Le Boudoir de Marie-Antoinette

Prenons une tasse de thé dans les jardins du Petit Trianon
 
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 16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II): 8H du matin

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yann sinclair

yann sinclair


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16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II): 8H du matin Empty
MessageSujet: 16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II): 8H du matin   16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II): 8H du matin Icon_minitimeMer 16 Oct - 8:00

Mercredi 16 octobre 1793
Ste Hedwige
Quintidi 25 vendémiaire an II Bœuf


8H

Marie-Antoinette a tant perdu de sang depuis la veille!

La Reine ne devait pas être conduite au supplice dans sa tenue de veuve


Peu à peu, la condamnée se reprend et lorsque, toute tremblante, Rosalie revient dans la cellule, Marie-Antoinette lui demande de l'aider à changer sa chemise pour la dernière fois

Rosalie Lamorlière obtempère, mais le garde posté dans la cellule refuse de s'écarter, même "au nom de l'honnêteté"
La malheureuse étale sur le lit une chemise neuve, se glisse dans la petite ruelle ménagée entre le lit de sangle et la muraille et laisse tomber sa robe noire

Sur un geste de la Reine, la jeune servante vient se placer devant elle, mais l'officier de gendarmerie s'avance et penché au-dessus du traversin, regarde...

"Au nom de l'honnêteté, Monsieur, permettez que je change de linge sans témoin"


"Je ne saurais y consentir, répond l'homme brusquement, mes ordres portent que je dois avoir l’œil sur tous vos mouvements"


La Reine soupire...et "avec toutes les précautions et toute la modestie possibles", enlève sa chemise tachée

Elle veut mourir en blanc, le deuil des reines

Sur sa chemise neuve elle passe le déshabillé blanc quelle met habituellement le matin, puis elle déploie un grand fichu de mousseline qu'elle croise haut, sous le menton, et se coiffe d'un bonnet blanc sans voile de deuil

Rosalie la voit ensuite "rouler soigneusement sa pauvre chemise ensanglantée, la refermer dans une de ses manches comme dans un fourreau", puis porter autour d'elle "des regards pleins d'anxiété comme pour chercher quelque objet qu'elle craignait de ne pouvoir découvrir", soudain, avec "l'expression d'une ineffable satisfaction", elle glisse le linge souillé dans un enfoncement qu'elle venait d'apercevoir dans le mur derrière un lambeau de la toile à papier


Sans oser lui dire au revoir, Rosalie la quitte et l'horrible attente commence...

Sous son léger déshabillé de piqué blanc, Marie-Antoinette tremble de froid

L'abbé Girard, prêtre-jureur envoyé par le Tribunal, lui conseille de mettre son oreiller sur ses jambes

il lui offre ensuite "les services de son ministère"

La condamnée refuse...


"Mais, Madame, que dira-t-on lorsqu'on saura que vous avez refusé les secours de la religion dans ces suprêmes moments?"

"Vous direz aux personnes qui vous en parleront que la miséricorde de Dieu y a pourvu !"

Timidement le prêtre demande:


"Pourrai-je vous accompagner, Madame?"


"Comme vous voudrez..."


Quelques instants plus tard elle interroge le gendarme:
"Croyez-vous que le peuple me laissera aller à l'échafaud sans me mettre en pièces?"

Larivière entre dans le cachot et, avec une pauvre voix, Marie-Antoinette lui dit:


"Larivière, vous savez qu'on va me faire mourir ?"


A cette même heure, des conjurés se dirigent vers la rue St Honoré où doit passer la suppliciée

En se rendant à leur poste ils sont pleins d'espoir:

ils seront cinq cents tout à l'heure, quinze cent même, pensent certain! et bondiront sur la charrette

Quels sont les ultimes défenseurs de Marie-Antoinette qui vont perdre leur vie pour sauver celle de la Reine?

D'anciens gardes du corps? D'anciens officiers de la Maison de la Reine? D'anciens amis de Trianon qui, autrefois, pour baiser le bout des doigts roses de leur Souveraine, se seraient fait tuer?

Non!

A la tête de la conspiration se trouve une ancienne ouvrière qui a perdu la vue en faisant de la dentelle: c'est une Auvergnate bossue, nommée Catherine Urgon, femme Fournier

Son état-major est composé de son fils, un décrotteur de 14 ans, et de deux perruquiers: Guillaume Lemille et Jean-Baptiste Basset

Ce dernier, âgé de 18 ans et demi, a réussi, à lui tout seul, à réunir 460 hommes

Leur quartier général se tient chez un marchand  de vin de la rue de la Vannerie, à l'enseigne de La Cave des Charbonniers

Leurs principaux lieutenants ?

Deux serruriers, trois pâtissiers, deux marchands de vin, deux épiciers, deux charcutiers, deux convoyeurs, deux maçons, un rémouleur, un peintre en bâtiment, un jardinier, un fripier, un limonadier... et quatre perruquiers!

Et tous demeurent dans la Section des Incorruptibles, autrement dit la section des Arcis qui s'étend du nord de la place de Grève, à deux pas de la Conciergerie

Ils ont comme signe de ralliement une petite carte ronde portant au centre un cœur et sur son pourtour ces mots: "Vive Louis XVII, Roi de France"

Leurs principales forces ont été recrutées parmi les Volontaires casernés à Vanves et à Courbevoie

on parle de quinze cent hommes et la dentellière bossue et aveugle sait leur parler!

"Il ne faut pas des gens à paroles!
Il faut des braves, des gens qui sachent frapper!
Enfin tous des "Charlotte Corday" !

Au début du mois, ils avaient tout d'abord voulu se ruer sur la Conciergerie

"il faut agir de suite, s'était écrié l'un des perruquiers, sans cela cette malheureuse périra!"


Leurs armes? 1 500 pistolets!
Leur plan?
Il était ingénieux et dû au jeune Basset: allumer, de jour, tous les réverbères du quartier, de façon que, faute d'huile, ils s'éteignirent au milieu de la nuit

Profitant de l'obscurité, on se serait alors porté en masse à la Conciergerie

Mais six bas policiers ont eu vent du projet


En se faisant passer pour ardents royalistes, ils ont réussi à capter la confiance des  perruquiers et à faire différer l'attaque de la prison... à la faire tellement retarder que le procès avait commencé

La bossue manifesta alors "un désespoir affreux"

"Il n'y a pas un instant à perdre pour sauver la pauvre Reine. Il faut absolument que l'on donne des ordres pour faire un rassemblement et enlever la condamnée au cours du trajet!"

Et ordre est donné au conjurés de se porter rue Saint-Honoré


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16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II): 8H du matin 211

A la même heure, Hermann, flanqué des juges Foucauld et Douzé-Verteuil, pénètre dans le cachot

Fabrius, tenant une grande feuille de papier à la main, les suit

La condamnée qui prie, à genoux, auprès de son lit, se lève

"Soyez attentive, déclare Hermann, on va vous lire votre sentence"

Contrairement à la coutume, les quatre hommes habillés de noir enlèvent leur chapeau

ils semblent "saisis" devant l'air majestueux de la condamnée qui leur déclare, en élevant la voix:

"Cette lecture est inutile, je ne connais que trop cette sentence"

"il n'importe, déclare l'un des juges, il faut qu'elle vous soit lue une seconde fois"

Et les mots tranchants comme un couperet résonnent sous la voûte basse du cachot:
"Faisant droit...condamné...déclare...ordonne...exécuté..."

A peine le greffier a-t-il prononcé le mot de "République" terminant l'arrêt, que, suivi par Nappier, l'huissier-ordiencier du tribunal, entre un homme jeune: le bourreau

C'est Henri Sanson, le fils de l'exécuteur qui a guillotiné Louis XVI et qui n'exerce plus sa charge depuis le 21 janvier



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16 octobre 1793 (25 vendémiaire an II): 8H du matin Ob_8a010

il s'avance, semblant remplir le cachot de sa "taille immense"
"Présentez vos mains"

La Reine recule de deux pas et demande d'une voix affolée:
"Est-ce qu'on va me lier les mains?"

Le bourreau incline la tête.

Elle s'exclame:
"On ne les a point liées à Louis XVI!"

Sanson se retourne vers Hermann qui ordonne:


"Fais ton devoir!"

"O mon Dieu", s'écrie la condamnée, "tout éperdue"


" A ces paroles, raconte Larivière, Henri saisit brusquement les pauvres mains de la Reine et les lui lia trop fort, derrière le dos. Je vis que la Princesse soupirait en levant les yeux au ciel; mais elle retenait ses larmes, prêtes à couler"


Puis Sanson, qui domine Marie-Antoinette de sa haute taille, lui enlève brusquement son bonnet qu'elle a mis tant de soin à arranger tout à l'heure et, armé d'une grosse paire de ciseaux, taille à grands coups l'admirable chevelure devenue blanche, mais où se devient encore, des reflets blond cendré

Il coupe jusqu'au ras du cou.

La Reine croit qu'on va l'exécuter là, à la hache... et elle se retourne les yeux hagards

C'est pour voir l'exécuteur enfouir dans sa poche la chevelure qui sera brûlée tout à l'heure

De ses grosses mains, le bourreau remplace le bonnet très haut sur la tête de la Reine

Des mèches coupées irrégulièrement encadrent la nuque dégagée

Il est près de 11H

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