Louis XVII

Ce n'est pas grave, nous pouvons déplacer les messages facilement

Deux choses que j'ignorais à propos de Louis XVII et que je découvre dans le livre de Beauchesne :

- Tout d'abord, peu après l'exécution de sa mère, Louis-Charles aurait eu pendant quelques temps comme compagne de jeu une enfant de son âge : la fille de Barelle, un des rares gardes à lui avoir montré de la compassion. Il semble donc, d'après la source de Beauchesne ("les mémoires de la femme Cloüet, blanchisseuse du Temple"), que cet homme fausait venir sa fille pour qu'elle joue avec lui
Louis-Charles aurait eu de l'affectation pour cet homme, par exemple il aurait expressément gardé pendant 2 jours un poulet pour lui offrir :
"Barelle fit quelques difficultés pour l'accepter. Témoin de ce débat, Simon dit au municipal : "Allons, prends-le; il y a deux jours qu'il te le garde."

Rien de bien formidable en soi, mais savoir que Louis-Charles a pu jouer et prendre un peu de bon temps avec une autre enfant, c'est assez rare pour le noter ici

- Autre nouveauté : je pensais que la dernière signature connue de Louis-Charles était celle figurant en bas de l'acte d'accusation d'inceste d'Hébert.
Or Beauchesne nous dit (élément à l'appui, authentique ou non, là c'est un autre débat...) qu'il y en a eu une autre peu après, la dernière. Les révolutionnaires voulant à tout prix faire tomber Elisabeth, ils ont forcé Louis-Charels a signer une accusation contre sa tante (je ne savais pas ).
Voici un extrait de ce document, présent au dépôt de l'Empire :
"Et avant de signer, le petit Capet a dit que sa mère craignait sa tante; et que sa tante était celle qui exécutait le mieux les complots."

Les révolutionnaires ont donc une 2ème fois manipulé un enfant, pour arriver à leurs fins, faute de preuve....
Mais selon Beauchesnes, cette accusation n'a pas aboutie tant les éléments manquaient...

Voici donc une photo de cette fameuse signature, toute aussi maladroite et révélatrice de l'état psychologique de Louis-Charles : :s:



Simon y a même laissé aussi un petit mot :s:

C'est très intéressant, ça... Je n'ai jamais entendu parler de cette dernière signature. Quid de son authenticité ? Où l'a-t-on trouvée ? Où se trouve-t-elle actuellement ?

Oui c'est une première pour moi aussi

Selon Beauchesne, ce document date du 5 brumaire an II (26 octobre 1793), et elle se trouve au dépot des Archives de l'Empire, Armoire de fer.

Et la signature est cohérente avec celle sur l'acte d'accusation d'Hébert

Merci, Chou, de nous faire ainsi partager vos lectures. Pauvre gosse !!! que ne lui aura t-on pas fait subir ?

De rien

C'est très dur à lire en effet...

C'est pour ça que j'évoque ici cette petite fille avec laquelle il a pu jouer, même un petit moment, ça fait du bien de lire ce genre de chose

Les révolutionnaires lui ont fait faire n'importe quoi, honte à eux!

Encore une anecdote que je découvre, celle que les révolutionnaire ont appelé "la conspiration des canaries" :

Il a été offert à Louis-Charles fin 1793 plusieurs serins, dont un lui plaisait particulièrement. Louis-Charles lui a donc accroché un petit ruban rose à la patte pour pouvoir le suivre en vol et le distinguer des autres.
Quant les municipaux découvrirent ça, voici leur réaction pour le moins ridicule :

"Que signifient ce chant factieux et ce ruban rose ornant comme une décoration un oiseau privilégié? Cela sent l'aristocratie et dénote une distinction que les républicains ne sauraient tolérer."
Et ils ont donc fait enlever le ruban au serin

Incroyable non?

Je connaissais de nom cette "conspiration des canaries" mais j'avais oubléi que c'était aussi puéril :s:
Beauchesne ne donne pas sa source, dommage...

Jamais entendu parler de ça non plus. C'est énorme d'imbécillité !

C'en est même risible tellement c'est ridicule

pimprenelle a écrit:

Jamais entendu parler de ça non plus. C'est énorme d'imbécillité !

Et de méchanceté je trouve !

Oui, enfin là ils n'en étaient plus à ça près

Chou d'amour a écrit:

Oui, enfin là ils n'en étaient plus à ça près

Exact, mais là c'est un peut la maman que je suis qui s'est exprimé.

Rassurez-vous, le serin n'a rien eu et ils l'ont redonné à Louis-Charles, avec les autres, et après ce que ce pauvre petit avait déjà pu voir, là ça reste bien plus ridicule que méchant, c'est dire

Je savais que Louis Charles avait une compagne de jeu mais j`ai toujours que c`était la fille de la blanchisseuse et non pas de Barelle qui venait chaque fois qu`elle allait chercher du linge.

Louis Charles a signé quatre documents, celui du 5 et 6 octobre, un du 26 octobre et l`autre au mois de décembre. Et aussi, il existe des devoirs de Louis Charles sur lesquels son père lui faisait écrire son nom.

Fleurdelys

Citation :

Je savais que Louis Charles avait une compagne de jeu mais j`ai toujours que c`était la fille de la blanchisseuse et non pas de Barelle qui venait chaque fois qu`elle allait chercher du linge.

D'après Beauchesne, ce serait justement la blanchisseuse qui a rapporté le fait que la fille de Barelle venait jouer avec Louis-Charles

Citation :

Louis Charles a signé quatre documents, celui du 5 et 6 octobre, un du 26 octobre et l`autre au mois de décembre. Et aussi, il existe des devoirs de Louis Charles sur lesquels son père lui faisait écrire son nom.

Celui dont parlait Beauchesne était de Décembre je crois donc ça confirme ce que vous dîtes Fleurdelys
Par contre celui du 26 octobre ne me dit rien...

Après le 9 Thermidor et la chute de Robespierre, la situation du pauvre Louis-Charles s'est améliorée (même si elle ne pouvait que s'améliorer, dans le sens où il était laissé complètement à l'abandon, pire encore que son sort avec Simon ), grâce à Laurent, le nouveau responsable du captif, commé par la Convention.
A sa prise de fonction, il n'a pu que constater la situation quasi indescriptible dans la quelle se trouvait Louis-Charles. Beauchesne le décrit (suivant les sources de Gomin et Laurent), âmes sensibles s'abstenir :

"En peu de minutes, la porte fut enlevée : les visiteurs entrèrent. Alors apparut le spectacle le plus horrible qu'il soit donné à l'homme de concevoir; spectacle hideux qui ne présenteront jamais deux fois les annales d'un peuple civilisé, et que les meurtriers mêmes de Louis XVI ne peuvent contempler sans une pitié douloureuse mêlée d'effroi.
Dans une chambre ténébreuse d'où il ne s'exhalait qu'une odeur de mort et de corruption, sur un lit défait et sale, un enfant de neuf ans, à demi enveloppé d'un linge crasseux et d'un pantalon en guenilles, gisait, immobile, le dos vouté, le visage hâvre et ravagé par la misère, dépourvu aujourd'hui de ce rayon de vive intelligence qui l'éclairait naguère; sur ses traits si délicats, on ne voyait plus que la morne apathie, que l'inertie la plus sauvage et qui semblait attester la plus profonde insensibilité. Ses lèvres décolorées et ses joues creuses avaient dans leur pâleur quelque chose de vert et de blafard; ses yeux bleus eux-même, agrandis par la maigreur du visage, mais dans lesquels toute flamme était éteinte, semblaient, depuis qu'ils ne reflétaient plus l'azur du ciel, avoir pris dans leur terne immobilité une teinte grise et verdâtre. Sa tête et son cou étaient rongés par des plaies purulentes; ses jambes, ses cuisses et ses bras, grêles et anguleux, étaient démesurément allongés aux dépens du buste et jaunâtres; ses pieds et ses mains, qui ne ressemblaient plus à une chair humaine, étaient armés d'ongles excessivement longs et ayant la dureté de la corne. Une crasse invétérée collait comme une poix sur ses petites tempes ces beaux cheveux blonds que devait toucher un jour la couronne de France, et aujourd'hui livrés à la honte de la vermine; la vermine lui couvrait aussi le corps; la vermine et les punaises étaient entassées dans chaque pli de ses draps et de sa couverture en lambeaux, sur lesquels couraient des araignées noires.
[...]
Au bruit qu'avait fait la porte en s'ouvrant, l'enfant avait tréssailli par un mouvement nerveux; mais il ne s'était retourné que légèrement, regardant à peine qui entrait[...]
Etonné de trouver sur la petite table son dîner presque intact, un des commissaires lui demanda pourquoi il ne mangeait pas. Cette demande ne fut pas d'abord mieux reçue que les autres; mais comme elle fut renouvelée plusieurs fois par le plus ancien de la députation, qui s'était approché de lui, et dont il avait pu remarquer la tête grise, l'attitude convenable et l'accent paternel : "Non, je veux mourir", dit-il enfin d'un ton tranquille et résolu, qui attestait, par l'absence même de toute émotion, des souffrances sans remède, un dégoût sans consolation et des chagrins sans espérance."

Voilà un des tristes bilan de la Révolution, trop souvent voire quasiment tout le temps oublié, qui reste très dur à lire mais qui relève d'une vérité

Je ne sais pas si cette phrase de Louis-Charles, "Non, je veux mourir", est authentique (c'est la 1ère fois que je l'apprends...), mais elle reste effrayante quand même :s:
Les symptômes décris là semblent aussi montrer qu'il était clairement malade en 1794, d'une tuberculose comme le défend M. Delorme.

Par la suite, Laurent fit donc nettoyer sa chambre, il lui donna de nouveaux linges, de nouveaux vêtements et il le promena quelques fois au dehors...une grande bouffée d'air frais pour Louis-Charles donc, même si ce dernier restait très atteint, forcément :s:
D'ailleurs, pour la première fois depuis 1793, il était appelé M. Charles et il était quelques fois vouvoyé, au lieu du "Capet" et du tutoiement

On a beau le savoir, ces témoignages atterrent toujours autant ...

Oui, c'est vraiment très difficile à lire

On en vient même a regretter la période avec Simon, c'est dire comment était sa situation

C'est certain ! Nous avons vu que ces Simon n'étaient pas aussi mauvaises personnes que le veut la tradition royaliste (Lescure : "Vieilles maisons, vieux papiers") et , quels qu'ils aient pu être, c'étaient des êtres humains, c'était la vie ... alors que l'isolement, quoi de plus affreux ? Le petit Roi a bel et bien été emmuré vivant.

Beauchesne trace un portrait très dur de Simon, mais nous savons qu'il n'est pas toujours objectif car clairement anti-révolution

Mais vous avez raison, le pire que Louis-Charles ait eu à subir est bien cet isolement une fois Simon levé de ses fonctions, un isolement total dans une chambre très sombre, avec des gardes qui le faisaient lever au beau milieu de la nuit juste pour constater sa présence à leur prise de fonction.
On se demande même quelle notion du temps il a pu avoir pendant ces presque deux ans. Il n'avait rien pour jouer ou s'occuper, donc l'ennui devait être atroce...

C'est ce qu'a essayé de se figurer Chantal Chandernagor, pour écrire sur la captivité de Louis XVII, son livre très dur, je dirais même insoutenable, "La chambre".

Ah je ne l'ai pas lu

C'est dur à lire, mais je trouve qu'il faut le lire, car c'est édifiant :s:

Ne connaissant que l'épisode du cordonnier Simon, j'ignorais pour ma part que le petit Dauphin avait été de cette façon emmuré. De telles atrocités, qui plus est envers un enfant de cet âge, sont ô combien terrifiantes. Vivre, si ce n'est survivre, dans ces conditions relèvent véritablement d'un calvaire. Il va de soi que cet isolement dans le noir lui a fait perdre de repères temporels ainsi que sa lucidité.
Merci pour le conseil de lecture que je ne manquerai pas de suivre.

L'enfant n'est plus Dauphin, Chevalier, mais (si peu) Roi ...

Oui, le pauvre