Saint-Just

"Les Saint -Just revinrent à Decize , accompagnés de leur fille aînée et s'installèrent dans la maison du père d'Anne-Marie, père avec lequel elle s'était enfin réconciliée. Louis-Antoine fit la connaissance de sa soeur et de ses cousins. Les petites filles de la bourgeoisie qui venaient jouer avec lui , le trouvaient très méchant , car il cassait leurs poupées.
Il était assez charmant quand il le voulait et apprenait tout avec une étonnante facilité. Quand on lui montra le dessin , il fit tout de suite l'admiration de sa famille par la précocité de son talent.
Madame de Saint-Just était très fière de lui et le traitait un peu en petit prodige. Louis-Antoine avait un sens profond du beau : on s'en apercevait à son goût pour les jolis visages. Le charme de Melle Anne Renaud , la fille du maire de Decize , surprenait visiblement Louis-Antoine et il lui témoignait une amabilité toute particulière. "

"Après la mort de maître Léonard , survenue en 1776, les SAint-Just quittèrent Decize pour toujours. A peine arrivés à Nampcel , ils eurent le chagrin d'assister aux derniers moments de Marie-Madeleine de Saint-Just, la soeur du maréchal. Le chevalier ne voulut pas rester dans cette maison qui lui rappelait tant de souvenirs. Aussi, il songea à aller s'établir à Blérancourt , petite ville plaisante , animée par de grands marchés de moutons et de grains. De plus ,Blérancourt s'enorgueillissait de posséder un des plus magnifiques châteaux de la région, un hôpital du XVe siècle, un jeu d'arc et de vastes cultures. M. de Saint-Just y acheta une maison le 16 octobre 1776. A peu près un an après , Monsieur de Saint Just mourait. "

" C'était , à la vérité , un bien grand malheur pour Louis-Antoine que de perdre si tôt son père. Bien qu'elle fût douée d'un caractère résolu, il était à prévoir que Mme de SAint-Just aurait quelque peine à élever seule cet enfant trop doué, trop précoce. A Decize , Anne-Marie était étroitement entourée par la tribu des Robinot. A BLérancourt , elle était comme exilée , ne connaissait presque personne et n'avait plus comme parent que le vieux fermier de Morsain, Charles de Saint-Just.
Pourtant, elle vendit une partie de ses " terroirs " du Nivernais et demeura à Blérancourt.
Louis-Antoine avait été placé au collège Saint Nicolas de Soissons , chez les oratoriens et sa mère s'occupa de lui faire obtenir une bourse , afin qu'il pût terminer ses études à LOuis Le Grand selon l'usage établi pour tous les fils de bonne maison.
L'enfant travaillait bien. Ses dons éclatants se vérifiaient chaque jour. Il était sensible à tout ce qui était beau , généreux et brillant . Il méconnaissait profondément la valeur de l'argent. L'économie et la prudence de ses ancêtres picards et nivernais ne se retrouvaient pas en lui. Il avait un goût immodéré pour le luxe vestimentaire et un penchant fameaux pour les dépenses inutiles .
Comme tout l'intéressait et qu'il se plaisait aux activités les plus diverses , il changeait souvent ses projets d'avenir.
Avec l'âge , il lui vint un enthousiasme emporté pour les idées nouvelles.
Il n'était bruit , à Blérancourt et dans toute l'Ile de FRance que des campagnes de La Fayette. "

"L'expédition d'Amérique avait recruté dans la province de nombreux et chauds partisans , tant parmi les nobles libéraux qui s'ennuyaient que parmi les villageois que la misère et le manque de travail poussaient aux aventures.
Le duc de Gesvres, marquis de Blérancourt se ruinait élégamment pour l'indépendance américaine.
Il dut même vendre son château à M. Grenet de Marquette .
Louis-Antoine de SAint-Just avait alors 14 ans. Cette guerre d'Amérique dont on parlait sans cesse autour de lui , échauffait beaucoup son imagination.
Fils de soldat , habitué dès sa tendre enfance aux propos militaires et au cliquetis des armes , il vibrait au récit des combats américains. La Liberté fut le mot magique qui enchanta son adolescence et le marqua pour la vie. "

Dommage qu'il ne se soit pas embarqué comme mousse !

Et oui ! Mais ce qui est marquant dans son caractère, c'est que déjà tout petit, il était méchant et cassait les poupées des petites filles. Il leur ôtait la tête.

Ce ne serait pas une exagération de l'auteur ? J'ai connu des tas de petits garçons qui coupaient les têtes des poupées des filles, j'espère qu'ils ne finiront pas boucher comme Saint-Just. Ouf, le métier de bourreau n'existe plus.

Sans doute .

"Vers sa seizième année, Louis-Antoine avait un charme fou et il le savait. Et il jouait volontiers de son pouvoir sur les femmes. Il avait remarqué Melle Gellé , la fille d'un notaire du pays. On les rencontrait souvent ensemble , se promenant dans les chemins creux et les bois. Cela fit jaser. Les amoureux se croyaient liés l'un à l'autre pour l'éternité. Les parents de la jeune fille prirent très mal la chose. L'extrême jeunesse de Saint JUst rendait un mariage impossible. Pour couper court à tout cela , le notaire promit sa fille à un de ses confrères , maître Thorin , lequel se trouvait être le propre notaire de Mme de Saint Just.
Le mariage eut lieu le 26 juillet 1786. Saint Just était encore au collège Louis Le Grand. Il n'avait pas encore 20 ans et fut la proie d'un chagrin déréglé et excessif. "

C'est vrai qu'il devait être sacrément beau. Mais au lieu de se plonger dans la musique ou le cinéma, pardon le théâtre,  comme le font les jeunes hommes à qui tout réussit et qui veulent devenir n°1, il se lance dans la politique, pour le malheur de ses concitoyens.

Je le verrais bien en Jim Morrison.  

"Pour couper court à son chagrin, il se jeta dans une vie de débauche. Il se mit à fréquenter le Palais Royal, les théâtres et les comédiens. Il prit part aux cabales, noua des connaissances de hasard et enfin fit mille folies ( de son argent et de son corps ! ).
Un beau jour, il se trouva criblé de dettes plus ou moins inavouables. C'était précisément l'époque des vacances. Il devait passer 15 jours à Blérancourt. Selon toute vraisemblance , il tenta d'obtenir de sa mère de quoi satisfaire ses créanciers les plus pressants . UNe scène violente éclata entre la mère et le fils. Ni l'un ni l'autre n'avaient le caractère bien accomodant et du reste à l'époque, Saint Just avait le caractère agressif de rébellion propre aux adolescents. Mme de Saint Just le mit à la porte ; du moins , il le crut. Et il n'avait toujours pas un sol vaillant.
Affolé, il ramassa une écuelle d'argent qui provenait d'EDmond Robinot, une timbale héritée de son parrain, trois tasses, un paquet de galons ( probablement ceux qui ornaient l'uniforme de son père ), les pistolets garnis d'or de son père , une bague en rose et diverses babioles. Au choix qu'il fit de ses objets , on pourrait autant croire qu'il les emportait comme souvenirs que pour les vendre. Il ne prit ni linge ni vêtements et partit furtivement dans la nuit, sauta dans la diligence pour Paris, y arriva le lendemain sans encombre et descendit à l'hôtel Saint Louis, rue FRomenteau, près du Palais Royal. "

Attendez chère Olivia , il ne s'est pas lancé tout de suite dans la politique. Il a connu d'abord son heure de débauche.

"Mme de Saint Just ne s'aperçut du départ de son fils que le lendemain matin ainsi d'ailleurs que de la disparition de ses écrins. Elle fut atterrée et encore plus furieuse.
Elle vit son fils à Paris , cette ville de perdition , dilapidant avec des gourgandines l'argenterie familiale. Avait-elle enfanté un nouveau Cartouche ? Faire mettre Louis-Antoine en sûreté le plus tôt possible fut son premier souci. Mais encore fallait-il l'atteindre.
Elle recourut alors aux bons offices des d'Evry. Elle manda les méfaits de Louis-Antoine au chevalier de Brunet d'Evry qui habitait la capitale et le pria de faire rechercher l'enfant rebelle et d'obtenir qu'il fût mis en lieu de sûreté.
" Je vous prie , ajoutait-elle , de mener l'affaire avec la prudence que je vous connais...Vous sentez que je ne veux pas perdre mon fils , mais seulement le mettre dans le cas et lui donner le loisir de reconnaître sa faute et d'en avoir du repentir."
Ce qui signifiait , en clair, qu'elle désirait que Louis-Antoine fût enfermé sous 36 verrous , en vertu d'une bonne lettre de cachet. "

Un vrai rebelle !

Yes ! Et je ne vous dis pas les relations mère-fils !
Cela devait plus que flamber entre eux deux !

"Tandis que sa mère attirait sur sa tête bouclée les foudres du lieutenant de police de Crosne , Ssaint Just éblouissait l'hôtesse et la servante de l'hôtel Saint Louis , par un étalage de bijoux et d'argenterie d'autant plus intempestif qu'il logeait là à crédit. Il avait fait vendre une partie de ses trésors par un commiissionnaire qu'il avait trouvé dans un café. On juge du peu d'argent qu'il avait pu tirer d'une telle transaction . Ce qui inquiétait le plus sa mère et le chevalier d'Evry , c'est précisément , qu'il n'avait pas emporté un denier comptant.
Du reste, il divaguait complètement et ne savait plus comment se tirer de ce mauvais pas où il s'était étourdiment précipité. Il essayait bien de se faire engager aux gardes du comte d'Artois ", en attendant qu'il fût assez grand pour entrer aux gardes du corps" ; il avait apparemment des amis dans ces deux corps ; mais à d'autres moments, il paraît qu'il se sentait attiré par la physique et la médecine. Il voulait se faire oratorien ou il voulait passer en Angleterre . C'était un enfant désemparé , une malheureuse épave, prêt aux idées les plus folles.
L'idée de retourner à Blérancourt l'épouvantait."

Marat était médecin des gardes du comte d'Artois. Se sont-ils rencontrés à cette époque ?

C'est drôle comme ça ressemble à la jeunesse de Desmoulins. Sauf que lui était moche et n'avait donc pas les mêmes succès auprès des demoiselles et des dames. Mais, lui aussi, après des études brillantes à Louis-le-Grand refusait de revenir dans sa province où son père, bon bourgeois correctement installé l'attendait pour qu'il l'aide à gérer ses affaires. Nais non, il rêvait un autre avenir que ses études d'avocat lui avaient fait caresser. Alors de 1784 à 1789, ce fut une période de vache maigre. Il oscillait entre les promesses de retour du fils prodigue ou celles d'un avenir grandiose à son père. Quant au paternel, c'était une alternances d'espoirs et de menaces.
Comme ses plaidoiries étaient médiocres et ne payaient guère, il a fini par écrire des poèmes ou des pamphlets enflammés en attendant pour vivre.

C'est possible.

" Mme de Saint Just reçut bientôt une longue lettre signée " Richardet" , qui lui apportait de son fils des nouvelles singulières et de nature assez alarmantes. On a admis généralement que cette lettre , qui donnait à l'action de SAint Just une explication somme toute plausible et vraisemblable, ne fût qu'un roman inventé de toutes pièces par Louis lui-même pour " pallier sa faute" et apitoyer sa mère. Il y était question , en effet, d'un "mal de tempe "mystérieux, d'une somme de deux cent livres duezs à un médecin, de remords , de gobelet racheté par le bon médecin Richardet en personne, d'une " poudre antiémorragique" qui coûait 2 louis la boîte et de bien d'autres choses encore. Mme de Saint Just et le chevalier d'Evry haussèrent les épaules et ne retinrent de tout ceci qu'un détail mais d'importance : Richardet puisque Richardet, il y avait, donnait l'adresse de Saint Just tout en spécifiant que le jeune homme le lui avait formellement défendu. "

Cette enfance me fait penser à celle d'Hébert, seul fils coincé entre deux soeurs sauf que la mère de St Just a du caractère et qu'on ne lui la fait pas. Cela aide d'avoir dû élever ses frères et ses soeurs !

Oui Saint-Just a eu une enfance et une adolescence assez houleuses et mouvementées, le genre jeune homme qui se rebelle contre ses parents
Mais ça ne l'a pas empêché de réussir en parallèle ses études de manières convaincante. Il était très dispersé et il a dû apprendre à se canaliser un peu...la Révolution a été pour lui un moyen de s'affirmer et de se dépenser

Je ne connais pas trop Saint Just. Je sais qu'il était l'un des élus les plus jeunes de la convention. C'est lui qui a demandé à la convention de juger et de condamner Louis XVI. Il était l'ami de Robespierre qu'il a suivi dans la mort.

C'est également Saint Just qui a eu l'idée de faire voter par la convention le décret permettant au tribunal révolutionnaire d'empêcher Danton d'utiliser sa formidable éloquence pour se défendre, le privant ainsi de sa seule arme.

Saint Just semble avoir beaucoup voyagé, car il a été envoyé comme représentant en mission auprès des armées aux quatre coins de la France. Il aurait dit aux généraux que la convention voulait des victoires et pas des rapports. Il se serait aussi opposé à Carnot.

On l'appelait "l'archange de la Terreur", car il semble n'avoir eu aucun remord et aucune pitié. S'il a lui aussi du sang sur les mains et a envoyé beaucoup de gens à la mort, il semblerait cependant qu'il n'ait pas participé à toutes les horreurs dont se sont rendus coupables les représentants en mission comme Carrier, représentants si terribles qu'on les a nommés "les proconsuls de la férocité".


Ami très proche de Robespierre, il le suivra sur l'échafaud, guillotiné à 27 ans.

Il a laissé des écrits. J'aimerais beaucoup les lire.

Ce buste (je l'ai déjà vu sur le sujet), avec son regard vraiment dur, impitoyable, lui ressemble beaucoup je trouve !



La beauté du diable !

Il devait savoir qu'il était beau car en deux ans de pouvoir il s'est fait énormément potraituré. Robespierre aussi d'ailleurs. Preuve certaine de leur mégalomanie.

Citation :

On l'appelait "l'archange de la Terreur", car il semble n'avoir eu aucun remord et aucune pitié.

On ne peut point régner innocemment . Tout roi est un rebelle et un usurpateur .

( Saint-Just, peu avant l'ouverture du prcès de Louis XVI )

Par contre les dictateurs, là pas de souci.

Il parlait sûrement de lui et de Roro !!!

la différence, c'est que Robespierre, Saint Just et consort se sont cachés derrière la Convention et le comité de Salut Public.