Marie-Josèphe de Savoie, Comtesse de Provence

Citation :

De la physionomie dans sa laideur ?

Non pas de la physionomie mais de la physiognomonie...

Bien à vous.

Oh bien sûr !!! je vous ai lu trop rapidement ! la fameuse physiognomonie de Lavater !!!! Fort heureusement, je ne sache pas que Madame ait consulté ce père de la physiognomonie, son diagnostic n'aurait guère pu être élogieux ... Vous imaginez : "Votre Altesse, toute la laideur de votre âme est peinte sur votre visage; courez vous planquer ..."

Merci pour cet extrait

"Si la reine savait tout ce que j'ai fait pour traverser ses projets, elle redoublerait ses persécutions"

A quels projets et à quelles persécutions la Comtesse de Provence pouvait-elle faire référence?  :s:

J'imagine que tout ce qui venait de la Reine était une persecution pour cette Princesse. Avec son mari qui devait certainement en rajouter une touche.

Si les papillons se brulent les ailes prés de la lumière, les moustiques aussi.

Cela pourra paraître surprenant, mais je n'accorde pas un crédit très important aux lettres de la comtesse de Provence. Elle écrivait d'une seule traite, sans trop réfléchir et allant droit au but dans ses pensées... Les lettres qu'elle adressa à Mme de Gourbillon sous la Révolution révèlent l'instabilité de ses troubles de l'humeur - à mon avis elle était en pleine dépression depuis l'exil de sa favorite en février 1789-, et de plus je pense qu'elle était entrée dans un cycle de paranoïa assez aigüe me semble t-il...
Son comportement après ses 35 ans me fait penser à celui d'une femme plutôt hystérique, en soi très malheureuse, qui pense constamment que tout le monde lui veut du mal. En premier lieu, la reine qu'elle déteste et qu'elle détestera encore plus après la lettre de cachet à l'encontre de sa lectrice, car Marie-Josèphine pensait que Marie-Antoinette en était l'instigatrice, ce qu'elle ne put jamais prouver et qui parait assez improbable.
En second lieu, elle se méfiait de tous : son époux, même le roi qui pourtant s'efforçait de lui faire bon visage et qui l'appelait autrefois "Bonne tête", sa sœur la comtesse d'Artois avec qui elle ne s'entendait pas, et les dames de sa maison et ses femmes de chambre... Bref, cela fait beaucoup de monde ! Je pense de plus en plus, qu'au bout d'une quinzaine d'années de mariage "blanc" que Marie-Joséphine de Savoie était malade psychologiquement et physiquement : dépression, accès de violence avec ses domestiques, paranoïa, alcoolisme chronique, elle perd pied...

Pauvre comtesse de Provence... le panier de crabes de la cour ne lui avait pas convenu... Sans doute avait-elle par nature quelques tendances parano, que le comportement social de son mari avait dû aggraver...

En effet, il semble improbable que Marie Antoinette puisse être à l'origine de cette lettre de cachet. La reine n'en eût du reste pas eu le pouvoir.

Madame de Gourbillon encourageait le penchant de la comtesse pour la boisson, c'était ça le drame...

Au contraire, il semblerait que la lectrice de Madame ait voulu lui faire passer ce vice, ou du moins essayer de le modérer... En pure perte ! C'est par la suite, la maladie qui mit fin à la dépendance de la comtesse de Provence pour les liqueurs fortes. A plusieurs reprises, elle se plaint d'être malade à en mourir.

Vous m'étonnez, cher Dominique ! J'avais lu que Madame de Gourbillon favorisait ce penchant de la comtesse pour mieux tirer parti de sa faiblesse. Ce serait donc faux ?

En tout cas ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est le marquis de Bombelles qui le dit dans son Journal, mais la correspondance de la princesse et d'autres indices disent le contraire.

C'est à croire que la Comtesse de Provence n'a pas vraiment supporté d'être toujours cachée derrière les autres (sa soeur, Marie-Antoinette, Polignac, etc...), d'être moquée pour son physique, et de ne pas trouver le moindre plaisir dans cette cour de Versailles, et dans son mariage :s:

Dominique Poulin a écrit:

En tout cas ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est le marquis de Bombelles qui le dit dans son Journal, mais la correspondance de la princesse et d'autres indices disent le contraire.

Merci, Dominique. Bombelles peut s'avérer mauvaise langue, en effet... Donc, ce n'est pas pour cette raison que Madame de Gourbillon ramassa une lettre de cachet ?

En partie oui, car selon une lettre de Madame, sa favorite rencontra un jour le comte de Provence dans le dédale intérieur de Versailles, avec dans les mains un récipient étrange que le frère du roi supposa être une boisson forte afin de griser son épouse !
Or, Madame de Gourbillon et Marie-Joséphine de Savoie étaient d'accord pour dire que ce n'était pas une liqueur forte mais un bouillon aux herbes médicinales nécessaire aux attaques de nerfs de la princesse... Le comte de Provence ne voulut rien entendre, usa de violence physique avec la Gourbillon et obtint du roi une lettre de cachet afin de renvoyer "l'intrigante".
Monsieur soupçonnait la suivante de sa femme pour plusieurs raisons :

- collusion avec l'alcoolisme de la comtesse de Provence
- malversations dans les comptes de la princesse (plusieurs dépenses pour sa Folie de Montreuil furent payées 2 fois !)
- complicité de confidences attenant à la vie privée de la famille royale frolant les secrets d'Etat
- complicité de relations charnelles (mais là qu'est-ce que ça pouvait bien lui faire au gros Monsieur sans couilles ! )
- soupçons d'espionnage avec la Cour d'Angleterre (j'ai du mal à y croire à défaut d'arguments...)

Merci pour ces explications qui éclaircissent enfin ma lanterne ! Ce renvoi était encore un mystère pour moi, car je trouvais les insinuations de "tribadisme" invoquées par Evelyne Lever dans son Journal de Marie Antoinette bien faibles. J'avais vu avancé dans un recueil de lettres de Marie Antoinette à sa mère (je crois que c'est chez Arneth) le prétexte de la boisson, qui me paraissait déjà plus convaincant. Mais vos explications à vous sont lumineuses.

Quel que soit le prétexte, c'est donc Monsieur qui a intrigué pour obtenir le départ d'une intriguante dangeureuse pour lui plus que pour sa femme, au bout du compte...

Ha oui, je confirme c'est bien Monsieur qui fut l'instigateur de la lettre de cachet... Qu'a-t-il dit à Louis XVI ? on aimerait bien le savoir, mais le secret est resté bien gardé derrière les portes closes des appartements royaux ! Je suis d'une indiscrétion ! A coup sur, le comte de Provence me détesterait : "De quoi se mêle ce roturier parbleu ?" Le pire, c'est que face à l'état chaotique de la comtesse de Provence et les rumeurs alarmistes parvenues à la Cour de Turin, Victor-Amédée III exigea des explications et pria son ambassadeur, le marquis de Cordon de solliciter une audience à Monsieur.
Louis-Stanislas n'eut même pas le courage de dire que c'était lui qui avait poussé la lettre de cachet et retrancha la sentence sur Louis XVI en disant que c'était -je cite- : "Le Roi qui l'a voulu". C'est trop fort...Quelle mauvaise foi !

Dominique Poulin a écrit:

A coup sur, le comte de Provence me détesterait

Et ce serait le meilleur compliment qu'il puisse vous faire
L'insulte suprême serait d'en être apprécié

Bien à vous.

Ha Provence, un gros jaloux... Je me demande quel type de roi il aurait fait à la place de Louis XVI ! Mais pour revenir à nos moutons, il m'aurait fait massacrer de m'intéresser ainsi à sa femme ! Enfin, je ne risque rien, et j'ai pas fini mes investigations, je suis une noix dure à casser.

Dominique Poulin a écrit:

Louis-Stanislas n'eut même pas le courage de dire que c'était lui qui avait poussé la lettre de cachet et retrancha la sentence sur Louis XVI en disant que c'était -je cite- : "Le Roi qui l'a voulu". C'est trop fort...Quelle mauvaise foi !

Ce qui peut expliquer que ce soit la version que retiennent en général les historiens : c'est le roi qui a fait exiler la Gourbillon, et on avance toutes sortes de raisons.

Votre explication réhabilite cette amitié de la comtesse de Provence. Elle était sans doute manipulée par sa confidente, mais ce n'était pas la pocharde puante décrite par Messadié !

Messadié, ça me dit quelque chose... Il a écrit quelque chose sur la princesse ?
En tout cas, l'errance de l'exil ne lui a pas profité. C'est à cette période qu'elle a cessé de prendre le moindre soin d'elle-même, surtout après 1805. Car c'est vrai que là, son apparence fait pitié. Quelques contemporains qui l'ont vue à cette époque ont laissé des témoignages désastreux. Un jour, Marie-Joséphine a dit : "Autrefois, j'étais un cheval, aujourd'hui je ne suis plus qu'une vieille rosse !".

Dominique Poulin a écrit:

Messadié, ça me dit quelque chose...

Auteur de la Rose écrasée, il n'a malheureusement pas écrasé que la rose...
Gardez-vous donc d'en connaître plus sur lui, vous en perdriez votre temps

Bien à vous.

En effet, si Messadié égratigne Marie Antoinette, il explose carrément la pauvre comtesse de Provence, dont il fait un personnage crasseux et répugnant. Je ne vous conseille pas sa lecture non plus, il n'y a rien de bon à prendre de son roman, ce n'est qu'un ramassis de fantasmes dignes d'un vieillard libidineux. Pouah !

Il semble que l'exil ait nui à l'état général de pas mal de personnes. Madame de Polignac n'a pas bien supporté l'errance non plus, sa santé est allée en se dégradant.

Tiens tiens ! je vais quand même me débrouiller pour lire quelques passages de ce livre "à charge" apparemment !!! Mais je vais pas l'acheter ! non non ! je suis de plus en plus exigeant en matière de choix de livres et j'ai l'œil de plus en plus exercé en cette matière. Je vous tiens au courant, Pim, Chou et tout le monde...

Merci Dominique Poulin pour vos réponses ; je n'avais pas encore trouvé le temps de lire vos messages et ceux, complémentaires, des autres participants.

pimprenelle a écrit:

Dominique Poulin a écrit:

En tout cas ce n'est pas moi qui l'ai dit. C'est le marquis de Bombelles qui le dit dans son Journal, mais la correspondance de la princesse et d'autres indices disent le contraire.

Merci, Dominique. Bombelles peut s'avérer mauvaise langue, en effet... Donc, ce n'est pas pour cette raison que Madame de Gourbillon ramassa une lettre de cachet ?

Non non, Bombelles n'est jamais mauvaise langue. Il se peut, en revanche, qu'il soit parfois dans l'erreur, mais mauvais langue sciemment, non ! Il est honnête homme et bon comme le pain, ce petit Marco !

De toute façon, même si le marquis de Bombelles est un observateur de bonne foi et que son Journal représente un monument d'érudition, il ne vivait pas forcément toujours dans l'intérieur des appartements privés de la famille royale, il pouvait se tromper parfois bien sur et faire quelques erreurs d'appréciation, mais je l'aime bien moi aussi, surtout son Journal, une mine, ce Journal, vraiment, un bijou.

Et sa bonne petite bouille ! Ne lui donnerait-on pas le Bon Dieu sans confession ?