Madame Clotilde

Le deuxième portrait de Clotilde affiché par Madame Sophie est signé du peintre flamand Leclerc. Il aurait été réalisé en 1780, mais il témoigne toujours du solide embonpoint de Clotilde, ce qui est contradictoire car d'après ce que je sais elle aurait commencé à maigrir à cette époque et de plus il ressemble comme deux gouttes d'eaux à un portrait de Ducreux réalisé vers 1775. Ha moi, et mes doutes alors !!!  
Quant au premier portrait, je reste sur mes positions, il ne ressemble guère à Clotilde, et la coiffure de la dame témoigne de la folie capillaire des années 1770, alors que la princesse de Piémont à cette époque avait une surabondance de capitons...  

Cher ami , le premier portrait est identifié à la reine Marie-Clotilde et signé Giovanni Panealbo.

Quant au second , il y a un air de famille évident . Il me semblait bien avoir reconnu le style de Leclercq , notamment dans l'emploi du mobilier néoclassique (probablement doré) dont on retrouve les mêmes exemplaires dans le portrait de la comtesse d'Artois et de ses enfants par ledit peintre .

Leclercq était un peintre intimiste qui ne peignait pas d'après modèle , mais au moyen d'autres tableaux . Il put très bien donc exécuter cette toile de Madame Clotilde en 1780 d'après un portrait de Ducreux de 1775 . Leclercq disposait probablement dans son atelier du mobilier (la table et le canapé) présent dans presque tous ses portraits d'intérieurs..

Compliqué...

D'après les archives , la présence de Charles Leclercq est attestée à Turin en 1780-1781 ...

Il a aussi peint d'autres membres de la famille royale , on y reconnait son style comme sur les deux tableaux précédents :

Marie-Elisabeth-Philippine-Hélène de france dite Madame Élisabeth , jouant de la harpe , par Charles Leclercq - 1783 (conservé au chateau de Versailles ) :


(c)EPV

(Toujours la même table néoclassique dorée à tores de laurier , avec le vase de verre et bouquet de fleurs)

La reine Marie-Antoinette avec ses enfants Madame royale et le dauphin Louis-Joseph , par Charles leclercq.1783 (conservé au chateau de Sassenage) .


( table néoclassique dorée carrée cette fois , avec le vase de verre et fleurs , ainsi que le buste du roi ).

Ce dernier portrait est vraiment attendrissant et il gagne à être connu

Madame Sophie a écrit:

Madame Élisabeth jouant de la harpe , par Charles Leclercq

On distingue un petit portrait dans le fond du tableau... :cyclops:

Je me suis dis que ce pourrait être sa mère...mais vue la coiffure ce serait plutôt sa sœur Clotilde ou bien sa Tante Adélaïde, non?

Bien à vous.

Majesté a écrit:

Je me suis dis que ce pourrait être sa mère...mais vue la coiffure ce serait plutôt sa sœur Clotilde ou bien sa Tante Adélaïde, non?

Je ne vois pas assez bien.
J'aime beaucoup ces sortes de double portraits.

Vu la présence de la fameuse table et du vase , ce tableau dans le tableau est certainement de Charles Leclercq lui-meme .Peut-etre la reine ?

Leclercq semble etre habitué de ces clins d'oeil , comme le profil d'homme présent sur les ceintures de ses tables ..

Il m'est impossible de discerner non plus ...

C'est curieux comme, en amont, la comtesse d'Artois et ses bambins baignent dans le bleu .
La craquelure très visible de la peinture ajoute au charme du tableau .

Citation :

Je ne vois pas assez bien.  

C'est maigre en clarté mais voici ce tableau agrandi :



Bien à vous.

On distingue néanmoins les caractéristiques d'une composition de Charles Leclercq : un sujet féminin de qualité , assis dans un canapé à accoudoirs , en face d'une table (ici carrée) sur laquelle est posé le fameux vase de verre , avec surement des fleurs .

J'y vois bien la reine .

Merci Majesté pour l'effet loupe...

Madame Sophie a écrit:

J'y vois bien la reine .

C'est ce que j'imaginais aussi à dire vrai.

Pourquoi forcément la reine ?

La pause fait penser à celle du portrait de Vigée-Lebrun de 1778 (avec la rose dans la main droite devant le corps), mais bon c'est sûr que ça ne suffit pas pour faire de cette femme Marie-Antoinette

Et le modèle est ici assis, comme Leclercq aime à les faire poser

Bien à vous.

Ah bon? Je la voyais debout

Ben la table est au niveau des hanches de cette Dame...

Bien à vous.

Dans son ouvrage "De Soie et de Poudre : Portraits de Cour" de Xavier Salmon, un chapitre sur les portraits intimistes évoque le portrait de la princesse de Piémont par Leclerc et il est dit que ce portrait est également reproduit en arrière-fond sur la toile représentant Madame Elisabeth jouant de la harpe.

Ah merci pour l'info Dominique Poulin !!
Nous avions donc faux Madame Sophie...

C'est donc le portrait de Madame Clotilde du même auteur qui apparait en fond : il est vrai que lorsqu'on le regarde c'est la même pose !

Je n'y avait pas pensé car le portrait posté en page 15 de ce même sujet est une mauvaise reproduction en noir et blanc , je n'ai pu en trouver en couleur malgré mes recherches , et comme je ne sais pas où il est conservé (un château-musée piémontais probablement ).

Majesté, tu avais raison !

Suite du chapitre III

La Princesse de Piémont 1775-1789

De tous les membres de la famille royale de Savoie, il en est un qui prédomina désormais dans la nouvelle vie de Clotilde. C'est son époux, Charles-Emmanuel de Savoie, prince royal de Piémont, l'héritier du trône. Le fils aîné des souverains piémontais avait alors vingt-quatre ans, soit huit ans de plus que sa fraîche épousée. Cette différence sensible a du jouer un rôle important dans la vie des jeunes mariés, du moins au début. Le rang éminent de Charles-Emmanuel à la Cour de Turin et la sollicitude protectrice de son rôle d'ainé ont probablement rassuré Clotilde, déracinée de sa famille française.
Appelé à succéder un jour à la couronne de Piémont-Sardaigne depuis 1773, il vivait dans l'ombre de son père et n'avait guère suscité jusqu'alors un grand intérêt sur la scène internationale. Son apparence physique nous échappe malheureusement malgré quelques portraits parvenus jusqu'à nous, mais aucun témoignage contemporain de sa jeunesse n'a été retrouvé. Il semble que le prince de Piémont bénéficiait d'une taille avantageuse et plus élevée que la moyenne de l'époque, c'est ce que laisse supposer un portrait de Leclerc en 1781. Son visage très allongé s'accentua avec le temps au point de paraître émacié et l'expression du regard ne manquait pas de charme en dépit d'une myopie très basse. En revanche, les proportions mal équilibrées du corps révélaient les déficiences de sa santé fragile, il était de nature maigre et l'âge venant, il se décharnera davantage au point de susciter l'apitoiement chez les visiteurs étrangers. A tout le moins, Charles-Emmanuel ne ressemblait pas à un apollon !

Présenter un portrait moral circonstancié du prince serait un entreprise risquée, les sources françaises à se sujet se réduisant à fort peu de choses. Le Dictionnaire de Biographie Universelle Michaud de 1836, soit dix-sept ans après la mort de Charles-Emmanuel le décrit ainsi :
"Doué de quelques heureuses dispositions et d'un caractère sage et réfléchi, tout annonçait en lui un bon prince ; mais ses premiers maitres, le bailli de Saint-Germain et le savant cardinal Gerdil, prévoyant peu les circonstances difficiles ou il devait régner, s'occupèrent beaucoup plus de lui inspirer des sentiments de religion et d'humilité que d'en faire un guerrier et un politique habile, comme la plupart de ses ancêtres."
Que le fils aîné de Victor-Amédée III ait mené précocement une vie intérieure ascétique, voire mystique, ne fait aucun doute et à l'instar de sa femme Clotilde, on note une tendance schizophrénique entre son état de futur roi et celui de son repli dans les austérités religieuses les plus marquées. Charles-Emmanuel de Savoie ne manquait pourtant pas d'esprit d'à-propos, ni d'un humour ironique cinglant qui pouvait déconcerter.
C'est ainsi qu'un jour, ayant été rabroué par son père sur une observation qu'il s'était permis de formuler, il résolut de garder le silence. Victor-Amédée III ne lui en tint pas longtemps rigueur lui demandant par la suite son avis sur une affaire à trancher. La cause était perdue, son fils tira sa montre en donnant à son père cette réponse sibylline :
- "Sire, je ne me mêle que de régler ma montre, et elle va bien !".

PS : La suite demain, si je trouve le temps nécessaire...

Merci Dominique

J'aime bien la réplique du fils de Victor-Amédée III, assez significative

Elle n'est pas exempte d'humour .....