Madame Elisabeth

pimprenelle a écrit:

peindre la reine à la fois bête comme ses pieds et plus diaboliquement calculatrice.

N'est-ce pas ? ça m'a toujours frappée comme toi !

Effectivement, je n'y avais jamais pensé, et comme tout un chacun bien pensant, je plaignais Barnave qui se dévouait pour la Reine -comme tant d'autres, il avait été séduit par elle, et dans quelles circonstances ! le retour de Varennes, la famille royale épuisée, à bout, couverte de poussière et d'injures, et la Reine, aussi bien qu'Élisabeth, restaient séduisantes, à voir la ridicule réaction de Pétion.

Mais Barnave est respectueux, touchant, sincère, et Marie Antoinette ne l'est pas avec lui.

Votre analyse de la situation nuance ce point de vue. En effet, comment peut-on être une petite oie frivole, et une calculatrice impitoyable ?

En l'occurrence, ce n'est pas Marie Antoinette qu'il faut montrer du doigt, mais plutôt les autres monarques européens qui n'ont rien fait pour sauver la famille royale française, à laquelle pourtant les liait non seulement l'intérêt monarchique, mais les liens du sang : que des menaces telles le manifeste de Brunswick qui ont attisé la haine. Sans doute étaient ils secrètement heureux que la France se débatte dans ces problèmes, cela renforçait leur position ?

Cela, Marie Antoinette, ni Élisabeth, ne pouvaient le concevoir. Pour elles, la loyauté aurait dû jouer.

En effet, par la suite, des malheurs plus grands ont rapproché les deux femmes, puisque la dernière lettre de Marie Antoinette a été pour Élisabeth et qu'au Temple elle lui avait confié l'éducation de sa fille.

La lecture de la correspondance de cette tranche-là dément tout calcul froid et cynique. Marie Antoinette est paumée. Elle vient de supporter un échec cuisant, qui lui brise le coeur. Mais la tentative était perdue, elle ne l'ignorait pas, perdue à cause des lenteurs et atermoiements des cours européennes, à commencer par l'Autriche.

De bonne foi, Marie Antoinette se tourne vers tous ceux qui s'intéressent à elle. Il ne reste plus grand monde. Barnave et Gustave, représenté par Fersen. Le premier est un has been, il n'a plus beaucoup d'aura au sein de l'assemblée, et il ne l'ignore pas. Il sert les souverains par idéal, mais peut être aussi un peu pour redorer son propre blason. Le second se montre très circonspect. En effet, la Suède ne peut rien sans les autres cours, et celles-ci se font tirer l'oreille.

De tout cela, Marie Antoinette est consciente. Elle examine donc les options présentes, pleine de méfiance, et veille à ne décourager aucune bonne volonté. Les souverains ont trop besoin de secours pour se permettre de rejeter qui que ce soit, à ce stade-là.

J'ai toujours eu de l'admiration pour la grandeur d'âme dont la familleroyale a fait preuve pendant sa captivité au Temple : ils subissaient des humiliations sans nombre, des graffitis injurieux et menaçants sur les murs, les cris de la foule ("Madame à sa tour monte, ne sait quand reviendra"!), la prose ordurière du Père Duchesne ("la grosse Élisabeth pleure dans son coin"), le petit dauphin arraché à sa mère, je crois que n'importe qui aurait craqué nerveusement, et haï ses geôliers.

Le roi, la reine, Élisabeth, restaient parfaitement courtois et tentaient même de converser un peu avec leurs geôliers (on se souvient de l'anecdote de Marie Antoinette faisant respirer un parfum à un garde, ou Élisabeth demandant poliment à un autre pourquoi il fumait autant ; il lui fut répondu grossièrement "apparemment parce que ça lui plaît")

Ce que je veux dire, même ceux qui considèrent qu'Élisabeth, ou Marie Antoinette, ou le roi, ont commis des erreurs et des fautes, même les plus ardents défenseurs de la révolution, devraient s'incliner devant cette grandeur.

Et ce que je comprends mal, c'est cette haine de l'époque, que certaines personnes entretiennent encore. On ne voit de Marie Antoinette que la petite reine dépensière et la fausse bergère de Trianon, d'Élisabeth qu'une bigote aux vues étroites, sans souligner leur héroïsme de femmes dans une époque terriblement misogyne. Quel manque de cœur !

Cécile de l'Hérault a écrit:

Et ce que je comprends mal, c'est cette haine de l'époque, que certaines personnes entretiennent encore. On ne voit de Marie Antoinette que la petite reine dépensière et la fausse bergère de Trianon, d'Elisabeth qu'une bigotte aux vues étroites, sans souligner leur héroïsme de femmes dans une époque terriblement misogyne. Quel manque de cœur !

C'est une question que je me pose souvent, chère Cécile. Vu de l'extérieur, de quelqu'un qui est de culture française mais pas française, c'est réellement étonnant. On dirait deux camps qui s'affrontent, les républicains, le plus souvent de gauche et progressistes, contre les partisans de Louis XVI, presque toujours royalistes et réactionnaires, pour ne pas dire carrément d'extrême droite.

C'est très curieux... Les deux parties se montrent aussi intransigeantes et de mauvaise foi l'une que l'autre.

Aussi suis-je très heureuse d'avoir trouvé parmi vous, mes amis, des interlocuteurs capables de nuances.

........ des interlocuteurs de choix, que dis-je ? d'élite !!!

Bon, eh bien , je les quitte, ces interlocuteurs d'exception, car il fait le plus beau soleil du monde et que je vais aller le goûter pleinement en marchant dans la campagne avec deux amies ....

A tout à l'heure !!!

Ici aussi, il fait beau !   Bonne promenade !  

Dans mon coin de campagne , j'ai aussi un soleil radieux !

Il était temps, hein ?! Les p'tits zoiseaux commençaient à la trouver longue...

Ah oui ! Comme l'hiver a été long , hein !

Je suis comme Pimprenelle, de culture mixte, à la fois française et portugaise.

Je pense que c'est partout pareil, on colle facilement une étiquette aux gens.

En France, qui dit défenseur de la famille royale et qui a une autre vision de l'histoire, est catalogué d'extrême droite.

Je m'empresse de dire que ce n'est pas mon cas, car dans mon "autre pays" la génération d'avant a subi une véritable dictature fasciste que je ne souhaite certainement pas voir revenir, où que ce soit.

Mais l'école donne une vision très partiale des choses, je trouve : même de nos jours, l'histoire d'une Marie Antoinette ennemie du peuple, insultante même avec son histoire de manger de la brioche, est de rigueur, et une Elisabeth absolutiste et niaise à la fois.

J'ai essayé de mon mieux de rétablir une vision plus nuancée pour ma fille. Mais je pense aux personnes qui ne s'intéressent pas à l'histoire : ils laissent dire, les enfants le croient, et c'est ainsi que se perpétuent les légendes absurdes.

Bonne promenade, Princesse ! Ici aussi, il fait beau, mais je suis trop fatiguée pour sortir. On ne dirait pas à priori, mais les journées d'une maman au foyer peuvent être épuisantes

Une vision réductrice de l'Histoire est trop souvent enseignée, à mon avis. Ah, bien sûr, il est plus facile d'obtenir l'adhésion du public avec une caricature bien flash qu'en lui montrant que tout n'est jamais ni noir ni blanc. Mes élèves, même mis devant les sources, refusent souvent de renoncer au mythe de Néron mettant le feu à Rome.

Encore une idée reçue ! Comme Roland à Roncevaux combattant les Maures (qui étaient des Basques chrétiens) et toute la lyre.

Bravo pour le type d'enseignement que vous proposez : j'aurais adoré un professeur d'histoire tel que vous.

Merci de votre gentillesse, chère Cécile. J'enseigne en fait les langues anciennes, où le commentaire de textes occupe une place importante.

pimprenelle a écrit:

Bonne promenade !  

Merci, Pim, excellente promenade ! Toute la nature est en folie, c'est vraiment le printemps !!!  L'air est doux, le soleil presque chaud .
 Je suis rentrée, j'ai avalé un mug de thé et je suis ressortie : séance de jardinage, plantation  puis arrosage de petites choses coussinantes au feuillage argenté, fleurs blanc éclatant !
Je suis morte ................. mais top ravie !!!!!!!

Maintenant, repos ! Je toupine dans mon cher Boudoir  .

Aujourd'hui 10 mai : double anniversaire de décès ....Celui qui réunit le grand père et sa dernière petite fille !
Louis XV en 1774 et Élisabeth en 1794...Étrange comme toujours les "clins d'œil " du hasard...

J'y ai pensé en me levant...mais j'ai oublié de le noter ici, merci, chère Cécile, d'avoir pallié à cela


Bien à vous.

Bien que ce roi ne fasse pas partie du siècle étudié par notre forum , n'oublions pas tout de même Henri IV. Un certain 14 mai 1610, il se faisait assassiner dans la rue de la Ferronerie à Paris par un certain Ravaillac....
C'est de lui que descend Louis XVI.

D'ailleurs , le sort des régicides n'était guère enviable . Ils étaient condamnés à être écartelés en place publique....

Madame de Chimay a écrit:

Bien que ce roi ne fasse pas partie du siècle étudié par notre forum , n'oublions pas tout de même Henri IV. Un certain 14 mai 1610, il se faisait assassiner

Qui l'oublie?
Cet anniversaire est dans quatre jours, Princesse !

Bien à vous.

Décidément , il est écrit que je ne suis jamais au tempo pour les anniversaires : soit , je les fête en retard, soit à l'avance !
Au temps pour moi !

Attention! Vous parlez de fêter une mort...préférons plutôt la notion de commémoration ou de souvenir, non?

Bien à vous.

Oui, vous avez tout à fait raison.

Le sacrifice du soir : Vie et mort de Madame Élisabeth, soeur de Louis XVI de
Jean de Viguerie
Cerf, 10 juin 2010, 188 p : 19 euros

Résumé Amazone :

"Orpheline à l'âge de trois ans, Madame Elisabeth, la petite soeur de Louis XVI, la dernière de la famille, bénéficie pourtant d'une instruction complète. Sportive, passionnée d'équitation, excellente en mathématiques et en dessin, vive, active et rapide, elle étonne son entourage par la diversité de ses talents et la fermeté de son caractère. Avec sa maison princière et ses amies, elle forme une petite cour au milieu de la cour, y faisant régner la piété et la paix. Elle ne se marie pas, n'entre pas au couvent. Sa vocation est de rester avec les siens, le roi, la reine et leurs enfants. Dans les dernières années de l'Ancien Régime, comme avertie de la tragédie, elle se prépare pour les secourir. A partir de 1789, elle les assiste et les réconforte. Refusant de les abandonner, elle quitte avec eux Versailles pour les Tuileries, et les Tuileries pour la prison du Temple. Après le roi et la reine, elle est guillotinée. Le régime ne peut pas l'épargner. Elle est son ennemie. Elle a toujours vu dans la Révolution un mensonge et une illusion. Elle a toujours déploré la faiblesse de son frère, et n'a jamais pu y remédier. Ange consolateur, grande figure de la résistance spirituelle à la persécution antichrétienne, elle est aussi l'exhortatrice. Elle encourage ses amies à la perfection chrétienne. Dans la voiture du retour de Varennes, elle convertit Barnave à la cause du roi. Sur le chemin de l'échafaud, elle exhorte à la mort ses compagnons de supplice. Puis elle quitte ce monde sans regret, tout à l'espérance de se " retrouver dans le sein de Dieu " avec sa " famille ". "

Si Elle a converti Barnave, pourquoi la famille royale n'aurait pas converti Hébert ? C'est la question que je me pose justement...

C'est surtout Marie-Antoinette qui convertit Barnave. Et je doute que celui-ci se soit fait un nom en employant les termes les plus abjects.