Ce fut encore Lasne qui, le lundi 8 juin, entra le premier dans sa chambre, entre huit et neuf heures.
Gomin nous a avoué qu'il n'osait plus, depuis plusieurs jours, y monter le premier, dans l'appréhension de trouver le sacrifice accompli.
Les médecins arrivèrent, chacun à l'heure convenue.
L'enfant était levé quand Pelletan vint le voir à huit heures.
Lasne le croyait mieux depuis la veille, mais le bulletin du médecin ne lui fit que trop comprendre qu'il se trompait.
L'entrevue fut courte.
Se sentant de la pesanteur dans les jambes, le jeune malade demanda bientôt lui-même à se coucher.
Il était au lit quand Dumangiu entra, vers onze heures.
L'enfant le reçut avec cette douceur inaltérable qu'il conservait au milieu de ses souffrances, et à laquelle ce médecin a rendu témoignage
Les deux bulletins, partis du Temple à onze heures, dénonçaient des symptomes effrayants pour la vie du malade.
M. Dumangin s'étant retiré, Gomin remplaça Lasne dans la chambre du Dauphin
Il s'assit auprès de son lit et ne lui parla point, de peur de le fatiguer.
Le Prince n'entamait jamais la conversation, et par conséquent il ne dit rien non plus; mais il arrêta sur son gardien un œil profondément mélancolique
« Que je suis malheureux de vous voir souffrir comme cela ! lui dit Gomin.
Consolez-vous, lui dit l'enfant, je ne souffrirai pas toujours » Gomin se mit à genoux pour être plus près de lui.
L'enfant lui prit la main et la porta à ses lèvres.
Le cœur religieux de Gomin se fondit en une prière ardente, une de ces prières que la douleur arrache à l'homme et que l'amour envoie à Dieu.
L'enfant ne quitta pas la main fidèle qui lui restait; il éleva un regard vers le ciel, pendant que Gomin priait pour lui.
Vous écouterez sans doute avec émotion les dernières paroles du mourant
Car vous avez connu celles de son père, qui, du haut de l'échafaud, envoyait le pardon à ses assassins.
Vous avez connu celles de sa mère, de cette reine héroïque qui, impatiente de quitter la terre où elle avait tant souffert, priait le bourreau de se
dépêcher.
Vous avez connu celles de sa tante, de cette vierge chrétienne qui, d'un œil suppliant, lorsqu'on lui enlevait son vêtement pour mieux la frapper, demandait au nom de la pudeur qu'on lui couvrit le sein.
Et maintenant oserai-je vous répéter les paroles suprêmes de l'orphelin?
Ceux qui recueillirent son dernier souffle me les ont rapportées, et je viens fidèlement les inscrire dans le martyrologe royal.
Gomin, voyant l'enfant calme, immobile, muet, lui dit:
« J'espèreOh! si, je souffre encore, mais beaucoup moins que vous ne souffrez pas dans ce moment? La musique est si belle »Or, on ne faisait aucune musique ni dans la tour ni dans les environs; aucun bruit du dehors n'arrivait en ce moment à cette chambre où le jeune martyr s'éteignait.
Gomin, étonné, lui dit:
« De quel côté entendez-vous cette musique? De là-haut! Y a-t-il longtemps? Depuis que vous êtes à genoux. Est-ce que vous n'avez pas entendu? Écoutez! écoutez ! » Et l'enfant souleva par un mouvement nerveux sa main défaillante, en ouvrant ses grands yeux illuminés par l'extase.
Son pauvre gardien, ne voulant pas détruire cette douce et suprême illusion, se prit à écouter aussi avec le pieux désir d'entendre ce qui ne pouvait être entendu.
Après quelques instants d'attention, l'enfant tressaillit de nouveau, ses yeux étincelèrent, et il s'écria dans un transport indicible:
« Au milieu de toutes les voix, j'ai reconnu celle de ma mère! »Ce nom tombé des lèvres de l'orphelin semblait lui enlever toute douleur.
Son regard s'éclaira de ce rayonnement serein que donne la certitude de la délivrance ou de la victoire
Captivé par un spectacle invisible, l'oreille ouverte au bruit lointain d'un de ces concerts que l'oreille humaine n'a pas entendus, il sentait éclore dans sa jeune âme toute une existence nouvelle.
Un instant après, l'éclat de ce regard s'était éteint, et un froid découragement était empreint sur son visage.
Gomin suivait d'un œil inquiet tous les mouvements du malade.
Sa respiration n'était pas plus pénible, seulement sa prunelle errait lentement, et distraite, ramenant de temps en temps un regard vers la fenêtre...
Gomin lui demanda ce qui l'occupait de ce côté.
L'enfant regarda son gardien quelques instants, et, bien que la même question lui eut été faite de nouveau, il ne parut pas l'avoir comprise et il n'y répondit point.
Lasne remontait pour remplacer Gomin
Celui-ci sortit le cœur serré, mais non pas plus inquiet que la veille; car il ne prévoyait pas encore une fin prochaine.
Lasne s'assit auprès du lit
Le Prince le regarda longtemps d'un œil fixe et rêveur.
Comme il fit un léger mouvement, Lasne lui demanda comment il se trouvait et ce qu'il désirait.
L'enfant lui dit:
« Crois-tu que ma sœur ait pu entendre la musique? Comme cela lui aurait fait du bien! »Lasne ne put répondre.
Le regard plein d'angoisse du mourant s'élançait perçant et avide vers la fenêtre.
Une exclamation de bonheur s'échappa de ses lèvres; puis, regardant son gardien:
« J'ai une chose à te dire... » Lasne lui prit la main
La petite tête du prisonnier se pencha sur la poitrine du gardien qui écouta, mais en vain.
Tout était dit.
Dieu avait épargné au jeune martyr l'heure du dernier râle
Dieu avait gardé pour lui seul la confidence de sa dernière pensée.
Lasne mit la main sur le cœur de l'enfant
Le cœur de Louis XVII avait cessé de battre.
Il était deux heures et un quart après midi.
Gomin et Damont, commissaire de service, prévenus par Lasne, montèrent immédiatement dans la chambre funèbre.
On enleva de cette chambre provisoire le pauvre petit cadavre et on le transporta dans celle où depuis deux ans il n'avait cessé de souffrir.
Il fallait que de ce royal appartement, d'où le père était parti pour l'échafaud, le fils partît pour le cimetière.
On arrangea les dépouilles de celui-ci sur son lit de mort, et on ouvrit les portes de l'appartement, portes fermées depuis que la révolution s'était emparée d'un enfant plein de force, de grâce, de vie et de santé!
Cachant sous une froide contenance l'émotion qu'il ressentait, Gomin se rendit au Comité de sûreté générale; il y vit M. Gauthier, un de ses membres, qui lui dit:
« Vous avez bien fait de vous charger vous-même et promptement de ce message; mais, malgré votre diligence, il arrive trop tard : la séance est levée. Le rapport n'en peut être fait aujourd'hui à la Convention nationale. Gardez la nouvelle secrète jusqu'à demain et jusqu'à ce que j'aie pris des mesures convenables. Je vais envoyer au Temple M. Bourguignon, l'un des secrétaires du Comité de sûreté générale, pour s'assurer lui-même de la vérité de votre déclaration »M. Bourguignon effectivement suivit de près Gomin à la tour
Il constata l'événement, renouvela la recommandation de garder le secret et de continuer le service comme à l'ordinaire.
20hA huit heures du soir, on avait, comme de coutume, préparé le souper du petit Capet
Caron l'avait apporté, et Gomin feignit de le monter lui-même.
Mais il monta sans le souper, seul en proie à la plus profonde affliction.
Cette affliction, contenue pendant cinq heures devant le public, se fit jour enfin par des larmes quand il se trouva seul en présence du corps inanimé de Louis XVII.
Jamais ce spectacle ne s'effaça de sa mémoire
Il y vivait encore quand je connus ce bon vieillard dans les dernières années de sa vie.
Il me disait à quatre-vingts ans:
« J'ai eu le courage de remonter l'escalier et de rentrer dans la chambre. Après avoir refermé la porte derrière moi et m'être assuré que j'étais seul, j'ai soulevé le linceul: je l'ai contemplé, et mon cœur s'est rempli de pensées tendres et douloureuses.Vous n'eussiez pas cru qu'il était mort. Les plis que la douleur avait formés à son front et à ses joues avaient disparu, les belles lignes de sa bouche avaient repris leur suave repos. Ses paupières, que fermait à demi la souffrance, s'étaient ouvertes et rayonnaient pures comme l'azur du ciel. On eût dit que son dernier regard avait rencontré une figure aimée. Sa magnifique chevelure blonde qui depuis deux mois n'avait point été coupée, encadrait son visage que je n'avais jamais vu aussi calme: il avait l'air de sourire, il avait repris le caractère qu'il devait avoir eu dans ses beaux jours d'autrefois. Depuis que les hommes ne pouvaient plus rien contre lui, on eût dit que la sérénité de ses traits était revenue comme d'elle-même, et que la candeur et la grâce morale lui montaient du cœur du visage. Le voilà donc tranquille et muet au terme de sa courte vie t de ses longues misères ! Pourquoi n'ai-je point passé avec lui plus d'heures dans sa prison ? Il me semble en ce moment que j'ai eu tort de n'avoir pas eu plus de courage. Il est mort et pour lui je ne puis rien réparer; voilà son pauvre cadavre qui a tant souffert; où est sa jeune âme qui a souffert encore plus ? O mon Dieu, si vous êtes juste, quelle récompense vous avez donnée à tant de patience, quelle couronne à tant de tortures ! Une heure s'écoula pendant laquelle, haletant, les yeux fixes, sans voix, je demeurai près de ses dépouilles. Cette heure solennelle devait avoir une grande influence sur toute ma vie. Une voix avait parlé en mon cœur, à laquelle j'avais promis d'être honnête homme. Hélas ! Je ne suis pas tombé à genoux, je n'ai pas joint ses petites mains, je ne les ai pas serrées à l'entour du crucifix ! Aucun signe chrétien n'ont abordé la couche funèbre du dernier descendant des Rois très chrétiens. La terre n'a eu pour lui que des outrages et pourtant, en ce moment, ses yeux entr'ouverts semblaient regarder la terre avec tant d'amour, qu'on eût pu croire le pauvre enfant dans une douce contemplation. Je suffoquais, je me retirai. Je songeai à monter sur la plate-forme pour respirer. Je voulus franchir deux à deux les degrés de l'escalier, je ne pus. Je n'avais cependant plus à mon bras le malade que j'y traînais les jours précédents mais mes forces étaient brisées. Que cette terrasse me parut large ce soir-là ! La soirée était belle et sereine, j'approchai du petit bassin; l'eau était tarie et les oiseaux étaient envolés. Je ne sais comment et pourquoi les souvenirs du sacre des rois me passèrent alors pas la tête ou plutôt par le cœur. Je me rappelai malgré moi, à cette heure de deuil, les oiseaux qu'à l'heure joyeuse de l'intronisation d'un Prince, on laisse s'envoler dans la basilique de Reims et tout à coup dans la fièvre de ma douleur quelque chose sembla m'annoncer que c'étaient là aussi les oiseaux d'un sacre, et que l'enfant venait d'être couronné !" Louis-Charles de FranceLouis XVII de Bourbonduc de Normandie dauphin de France(4 juin 1789 - 21 septembre 1792)(Louis-Charles de Bourbon) PRINCE ROYALNé le 27 mars 1785 à Versailles (78)
Baptisé le 27 mars 1785 à Notre-Dame de Versailles
Son acte de baptême
Décédé le 08 juin 1795 à la Prison du Temple à Paris (victime de la Révolution française) à l'âge de 10 ans
Deux officiers de santé, dont l'un venait de succéder à Dessault dans la place de chirurgien en chef de l'Hôtel-Dieu de Paris, alors nommé
hospice de l'humanité, procédèrent à l'ouverture du corps et en rédigèrent procès-verbal, comme il a été dit ci-dessus.
Après cette rédaction les précieux restes du roi furent enfermés dans un cercueil, enlevés par deux commissaires civils aux quels était adjoint le commissaire de police de la section du Temple, et déposés sans cérémonie, en leur présence, dans le cimetière public de Sainte-Marguerite, au faubourg Saint-Antoine.
Depuis quelque temps le fils de Capet était incommodé par une enflure au genou droit et au poignet gauche.
Le ter floréal (20 avril), les douleurs augmentèrent, le malade perdit l'appétit et la fièvre survint
Le fameux Dessault, officier de santé, fut nommé pour le voir et le traiter: ses talents et sa probité nous répondaient que rien ne manquerait aux soins qui sont dus à l'humanité.
Cependant la maladie prenait des caractères très-graves.
Le 16 de ce mois (04 juin) Dessault mourut.
Le comité nomma pour le remplacer le citoyen Pelletan, officier de santé très-connu; et le citoyen Dumangin, premier médecin de l'hôpital de santé, lui fut adjoint.
Leurs bulletins d'hier, à onze heures dumatin, annonçaient des symptômes inquiétants pour la vie du malade, et à deux heures et un quart après midi nous avons reçu la nouvelle de la mort du fils de Capet.
Le comité de sûreté générale nous a chargés de vous en informer: tout est constaté.
Les procès-verbaux en seront déposés aux archives.
La convention décrète l'insertion de ce rapport.
Procès-verbal de l'ouverture du corps du fïls de défunt Louis Capet, dressé à la tour du Temple, à onze heures du matin, ce 21
prairial. Nous soussignés, Jean-Baptiste-Eugénie Dumangin, médecin en chef de l'hospice de l'Unité, et Philippe-Jean Pelletan, chirurgien en chef du grand hospice de l'Humanité, accompagnés des citoyens Nicolas Jeanroy, professeur aux écoles de médecine de Paris, et Pierre Lassus, professeur de médecine légale à l'école de santé de Paris, que nous nous sommes adjoints en vertu d'un arrêté du comité de sûreté générale de la convention nationale, daté d'hier, et signé Bergoing, président, Courtois, Gauthier, Pierre Guyomard, à l'effet de procéder ensemble à l'ouverture du corps du fils de défunt Louis Capet, en constater l'état, avons agi ainsi qu'il suit
Arrivés tous les quatre, onze heures du matin, à la porte extérieure du Temple, nous y avons été reçus par les commissaires, qui nous ont introduits dans la tour.
Parvenus au deuxième étage, dans un appartement dans la. seconde pièce duquel nous avons trouvé dans un: lit le corps mort d'un enfant qui nous a paru âgé d'environ dix ans que les commissaires nous ont dit être celui du fils de défunt Louis Capet, et que d'eux d'entre nous ont reconnu pour être l'enfant auquel ils donnaient des soins depuis quelques jours.
Les susdits commissaires nous ont déclaré que cet enfant était décédé la veille, vers trois heures de relevée
Sur quoi nous avons cherché à vérifier les signes de la mort, que nous avons trouvés caractérisés par la pâleur universelle, le froid de toute l'habitude du corps, la roideur des membres, les yeux ternes, les tâches violettes ordinaires à la peau d'un cadavre, et surtout par une putréfaction commencée au ventre, au scrotum et au-dedans des cuisses.
Nous avons remarqué, avant de procéder
h l'ouverture du corps, une maigreur générale qui est celle du marasme
Le ventre était extrêmement tendu et météorisé.
Au côté interne du genou droit, nous avons remarqué une tumeur, sans changement de couleur à la peau, et une autre tumeur moins volumineuse sur l'os radius, près le poignet du côté gauche.
La tumeur du genou contenait environ deux onces d'une matière grisâtre,puriforme et lymphatique, située entre le périoste et, les muscles
Celle du poignet renfermait une matière de même nature, mais plus épaisse.
A. l'ouverture du ventre, il s'est écoulé plus d'une pinte de sérosité purulente, jaunâtre et très-fétide
Les intestins étaient météorisés, pâles, adhérents les uns aux autres, ainsi qu'aux parois de cette cavité
Ils étaient parsemé» d'une grande quantité de tubercules rie diverses grosseurs, et qui était présenté à leur ouverture la même matière que celle contenue dans les dépôts extérieurs du genou et du poignet.
Les intestins, ouverts dans toute leur longueur, étaient très-sains intérieurement, et ne contenaient qu'une très-petite quantité de matière bilieuse.
L'estomac nous a présenté le même état
Il était adhérent à toutes les parties environnantes, pâle au dehors, parsemé de petits tubercules lymphatique semblables à ceux de la surface des intestins
Sa membrane interne était saine, ainsi que le pylore et l'œsophage
Le foie était adhérent par sa convexité au diaphragme et par sa concavité aux viscères qu'il recouvre
Sa substance était saine, son volume ordinaire, la vésicule du fiel médiocrement remplie d'une bile de couleur vert foncé.
La rate, le pancréas, les reins et la vessie étaient sains
L'épiploon et le mésentère, dépourvus de graisse, étaient remplis de tubercules lymphatiques semblables à ceux dont il a été parlé.
De pareilles tumeurs étaient disséminée dans l'épaisseur du péritoine, recouvrant la face intérieure du diaphragme
Ce muscle était sain.
Les poumons adhéraient par tonte leur surface à la plèvre, au diaphragme et au péricarde
Leur substance était saine et sans tubercules
Il y en avait seulement quelque uns aux environs de la trachée artère et de l'œsophage.
Le péricarde contenait la quantité ordinaire de sérosité; le cœur était pâle, mais dans l'état naturel.
Le cerveau et ses dépendances étaient dans leur plus parfaite intégrité.
Tous les désordres dont nous venons de donner le détail, sont évidemment l'effet d'un vice scrofuleux existant depuis longtemps, et auquel on doit attribuer la mort de l'enfant.
Le présent procès-verbal a été fait et clos à Paris, au lieu susdit, par les soussignés, à quatre heures et demie de relevée, les jour et an que dessus.
Signé: J.-B.-E. Dumangin, p.-j. Pelleta, P. Lassus, N. Jeahroy Son cœur est inhumé à la Basilique royale de Saint-Denis
Né dix ans plus tôt, le 27 mars 1785, Louis-Charles, fils cadet de Louis XVI, était devenu l'héritier du trône à la mort de son frère aîné, le 4 juin 1789.
Le 13 août 1792, après la chute de la royauté, il est enfermé avec ses parents, sa tante,
Madame Elisabeth, et sa sœur aînée,
Madame Royale, dans l'enclos du Temple.
Il devient Louis XVII à la mort de son père, le 21 janvier 1793, et les grandes puissances européennes le reconnaissent comme tel.
Mais l'enfant du Temple n'a pas le loisir de jouir de son titre.
Il est enlevé quelques mois après à sa mère Marie-Antoinette et élevé à la dure, dans l'enceinte de la prison,par le cordonnier Simon.
Entre deux raclées, celui-ci lui apprend à chanter et jurer comme un vrai sans-culotte.
Il lui extorque des aveux indignes selon lesquels il aurait pratiqué l'inceste avec sa mère !
Ces fausses déclarations seront présentées au procès de Marie-Antoinette.
En pleine Terreur jacobine, en janvier 1794, Louis XVII est séquestré dans un cachot, ce qui achève de ruiner sa santé physique et mentale.
Après la chute de Robespierre et la fin de la dictature de la gauche jacobine, les Conventionnels modérés songent à le remettre aux Autrichiens en échange de prisonniers français.
C'est alors que survient sa mort pour cause de scrofule, une forme particulière de tuberculose que les rois capétiens, curieuse coïncidence, avaient la réputation de guérir en touchant les plaies des malades le jour de leur sacre.
Marie-Thérèse Charlotte, dite
Madame Royale, a plus de chance que son frère.
Elle est livrée à l'Autriche le jour de ses 17 ans, le 19 décembre 1795, contre des prisonniers français.
L'
«Orpheline du Temple» se marie en 1799 avec son cousin, Louis d'Artois, duc d'Angoulême.
Mais son attitude étrange à l'égard de son passé et des gens qui l'ont connue en France entretient la rumeur d'une mystérieuse substitution.
Menaces sur la Révolution
Suite à la mort en prison du petit Louis XVII, son oncle, le frère de Louis XVI, comte de Provence, devient pour les royalistes le souverain légitime.
Âgé de 40 ans, en exil à Vérone, en Italie, il prend le nom de règne de Louis XVIII.
En juillet 1795, alors que les députés de la Convention tentent de sortir à moindres frais de la Révolution, il publie une déclaration pour le moins maladroite :
«Il faut rétablir ce gouvernement qui fut pendant quatorze siècles la gloire de la France et les délices des Français, qui avait fait de notre Patrie le plus florissant des États et de vous-mêmes le plus heureux des peuples... Cette antique et sage constitution dont la chute a entraîné votre perte, nous voulons lui rendre toute sa pureté » En prônant un retour pur et simple à l'Ancien Régime, Louis XVIII hérisse beaucoup de Français, y compris parmi les plus modestes, qui ont gagné, avec la Révolution, un supplément d'égalité civile et la fin des privilèges.
Il menace aussi tous les Français qui se sont enrichis grâce à l'acquisition de
«biens nationaux» enlevés à l'Église.
Au total pas moins de 100.000 foyers.
Tous ces Français ne vont plus avoir d'autre but que de se prémunir contre le retour sur le trône de Louis XVIII.
Ils vont soutenir pour cette raison la dictature de salut public de Napoléon Bonaparte, sous le nom de Consulat, puis l'établissement du consulat à vie.
Ils vont enfin donner à Bonaparte le titre d'empereur avec succession héréditaire pour éviter que sa mort ne ramène Louis XVIII
Ce dernier accèdera au trône vingt ans plus tard, après l'effondrement de l'Empire, après avoir enfin renoncé au rétablissement de l'Ancien Régime.
Imposteurs
Selon une tradition bien établie chaque fois qu'un souverain disparaît dans des conditions troubles, des dizaines d'imposteurs ont contesté la version officielle de la mort de Louis XVII et revendiqué la succession de son malheureux père.
Le plus célèbre est un Prussien nommé Naundorff dont les descendants perpétuent la revendication après avoir obtenu de la Hollande le droit de porter le nom de Bourbon !
Mais le cœur momifié de l'enfant ayant été par miracle conservé, grâce au médecin légiste Philippe-Jean Pelletan qui l'avait examiné, des experts ont pu l'authentifier en comparant son ADN (acide désoxyribonucléique) à celui de la reine Marie-Antoinette.
Les conclusions de leurs recherches ont été présentés à la presse le 19 avril 2000 et exposées dans un livre de l'historien Philippe Delorme,
Louis XVII, la vérité.
Depuis le 8 juin 2004, les restes de l'enfant royal - Louis XVII pour les royalistes-reposent dans l'ancienne nécropole royale de Saint-Denis.
Le 08 juin 1795, le même jour de la mort de Louis XVII, la Convention Nationale berne les entretiens à Bâle et envisage de livrer les enfants à l'Espagne en échange de la signature garantissant la paix, alors que tout est mis en œuvre pour le faire mourir.