes vont commencer à dénoncer la maltraitance des Noirs, comme Marcel Verdier dans Le châtiment des quatre piquets représentant une scène de châtiment corporel en 1838.

"C’est l’une des seules œuvres où l’on voit réellement ce qui se passe dans les colonies", affirme Naïl Ver-Ndoye. D’un côté du tableau, se trouvent les maîtres blancs. De l’autre, un homme noir est attaché et fouetté par un autre noir. "Il y a très peu de scènes de ce type en peinture car ce n’était pas vendeur. Peu de peintres sont partis dans les Antilles et je ne pense pas que les maîtres de plantation les auraient laissé faire", ajoute-t-il.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 640_sc10
Le châtiment des quatre piquets, peint par Verdier (Menil Foundation)

Le portrait d'une négresse, en 1800, rebaptisé aujourd'hui Portrait d'une femme noire, par Marie-Guillemine Benoist est considéré comme une célébration de l'abolition de l'esclavage dans les colonies françaises. Cette oeuvre est aujourd'hui au Louvre. La peintre a réalisé ce portrait de femme noire à l'égale d'une femme blanche, en témoigne sa posture fière. Elle n'est pas en position de dominée ou d'esclave, mais peinte pour elle-même. Ce tableau a été appelé aussi la "Fornarina noire" en référence au portrait de "la Fornarina" par Raphaël, grand classique de la peinture de la Renaissance italienne.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 640_be10
Portrait d'une femme noire par Marie-Guillemine Benoist en 1800 / Domaine Public


Quant au célèbre tableau Le radeau de la méduse de Géricault, où le personnage principal est un métisse que l’on voit de dos, il est le symbole d’un désir de liberté et une critique de la traite négrière. Ce métisse s'appelle Joseph, dit Joseph l'Africain. Il venait de Saint-Domingue, un modèle bien connu par les peintres qui le faisait poser pour leurs portraits de personnages noirs.

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Le radeau de la Méduse -Géricault - 1818 / Domaine Public


Considéré comme précurseur de l'impressionnisme, le peintre Frédéric Bazille a peint notamment deux femmes noires en 1869 et 1870, deux domestiques noires, l'une en portrait devant un bouquet de fleurs, l'autre au service de sa maîtresse lors de la toilette.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 640_ba10
En 1870, Frédéric Bazille peint une Jeune femme aux pivoines (Musée Fabre à Montpellier)
/ Domaine Public



Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 640_ba11
Frédéric Bazille, La toilette, 1869 (Musée Fabre- Montpellier) / Domaine Public


De hiérarchie raciale à stéréotype

Au début du XXe siècle, la hiérarchie raciale va se transformer en stéréotype. Il est ainsi question de remettre la personne noire dans un décor fait de fruits et de feuilles, comme si le sujet était dans son environnement naturel. Puis, arrive des peintres comme Picasso et Matisse. À titre d’exemple, Pablo Picasso va insérer dans ses toiles des caractéristiques propres à l’art africain. Quant à Henri Matisse, l’artiste peint "Aïcha et Lorette", célèbre tableau mettant en scène Aïcha, une martiniquaise connue des spectacles parisiens et considérée comme la première Joséphine Baker.
https://www.franceinter.fr/culture/de-gericault-a-matisse-comment-les-peintres-francais-ont-represente-les-noirs-au-fil-des-siecles


Note
Voir aussi notre topic https://maria-antonia.forumactif.com/t28973-ayouba-diallo-le-riche-senegalais-qui-finit-esclave-par-erreur





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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeMer 27 Mar - 7:31

Voici un autre article intéressant sur cette exposition récemment inaugurée.

« Le modèle noir » bouscule le musée d'Orsay

Les affiches sont arrivées dans la capitale. Abd al Malik en vedette, et les noms de Lilian Thuram, Marie Ndiaye, Germaine Acogny, la mère de la danse africaine contemporaine, mais encore de Pascal Légitimus ou Patrick Chamoiseau, pour ne citer qu'eux, s'alignent, invités pour trente événements annoncés à l'occasion de l'exposition « Le modèle noir de Géricault à Matisse. »

Mais enfin, que se passe-t-il au musée d'Orsay à partir du 26 mars  ? Une petite révolution dans l'histoire de l'art nationale : « Le modèle noir » est la première exposition d'une grande institution française abordant la représentation des Noirs en France – et plus particulièrement à Paris – dans les beaux-arts, de la Révolution française aux années cinquante débutantes, à travers la relation entre les artistes et leurs modèles. Avant qu'elle n'ouvre ses portes au public, la présidente des musées d'Orsay et de l'Orangerie, Laurence des Cars, nous raconte la genèse d'un projet qui fera date dans l'histoire de l'art, une discipline, dit-elle, « qui n'est pas figée, qui rend compte des changements de regards sur une histoire tragique ou lumineuse ». « C'est un travail de fond qui commence, a-t-elle ajouté, et c'est le premier geste venant d'un grand musée national. » Sans inclure, bien entendu, des institutions aux tropismes plus spécialisés comme le Quai Branly-Jacques Chirac qui a, dans son domaine, défriché ces questions, qu'il s'agisse des « zoos humains » ou de la question de la couleur aux États-Unis, avec « Color Line ».



L'ombre de Saint-Domingue

Laurence des Cars était encore à la tête de l'Orangerie quand elle reçut la visite de Denise Murrell, chercheuse de la Fondation Ford, qui venait lui parler autrement de l'Olympia de Manet, s'étant interrogée sur la place qu'occupait la servante noire dans le tableau qui fit scandale en 1865. Denise Murrel a consacré sa thèse au regard de Manet sur son modèle noir, Laure. Il fut aussi question entre les deux femmes de la possibilité, un jour, de voir se tenir en France, le pays de Manet, une exposition sur le thème du modèle noir. Denise Murrell est en effet la commissaire de l'exposition qui s'est tenue sur ce thème l'hiver dernier à la Wallach Gallery au sein de l'université Columbia à New York, dans une période allant de Manet à Matisse. « La première chose que j'ai faite après ma nomination à Orsay fut de valider ce projet avec la Wallach Gallery, confie Laurence des Cars, mais en le ramenant plus tôt dans l'histoire de l'art, dans ce Musée du grand XIXe, en remontant à la Révolution. »

Tous les visiteurs français, loin s'en faut, n'ont pas en mémoire cette longue histoire, surtout quand elle est à ce point liée à celle d'une ex-colonie : Saint-Domingue, qui deviendra Haïti, première république indépendante en 1804, dont les esclaves se sont révoltés. Or, du premier député Jean-Baptiste Belley peint par Girodet en 1797 (trois ans après la première abolition de l'esclavage, tableau visible à Versailles, mais trop fragile pour venir à Orsay) au célèbre modèle de Géricault, Joseph, natif de Saint-Domingue, et jusqu'à l'un des modèles préférés de Matisse, la danseuse haïtienne Carmen, Haïti est un fil rouge de ce parcours. Heureux hasard, le patronyme de Carmen est Lahens. Or, le 21 mars, au Collège de France, l'écrivaine homonyme Yanick Lahens inaugurait la chaire des mondes francophones en racontant l'histoire de son pays, et de ses écrivains. Histoire méconnue, peu visible, elle est, parmi tant d'autres, un des aspects passionnants de l'exposition d'Orsay dont le parcours s'ouvre sur le portrait d'une servante noire, esclave de la Guadeloupe tout juste affranchie, par madame Benoist, en 1800.


Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 18258310
© Agence Photo de la Reunion des M / © Photo RMN - Gerard Blot


« À partir du tableau de madame Benoist, le regard des artistes individualise la figure et, comme par hasard, cela accompagne la naissance de la modernité, et surtout des artistes comme Géricault et Manet qui, comme Matisse plus tard, ont été politiquement engagés, on peut le dire. L'histoire de l'art, qui est de toute manière une science carrefour par définition, se nourrit de la question politique, sociale, culturelle au sens large et ce genre d'exposition permet de redonner cette histoire un peu longue aussi. »


Changer les titres des œuvres

Portrait d'une négresse, puis Portrait femme noire, et aujourd'hui Portrait de Madeleine. Le cartel de ce tableau indique ces changements successifs de titre, qui fut, jusqu'à s'accorder à redonner un prénom au modèle, l'objet de longues discussions au sein de la nombreuse équipe de l'exposition. « J'ai écrit à mes confrères directeurs de musées, Louvre, Quai Branly, etc., pour les informer de la décision que nous avions prise de renommer certaines œuvres au regard de l'évolution de la société, et tous ont été d'accord avec cette démarche », confie Laurence des Cars, précisant qu'« elle n'aurait pas été envisageable il y a dix, voire cinq ans ».

On pourrait presque parler de « décolonisation » des arts, un travail de fond entamé par des chercheurs beaucoup plus entendus outre-Atlantique qu'en France. Mais l'optique d'Orsay ne va pas jusqu'à revendiquer le terme, et elle demeure modérée. Même si Laurence des Cars avoue : « Nous sortons de la zone de confort. » À la fin du catalogue publié par les éditions Flammarion et le musée d'Orsay, Pascal Blanchard et Lilian Thuram rappellent qu'en parallèle du regard porté sur les Noirs par les artistes choisis par Orsay, en ce même XIXe siècle et début XXe, la domination coloniale en porte un autre. Les Noirs sont plus souvent vus comme des sauvages, caricaturés et sexualisés à l'extrême : il suffit de se reporter à l'ouvrage Sexe, race et colonies, sur lequel Blanchard et ses collègues historiens ont beaucoup travaillé.


Une exposition aux visées culturelles

Cet aspect n'est pas tout à fait absent de l'exposition d'Orsay, mais il n'est pas le propos du « Modèle noir », nous précisera l'historien de la condition noire et conseiller scientifique Pap N'Diaye. Un entretien à découvrir dans le dossier que nous consacrons, en sa semaine d'ouverture, à l'exposition. « Le modèle noir » est un rendez-vous à ne pas manquer pour des raisons artistiques, mais, on l'aura compris, pas seulement.

L'exposition s'entoure, pour en revenir à l'affiche mentionnée au début de cet article, d'une programmation culturelle ouverte à de multiples voix, et novatrice, en écho aux thématiques soulevées. Ella a aussi inspiré deux publications : « Le jeune homme noir à l'épée », récit poétique et CD (coédité par Orsay, Présence africaine et Flammarion) d'Abd el Malik d'après le tableau de Puvis de Chavannes, et une nouvelle de Marie Ndiaye, « Un pas de chat sauvage », coéditée par Flammarion et le musée d'Orsay et inspirée par Maria Martinez photographiée par Nadar.

Cet aspect n'est pas tout à fait absent de l'exposition d'Orsay, mais il n'est pas le propos du « Modèle noir », nous précisera l'historien de la condition noire et conseiller scientifique Pap N'Diaye. Un entretien à découvrir dans le dossier que nous consacrons, en sa semaine d'ouverture, à l'exposition. « Le modèle noir » est un rendez-vous à ne pas manquer pour des raisons artistiques, mais, on l'aura compris, pas seulement.

L'exposition s'entoure, pour en revenir à l'affiche mentionnée au début de cet article, d'une programmation culturelle ouverte à de multiples voix, et novatrice, en écho aux thématiques soulevées. Ella a aussi inspiré deux publications : « Le jeune homme noir à l'épée », récit poétique et CD (coédité par Orsay, Présence africaine et Flammarion) d'Abd el Malik d'après le tableau de Puvis de Chavannes, et une nouvelle de Marie Ndiaye, « Un pas de chat sauvage », coéditée par Flammarion et le musée d'Orsay et inspirée par Maria Martinez photographiée par Nadar.
https://www.lepoint.fr/

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeVen 29 Mar - 6:46

Autre source : https://www.lemonde.fr/culture/article/2019/03/27/artistes-et-modeles-a-l-epreuve-du-racisme_5441726_3246.html


  • Stéréotypes, colonialisme… les Noirs dans l’art à l’épreuve du racisme

    Une exposition pionnière au Musée d’Orsay étudie la représentation des Noirs dans l’art et leurs conditions de vie en France.

    Le modèle noir, de Géricault à Matisse est une exposition de grande ampleur sur un sujet jusqu’ici très peu traité en France alors qu’il l’est depuis longtemps aux Etats-Unis. L’exposition parisienne en vient d’ailleurs, deuxième version très augmentée de Posing Modernity, qui a eu lieu cet hiver à la Wallach Art Gallery de Columbia University.

    « De Géricault à Matisse » signifie que les siècles antérieurs, qui sont du ressort du Louvre, n’y sont pas étudiés alors que tant d’œuvres le permettraient, du roi mage Balthazar aux jeunes pages « maures » des cours européennes. Jusqu’ici, le Musée du quai Branly-Jacques Chirac était le seul à aborder ces questions, dans le champ nord-américain avec Le siècle du jazz en 2009 et Color Line, les artistes africains-américains et la ségrégation en 2016 et, plus largement, avec Exhibitions, l’invention du sauvage en 2012.

    Ce déficit flagrant explique la spécificité de l’exposition : il y en a deux en une, dont la deuxième s’efforce de compenser le manque d’expositions sur l’histoire du racisme et du colonialisme. Celle qu’annonce le titre étudie la représentation de femmes et d’hommes noirs dans la peinture, sculpture et arts graphiques du Ier Empire à la seconde guerre mondiale, les modèles dans les ateliers, les rôles pour lesquels ils posent, les rapports entre eux et les artistes que l’on perçoit à travers les œuvres – de la plus évidente sympathie à la plus frappante indifférence.

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeVen 29 Mar - 10:00

Une exposition essentielle.
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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeSam 30 Mar - 9:41

komakoma a écrit:
Une exposition essentielle.

Oui, et les médias le relayent largement. Very Happy

Exposition à Orsay: "Le modèle noir" contre l’invisibilisation des personnages noirs

  • L’exposition "Le modèle noir de Géricault à Matisse", au musée d’Orsay jusqu’au 21 juillet, lutte contre l’invisibilisation des personnages de couleur des tableaux du XIXe siècle.


Le Modèle noir, de Géricault à Matisse 5c9b9c10
Femme aux pivoines" de Frédéric Bazille, 1870 (COURTESY NATIONAL GALLERY OF ART, WASHINGTON, NGA IMAGES)


On a sans doute déjà vu ces œuvres, mais avions-nous bien observé tous leurs personnages? La nouvelle exposition “Le modèle noir de Géricault à Matisse”, qui se tient jusqu’au 21 juillet au musée d’Orsay à Paris, propose de montrer comment se sont construites, déconstruites et reconstruites les images des individus “de couleur” dans l’art au cours du XIXe siècle.

Tout commence en 2013, lorsque la chercheuse américaine Denise Murrell soutient une thèse à l’université de Columbia intitulée “Voir Laure: race et modernité de l’Olympia de Manet à Matisse, Bearden et d’autres”. Cette Laure à qui elle fait référence n’est autre que la servante noire, deuxième personnage principal du chef-d’oeuvre de Manet peint en 1863, qui a pourtant très peu fait l’objet de travaux de recherche. Et Laure est loin d’être la seule oubliée de l’histoire, comme le découvriront les visiteurs au fil de cette exposition.

  • Redonner une identité aux modèles noirs

En rassemblant des toiles, sculptures, photographies, gravures et autres épreuves réalisées entre la Révolution française de 1789 et le début du XXe siècle -de Géricault à Matisse en passant par Chassériau, Gauguin ou le Douanier Rousseau-, les commissaires et membres du comité scientifique tentent de rattraper des années d’invisibilisation de ces modèles noirs dont on ne connaît souvent que le prénom, et qui ont pourtant pris part à la vie artistique parisienne de l’époque.

L’exposition donne aussi des clés de compréhension des problématiques politiques et sociales de l’époque comme avec la représentation officielle, et forcément biaisée, de “L’abolition de l’esclavage dans les colonies françaises le 27 avril 1848” par François-Auguste Biard ou les caricatures racistes d’Alexandre Dumas par le dessinateur Cham pour Le Charivari autour de 1855.


Questions / Réponses

Pap Ndiaye, historien, professeur des universités à Sciences Po Paris et membre du comité scientifique de l’exposition “Le modèle noir de Géricault à Matisse” au musée d’Orsay, répond aux questions du HuffPost.

  • Les œuvres de l’exposition ont toutes été réalisées entre la Révolution française et le début du XXe siècle, pourquoi avoir choisi cette période-là?

Évidemment, le musée d’Orsay est centré sur le XIXe siècle. Mais l’exposition a aussi une logique propre. On est partis de la Révolution française de 1789 et de la question de l’abolition de l’esclavage qui se pose à ce moment-là, jusqu’aux années 1930-40 qui est le moment où les premiers craquements apparaissent dans l’Empire, où les premières remises en cause de la colonisation se font sentir.

On passe donc de la remise en cause de l’esclavage à la remise en cause de la colonisation de l’Afrique, ce qui enserre un siècle et demi d’histoire et se termine sur l’irruption notable du monde noir américain avec Joséphine Baker et les voyages de Matisse à Harlem.

  • L’un des tableaux qui ouvre “Le modèle noir” est une étude du portrait de Joseph, réalisé par Théodore Géricault pour le tableau “Le radeau de la méduse” en 1818-19. Comment avait été reçue cette toile à l’époque?

La présentation du “Radeau de la méduse” est un vrai événement culturel. On sait que Géricault a préparé ce tableau pendant des années, qu’il a fait un travail incroyable de recherche jusqu’à reconstituer le radeau dans son atelier, qu’il a interviewé tous les survivants. Et bien sûr ce tableau a une dimension discrètement politique puisqu’il est abolitionniste. Il introduit trois personnages noirs -trois fois le même modèle, Joseph- dont l’un d’eux, en position sommitale, agite le chiffon rouge: on peut à la fois interpréter cela comme celui qui essaie de sauver les autres, affalés et moribonds, ou comme une allégorie de la libération des esclaves.

Donc en plus d’être impressionnant par sa taille et son souci de précision, le tableau avait à l’époque aussi été interprété dans sa dimension politique. Il avait été énormément commenté, mais n’a pas créé un scandale comparable à d’autres comme évidemment “Olympia” de Manet, qui elle, 40 ans plus tard, suscite énormément de commentaires négatifs.

  • Est-ce qu’il y a une date clé qui marque l’évolution dans la représentation des personnages de couleur, du statut d’esclave à celui d’homme?

Non, pas vraiment. Au XVIIIe siècle, il y avait énormément de Noirs dans la peinture mais c’était souvent des stéréotypes, des petits pages, des petits négrillons. À partir de la Révolution, on peint les personnes noires pour elles-mêmes.

Il y a notamment Madeleine (dans le tableau “Portrait de Madeleine”, peint en 1800 par Marie Guillemine de Benoist), qui a une beauté et une dignité qui s’écartent fortement des stéréotypes. Ou aussi cette étude d’un tableau d’Anne-Louis Girodet-Trioson qui représente le premier député noir, Jean-Baptiste Belley à la convention de 1794, un portrait splendide où il est accoudé au buste de Reynald, abolitionniste du XVIIIe siècle, et qui reflète toute la noblesse de ce personnage d’ancien esclave devenu député. Mais l’évolution n’est pas toujours aussi évidente que ça.

  • En fait, on se rend compte que ces modèles noirs ont toujours existé, mais c’est l’histoire qui les a oubliés et invisibilisés?

Tout à fait ! Ces tableaux il n’a pas fallu les chercher dans d’obscurs recoins. “Olympia” c’est quand même l’équivalent de “La Joconde” pour le musée d’Orsay. D’autres tableaux de Matisse ou de Biard sont des œuvres très importantes des collections françaises, il fallait simplement regarder.

Figurez-vous qu’à propos d’“Olympia”, il y a plus d’études sur le chat noir que sur Laure ! Moi-même, lorsque Denise Murell (chercheuse de la Ford Foundation à la Wallach Art Gallery qui co-organise l’exposition, ndlr) m’avait montré “Olympia”il a y une dizaine d’années, j’avais repéré Laure mais sans la voir, sans m’interroger sur qui pouvait-elle être, quelle pouvait être sa fonction?

L’exposition vise simplement à dire aux visiteurs: regardez mieux. Et voyez que la France a une composante noire depuis le XVIIIe siècle. Elle est là, présente dans les Beaux-arts, il suffit de regarder.

  • De nombreux tableaux intitulés “Jeune nègre”, “Tête de Noir”, “Portrait d’une Négresse”, etc ont été renommés pour cette exposition, faisant apparaître les prénoms des modèles. Est-ce que ces noms vont perdurer?

Ils ont été renommés pour l’exposition et on espère pour toujours ! Le portrait de Madeleine de Marie-Guillemine Benoist, initialement “Portrait d’une Négresse” lors de sa présentation au Salon en 1800, a été rebaptisé “Portrait d’une femme noire” par le Louvre en 2000. Aujourd’hui, on l’a appelé “Portrait de Madeleine” car c’est ainsi que s’appelait cette femme. On sait qu’elle venait de Guadeloupe et accompagnait ses maîtres en métropole. On espère bien que le Louvre, quand il va récupérer son tableau, gardera le nom de Madeleine.

Chaque musée fait comme il veut, mais l’espoir de l’exposition c’est qu’en renommant, on change aussi les choses. On n’a pas toujours le nom du modèle, alors certains “Portrait de femme noire” sont juste devenus “Portrait de femme”. On a fait sauter le vocable racialisé.

L’histoire des titres est extrêmement variable selon les tableaux, donc il est souvent arrivé que des toiles changent de nom au fil des années. Notre démarche n’est pas une rupture radicale dans l’histoire de la peinture. Je sais qu’il y a des gens choqués par cette démarche-là, mais l’idée n’est pas d’effacer les anciens noms. D’ailleurs, on les donne dans les cartels pour reconstituer l’histoire de ces tableaux. Notre message c’est de faire savoir qu’il est temps de dire que cette femme s’appelait Madeleine. Ou Laure. Ou Carmen. C’est encore une fois un effort de visibilisation.

  • Cette exposition s’intéresse aux modèles noirs qui ont posé pour ces tableaux, mais qu’en est-il des artistes derrière les œuvres? Y avait-il des peintres de couleur au XIXe siècle?

Dans cette exposition, il y a des artistes métis comme Théodore Chassériau qui peint cette ”étude d’homme, d’après le modèle de Joseph” vers 1818-1819, ou aussi les sculptures de Charles Cordier en albâtre et bronze. Il y a quelques peintres non blancs, mais dans l’ensemble c’est plutôt des hommes blancs qui peignent des modèles noirs. C’est effectivement globalement un regard blanc sur les modèles noirs.

Au XIXe siècle en France, on aurait quand même du mal à faire une exposition avec des artistes non blancs qui, à l’époque, avaient difficilement accès aux Beaux-Arts.

https://www.huffingtonpost.fr/entry/exposition-orsay-le-modele-noir_fr_5c9b7477e4b07c88662e919c

Je n'ai pas mis les tableaux, parce qu'ils sont déjà au-dessus. Wink

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paname

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeJeu 4 Avr - 8:15

"Le modèle noir", une exposition qui tend à déconstruire le racisme

Par Malia Coutand

Géricault, Matisse, ou encore Cézanne, les plus grands noms de l'art français sont réunis à l'occasion d'une exposition atypique. Le Musée d'Orsay met en lumière "Les modèles noirs". Un événement qui souhaite rendre hommage à ces hommes et femmes souvent oubliés de l'art. C'est au travers de plusieurs centaines d’œuvres, du XVIIIe siècle à nos jours, que les organisateurs ont décidé d'étudier la représentation des personnes noirs dans l'art français.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse D2hymc10

Un événement qui vise à déconstruire le racisme. Certains tableaux ont d'ailleurs été renommés, l'intitulé de ces derniers étant choquants. Pour la directrice du musée, Laurence des Cars, ces changements de noms sont importants : "Ils caractérisent quelqu'un de singulier avec une personnalité, et c'est pourquoi nous suggérons qu'il y ait un nouveau titre maintenant ".


L'exposition rend également hommage à des grands noms de la littérature, dont Alexandre Dumas, écrivain de renom, qui a souvent fait l'objet d'attaques racistes en raison de ses origines haïtiennes.

Pour le rappeur et poète, Abd Al Malik, cette exposition invite à construire un regard plus positif "Si par le passé, on a pu construire une image négative, aujourd’hui cette exposition permet de déconstruire cette image."

Ce rendez-vous est à découvrir au musée d'Orsay, à Paris, jusqu'au 21 juillet prochain.
https://fr.euronews.com/2019/04/02/le-modele-noir-une-exposition-qui-tend-a-deconstruire-le-racisme

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Bint Georch

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeVen 12 Juin - 22:30

Merci pour ces oeuvres magnifiques.

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeSam 13 Juin - 17:00

Le plus ancien portrait connu d'un africain de couleur, par Jan Jansz Mostaert, vers 1525-1530.

Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Screen23

Image Rijksmuseum sur Instagram.
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Wilhelmine

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeDim 14 Juin - 10:13

Magnifique portrait, merci Dame d'atours. Comme pour le portrait de Marie-Antoinette qui nous parle tant, on reste en arrêt devant ses yeux. Tout ce que cet homme a à dire !
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Bint Georch

Bint Georch


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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitimeLun 15 Juin - 12:38

Je remercie Dame d'atours pour ce portrait si expressif.

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MessageSujet: Re: Le Modèle noir, de Géricault à Matisse   Le Modèle noir, de Géricault à Matisse Icon_minitime

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