Madame Elisabeth

Citation :

Osterreich a écrit:

Je n'avais jamais entendu ou lu cet aspect antisémite de Madame Elisabeth !!! Est-ce dans le livre d'Anne Bernet que tu as rencontré cette information ? (j'ai cet ouvrage, mais je ne l'ai pas encore lu).

Elle l'écrit à Angélique de Bombelles. Anne Bernet en parle très rapidement .

J'avoue que je suis très étonné... Reste à savoir quelle était l'ampleur de ce préjugé...

Osterreich a écrit:

J'avoue que je suis très étonné... Reste à savoir quelle était l'ampleur de ce préjugé...

Ben elle est 100% antisémite.

Voici ce que j'ai trouvé sur "l'antisémitisme" au XVIIIème siècle et ce qu'en pense Hannah Arendt :

Hannah Arendt, née Johanna Arendt à Hanovre le 14 octobre 1906 et morte le 4 décembre 1975 à New York, est une philosophe allemande naturalisée américaine, connue pour ses travaux sur l’activité politique, le totalitarisme et la modernité.

wiki a écrit:

Du XVIIe siècle au XIXe siècle

En somme, dans toute l'histoire de la chrétienté, ou de l'Europe, et jusqu'au XXe siècle non compris, le sentiment antijuif et les persécutions et discriminations qui s'ensuivirent furent le fait de l’antijudaïsme chrétien, même si l'antisémitisme de Voltaire n'est pas de source chrétienne. Cependant, selon Hannah Arendt, au XVIIIe siècle, les hommes des Lumières, à l'exception de Denis Diderot, méprisent les Juifs, alors qu'ils sont mieux considérés par les conservateurs :

   « Les hommes des Lumières qui préparèrent la Révolution française méprisaient tout naturellement les Juifs : ils voyaient en eux les survivants de l’obscurantisme médiéval, les odieux agents financiers de l’aristocratie. Leurs seuls défenseurs déclarés en France furent les écrivains conservateurs qui dénoncèrent l’hostilité envers les Juifs comme « l’une des thèses favorites du XVIIIe siècle » (J.de Maistre). »

— Hannah Arendt, Sur l’antisémitisme, Calmann-Lévy, 1973, p.110

Donc si on applique "l’antisémitisme" dont tu accuses Madame Elisabeth, presque tous les philosophes du siècle des Lumières en sont coupables...     

Voltaire n'est pas un modèle de tolérance. Cela étant, je doute qu'il était opposé à ce que les Juifs aient les mêmes droits civiques que le reste de la population.  Quels sont ses écrits sur ce point ?
De toute façon, je ne vois pas en quoi l'antisémitisme de certains excuserait celui des autres.

Osterreich a écrit:

Donc si on applique "l’antisémitisme" dont tu accuses Madame Elisabeth, presque tous les philosophes du siècle des Lumières en sont coupables...     

Ce n'est pas une "accusation" de ma part, c'est elle qui l'écrit ! Lis sa lettre à Angélique de Bombelles.

Citation :

Reinette a écrit:

Qu'elle soit antipathique, je peux l'admettre. Cela n'empêche pas Marie-Antoinette et Louis XVI de l'aimer.

Je doute que Marie-Antoinette l'aimait. A la fin, elles se serrent les coudes certes. Sans doute. Mais avant la Révolution, on ne peut pas les qualifier de proches amies. Madame Elisabeth a presque 10 ans de moins que Marie-Antoinette. Lorsque Marie-Antoinette devient reine à l'âge de 19 ans, Madame Elisabeth n'a encore que 10 ans. Et tu crois sérieusement qu'elles sont copines et font des tas de trucs intéressants ensemble? Allons, allons.  Madame Elisabeth n'est ni la princesse de Lamballe ni la duchesse de Polignac etc...

De nombreux témoignages nous parlent de promenades, parties de pêche ensemble. Madame Elisabeth à sa chambre au Petit Trianon. Marie-Antoinette la veut près d'elle au décès de sa fille.
Sans être intimes, Marie-Antoinette fait tout pour l'avoir souvent auprès d'elle. Nettement plus qu'avec les tantes et les deux autres belles-sœurs.

Voici ce que Madame Elisabeth écrit à Angélique de Bombelles le lendemain de l’admission des juifs à tous les emplois par l'Assemblée
constituante :

"L’Assemblée a mis hier le comble à toutes ses sottises et ses irréligions en donnant aux juifs le droit d’être admis à tous les emplois. Je ne puis te rendre combien je suis en colère de ce décret. Mais Dieu a ses jours de vengeance, et s’Il souffre longtemps le mal, Il ne le punit pourtant pas avec moins de force".

Reinette a écrit:

Sans être intimes, Marie-Antoinette fait tout pour l'avoir souvent auprès d'elle. Nettement plus qu'avec les tantes et les deux autres belles-sœurs.

Oui car Mesdames Tantes, la comtesse de Provence et la comtesse d'Artois sont hostiles à Marie-Antoinette.
Cela étant, la comtesse de Provence a également été invitée au Petit Trianon. Je me rappelle avoir lu que la comtesse de Provence avait refusé l'invitation une fois .

Reinette a écrit:

Je n'ai jamais lu que Louis XVI et Marie-Antoinette acceptent finalement de la voir entrer dans les ordres, les carmélites exclus.

Ah voilà, j'ai retrouvé l'extrait que je cherchais! Marie-Antoinette et Louis XVI lui ont proposé de devenir abbesse de Remiront :

"La reine, après s'être tant agitée afin de retenir Elisabeth à Versailles, encourageait son mari à satisfaire "les voeux" de la princesse. Il y avait deux causes à ce revirement : la première était que sa belle-soeur l'agaçait et qu'elle n'eût pas été fâchée de l'éloigner; la seconde qu'un des plus prestigieux bénéfices de Lorraine se trouvait à pourvoir et que la reine prenait intérêt à la question. Anne Charlotte de Lorraine, abbesse de Remiremont, plus noble chapitre féminin d'Europe déclinait ; sa succession était affaire de semaines. Or Remiront jouissait d'un statut unique. (...) Les chanoinesses avaient officieusement demandé à Louis XVI s'il accepterait de nommer Madame Elisabeth à l'abbatiat. Marie-Antoinette jugeait ce projet excellent, le soutenait, escomptait que sa belle-soeur y souscrirait. N'osant toutefois lui en parler, la reine fit sonder ses intentions par Mme de Bombelles. Cette tentative ne fut pas positive mais, dans son désir de complaire à la reine, Angélique voila les réticences de son amie, les présentant plutôt comme des scrupules que comme un refus. Le 18 mars 1786, Louis XVI convoqua sa soeur, convaincu de son assentiment, et se heurta à un non ferme et définitif: Elisabeth ne voulait pas de cet abbatiat. (...) Marie-Antoinette, piquée au vif de ce refus, voulait la faire changer d'avis; quant aux Bombelles, après avoir laissé croire qu'Elisabeth approuvait le projet, ils avaient inventé pour se justifier une intervention de la vicomtesse d'Aumale, toujours leur bête noire, soutenant qu'elle était allée mettre des scrupules en tête à la princesse et l'avait détournée par jalousie d'un abbatiat qu'elle était prête à accepter. Allégation habile puisqu'elle ravivait les calomnies contre Rosalie d'Aumale et contribuait à écarter tout danger de la voir rentrer en grâce. Marie-Antoinette revint à la charge. (...)". (A. Bernet, Madame Elisabeth, soeur de Louis XVI).

Je ne peux pas citer tout l'ouvrage mais enfin pour résumer la fin : Elisabeth réussit à obtenir un dernier entretien, seule à seul, avec Louis XVI, hors la présence de Marie-Antoinette. Entretien au cours duquel Elisabeth obtint que Mlle de Condé fut nommée, à sa place, comme abbesse de Remiront. Anne Bernet écrit que "Louis XVI voyait peu sa cadette, ne s'en préoccupait guère, se laissait influencer, dans ses jugements sur elle par l'opinion de la reine, ou d'autres, négatifs (...)".
Bref, comme tu le vois : Marie-Antoinette et Elisabeth étaient loin d'être proches avant la Révolution. Je dirais même qu'elles étaient plutôt en bisbille.

Ne doit-on pas voir là seulement qu'Anne Bernet a une aussi piètre opinion de l'héroïne de sa biographie que toi?
D'où l'auteur tient-elle tous ces revirements de situations? C'est, pour ma part, la première fois que je lis cela.

Bien à vous.

C'est plutôt l'inverse en fait : A. Bernet a tendance à présenter Madame Elisabeth sous un jour favorable et à débiner Marie-Antoinette dans son livre.
Je ne sais pas d'où elle tire toutes ses infos mais je suppose qu'elle a dû pas mal puiser dans la correspondance des Bombelles.

Citation :

Voltaire n'est pas un modèle de tolérance. Cela étant, je doute qu'il était opposé à ce que les Juifs aient les mêmes droits civiques que le reste de la population.  Quels sont ses écrits sur ce point ?
De toute façon, je ne vois pas en quoi l'antisémitisme de certains excuserait celui des autres.

"Enfin vous ne trouverez en eux [les Juifs] qu'un peuple ignorant et barbare qui joint depuis longtemps la plus sordide avarice à la plus détestable superstition, et à la plus invincible haine pour tous les peuples qui les tolèrent et les enrichissent."

Dictionnaire Philosophique.

C'est ce qu'il a écrit de plus doux. Dans ces lettres il est d'une monstruosité à peine soutenable.

J'ai, quant à moi, lu l'excellente biographie de Mme de Huertas, qui ne la dépeint ni comme une femme méchante, ni fausse.

Citation :

C'est plutôt l'inverse en fait : A. Bernet a tendance à présenter Madame Elisabeth sous un jour favorable et à débiner Marie-Antoinette dans son livre.
Je ne sais pas d'où elle tire toutes ses infos mais je suppose qu'elle a dû pas mal puiser dans la correspondance des Bombelles.

Donc l'attitude que tu décris là n'est pas anodine!
Elle vise à donner à Marie-Antoinette de quoi être dans l'influence de Louis XVI pour évincer Elisabeth de leur entourage.
Si tu lis ce récit au premier degré, alors je présume que tu lis les Girault de Coursac avec la même crédulité...   

Bien à vous.

Je reste étonné !!!
J'ai lu quatre biographies sur Madame Elisabeth :

- Noëlle Destremau, Une Sœur de Louis XVI, Madame Élisabeth
- Monique de Huertas, Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
- Élisabeth Reynaud, Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI
- Jean de Viguerie, Le Sacrifice du Soir, vie et mort de Madame Élisabeth, sœur de Louis XVI

Aucune des quatre ne parle vraiment des conflits constants entre la Reine et Madame Elisabeth...
Je n'y ai jamais vu non plus cette lettre dont tu nous a donné l'extrait, et que je veux bien prendre en compte.

Mais avoue aussi que si tu n'avais pas vu ce passage de lettre, ton avis sur la personne n'aurait pas
été si sévère, d'ailleurs, lors de l'exposition, je ne t'ai pas senti en conflit avec la Princesse.
Hannah Arendt qui est bien placée pour juger de cela, et l'explique elle même que l'antisémitisme du XVIIIème siècle n'est pas l'ignoble théorie des races des nazis, mais un anti judaïsme chrétien.
On ne peut absolument pas les comparer !!!

Madame Elisabeth a écrit:

"L’Assemblée a mis hier le comble à toutes ses sottises et ses irréligions en donnant aux juifs le droit d’être admis à tous les emplois. Je ne puis te rendre combien je suis en colère de ce décret. Mais Dieu a ses jours de vengeance, et s’il souffre longtemps le mal, Il ne le punit pourtant pas avec moins de force".

Je suis d'accord sur le fait qu'elle n'est pas délicate et que je n'aime pas cette pensée...
Mais peut-on généraliser sa pensée par cette lettre, qui est écrite dans un état de colère ? (Cette colère tournée principalement envers l'Assemblée.)

Je pense que cela mérite tout de même plus de recherches.

Je lis dans ce moment :

              Madame Elisabeth : Princesse martyre par Martial Debriffe, Edition "Les 3 Oranges"

je suis seulement à la moitié du livre juste quand la famille royale arrive aux Tuileries. Mon impression est que cette petite aime sa famille, admire la reine et est surtout catholique consacrant sa vie aux pauvres, pas surtout d'arrière pensées d'antisémitisme de race mais uniquement de religion.

Chère Teresa, laissez ce livre là où vous en êtes et optez pour un vrai ouvrage sur la princesse !
Celui-là n'est qu'une biographie de seconde main qui reprend le traitement du personnage que l'on dénigre tant il en oublie l'aspect humain !

Bien à vous.

Il est vrai que rien que le nom annonce un contenu pas nécessairement très objectif ...

Reinette a écrit:

Qui fait-elle appeler au décès de madame Sophie ? Même pas madame de Polignac, mais bien sa petite soeur. Je recite : Combien, dans nos malheurs, notre amitié nous a donné de consolations, et, dans le bonheur, on jouit doublement quand on peut le partager avec un ami ; et où en trouver de plus tendre, de plus cher que dans sa propre famille ?
:

Tu fais allusion, Reinette, à ce petit mot de Marie-Antoinette qui appelle Elisabeth à Trianon :
Nous pleurerons sur la mort de ma pauvre ange ...   J'ai besoin de tout votre coeur pour consoler le mien .


Alors, je précise le contexte .
Quand la petite meurt, Mme de Polignac est en Angleterre depuis près de deux mois dont les six dernières semaines passées à Bath .
Ecoutons la comtesse Diane :
Tous les Anglais qui venaient en France, si bien reçus chez eux ( le duc et la duchesse ) s'empressèrent à leur tour de prouver leur reconnaissance . Mais, tandis qu'ils en recevaient les témoignages les plus flatteurs, la mort de la jeune princesse Sophie précipita leur départ .

Sophie disparaît le 15 juin .  
Marie-Antoinette se retire à Trianon pour cacher sa douleur .

Combien de jours faut-il pour que la nouvelle atteigne Mme de Polignac à Bath, et que celle-ci se jette sur la route pour rentrer en France dans l'instant ?
Le voyage est si précipité et fatigant, que Yolande arrive à Versailles en assez piètre état pour que Marie-Antoinette, qu'elle rejoint aussitôt à Trianon,  écrive à Elisabeth, le 22 ( tu avoueras qu'il n'y a pas de temps perdu ! ) :
Madame de Polignac a été fort indisposée tout de bon hier et ce matin, et m'a donné de l'inquiétude; voilà pourquoi, mon cher coeur, vous n'avez pas vu de mon écriture que vous attendiez dans votre Petit Trianon.   ( comme Marie-Antoinette appelle Montreuil ), Je veux absolument faire avec vous une visite au mien . Nous pleurerons sur la mort de ma pauvre ange ...   J'ai besoin de tout votre coeur pour consoler le mien .

Quand Marie-Antoinette appelle Elisabeth à sauter la rejoindre pour qu'elles pleurent ensemble la petite Sophie, Mme de Polignac est déjà là auprès d'elle .

Reinette a écrit:

Et franchement, peut-on oublier son geste courageux du 20 juin 1791 où elle laisse croire être la reine pour que celle-ci puisse être moins en danger ? 
:

Certes non ! Il est à mettre à l'actif de Madame Elisabeth .  

Citation :

Je ne suis pas certain qu'Elisabeth était sympathique.  C'était une grosse réac.

Hola ! hola !  Elle était tout simplement un pur produit de sa caste, de son éducation princière, de son catholicisme échevelé .
Alors oui, réac, c'est sûr qu'elle était réac .

Citation :

Elle était antisémite à mort et opposée par exemple à l'Edit de tolérance de Louis XVI, qui émancipe les Juifs.

Encore faut-il savoir ce que recouvre le terme antisémite à l'époque ?
Les Juifs étaient détestés, depuis le moyen âge, comme le peuple déicide qui refuse " la Bonne Nouvelle " . On les soupçonne d'empoisonner les sources, de répandre la peste, de tuer les enfants chrétiens lors de cérémonies rituelles horribles ...  Ce qui leur est particulièrement reproché, c'est d'avoir leurs usages propres, auxquels ils sont farouchement attachés .
Comment pouvoir affirmer qu'Elisabeth adhérait à ce mauvais trip ?  Pour moi, elle n'était qu'obstinément et sottement anti-judaïque honnissant toute autre forme de culte que le sien .

A la vente de mercredi dernier, il y avait le livre en deux tomes, édition XIX° siècle de BEAUCHESNE   "MADAME ELISABETH"
le prix de départ a été rabaissé, et CECILE COUTIN l'a acquis pour 50 euros !!!

une autre amie le souhaitant je viens de le trouver, même édition, bien relié, pour 60 euros !!!!
BEAUCHESNE est un historien intéressant bien que XIX° siècle .... je le consulterai à l'arrivée du livre.

MARIE ANTOINETTE

Citation :

opposée par exemple à l'Edit de tolérance de Louis XVI, qui émancipe les Juifs.

Il était très light, cet Edit, quoique tout à l'honneur de Louis XVI, c'est certain .  
Mais c'était déjà une sacrée avancée !





L'Essai sur les Juifs de l'abbé Grégoire, paru en 1787 ( et dont découlera le vote, le 27 septembre 1791, de la loi d'émancipation des Juifs ), avait préparé le terrain à l'Edit de tolérance de Louis XVI, voté en novembre .

Cependant, ne nous cachons pas que les meilleurs amis des Juifs dans le passé, et notamment l'abbé Grégoire, espéraient que l'émancipation accordée ne tarderait pas à réduire l'unicité juive et que le problème posé depuis tant de siècles serait résolu par la disparition progressive du particularisme juif .

Citation :

Les enfants sont restés emprisonnés avec Madame Elisabeth (Louis-Charles est séparé de sa tante, certes, mais il se trouve dans l'enclos du Temple). Ce n'est pas tant Marie-Antoinette qui confie ses enfants à Madame Elisabeth.
C'est plutôt que les enfants n'ont plus personne pour veiller sur eux, à part Madame Elisabeth.

Oui, ce me semble imparable aussi .

Citation :

Madame Elisabeth n'en faisait qu'à sa tête avec les princes émigrés, qu'elle a beaucoup excités . Madame Elisabeth porte une part de responsabilité dans l'aveuglement et la folie des émigrés.

Ils n'avaient pas besoin d'être asticotés pour cela !
Et vois ! Si Artois avait réussi à fédérer les puissances étrangères contre la Révolution qu'elles auraient fait rentrer à la niche, tu applaudirais Artois .
La fin aurait justifié les moyens .  Il n'en a pas été ainsi .