Madame Royale

En effet, et la Duchesse d'Angoulême se mettait dans tous ses états dès que quelque chose lui rappelait le passé, donc évoquer Louis-Charles était à proscrire

C'est vrai ... Quelle femme singulière tout de même !

Oui et j'ai du mal à la cerner.

Le comportement de la Duchesse d'Angoulême ne correspond plus à celui de Madame Royale, il y a cette cassure qui est très difficile à expliquer.
A la rigueur je peux comprendre que la Duchesse d'Angoulême ait du mal à évoquer sa famille, dans le sens où si elle voulait tourner la page et passer à autre chose (ce que l'on peut comprendre sans problème), elle faisait tout pour garder ses distances.
Le plus étrange reste je pense son attitude avec les français en général : très froide, très sèche et très dure...les historiens partent du principe qu'à chaque fois les gens voulaient lui rappeler le passé, d'où son attitude :s:

On se renfermerait, à moins, ne trouves-tu pas ?!   Cette fille a vécu des situations et enduré des malheurs hors du commun. Déjà, pour survivre à la réclusion solitaire, surtout si jeune, il faut être d'une force de caractère extraordinaire. Beaucoup se seraient laissés aller. Mais Marie Thérèse Charlotte pas, au contraire, elle entretenait son corps et son moral par des exercices quotidiens.

Es-tu si sûr qu'il y ait une cassure nette entre Madame Royale et la duchesse d'Angoulême ? Cette tempérament bien trempé, elle l'avait déjà enfant. Et qu'elle ait préféré se tenir à l'écart de la kyrielle de survivants qui surgissaient comme la mauvaise herbe, c'est un peu normal, non ? Le starsystem, c'était pas son truc, apparemment.

Citation :

Le plus étrange reste je pense son attitude avec les français en général : très froide, très sèche et très dure...les historiens partent du principe qu'à chaque fois les gens voulaient lui rappeler le passé, d'où son attitude

Même avec les vendéens et autres chouans qui s'étaient battus pour sa famille, enfin surtout pour son frère puis son oncle Louis XVIII, elle s'est montrée assez dure, pour ne pas dire odieuse...

Mais tout doit se rapporter à ces vagues de blessures/calomnies/injures et violences subis dans sa jeunesse.
Faire confiance à des français et surtout à des foules devait lui être devenu impossible...Quitte à être ingrate avec tous ceux qui étaient restées fidèles à sa famille...

Pim a écrit:

Es-tu si sûr qu'il y ait une cassure nette entre Madame Royale et la duchesse d'Angoulême ?

Je dirais que la cassure la plus nette est que les deux personnes, avant et après l'exil, ne se ressemblent point, du point de vue de leur physionomie!

Nous ne possédons de portraits que de l'enfant Mousseline , ou bien de la duchesse d'Angoulême. Il n'y en a pas de la période intermédiaire qui correspond justement à la captivité et qui nous montreraient la petite fille évoluant vers l'âge adulte.

D'une part, il est difficile de se faire une idée à partir de gravures peu fiables. D'autre part, les traits d'un enfant évoluent considérablement. Tous les enfants ont les traits plus ronds et plus doux que leur visage d'adulte.

Mais oui ! Les traits s'accusent considérablement à ce que l'on appelle l'âge ingrat.

Pim a écrit :

Citation :

Es-tu si sûr qu'il y ait une cassure nette entre Madame Royale et la duchesse d'Angoulême ? Cette tempérament bien tempé, elle l'avait déjà enfant. Et qu'elle ait préféré se tenir à l'écart de la kyrielle de survivants qui surgissaient comme la mauvaise herbe, c'est un peu normal, non ? Le starsystem, c'était pas son truc, apparemment.

Le problème, c'est que cette cassure, si cassure il y a, a eu lieu après la libération de Madame Royale fin 1795, car en ce temps elle était encore elle-même si je puis dire, avec Mme de Chanterenne notamment, ou même avec la famille Sauce quand elle repassa à Varennes sur le chemin de l'Autriche. Donc après avoir déjà subi toutes ces horreures.
Et même si Madame Royale était déjà très renfermée sur elle-même, elle erstait polie et bien élevée même après 1795, or dure de retrouver ces caractères chez la Duchesse d'Angoulême, c'est pour cela que j'envisage une cassure...pendant l'exil...son mariage raté peut-être?  :s:

C'est moins l'énormité d'un fait précis qu'il faut chercher comme cause, à mon avis, qu'une accumulation. Et une accumulation d'horreurs. Il y a de quoi perdre tous ses repères ! Franchement, je me demande souvent comment cette enfant a eu la force de survivre.

Peut-être, justement, s'est-elle peu à peu laissée mourir à l'intérieur ? Elle est allée de désillusions en désillusions. Tu penses à son mariage raté. Je vois aussi la façon honteuse dont son oncle s'est servi d'elle. Comment, après toutes ces expériences affreuses, garder encore espoir en l'humanité ?

Tout à fait d'accord avec vous Pim...ce qu'elle a enduré peut expliquer beaucoup de choses. Sortir indemne psychologiquement de telles horreurs, qui le peut, surtout à cet âge.

Je vois cela tout à fait comme vous , Pim. C'est d'une tristesse désolante ! La petite Madame Royale a été meurtrie et brisée par la Révolution, c'est une chose, mais la suite de son existence fait froid dans le dos. Ce duc d'Angoulême ... ce n'était pas un cadeau vraiment ... et puis révolution encore, exil encore ... Qui y aurait résisté ?
Je trouve, comme vous, une continuité cohérente entre son caractère épineux d'enfant et sa sécheresse de femme que n'ont pu qu'exacerber l'accumulation de malheurs .

Oui, c'est clair que tous ces faits sont à prendre en compte, mais je voulais dire que le "déclic" en question a eu lieu après sa libération, c'est donc que la révolution seule n'est pas responsable, il y a aussi les contraintes de son exil, de son mariage et de sa situation politique et familiale oui

J'ai déplacé les messages sur le Duc d'Angoulême dans ce sujet :

https://maria-antonia.forumactif.com/sa-famille-francaise-f11/louis-antoine-dartois-duc-dangouleme-t141-15.htm

Beauchesne confirme que Robespierre serait venu rendre visite à Madame Royale au Temple, le 11 Mai 1794. Voici ce qu'il en dit :

"Elle ne lui adressa pas un mot. Elle lui remit seulement un papier sur lequel elle avait écrit : "Mon frère est malade. J'ai écrit à la Convention pour obtenir d'aller le soigner; la Convention ne m'a pas encore répondu. Je réitère ma demande."
Après avoir donné ce papier, elle détourna la tête et se remit à lire."

Je ne sais pas si cette anecdote est vraiment une source sûr, mais ce petit mot qu'elle lui aurait remis est étonnant : elle n'a pas pu l'écrire devant Robespierre et Beauchesne précise qu'elle l'avait déjà écrit, donc soit elle savait d'avance que Robespierre viendrait la voir, soit elle l'avait écrit pour le faire envoyer à la Convention et elle aurait sauté sur l'occasion de le remettre en main propre à Robespierre :s:

A-t-on une trace de cette première demande écrite qu'elle aurait faite à la Convention?

Oui, c'est très louche, en effet. Il faudrait relire le mémoire de Madame Royale.

Je l'ai en stock

Madame Royale a évoqué dans ses mémoires la visite de Robespierre mais elle a jamais écrit qu`elle a donné une missive.
Fleurdelys

Ah merci de l'info

Il serait étonnant que Madame Royale ait oublié de rappeler une chose comme cela...dommage que Beauchesne de donne pas sa source sur ce coup :s:

Je viens d'apprendre par Beauchesne que Madame Royale aurait aperçu son frère en 1794 (je pensais que ça n'avait pas été le cas ) :

"Depuis leur séparation, le 3 Juillet, et leur confrontation, le 7 Octobre 1793, Madame Royale n'avait point vu une seule fois son frère. Aujourd'hui, 3 frimaire an III (23 novembre 1794), elle l'a aperçu par l'escalier au moment où elle rentrait dans sa chambre avec Laurent, et où Gomin, escorté du commissaire de service du nom d'Alavoine, sortait de celle du Dauphin, emmenant l'enfant se promener avec lui sur la terrasse; mais il ne lui a été donné ni de l'embrasser ni de lui parler."

Madame Royale évoque t-elle cette rencontre dans ses mémoires?

Il est aussi surprenant de voir Louis-Charles appelé "Le Dauphin" en ce temps où il était même Roi

Je tombe sur andecdote assez amusante et typique du caractère de Madame Royale que j'aime tant, relatée par Beauchesne (qui prend sa source chez Gomin)
Cela se passe le 23 Février 1795, alors qu'un nouveau commissaire civile, Leroux, un "terroriste arriéré qui vivait dans le regret de l'incorruptible Robespierre et dans l'espérance de voir le boyau du dernier prêtre serrer le cou du dernier roi" selon Beauchesnes , se rend au Temple pour voir de lui-même les enfants de Louis XVI.

"On le conduisit jusqu'au sommet de la tour; et, en descendant, on le fit entrer d'abord dans l'appartement de Madame Royale. La Princesse était occupée à coudre : elle ne quitta point son ouvrage, sur lequel ses yeux restèrent fixés. "Est-ce qu'on ne se lève pas ici devant le peuple?" s'écria Leroux. La brusque question du mandataire de la Commune n'altéra point l'attitude calme et digne de la jeune fille, qui, immobile sur son siège, continua son oeuvre en silence. Leroux chercha à se dédommager sur les meubles, qu'il affecta de soumettre au plus minitieux examen. Marie-Thérèse ne fit aucune attention à tout ce manège inquisitorial, ce qui dépita le susceptible démocrate, qui murmura en se retirant : "Elle est fière comme l'Autrichienne!""

J'adore!
Là c'est clair qu'on y reconnaît sa mère...y'a pas, elle avait bien du sang Habsbourg cette petite capable d'énerver un gros dur juste en l'ignorant

Oui, c'est une attitude super ! Cette scène-là me dit quelque chose, il me semble l'avoir déjà lue quelque part. Par contre, je ne sais plus, pour la rencontre avec son frère. Dans son mémoire, Madame Royale raconte l'avoir vu de loin, alors qu'Élisabeth était encore là. Ça, j'en suis sûre, parce que ça m'a frappée, elle dit qu'elle le trouve fort grossi. On s'est d'ailleurs demandé ce qui avait pu le mettre dans cet état.

Mais a-t-elle vu son frère plus tard ? Sais plus...

Beauchesne confirme que Madame Royale et Elisabeth ont pu apercevoir à pluieurs reprises Louis-Charles de loin, quand il allait se promener avec Simon en haut de la tour.
Par contre une fois tous d'eux isolés, je le découvre avec Beauchesne...mais il faudrait que je lise vite les mémoires de Madame Royale pour vérifier, car il aurait été étonnant qu'elle n'en parle pas, à moins que Louis XVIII soit passé par là :s: