Aimée de Coigny

Le contrat de mariage nous donne des enseignements très précieux.

Douze douzaines de paire de gants blancs...
Il y a de quoi faire !

Et oui. Sans doute , l'usage des gants blancs était-il courant à cette époque ...
Du moins pour les personnes de la haute noblesse et peut-être à la Cour de France ?

Madame de Chimay a écrit:

Et oui. Sans doute , l'usage des gants blancs était-il courant à cette époque ...
Du moins pour les personnes de la haute noblesse et peut-être à la Cour de France ?

Absolument !
J’avais posté, je ne sais plus où ici, le budget « gants blancs » de la princesse de Conti.
322 paires en 1766, 432 en 1767, 444 en 1768 ou encore...576 paires en 1787.
En soie de Perse, soie de Tresme, en raz de Saint-Maur, à doigts fermés, en mitaines doublées, en mitaines lacées, pour la chasse, pour tous les jours mais tous...blancs ET parfumés !
J’adore !

Oui, le gant est un accessoire magnifique et combien hautement symbolique.

Impressionnant, cette énumération de gants.

Etat des dépenses pour le mariage de M. le Marquis de Fleury

Payé aux sieurs :

19 may 1785 , Langlois , bijoutier , 54 livres ; 23 may , Guidon, marchand de fleurs 259 livres ; 25 may, Jolivet, marchand de papier , 44 livres ; 26 may, Minat, bottier, 48 livres ; 29 may, Chardon , chapelier 23 livres ; 31 may, Melle Bertin, marchande de modes , 369 livres ; Foucart , drapier , 168 livres ; 1er juin , Le Normand , marchand de soye , 96 livres ; Boullenger , bonnetier 412 livres ; Sauvage , draps , 81 livres ; Darmandy , boutonnier , 25 livres ; Pecquet , marchande de plumes , 87 livres ; Gaillard, marchand gantier , 120 livres ; plus divers . Au total : 2410 livres, 4 solls.

D’autre part à M.Lapérière , marchand de galons , 312 livres ; aux gens de M. Le comte de Coigny , 48 livres ; à Gaillard , gantier 115 livres , 10 sols ; à Basty , évantailliste , 636 livres . Au total : 3521 livres, 13 sols .

Bans et célébration , 369 livres ; curé de Choisy, 45 livres ; galons d’habits des deux laquais de Mme la Marquise et chapeaux, 500 livres.

M. le marquis de Fleury doit à Dasse , tailleur du Roi à Paris le 4 juin 1785 :

-1 habit de valopine lilas , veste de basin brodée or et soie et culotte de soie noire
-1 redingote d’uniforme à revers
-1 habit de drap chiné , veste d’étoffe d’argent
-2 robes blanches piquées
-6 vestes et 6 culottes basin
-1 veste brodée or et soie

Mémoire pour M. le Marquis de Fleury , par Sagnier frères, tailleurs, du 31 may 1785 , pour les gens de Mme la Marquise lors de son mariage .
-Fait deux habits complets de drap écarlate galonné en argent , de 93 livres
-Fait deux habits de drap carmélite , deux vestes de drap écarlate galonné en or et deux culottes de prunelle noire 75 livres

le drap avait été fourni par Foucart , marchand drapier et avait coûté 483 livres, 2 sols, 6 deniers ;

Mémoires d’ouvrages et fournitures pour Monsieur le Comte de Coigny , faits et fournis par la veuve Alexandre le 6 juin 1785 :

Pour Lallemand , laquais du marquis de Fleury

-1 habit de drap merdoye à revers , gilet galonné , culotte noire , boutons jaunes surdorés .
-1 habit de poste en drap gris de fer , gilet de drap écarlate
-1 redingote de drap gris de fer
-1 frac de ratine

Le mariage fut célébré le 6 juin 1785 dans la chapelle du château de Choisy , dont le gouverneur était le comte de Coigny.
Choisy était le cadre rêvé pour un mariage. En effet, ce château a un merveilleux jardin.

La mariée, selon la mode du temps , portait un léger bonnet et pas de voile.
Quant au jeune marquis de Fleury , il endossa-sans doute pour la première fois, l’uniforme de sous-lieutenant au régiment du mestre de camp général des dragons que Dasse, tailleur du Roi –le fameux Dasse, venu de son Béarn en sabots et qui, à cinquante ans , ne savait ni lire, ni écrire et pouvait à peine signer , mais se trouvait riche de trois millions-avait exécuté pour la somme de 214 livres 3 sols 9 deniers : habit de drap vert à parements et revers écarlates , veste et culotte de drap blanc , boutonnières et galons d’or.
Après la messe, on distribua aux dames des éventails , dix à 24 livres la pièce , six à 12 livres et dix-huit à 6 livres.
Le dîner de noces fut donné au château , dans l’appartement qu’en sa qualité de gouverneur y possédait le duc de Coigny ;


J'avoue que je connaissais pas ce personnage de Dasse , tailleur du roi ni ces quelques détails sur sa vie.

Château de Choisy

http://fr.wikipedia.org/wiki/Château_de_Choisy

Voici un site où on peut mieux découvrir ce château

http://chateauchoisy.wifeo.com/le-chateau.php

Et bibliographie sur ce château

http://chateauchoisy.wifeo.com/bibliographie.php

Voici encore un château pour notre ami Derrick83

Il ne reste que fort peu de choses du château de Choisy. Seuls l'église de la ville actuelle de Choisy-Le-Roi, qui servait de chapelle au château et les pavillons d'entrée ont subsisté.
L'histoire du château est présentée par Georges Poisson dans le très beau livre Les Gabriel (Picard, 2004).
L'iconographie du château est abondante pour le début du XVIIIè siècle mais il est difficile de trouver des documents qui montrent les créations de Louis XV dans leur intégralité alors qu'elles furent constantes tout au long de son règne. J'envoie ici des représentations du début du XVIIIè siècle ainsi qu'un dessin montrant "le petit château", sorte de folie adjointe au "grand" par Louis XV, accompagné d'un plan.

https://servimg.com/view/11103966/16
https://servimg.com/view/11103966/17
https://servimg.com/view/11103966/18
https://servimg.com/view/11103966/19
https://servimg.com/view/11103966/20

G. Poisson mentionne à ce propos l'existence d'un plan de Gauche, daté de 1783, montrant le domaine avec l'ensemble des batiments construits par Louis XV.

source :

http://chateauxroyauxdispa.forumactif.fr/t37-chateau-de-choisy-le-roi

De 1775 à 1780, Marie-Antoinette y organise des amusements de toutes sortes.
Ainsi donc notre reine se serait bien plu dans ce château ?

Source

http://www.choisyen-citoyen.org/choisy-le-roi

Merci princesse.
C’est triste de lire comment, lentement mais surement, le château a disparu...

Il semble que le marquis de Fleury , après la cérémonie et pour achever son éducation , ait fait seul un voyage en Alsace. Mais au début de 1785 , il est en même temps que sa femme à Mareuil en Brie et quelques jours plus tard à Vigny.
En tout cas, si durant cette année 1785 et l’année 1786, le jeune marquis est encore considéré comme un enfant dont l’éducation n’est pas terminée, la marquise est vraiment traitée en « dame ».
Elle s’est installée dans l’hôtel de Fleury , rue Notre Dame des Champs.
Bâti pour l’abbé Terray , le ministre de Louis XV , vers le milieu du siècle, l’hôtel de Fleury comprend de vastes bâtiments en bordure de la rue , et en arrière, des jardins et un parc à l’anglaise finissant en terrasse sur le boulevard du Montparnasse. . Partout le calme des champs et des échappées sur la verdure. Du côté des quartiers de l’université , le parc et les enclos du couvent des Chartreux , puis le Luxembourg avec ses grands arbres que Watteau , à ses débuts ne se lassait pas de peindre. Au-delà du boulevard , le long duquel ne s’élèvent que de rares constructions , vers les villages du Montparnasse et de Montrouge , rien que des « marais » alignant leurs plans rectilignes.

L’hôtel de Fleury s’élevait à l’endroit où se trouvent actuellement la rue Brès et la rue Stanislas. Le collège Stanislas y fut installé dès 1804 et y resta jusqu’à la fin du règne de Louis-Philippe.
Le vaste hôtel de Fleury est aussi habité par les grands –parents du jeune marquis.
L’appartement habité par Aimée est remanié selon ses goûts. Elle a son personnel domestique particulier composé de quatre laquais , d’un cocher, d’un postillon et de deux femmes de chambre.

A partir de 1787 , l’un et l’autre des époux sont complètement émancipés. Le 22 avril 1787 , la jeune marquise de dix huit ans fait son apparition à Versailles ; elle est présentée à la reine et au roi par la grand-mère de son mari. La veille, pendant trois ou quatre heures , elle a répété avec son maître à danser cette scène de la présentation , rien ne devant être laissé au hasard ou à l’improvisation et le jour de la cérémonie, elle est arrivée à Versailles en « grand corps », avec une jupe de traîne démesurée et toute étincelante de bijoux.

Nous y sommes, grâce à vous. Merci, Princesse !

J'apprécie beaucoup ces péripéties !

En décembre 1785 , on commande notamment pour la jeune marquise un lit de repos recouvert de gros de Tours bleu qui revient à 227 livres 15 sols , et en janvier 1786 , chez Legrest-Desmarest , marchand miroitier , rue St Denis , un « écran à trois feuilles en bois d’acajou garni en taffetas vert « , du prix de 45 livres , ainsi qu’un « écran simple en taffetas vert « du prix de 10 livres.

Le marquis de Fleury connaît à son tour les honneurs enviés de la Cour . Le 22 mars 1788 , il est présenté au roi , selon l’usage , après la présentation, il monte dans un carrosse de Sa Majesté et le suit à la chasse.
La mort du grand-père du marquis , survenue le 13 avril 1788 , confère aux époux les titres de duc pair et duchesse.


Le ménage est tout à fait dans le goût de l’époque , car le duc et la duchesse ne vivent jamais ensemble. Le duc est tantôt à Versailles , où il remplit par quartier ses fonctions de premier gentilhomme de la Chambre , tantôt dans ses garnisons , Neufchâteau , Metz ou Nancy , où pour tuer l’ennui , il se met à jouer avec frénésie. La duchesse n’est ni intéressée par les villes de province ni par Versailles. Pourtant , à Versailles , Aimée a le tabouret depuis le 22 juin et les grandes entrées depuis le 23 novembre .
La prise de tabouret était précédée d’une nouvelle présentation . La duchesse de Fleury fut présentée cette fois par Mme de Montmorency –Luxembourg , princesse de Tingry , dont le mari commandait une des quatre compagnies de gardes du corps.
Non, ce qui l’attirait, c’était Paris.

Est-il expliqué pourquoi la prise du tabouret et des grandes entrées furent à des dates différentes ?

Je pensais que le titre de duchesse octroyait illico le tabouret et les grandes entrées.

Si je comprends bien, la présentation à la Cour du couple est intervenue avant que le décès du duc ne leur transmette ce titre, et donc le droit au tabouret pour la duchesse ?

Mercy-Argenteau a écrit:

Si je comprends bien, la présentation à la Cour du couple est intervenue avant que le décès du duc ne leur transmette ce titre, et donc le droit au tabouret pour la duchesse ?

Oui mais elle devient duchesse en avril et reçoit le tabouret seulement en juin.