Vu les aléas de l'actualité, on parle beaucoup du Drouet moderne, qui qui fait resurgir le Drouet du passé.
Ce sale type.
Révolution française : l’échec au roi du citoyen Jean-Baptiste DrouetMaître de poste dans la Marne, il menait une vie bourgeoise jusqu’à ce qu’il croise la route de Louis XVI fuyant Paris avec sa famille. Et qu’il contribue à le faire arrêter à Varennes.
Mardi, Jean-Luc Mélenchon a exprimé sa « fascination » pour le médiatique et controversé gilet jaune Éric Drouet, chauffeur-routier de 33 ans. Sur sa page Facebook, le leader de la France Insoumise fait un parallèle avec un autre Drouet, Jean-Baptiste, qui avait empêché Louis XVI de fuir « Paris, le peuple et la révolution » en juin 1791…
Le lit du roi est vide ! A 7 heures, le mardi 21 juin 1791, Lemoine, valet de chambre de Louis XVI, donne l’alerte. A 8 heures, la nouvelle s’est déjà répandue dans tout Paris. Mais pas assez vite pour rattraper la berline verte à six chevaux qui chemine depuis le milieu de la nuit sur la route de Metz.
Pendant que la famille royale - le roi s’est déguisé en valet - s’échappait, sur les coups de minuit, du palais des Tuileries où elle était assignée à résidence, Jean-Baptiste Drouet, lui, dormait du sommeil du juste dans sa belle maison de Sainte-Menehould. Encore quelques heures et ce solide gaillard d’1m85, père de deux enfants, notable sans histoires, entrera dans l’Histoire. Son esprit audacieux et déterminé l’y préparait sans doute ; son statut de confortable bourgeois, beaucoup moins.
« Je crus reconnaître la reine »
A 28 ans, Drouet assure la prestigieuse charge royale de maître de poste, que lui a confiée sa mère : il gère à ce titre l’une des 3 000 écuries relais disséminées dans le Royaume pour acheminer rapidement le courrier et les voyageurs. Il fait encore jour, à 20 heures, quand il aperçoit, stationnée devant sa Poste, un cabriolet suivi d’une grosse berline à roues jaunes, ainsi qu’une escorte de dragons. Malgré l’heure, les courriers, aux commandes des deux voitures, semblent pressés de remplacer les chevaux fatigués et de déguerpir.
« Encore un de ces émigrés pressés de quitter le pays avec leurs malles pleines », songe Drouet. Curieux, il glisse un œil à l’intérieur… « Je crus reconnaître la reine ; et apercevant un homme dans le fond de la voiture à gauche, je fus frappé de la ressemblance de sa physionomie avec l’effigie d’un assignat (NDLR :monnaie papier sous la Révolution) de 50 livres », témoignera-t-il.
Il a de sérieux doutes, mais aucune preuve, ni pouvoir de police pour l’empêcher de reprendre la route. Alors que les voitures disparaissent dans un nuage de poussière, la rumeur déferle à Sainte-Menehould : « C’était le roi ! Il s’est enfui ! » Le conseil municipal se réunit en toute hâte et désigne Drouet (il accepte mais n’en prend pas l’initiative, contrairement à ce qu’il fanfaronnera) pour le rattraper. Pourquoi lui ? C’est un formidable cavalier, aguerri par sept ans dans l’armée, mais aussi un cœur intrépide qui connaît tous les chemins alentour. Dans le village gagné par une folle effervescence, des mains se lèvent pour l’accompagner. Mais il ne reste qu’un autre cheval. Il choisit un certain Guillaume, dit « La Hure », qui peut, lui aussi, galoper à bride abattue.
Pour Louis, Marie-Antoinette et leurs deux enfants, le piège s’est refermé
Ils partent au grand galop avec une heure de retard sur le roi, qui a changé de monture à la poste de Clermont-en-Argonne avant de bifurquer plein nord sur la route de Montmédy. Drouet et « La Hure », eux, coupent par la forêt, désormais plongée dans la nuit. C’est une course contre la montre qui se joue. Après 23 heures de route et 225 km, la famille royale est épuisée et s’inquiète. Ils ont pris un énorme retard sur leur plan de fuite. Et ne trouvent pas trace des régiments « amis » du marquis de Bouillé, qui devraient déjà être là.
A 23 heures, Drouet et son comparse passent en trombe devant la berline, coincée en haut du village de Varennes. Ils avisent deux charrettes de vieux meubles qu’ils empilent en contrebas, sur le pont de la rivière. Ce modeste barrage, pense-il, exalté par sa mission, dissuadera les fuyards de passer la rive et de se rapprocher de la frontière. Il a aussi alerté les autorités locales, qui font sonner le tocsin des églises à toutes volées. Des milliers de curieux accourent, suivis par des haies de gardes nationaux. Pour Louis, Marie-Antoinette et leurs deux enfants, le piège s’est refermé.
Le maître de poste a juste le temps de les voir descendre de leur voiture et entrer dans l’auberge du Bras d’or. Ils n’en sortiront plus libres. Le voyage vers Paris, dès le lendemain matin sous une chaleur d’enfer, sera un long supplice. Et le premier pas vers l’échafaud.
[« Monsieur Drouet, vous avez changé la face du monde »
Là encore, l’infatigable maître de poste devance le souverain déchu. Quand Drouet arrive dans la capitale, le vendredi 24 juin, son nom est déjà glorifié. Il se laisse griser par sa phénoménale notoriété, enjolive à loisir ses exploits, quitte peu à peu les rives modérées pour rejoindre les ultras de la Montagne. Devenu député de la Marne, il aura une dernière occasion de voir Louis XVI le 17 janvier 1793… en votant sa mort.
Le reste de sa vie est un torrent aussi tumultueux que la Révolution qui l’a rendu célèbre du jour au lendemain. Nommé sous-préfet de Sainte-Menehould par l’Empereur, il reçoit la Légion d’honneur le 7 août 1807. En l’épinglant à sa poitrine, Napoléon lui glisse : « Monsieur Drouet, vous avez changé la face du monde ».
« PAS UN SANS-CULOTTE »
François Duboisy a beau partager les idées de Jean-Luc Mélenchon, l’historien qui bouillonne en lui corrige la présentation qu’il fait de Jean-Baptiste Drouet sur son blog.
« Non, ce n’est pas Drouet, de son propre chef, qui fonce à la poursuite du roi. C’est le conseil municipal de Sainte-Menehould qui l’envoie », précise l’auteur d’une biographie de Drouet (éd. Terres d’Argonne), malheureusement épuisée.
Duboisy tique aussi sur la comparaison que le député insoumis fait avec le Drouet gilet jaune : « Celui de la Révolution n’est pas un sans-culotte mais un bourgeois éduqué, riche, partisan au début d’une monarchie constitutionnelle. Après l’épisode de Varennes, il devient une célébrité du jour au lendemain. Couplés aux circonstances, son caractère entier et déterminé, un peu vantard, ainsi que son courage, ont sans doute contribué à en faire un révolutionnaire pur et dur. »
http://www.leparisien.fr/politique/revolution-francaise-l-echec-au-roi-du-citoyen-jean-baptiste-drouet-06-01-2019-7981605.php
C'est trop pénible, à la fin.