|
| La féminisation de la langue | |
| | Auteur | Message |
---|
Chakton
Nombre de messages : 1263 Date d'inscription : 22/10/2017
| Sujet: La féminisation de la langue Mar 26 Fév 2019 - 11:40 | |
| Ou plus exactement sa reféminisation.
- "Féminiser la langue, ce n'est pas la tordre, c'est revenir à un usage naturel et ancien".
Après des années de résistance, les Immortels de l'Académie française sont sur le point de féminiser les noms de métiers. Pour les linguistes Bernard Fripiat et Bernard Cerquiglini, il était temps. Comment appeler une femme sapeur-pompier ou maître-nageur ? Jeudi prochain, l'Académie française se penchera sur la féminisation des noms de métiers et rendra un rapport sur cette épineuse question. "En France, tout le monde – dans la conversation courante, dans la presse, dans la langue professionnelle et administrative – féminise les noms. En Belgique, en Suisse et au Québec aussi. Il n'y avait plus que l'Académie française, elle régularise donc la situation", explique chez Wendy Bouchard l'historien de la langue française Bernard Fripiat, également chroniqueur d'Europe 1. Inégalités de genres et histoire de la langue. "Pendant trente ans, l'Académie a bloqué un changement linguistique naturel et évident socialement, et qui s'était répandu en francophonie", regrette aussi Bernard Cerquiglini, linguiste et auteur de Le/la Ministre est enceinte ou la grande querelle de la féminisation des noms, aux éditions du Seuil (2018). Dès lors, il est aujourd'hui usuel d'entendre les mots "avocate", "directrice", ou magistrate". "Féminiser la langue, ce n'est pas la tordre, c'est revenir à un usage naturel et ancien. Ce que vous avez appris il y a 60 ans résultait d'une situation dépassée où seuls les hommes avaient accès aux professions importantes, et où le masculin primait. L'histoire de la langue française traduit une certaine égalité jusqu'à la Renaissance, puis un recul, une sorte d'enfermement féminin après la Révolution française", indique le spécialiste. Le "féminin conjugal". Le mot "écrivaine" illustre parfaitement cette situation, selon les deux linguistes. "Quand l'Académie se fonde (en 1634, ndlr), les femmes sont exclues du champ littéraire. Le pouvoir littéraire est naturellement aux mains des hommes. Le mot 'écrivaine' devient donc inusité et paraît un néologisme, alors que c'est un archaïsme", note Bernard Cerquiglini. À cette époque, comme les femmes sont exclues de bien des professions, se met en place le "féminin conjugal". "L'ambassadrice n'est que l'épouse de l'ambassadeur, la colonelle n'est que l'épouse du colonel. Dans toute la littérature, dans toute la presse, dans tous les dictionnaires du 19e siècle, une étudiante est la petite amie d'un étudiant", nous apprend Bernard Cerquiglini. "Quand, à la fin du 19ème, les étudiantes ont eu accès non plus seulement aux lits des étudiants, mais aux amphithéâtres, elles se sont emparées du mot et le mot a changé de sens." "On ne va pas féminiser en cachette". Si les historiens de la langue s'accordent à dire que la féminisation actuelle des noms n'est qu'un juste retour à des formes anciennes de la langue française, certains commentateurs la jugent, au contraire, parfaitement incompréhensible. Selon eux, ses défenseurs veulent dénaturer les mots et ne réfléchissent que par effet de mode. "Mais généralement, les puristes se trompent", rétorque Bernard Fripiat. Le mot "autrice", féminin de "auteur", concentre à lui seul bon nombre de critiques, essentiellement sur la prétendue laideur du mot à l'oreille. "Le fait que ce soit laid, ça ne tient pas debout. Et mettre 'auteure' avec un 'e', c'est que l'on veut féminiser les fonctions mais que l'on ne veut pas que ça s'entende. On ne va pas féminiser en cachette !", défend Bernard Fripiat. "Qu'on mette 'autrice', on s'habituera. C'est plus cohérent. On dit bien actrice ou lectrice." Même chose pour l'emploi de "sapeuse-pompière", que soutiennent les deux linguistes. "Répétez-le une dizaine de fois, et le mot est tout simple. Morphologiquement, il n'y a aucun problème. Simplement, il faut s'y mettre", considère Bernard Cerquiglini. Et de poursuivre : "La nouveauté choque. Quand on a inventé le mot 'baladeur' pour remplacer le 'walkman', les gens m'ont dit que ça choquait l'oreille. Le croirait-on maintenant ?" https://www.europe1.fr/ Comme quoi, la Révolution n'a vraiment apporté que de bonnes choses. _________________ X est la force deux fois pure
|
| | | Therese Belivet
Nombre de messages : 213 Date d'inscription : 09/01/2019
| Sujet: Re: La féminisation de la langue Lun 4 Mar 2019 - 7:22 | |
| Merci Chakton. On parle beaucoup de ça pour le moment. _________________ Those words were somehow future, and this was present.
|
| | | Aglae
Nombre de messages : 1674 Date d'inscription : 09/10/2016
| | | | madame antoine
Nombre de messages : 6902 Date d'inscription : 30/03/2014
| Sujet: Re: La féminisation de la langue Lun 4 Mar 2019 - 9:47 | |
| Bonjour Aglae,
Un autre clin-d'oeil est également la savoureuse paire cafetier-cafetière.
Bien à vous
madame antoine _________________ Plus rien ne peut plus me faire de mal à présent (Marie-Antoinette)
|
| | | Aglae
Nombre de messages : 1674 Date d'inscription : 09/10/2016
| Sujet: Re: La féminisation de la langue Lun 4 Mar 2019 - 10:47 | |
| Délicieux ! merci chère Madame Antoine...... |
| | | Airin
Nombre de messages : 1005 Date d'inscription : 19/09/2015
| Sujet: Re: La féminisation de la langue Lun 11 Mar 2019 - 10:53 | |
| Nous le disions dans un autre sujet, la Journée de la femme a permis de mettre en lumières des personnalités féminines trop peu connues. Dans l'article que voici, ce seront des mots qui seront à l'honneur. Certains mots vous font peut-être lever les yeux au ciel ("autrice", "poétesse", "sororité"…). D'autres vous sont peut-être inconnus ("uxoricide" ou "nullipare"). Pourtant, ils désignent tous une réalité. Pourquoi ces mots consacrés aux femmes sont-ils si peu (pour ne pas dire pas du tout) employés ? Pour se coucher moins bête, zoom sur sept mots oubliés, méconnus, pas (assez) employés ou déformés qui concernent les femmes. Autrice, matriarcat, nullipare, poétesse, sororité, uxoricide… et bien sûr, féministe. Pourquoi le chiffre sept ? Parce qu'il est considéré comme un chiffre magique et que, comme dit le slogan, "nous sommes les petites-filles des sorcières que vous n'avez pas pu brûler." Dans son nouvel ouvrage Mes bien chères sœurs, Chloé Delaume consacre un chapitre aux "Fabuleuses aventures du mot sororité." On y apprend que ce terme désignait originellement une "communauté religieuse de femmes", mais que la plume de Rabelais a gommé l’aspect religieux après le XVIe siècle. Délivrez-nous du mâle. Courant à l’époque, ce joli mot a depuis totalement disparu des écrans radars. "Quand un mot n’est plus dit, qu’il n’est plus prononcé, ce qu’il désigne aussi disparaît des esprits", regrette l’autrice. "Tandis que le mot fraternité connaît un succès retentissant, sororité depuis des siècle a été jeté aux orties (…) il a fallu attendre les années 1970 pour que le mot sororité revienne, soit prononcé, écrit. (…) Sororité, le mot existe, son réel à notre portée. Le pouvoir vertical est déjà érodé, les liens se construisent en cercle et l’enserrent jusqu’à le rendre exsangue. (…)" Et de conclure : "Outil : sororité, une relation entre femmes qui renverserait la donne autant que la devise inscrite sur les frontons. Utiliser ce mot, c’est modifier l’avenir." Eh oui, le féminin d'"auteur" existe… et ce n'est pas "auteure." Dans ses travaux (cités par Slate dans un article passionnant) la chercheuse Aurore Evain explique pourquoi ce terme a une légitimité historique et linguistique, au même titre que le féminin du mot "acteur" a son équivalent, "actrice", selon la racine latine. "Au cours des premiers siècles du christianisme, les occurrences de ce féminin se multiplient" au sens de "créatrice"… "Mais la stricte séparation des rôles et des espaces entre les sexes s'invite dans la langue. Du côté de l'usage, il continue de faire son chemin tout au long du Moyen âge. C'est à cette époque qu'apparaissent les premières occurrences de ce terme en art et littérature." A la Renaissance, le développement de l'imprimerie fait germer de nombreuses autrices… et au XVIIe siècle, la guerre contre le mot "autrice" est déclarée pour fermer le métier aux femmes. "L'éducation féminine se développe et une nouvelle génération de femmes de lettres fait son apparition. Alors que la concurrence est grande entre les savants pour sortir avant l'Académie le premier dictionnaire de langue française, la pratique de l'exemple sera, pour tous, un bon moyen de propagande afin de faire passer dans l'usage les nouvelles règles en matière de féminisation." Résultat ? Le mot est retiré des manuels aux XVIIIe siècle. "En moins d'un siècle, avec la normalisation et la politisation de la langue, disparaît donc "autrice", au moment même où son emploi est le plus justifié." Aujourd'hui, presque tous les linguistes (hommes compris) s'accordent à dire que le féminin du mot "auteur" est "autrice." On parle de plus en plus de "féminicides" (et c'est tant mieux, même si on préférerait ne pas avoir à en parler). En France, en 2019, des femmes sont encore tuées parce qu'elles sont femmes. Dans les médias, le terme est de plus en plus employé et son utilisation permet entre autres un éclairage sur un fait social parfois sous-traité voire moqué ("Un papi tue sa femme pour une 'soupe trop chaude'", ahah, comme c'est drôle). Si le mot "féminicide" est utilisé pour désigner le meurtre des femmes au sens large, le mot "uxoricide" désigne le meurtre de sa propre femme. Le terme vient en effet du latin "uxor" ("épouse") accolé au suffixe "–cide" ("meurtre"). Alors, pourquoi parle-t-on de féminicides même lorsque l'on parle des cas précis des meurtres conjugaux ? "La racine n'est pas suffisamment compréhensible dans "uxoricide", me semble-t-il, par rapport à "féminicide"", justifie Laélia Véron, enseignante-chercheuse en stylistique et linguistique. "Dans "féminicide", tout le monde peut reconnaître le mot "femme."" Vous connaissez forcément une "nullipare", puisque le mot désigne une personne qui n'a jamais accouché. Le terme vient du latin "nullus" ("nul") et "parere" ("engendrer"). Une réalité, donc… mais le terme n'est pas souvent employé en dehors d'un contexte médical (les femmes enceintes, elles, l'ont forcément déjà entendu). Pourtant, aujourd'hui, de nombreuses femmes expriment leur volonté de ne pas devenir mère et le terme pourrait être davantage utilisé. Dans son essai Sorcière, la puissance invaincue des femmes, la journaliste et autrice Mona Chollet s'interroge : "Face aux femmes volontairement sans descendance, on brandit toujours cette menace : 'Un jour, tu le regretteras !' Cela traduit un raisonnement très étrange. Peut-on se forcer à faire quelque chose qu'on n'a aucune envie de faire uniquement pour prévenir un hypothétique regret situé dans un avenir lointain ?" On se demande moins, en revanche, si certaines femmes regrettent d'avoir eu des enfants. C'est aussi une réalité et l'esssayiste évoque avec précision le cas de l'infanticide. Quant aux hommes qui n'ont pas d'enfant, on leur pose, en général, moins de questions… ou on dira qu'ils ont simplement voulu "garder leur liberté", quand on traitera la nullipare d'"égoïste." Le terme est construit à la fin du XIXe sur le modèle du mot "patriarcat." Toutefois, l'existence de sociétés véritablement matriarcales fait débat. Ainsi, l'anthropologue Françoise Héritier écrit-elle : "Les seuls exemples que l'on a sont mythiques. Des sociétés où le pouvoir serait entre les mains des femmes et des hommes dominés n'existent pas et n'ont jamais existé. Le modèle archaïque dominant sur toute la planète est en place dès le départ (…). On trouve en revanche des sociétés de droit matrilinéaire. On a pu penser qu'elles étaient matriarcales parce que la filiation passe par les femmes, mais ce sont les hommes qui ont le pouvoir. C'est toujours récupéré." Aujourd'hui, la matriarcat est souvent présenté comme un type de société non sexiste, sans rapport de domination d'un sexe sur l'autre. On parle, à tort, de "poète" pour désigner une femme qui fait de la poésie alors que le terme "poétesse" existe bel et bien. Il date du XVe siècle et vient du moyen français, "poetisse", dérivant du bas latin "poetissa." Dans sa thèse sur les poétesse, Anne Debrosse explique : "C'est au XVIIe siècle que le débat sur sa conformité aux règles du français est pour la première fois engagé. La désaffection pour le terme date du premier tiers du XVIIIe siècle puisqu'il serait tombé en désuétude, à cause de la connotation négative que lui prête le Robert, au point d'être remplacé par "une poète" en 1723." Elle ajoute : "Au moment où l'on cherche à codifier la langue, les grammairiens, les lexicographes, les érudits lui trouvent trop de défauts pour l'employer sans hésiter, à tel point que l'on peut se demander si ce n'est pas la chose et ce qu'elle implique, plutôt que le mot, qui est problématique en amont. " Un peu comme "autrice", en somme… ou comme "peinteresse". Laélia Véron complète : "Le mot a été attaqué, à l'âge classique, au moment où l'Académie de peinture instaurait un quota pour n'avoir que quelques femmes dans ses rangs." Sacrées Académies… Pourquoi ce terme est-il considéré comme un gros mot ? "Il y a encore une fausse définition de "féministe" comme "celle qui n'aime pas les hommes", alors que "féministe" désigne simplement une personne qui se bat pour l'égalité entre les femmes et les hommes", souligne Laélia Véron. Oui, c'est aussi simple que cela. C'est la définition exacte du mot et si vous ne me croyez pas, ouvrez un dico. "Mouvement social qui a pour objet l'émancipation de la femme, l'extension de ses droits en vue d'égaliser son statut avec celui de l'homme, en particulier dans le domaine juridique, politique, économique; doctrine, idéologie correspondante", définit plus précisément le Centre National de Ressources Textuelles et Lexicales. Et la spécialiste en linguistique et stylistique de conclure : "Certains ne sont pas prêts à lâcher leurs privilèges ou tout simplement à se remettre en question." "Cette liste comprend des mots différents, qui effectivement, ne sont pas très employés mais pour des raisons différentes", explique Laélia Véron, Maîtresse de conférences en stylistique et docteure en littérature et langues françaises, à Femme Actuelle. "Certains concernent des noms de métiers et d'activités qui ont été très employés avant de disparaître après des attaques masculinistes pour des raisons sociales précises." Pourquoi ces termes sont-ils si peu utilisés… ou si critiqués ? "Parce que nous avons intégré l'idée absurde d'un masculin générique, parce qu'il est encore difficile de penser que les femmes sont sujets, et de les désigner comme telles par le langage." Alors, peut-on parler d'invisibilisation ? Oui, selon Laélia Véron. "Il y a eu et il y a toujours une réelle volonté d'invisibilisation symbolique et matérielle des femmes. La revendication du mot "étudiante" est allée de paire avec l'accession des femmes aux études supérieures, celle d'"avocate" avec celle des femmes à la magistrature." Fort heureusement les choses changent. "Les femmes s'imposent de plus en plus dans l'espace public", assure l'enseignante-chercheuse. "Cela va avec la revendication de certains mots. Nombreuses sont celles qui se battent pour que les mots ne soient pas atténués pour désigner ce que les femmes subissent, qu'on n'utilise plus l'expression "crime passionnel" par exemple." La bonne nouvelle, c'est que les langues ne sont pas figées : elles évoluent, souvent avec la société. "La langue française reflète une société sexiste, elle est donc marquée par ce sexisme." C'est l'usage collectif qui fait que les mots peuvent paraître "étranges, voire laids parce qu'on n'en a pas l'habitude. C'est aussi l'usage collectif qui peut réhabiliter ces mots, insiste Laélia Véron. Cela sera sans doute le cas pour "autrice." C'était le cas pour "étudiante" : "Personne ne songerait plus à parler d'"étudiant" pour évoquer une jeune femme qui fait des études", poursuit-elle. Pourtant, jusqu'à la fin du XIXe siècle, le mot est jugé comme étant extrêmement vulgaire. Maria Candea, enseignante-chercheuse en linguistique et sociolinguistique à la Sorbonne Nouvelle, rappelle d'ailleurs dans un entretien publié pour le site de la revue Ballast : ""Etudiante", ça voulait dire prostituée pour étudiant. Maintenant, plus personne, même pas l'Académie, ne trouve ce mot choquant." Hélène Lisle https://www.femmeactuelle.fr/ Oui, le langage est politique. |
| | | Therese Belivet
Nombre de messages : 213 Date d'inscription : 09/01/2019
| Sujet: Re: La féminisation de la langue Sam 18 Mai 2019 - 18:14 | |
| A recommander, peut-être (je ne l'ai pas encore lu ) ce livre : - Le 28 février dernier, l’Académie française publiait un rapport approuvant la féminisation de la plupart des noms de métiers. Pourtant le purisme de l’académie a mis du temps à se dépoussiérer face à une langue en constante évolution. Le masculin est un genre neutre, non marqué dont l’utilisation est justifiée lorsque le féminin n’existe pas ; tel est la position trop longuement défendue par l’académie à laquelle s’oppose le linguiste Bernard Cerquiglini. Les adversaires de la féminisation défendent également la polysémie des mots qui fait le charme et l’ambiguïté de la langue française. De plus si l’Académie a été si longtemps réticente à ce genre de changements, c’est qu’elle jugeait que la richesse du français lui donnait tous les moyens morphologiques pour le féminiser. Ainsi depuis des années, la France et plus précisément les académiciens s’arguent de la neutralité d’un masculin s’opposant de ce fait à la féminisation des noms de métiers souvent au dépit d’une parité d’accès à tous les emplois (notamment les hautes fonctions de l’état) entre les hommes et les femmes. Le Québec ou encore la Suisse sont en avance, par exemple avec la simplicité du suffixe québécois –eure pour féminiser les noms se terminant en « eur » (professeure, procureure…). Un retard que monsieur Cerquiglini justifie par le « renfermement des femmes » en France, commencé au XVIIIe siècle.
Un français masculinisé comme norme
Une « écrivaine », une « poétesse », ou encore une « autrice », autant de termes acceptés et attestés depuis des siècles. En effet, à partir du Moyen-Age, tous les métiers étaient féminisés, le masculin pour désigner les femmes est tardif. En 1635, Richelieu, prenant en exemple le modèle italien fonde l’Académie française dans le but de perfectionner et normaliser la langue. Il souhaite la codifier ; on passe de la coutume au droit écrit. C’est à partir du XVIIIe siècle qu’on assiste à ce que Bernard Cerquiglini désigne comme le « grand renfermement des femmes ». Les fonctions importantes et les libertés politiques sont progressivement attribuées aux hommes. « Lorsque les préfectures sont créées, Napoléon n’aurait jamais désigné une femme préfet, encore moins préfète », remarque le linguiste. La femme a de moins en moins d’importance dans la société, son statut est désormais ramené à celui de son mari. On passe d’un féminin à un féminin conjugal. La Révolution française puis le XIXe siècle vont accentuer cette norme de masculinisation. Dans le premier dictionnaire de l’académie achevé en 1694, une « ambassadrice » est désignée comme une femme chargée d’une ambassade. Dès la deuxième édition, elle devient épouse de l’ambassadeur.
Qu’est-ce que la norme ?
Cette norme de masculinisation du français acceptée par les immortels est souvent critiquée par les défenseurs de la féminisation s’insurgeant de voir que la définition d’une ambassadrice est toujours la même dans la version actuelle (9ème) du dictionnaire de l’Académie. Un certain paradoxe regrettable d’après monsieur Cerquiglini lorsque l’institution du Quai de Conty tend à accepter l’évolution de la langue française. Il y a un manque de coopération entre les linguistes – dont le métier est d’étudier la langue – et cette institution dont l’histoire voudrait qu’elle établisse le bon usage de celle-ci. Aujourd’hui, la francophonie, aussi riche soit-elle, constitue l’antithèse du purisme académicien. Le progressiste Cerquiglini suggère un dictionnaire francophone reprenant toute l’histoire et les subtilités du français. « Le dictionnaire de l’Académie française est le premier dictionnaire synchronique de notre langue, sans étymologie », analyse-t-il. Souvent jugée pour être en retard par rapport aux changements de la langue courante, l’Académie s’inscrit tout de même dans un souhait de faire changer les usages, reconnaissant une évolution évidente de celle-ci. Aujourd’hui de nombreux féminins sont déjà adoptés dans la société. L’évolution naturelle de la langue française doit s’inscrire dans cette logique, celle où la seule norme viserait à reconnaître les femmes en tant que femmes dans cette langue mondiale, riche, et noble qu’est le français.
Vincent Faure http://www.jfb.hu/node/75131
L'avenir nous dira ce qu'il adviendra de ce mouvement de féminisation linguistique, mais je suis assez confiante, vu que cela semble aller assez vite. _________________ Those words were somehow future, and this was present.
|
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: La féminisation de la langue | |
| |
| | | | La féminisation de la langue | |
|
Sujets similaires | |
|
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
| |
| |