Découvertes d'objets royaux

Il me semble qu'il y a bien un ou mêmes plusieurs sujets consacrés au Garde-Meuble de la Couronne mais je ne les trouve pas...

Je lis en ce moment Le Garde-meuble de la Couronne et ses intendants de Stéphane Castelluccio. J'en viens enfin au règne qui nous intéresse. Ce qui précède étant tout aussi intéressant mais ne nous concerne pas ici directement.

Quelques objets mentionnés me poussent à la curiosité et je suis certaine qu'en ces lieux, j'en saurai plus.

J'y apprends qu'en 1781 fut livré à Marie-Antoinette pour son grand cabinet un meuble en cristaux colorés imitant les pierres précieuses, de Riesener bien entendu. Au passage, Fontanieu, intendant du Garde-Meuble de 1767 à 1784 a conçu ces fausses pierres car il était un artisans hors-pair en la matière.
Il y a une photo en noir et blanc dans mon livre. Je ne peux scanner mais je suis sûre que nous pouvons le trouver facilement. Il est aujourd'hui au Louvre et les pierres furent remplacées au XIXème siècle par de l'acajou. C'est quand même dommage car le meuble dans son aspect original devait être du plus bel effet !

Ensuite, toujours grâce aux talents de Fontanieu, le peintre Cartaut (ou Carteau, les deux orthographes sont tirées de deux sources différentes et je n'en ai jamais entendu parler) a utilisé les émaux de l'intendant pour réaliser un portrait de Louis XVI de 18 pouces de haut sur 15,5 de large [0,48 m x 0,42] en 1777.

Ce portrait dut plaire car il en fut commandé un autre représentant la naissance de Madame Royale payé en deux fois en 1780 et 1781 puis encore un nouveau en 1781 payé directement par Louis XVI en 1784 mais dont le sujet reste ignoré.

L'atelier de chimiste de Fontanieu était si réputé, lui-même membre de plusieurs académies de sciences, pas seulement françaises, qu'à son décès, une partie fut rachetée par Louis XVI lui-même, grand amateur de plaisirs scientifiques également.

Bonsoir,

Moults objets doivent être éparpillés d' ici delà, sans compter les objets non "estampillés".

Marie.

Toujours dans le même livre que je viens d'achever, j'apprends des tas de choses sur Marie-Antoinette et la gestion de son mobilier.

D'une part il y a le Garde-Meuble de la Couronne, à l'époque de Louis XVI installé place Louis XV et ouvert au public.
Y sont exposés les plus belles collections royales, depuis les Valois : tapisseries, armes, meubles d'étoffe, objets en pierres ou cristal, orfèvrerie, porcelaines, bronzes, dais, manteaux de Sacre ou du Saint-Esprit...
Des magasins servent quant à eux à la fabrication de nouveaux meubles ou à la réparation de ceux existants.

Ils n'appartiennent pas en propre au roi. Ils lui sont en quelque sorte prêtés, à l'instar des Bijoux de la Couronne qui seront réunis à cette administration à partir de 1784.

Ces objets meublent les appartements officiels de la famille royale ainsi que les heureux courtisans logés à Versailles.
Un Inventaire précis est dressé pour éviter qu'un courtisan malhonnête s'en aille avec les meubles généreusement prêtés par la Couronne.
Ils sont officiellement inaliénables, appartement au Domaine de la Couronne. Mais évidemment devant un meuble usagé, et sans alors l'esprit de patrimoine, on peut les vendre, les donner ou les détruire afin de récupérer les matières précieuses.

Mais le souverain ainsi que les membres de sa famille ont droit à un garde-meuble privé. Le roi peut donc acheter sur ses propres fonds les meubles qui lui plaisent et en faire ce qu'il en veut. Ce sont ceux que nous retrouverons dans les cabinets et petits appartements.
De même pour la reine.

Mais Marie-Antoinette là encore ne suivra pas forcément les règles.

Depuis Marie Leszczynska , l'intendant du garde-meuble de la reine est Pierre-Antoine Bonnefoy du Plan.
Ce garde-meuble est installé au couvent des Récollets à Versailles.

A la mort de la reine en 1768, il est décidé de maintenir la même Maison pour la future Dauphine. Mais le garde-meuble est transféré pour un terrain de Clagny où Bonnefoy construit à ses frais son logement.
En 1777, le garde-meuble privé de Marie-Antoinette est envoyé à Trianon, le bâtiment de Clagny servant désormais d'annexe.

En 1776, Marie-Antoinette nomme le fils de Bonnefoy, Pierre-Charles concierge de Trianon et survivancier de son père. Il était jusque-là tapissier de sa chambre, c'est-à-dire celui chargé de placer les meubles d'été ou d'hiver.

Le grand drame de l'histoire de ce garde-meuble est qu'il ne reste plus rien de son organisation, Bonnefoy fils ayant détruit ses archives durant la Révolution, certainement dans l'idée de protéger Marie-Antoinette accusée de dépenses effrénées.

Marie-Antoinette disposait de 200 000 livres pour sa cassette versées tous les ans par le Trésor public et 72 000 livres" pour ses Menus Plaisirs".

Mais ces sommes ne suffisaient pas.

Entre 1780 et 1783, la moyenne de dépense pour le seul Trianon était de 132 500 livres.
En 1784 : 169 137 livres.
En 1785 : 233 986 lives.
En 1786 : 194 402 livres.

Il n'est pas précisé dans mon livre si ces sommes prennent en compte la construction des fabriques qui vont orner au fur et à mesure son domaine ou si ce ne sont que des frais de gestion simple, sans l'extraordinaire des nouveaux bâtiments.

Compte tenu que d'autres dépenses existaient ailleurs, on imagine bien que Marie-Antoinette ne pouvait faire face à ses dettes : budget atours, jeu, Saint-Cloud...

Bonnefoy ne voyant pas d'autres solutions, décida de faire passer ces frais à ceux du Garde-Meuble de la Couronne. Mais l'intendant d'alors, Fontanieu, refusa. Car il s'agit bien de deux domaines différents. Fontanieu n'avait pas droit de regard sur les meubles privés de la reine, il n'allait donc pas les payer.

Un autre expédient fut trouvé. Madame de Chimay, dame d'honneur de la reine, fit passer des ordonnances de paiement directement au Trésor royal concernant des sommes relavant de Trianon ou les Tuileries où Marie-Antoinette avait un petit appartement.

Car en 1786, les dépenses totales pour le garde-meuble de la reine atteignait 305 615 livres 6 sols 5 deniers.
Madame de Chimay obtint du Trésor royal 20 432 livres 1 sol 6 deniers.

Marie-Antoinette réussit néanmoins à faire payer par le Garde-Meuble de la Couronne les sièges de son Cabinet intérieur en 1779 et ceux du Belvédère en 1780.
De même en 1784 pour les banquettes de son billard à Trianon.


A mon avis Fontanieu puis Ville-d'Avray, bien que bons gestionnaires et soucieux d'économie, n'avaient pas envie de tout refuser à leur reine. Ils étaient aussi des courtisans.

De plus, relativisons. Marie-Antoinette n'est pas du tout la reine dépensière des rumeurs. D'autres reines et surtout des favorites ont bien plus dépensé qu'elle. Elle était même très économe, sa fille allant hériter d'une belle fortune que Marie-Antoinette avait judicieusement fait placer en banque belge.
Quand on lit Reiset, on ne compte plus les raccommodages de madame Eloffe effectuées sur les habits de la reine.

Vive Madame de Chimay alors !!!

olivia a écrit:

Il n'est pas précisé dans mon livre si ces sommes prennent en compte la construction des fabriques qui vont orner au fur et à mesure son domaine ou si ce ne sont que des frais de gestion simple, sans l'extraordinaire des nouveaux bâtiments.

La réponse me semble claire en me relisant : évidemment que les bâtiments n'entrent pas dans les frais du garde-meuble... puisque relevant des Bâtiments de la reine, dirigés par Mique.

Madame de Chimay a écrit:

Vive Madame de Chimay alors !!!

D'un certain côté oui mais d'un autre, je ne suis pas sûre que ce soit tout à fait honnête...
La faute aux administrations d'Ancien Régime complètement embrouillées !

Disons qu'elle a fait son possible pour aider notre Reine.

Madame de Chimay a écrit:

Disons qu'elle a fait son possible pour aider notre Reine.

Oui, elle avait quand même de bons serviteurs.

Si cela vous intéresse, je continuerai la suite sur le mobilier privé de Marie-Antoinette un peu plus tard.

Bien sûr que cela m'intéresse.

Madame de Chimay a écrit:

Bien sûr que cela m'intéresse.

Ça nous intéresse tous, évidemment !!!

Bien à toi

Merci pour ces informations !!!
OUI POUR LA SUITE !!!!

Alors je continue !

Lors de sa nomination par Louis XVI à la tête du Garde-Meuble de la Couronne en 1784, Antoine Thierry de Ville-d'Avray décida d'effectuer de franches économies en son sein. Louis XVI avait toute confiance en lui car il était son premier valet depuis sa naissance et l'avait déjà chargé de la gestion de ses petits cabinets à son avènement.

Il commença par exemple à enlever toutes commandes à Riesener qui à ses yeux coûtait trop cher. Il le remplaça par l’ébéniste Benneman.
Mais Marie-Antoinette n'en eut cure et continua à lui accorder sa confiance.

De plus, elle choisit des hommes nouveaux comme Ferdinand Schwerfeger en 1787 qui lui livra son mobilier d’ébénisterie pour sa chambre de Trianon et son nouveau coffre à bijoux de sa chambre à Versailles. Pour ce dernier meuble, nous ne sommes plus dans le domaine privé mais public, donc relevant du Garde-Meuble de la Couronne.

Marie-Antoinette voulait s'entourer de ce qu'il y avait de plus beau. Ce que nous constatons tous.

Si l'on se fie à Castelluccio, force est de constater que la politique de rigueur menée par Ville d'Avray aurait conduit à la longue à une réducation de la qualité esthétique des meubles de la famille royale. Jusque-là rien n'était assez beau pour le prestige de la monarchie. Ville d'Avray lui voulait des économies. Pas le choix donc pour la famille royale de tricher avec les nouvelles règles imposées.

Les spécialistes du mobilier de la Couronne ne peuvent faire que ce triste constat : Marie-Antoinette n'hésitait pas à détourner les meubles réglés par la Couronne qui lui plaisaient.

Les marques de son garde-meuble remplaçaient celles du Garde-Meuble désormais rayés :
_ les meubles destinés à Louis XVI à Trianon en 1777 (Waddesdon, Getty, Trianon) ;
_le secrétaire livré pour Marie-Antoinette à Trianon en 1783 (Wallace collection)
_le mobilier fourni pour son appartement aux Tuileries en 1784.

Castelluccio oublie le mobilier des couches livré en 1778 que Marie-Antoinette utilisa ensuite pour son appartement du rez-de-chaussée à Versailles. Le Garde-meuble fut donc obligé d'en commander un nouveau pour sa troisième grossesse. Celui que nous voyons aujourd'hui.

Ce n'est pas à proprement parler du vol car il est clair que tous ces meubles furent commandés à l'origine à son usage. Mais Marie-Antoinette semble ne pas avoir fait de différence entre ce qui relevait des domaines public et privé. Ils étaient pour elle, donc normal de les conserver en son nom propre.

Fontanieu puis Thierry n'osaient pas contrarier leur reine.
Dès 1776, aucun inventaire du Garde-Meuble ne fut effectué pour ses cabinets de Versailles, Fontainebleau, Compiègne ou Trianon. Seul Bonnefoy du Plan s'en voyait chargé.

olivia a écrit:

Si l'on se fie à Castelluccio, force est de constater que la politique de rigueur menée par Ville d'Avray aurait conduit à la longue à une réducation de la qualité esthétique des meubles de la famille royale. Jusque-là rien n'était assez beau pour le prestige de la monarchie. Ville d'Avray lui voulait des économies. Pas le choix donc pour la famille royale de tricher avec les nouvelles règles imposées.

... la différence de qualité a toujours été sensible d'une résidence à l'autre, y compris pendant les règnes précédents et suivants...
On a ainsi découvert par hasard, aux "Puces" un petit "dos d'âne" tout simple, sans placages ni bronzes, dont l'immatriculation relevée par un connaisseur a permis d'identifier le petit bureau utilisé par la reine Marie Leczynska à Marly...

Poursuivez, Olivia!

Marie-Antoinette tenait donc à son indépendance.

Les grandes résidences royales exigeaient la dorure pour les bois des sièges et lits, ainsi que le brocart pour le meuble d'hiver de la chambre.
A Versailles, Fontainebleau et Compiègne, Marie-Antoinette s'y conforma.

Mais elle le refusa pour Marly qu'elle considérait comme une résidence de campagne.
En 1781, elle y choisit un mobilier aux bois richement sculptés peints en blanc et couvert d'un basin peint pour sa chambre. Les cabinets reçurent un gros de Tours broché sur fond blanc.

Nous connaissons tous quels furent ses choix concernant sa chambre de Trianon, merveille des merveilles...



Mais Marie-Antoinette eut également un goût très vif pour les objets d'art.

Je regrette de ne pouvoir illustrer mes propos.
Si certains pouvaient s'en charger...

olivia a écrit:

Les marques de son garde-meuble remplaçaient celles du Garde-Meuble désormais rayés :
_ les meubles destinés à Louis XVI à Trianon en 1777 (Waddesdon, Getty, Trianon) ;
_le secrétaire livré pour Marie-Antoinette à Trianon en 1783 (Wallace collection)
_le mobilier fourni pour son appartement aux Tuileries en 1784.

Photos des membres du Boudoir !

La chambre de la reine au Petit trianon.

olivia a écrit:

De plus, elle choisit des hommes nouveaux comme Ferdinand Schwerfeger en 1787 qui lui livra son mobilier d’ébénisterie pour sa chambre de Trianon et son nouveau coffre à bijoux de sa chambre à Versailles. Pour ce dernier meuble, nous ne sommes plus dans le domaine privé mais public, donc relevant du Garde-Meuble de la Couronne.

Photos des membres du Boudoir.

diphildor a écrit:

La chambre de la reine au Petit trianon.

Merci !