Pour vous consoler si vous ne l'avez pas vu
Diffusé samedi sur sur Arte, le film de Marc Jampolsky s’appuie sur les technologies numériques pour dévoiler les dessous du palais. Une brillante leçon d’architecture.
« La Galerie des glaces, c’est un peu les Grands boulevards du palais, nous confie Mathieu Da Vinha, le directeur du Centre de recherche du château de Versailles, à l’occasion d’un magnifique documentaire diffusé samedi 1er mai. Le lieu relie l’appartement du Roi au nord, et celui de la reine, au sud. Il existait bien un passage empruntant des couloirs et des escaliers, mais il était malcommode. » La galerie s’élève à l’emplacement de l’ancienne terrasse italienne – conçue par Louis Le Vau – autrefois aux quatre vents et affectée de problèmes d’étanchéité.
Versailles: le palais retrouvé du Roi-soleil, brillante leçon d’architecture et d’histoire, démontre qu’en dépit d’un aspect homogène et harmonieux, le palais résulte d’un mille feuilles chronologique. Il faut tout le talent d’écriture de Marc Jampolsky et de sa co-scénariste Marie Thiry pour en tisser un récit à la fois savant et grand public.
Familier des documentaires historiques, le réalisateur de 62 ans a déjà derrière lui une imposante filmographie qui a passé en revue une somme de monuments : la cathédrale de Strasbourg, Chambord, le Mont-Saint-Michel, mais aussi l’aventure de l’imprimerie et Gutenberg…
Nous avons pu discuter avec lui de ce morceau d’architecture parmi les plus célèbres de l’histoire de France. Quand Jules Hardouin-Mansard débute la construction de la galerie des Glaces, en 1678, elle matérialise la décision de Louis XIV d’y loger sa famille, les ministres et les courtisans. « Une manière d’achever la domestication de l’aristocratie entamée par Henri IV », fait également remarquer Mathieu Da Vinha.
Des documents stupéfiants de minutieLe film prend pour point de départ la numérisation des 9 000 plans du palais mené par le Centre de recherche du château de Versailles. La tâche entreprise dans le cadre de Verspera – l’acronyme pour Versailles en perspective, plan des Archives nationales – constitue un travail gigantesque autour de documents souvent très fragiles et plein de « retombes ». Un joli terme qui désigne les superpositions de collages sur le plan initial – jusqu’à 21 pour les plus amendés. Certains de ces documents sont stupéfiants de minutie, comme cette vue à l’aquarelle des jardins au XVIIe siècle. Une fois agrandie ont peut y distinguer un détail tout à fait incongru : un gibet installé au milieu des bosquets.
Des lieux disparus du domaine royal ont été reconstitués en image 3D avec l’aide du très réputé studio Aristeas, basé à Arles. Ce travail a permis de redonner vie à la galerie Mignard, là où le roi Soleil accrochait sa collection de peintures italienne, dont la Joconde. Pour la Grotte de Thetys, les opérateurs se sont même mis en quête de vrais coquillages sur des plages de Normandie – il fallait bien ça pour le décor de l’une des grandes attractions aquatiques de Versailles.
Faire mentir la légendeL’observation des plans des appartements des courtisans font mentir la légende selon laquelle il n’y avait pas de toilettes à Versailles durant l’ancien Régime. Les latrines ont disparu lors de la construction, par Louis Philippe, du musée de l’Histoire de France dans l’aile Nord. Marc Jampolsky use de scènes rejouées pour relater le ballet des courtisans en quête des meilleurs logements. Le documentariste règle en personne la direction d’acteurs et la mise en scène. Interrogé sur ses goût en la matière, il cite les films en costume de Sofia Coppola et Peter Greenaway. Et
l’Adieu à la Reine de Benoit Jacquot ? « Ah oui c’est vrai, je m’en suis inspiré aussi ».
Plans aériens filmés à l’aide de drones, reconstitutions et décors en 3D sont le lot de nombreux documentaires de prime-time. Leur emploi répond ici à un récit rigoureux. Le film suit ainsi pas à pas l’un des grands connaisseurs du château, l’historien de l’architecture Jean-Claude Le Guillou. Le dispositif se résume alors à un travelling, caméra à l’épaule ! Et c’est magique de toucher du regard l’enveloppe calcaire de Louis Le Vau venant épouser le marbre rouge de l’ancien relais de chasse de Louis XIII.
Semblant quitter les rives de son scénario, le film s’offre enfin une belle respiration dans les carrières de Caune-Minervois à la recherche du marbre qui a servi à décorer le château. L’appartements des bains – une sorte de spa avant l’heure où le roi aimait rejoindre sa favorite Mme de Montespan – en fut recouvert. Peut-être est-ce la marque des grandes réalisations, mais on jurerait que la séquence en Languedoc-Roussillon a été improvisée. Marc Lampolsky en convient : « Notre voyage là-bas était bel et bien consigné dans le scénario, mais nous avons tourné davantage que ce qui était prévu. » Pour notre plus grand plaisir.
https://www.telerama.fr/
- Pour voir le docu
https://www.arte.tv/fr/videos/080101-000-A/versailles-le-palais-retrouve-du-roi-soleil/
Speedez tant qu'il est encore en ligne.
Sinon, on a aussi un topic sur Verspera.
https://maria-antonia.forumactif.com/t8074-le-chateau-de-versailles-bientot-en-3d-projet-versperaEt sur
Les Adieux à la Reine(se sont gourés dans le titre
)
https://maria-antonia.forumactif.com/t5856-les-adieux-a-la-reine-avec-diane-kruger-benoit-jacquot