Madame Royale

Citation :

Le comte de Semallé, page à la Cour de Louis XVI, témoigne dans ses mémoires, de la vigueur dont Marie-Antoinette pouvait faire preuve lorsqu'elle était confrontée aux caprices de sa fille :

"En 1789, Madame Royale ayant atteint sa onzième année, on lui désigna un service composé d'un écuyer, d'un page et d'un porte-manteau. Jusqu'alors, la jeune princesse accompagnait sa mère comme une petite fille. Son service une fois organisé, elle marchait seule, vêtue du costume de cour, et devant ses gens. Comme étant le plus petit, je fus choisi pour la première semaine. Je conduisis la princesse, avec M. de Saint-Pardon, son écuyer, à la messe, à travers la grande galerie ; mais, pour les vêpres, je manquai de quelques minutes, ainsi que M. de Saint-Pardon, le service nouveau, et nous ne retrouvâmes le cortège royal que dans la salle qui précédait la chapelle. La jeune princesse, ayant paru fâchée de ce retard, le témoigna par quelques marques d'impatience qui déplurent beaucoup à la Reine, et celle-ci ordonna de supprimer son service."

J'adore cette anecdote !

On raconte cette anecdote survenue lors du baptême de Madame Royale, le 19 décembre 1778 :

Le comte de Provence tenait l'enfant sur les fonts pour le roi d'Espagne. Le grand-aumônier lui demanda quel nom il voulait lui donner. Monsieur répondit : "Mais ce n'est pas par là où l'on commence; la première chose est de savoir quels sont les père et mère, c'est ce que prescrit le rituel."
Le prélat répliqua que cette demande devait avoir lieu lorsqu'on ne connaissait pas d'où venait l'enfant et qu'ici ce n'était pas le cas puisque personne n'ignorait que Madame était née de la Reine et du Roi.
Mais Monsieur ne fut pas satisfait, il se retourna alors vers le curé de Notre-Dame qui était présent à la cérémonie et voulut avoir son avis. Il lui demanda si lui, curé, et plus au fait de baptiser que le cardinal, ne trouvait pas son objection justifiée. Le curé lui répliqua, avec beaucoup de respect, qu'elle était vraie en général mais dans ce cas-ci il n'aurait pas agi autrement que le grand-aumônier.
Monsieur ne trouva rien à redire et les courtisans se mirent à pouffer discrètement dans l'assistance.

Cette anecdote est bien connue . Par la suite, à plusieurs reprises, Provence mettra en doute la légitimité des Enfants de France, notamment devant l'assemblée des Notables ...

Faut le comprendre, il plaçait son gros cul comme il pouvait, le pauvre...

Non, je ne le comprendrai jamais, surtout depuis que je connais Stautre !

Yann-Hubert de St Hermine a écrit:

il se retourna alors vers le curé de Notre-Dame qui était présent à la cérémonie

Notre Dame de Paris ? Que faisait-il là ?

Le curé était Honoré-Nicolas Brocquevielle, de la paroisse de Notre Dame de Versailles .

C'est bien ce que je pensais, mais je connais si peu la ville de Versailles !

Citation :

Citation :

il se retourna alors vers le curé de Notre-Dame qui était présent à la cérémonie  

Notre Dame de Paris ? Que faisait-il là ?

Bien vu !!!    

Peut-être devrions-nous créer un nouveau sujet pour cette princesse car comme elle est celle de la famille qui vit le plus longtemps, forcément, il y a beaucoup à dire.

Tout le monde ou presque connaît la fameuse anecdote où la petite fille de quatre ans sort les pires horreurs sur sa mère.
Certainement perdue dans les limbes de ce vaste sujet, je vais la recopier de nouveau et y rajouter la suite toujours omise et qui pourtant vaut son pesant de cacahuètes.

Bombelles, le 12 avril 1783 : La Reine racontait, ces jours passés, à M. de Vermond, son lecteur, qu'elle avait fait une chute de cheval et qu'il s'en était peu fallu qu'elle ne se fendit la tête. L'abbé de Vermond, après avoir représenté à SM qu'elle devait moins s'exposer, crut qu'en adresant ensuite la parole à Madame, fille du Roi, qui se trouvait dans l'appartement, il lui ferait dire des choses agréables pour la Reine. Mais il fut aussi surpris qu'affligé lorsque'en réponse à une question sur le danger qu'avait couru la Reine et la peine que cela faisait sûrement à Madame, fille du Roi, elle dit : "Cela m'eût été égal.
_Madame, répliqua l'abbé de Vermond, ne sait pas ce que c'est que de se casser la tête. La Reine serait morte."
_Cela m'eût été égal.
_Mais Madame ignore certainement ce qu'est la mort ?
_Non, M. l'abbé, je ne l'ignore pas. On ne voit plus les personnes mortes. Je ne verrais plus la Reine et j'en serais bien aise parce que je ferais mes volontés."
Il ne faut pas avoir d'entrailles paternelles, il n'est pas nécessaire de connaître tout ce qu'en général la nature a mis dans le coeur d'une mère pour son enfant, pour compatir à la situation de la Reine en entendant sa fille s'exprimer ainsi, et mettre autant de suite, autant de preuve de discernement dans l'énoncé d'une horrible façon de penser.

(...) La petite est envoyée en pénitence, Marie-Antoinette se sent mal, elle fond en larmes chez madame de Polignac et on fait le procès de madame d'Aumale qui s'avère avoir été une sous-gouvernante assez abominable, Bombelles l'accusant entre autres d'avoir poussé madame Elisabeth dans la dévotion la plus étriquée. Elle menace ainsi l'enfant de sa mère à chacune de ses bêtises d'où une aversion naissante.
Bombelles ne comprend pas qu'on ait fait le choix de séparer la petite princesse de son frère au départ de madame de Guéméné, n'ayant plus qu'une seule sous-gouvernante, directement sous les yeux de Marie-Antoinette.
Mais : "Le vrai est que Madame d'Aumale n'est point propre à la besogne dont elle a voulu être chargée exclusivemebnt et qu'un ange qui en aurait eu commission qu'il eût échoué de même."
Madame de Polignac ou toute autre sous-gouvernante n'y pourront rien : Cette éducation exigera bien du soin par rapport à tout ce que cette jeune princesse annonce d'esprit, de hauteur et de caractère d'un genre inquiétant. Et l'on s'étonne de la harpie des Tuileries ?

On comprend dès lors la situation gênante où se retrouve la sous-gouvernante :
Madame d'Aumale lui reprochant ce qu'elle avait dit devant la Reine à l'abbé de Vermond, ajouta que c'était d'autant plus mal que sûrement elle aimait sa mère. "Non, je ne l'aime pas, reprit l'enfant, parce qu'elle me gêne et ne fais pas attention à moi. Par exemple, quand elle me mène chez mes tantes, elle marche dare-dare en avant et ne regarde pas seulement si je la suis ; au lieu que mon papa me conduit par la main et s'occupe de moi."

Ces observations sont fort au-dessus de l'âge de quatre ans et c'est un grand malheur lorsque, presqu'en naissant, les enfants n'ont de l'esprit que pour en faire un mauvais usage.

Mais ce n'est pas fini !

Oh oui, encore du Bombelles !

Quel suspens insoutenable !

Brunier le médecin, et mauvais esprit qui ne devrait pas être dans le poste qu'il occupe *, fut chargé il y a quinze jours par la Reine de ne faire donner à Madame, fille du Roi, qu'un seul mets à son souper, parce qu'elle avait remarqué qu'elle ne mangeait pas des premiers servis, dans l'attente que les autres flatteraient davantage sa friandise. Elle demanda pourquoi on ne lui servait qu'un seul plat. Brunier répondit que c'était par ordre de la Reine. "A-t-elle ordonné que je me couchasse après mon souper ?
_Oui, Madame.
_Est-ce tout ?
_Oui, Madame.
_Monsieur, vous vous trompez ; elle a ordonné sans doute que je fisse, avant, mes prières du soir."

Cette dernière phrase fut accompagnée du rire moqueur qu'une personne de trente ans, piquée, aurait pu faire. Sur le compte qui en fut rendu à la Reine, elle en parla à sa fille, qui répondit sans s'excuser qu'elle s'était amusée à voir la mine que ses répliques faisaient à ses entours.



Après cela, rien d'étonnant que Marie-Antoinette ait pu écrire à madame de Tourzel à propos de son troisème qui à quatre ans lui aussi n'a encore aucune hauteur dans sa tête, qu'elle souhaite que cela dure le plus longtemps possible : "car nos enfants savent toujours assez tôt ce qu'ils sont."


Enfin pour conclure, quelle peste !!!

Bombelles dans les années qui suivent reproche au couple royal de beaucoup trop gâter leurs enfants. Quelque part, quand on connaît la suite, on peut se dire tant mieux.
La seule punition que connassaient Louis XVI et Marie-Antoinette étaient de ne pas visiter leur fille de plusieurs jours. Bien entendu, la sale gosse s'en fichait totalement.
Un gros câlin à Papa et Maman, et hop, ils fondaient et cédaient à ses caprices.
Marie-Antoinette a tenté de rectifier le tir, certainement trop tard, quand ce fut enfin madame de Polignac aux commandes.


*Bombelles changera d'avis quelques mois plus tard. Il semble et cela rejoint ce qu'en dit Marie-Antoinette dans sa lettre à madame de Tourzel, qu'il faisait rire ses patients :Soignant sa belle-mère, "(...) il a encore une autre qualité pour ses malades, c'est de les tenir en gaieté ou de les y mettre par celle de sa conversation."

Il est inépuisable, notre Bombelles, tellement disert !!! ...

Une mine d'or !

Quelle sale gamine, décidément !

Je suis surtout épaté par la maturité qu'elle démontre. Je veux dire, ses répliques sonnent comme celles d'adolescent en crise, ou de jeunes adultes par encore sortis du nid ... pas une enfant de cinq, six ans !

Mais aux âmes bien nées ..........

Si seulement c'était vrais

Une enfant qui passait le plus clair de son temps avec des adultes qui lui montaient la tête. Sa Maison était ingérable, selon Marie Antoinette. On voit ce que ça donne.

Citation :

Je suis surtout épaté par la maturité qu'elle démontre. Je veux dire, ses répliques sonnent comme celles d'adolescent en crise, ou de jeunes adultes par encore sortis du nid ... pas une enfant de cinq, six ans !  

Les enfants, même très jeunes, peuvent être bien étonnants.
Un élève de trois ans m'a bien sorti à ma question [i]E, comme ?[/i]
_Entresol !"
Je ne connaissais pas le mot entresol à 3 ans, ni à 13 ans.  
Pendant ce temps, d'autres ne savent pas dire les mots les plus élémentaires.

Tout dépend de ce qu'attend l'entourage. Or l'éducation des Enfants de France devait être de très haut niveau et très exigeante.
Les Enfants de France devaient savoir lire à trois ans. Et objectivement, j'en ai connu de cet âge  (peu) prêts pour cet apprentissage.
Louis-Charles qui ne savait toujours pas lire à son arrivée aux Tuileries passait pour un feignant.

Sympa ce Bombelle! J'aime bien ces anecdotes.

Merci Reinette pour ces anecdotes, très intéressantes d'ailleurs! Je rejoins l'avis de Pim, quelle sale gosse franchement! J'imagine qu'elle fut dès son plus jeune âge considérée en quelque sorte comme une adulte vu qu'elle devait très jeune savoir gérer ses devoirs de représentation, non? D'où cette étonnante maturité...

Elise