Les Après midis de LOUIS XVI/J.D. Bourzat

J'ai perdu tout à l'heure mon message sur la suite de ma lecture. Alors on recommence!

Hier soir j'ai lu la partie consacrée à François Gamain. Vraiment un sale type.

Fils de Nicolas et neveu de Louis qui travaillaient pour les Bâtiments du roi, il reprit la succession mais sans avoir le talent de son père et oncle. Le Dauphin a pris des cours avec le premier et non avec François, seulement son aîné de trois ans.
Par pitié et par égard pour le père, Louis XVI pensionne très largement François, le marie, dote la future mariée fille de Richard jardinier du Petit Trianon, lui octroie des terres et immeubles et le nomme dans ses petits cabinets. Celui-ci, déjà non content de s'appeler pompeusement Maître serrurier des cabinets particuliers du Roy, ne cesse de se plaindre à Louis XVI de sa situation financière catastrophique. Alors que son père et son oncle avaient laissé une entreprise très florissante, François semble incapable de gérer une telle entreprise qui fatalement périclite de par sa santé fragile. Il n'a peut-être pas non plus le même talent que ses père et oncle (a qui on doit par exemple entre autres la magnifique rampe du Petit Trianon).
En tout cas, il doit énormément à Louis XVI. Mais la reconnaissance n'est pas son fort!

Admettons qu'il ait peur de représailles avec le changement de régime. Ce serait légitime. Mais à ce point!!!

Il devient membre du conseil général de la commune de Versailles le 7 janvier 1792. En septembre de la même année, il fait partie des commissaires qui doivent faire disparaître toutes les marques de la royauté à Versailles (y a du boulot!) tout en étant nommé par Roland ministre de l'Intérieur gardien des cabinets particuliers du ci-devant roi.
Il dénonce ensuite la fameuse Armoire de fer qu'il a conçue pour le roi ce qui permettra d'avoir des pièces à charge pour son procès. Je n'entrerai pas dans les détails de cette histoire. Je signale par contre que l'auteur n'est pas historien de formation, il est chimiste et s'intéresse à l'histoire des sciences. Il s'appuie sur les découvertes des GDC pour qui cette affaire n'est qu'une fumisterie de Roland. Il les confronte aux dires de Madame Campan. Celle-ci aurait été chargée par le couple royale de faire détruire un porte-feuille dans lequel le roi aurait confié les papiers les plus compromettants de cette armoire (bah voyons! on te croit Henriette...). En tout cas, pour quelqu'un qui devait tant à Louis XVI, ce n'est pas une attitude très dévouée.

Mais il ne s'arrête pas là!
Il n'hésite pas à dénoncer Louis XVI comme ayant voulu l'empoisonner! Probablement pour toucher un petit quelque chose des nouvelles autorités car sa situation financière est aux abois. Nous sommes en 1794.
Voilà le rapport à la Convention d'un dénommé Peyssard chargé du comité des secours publics et de liquidation. Admirez cet exemple du langage révolutionnaire!
[...] C'est à la tribune de la liberté que doivent retentir les crimes des oppresseurs du genre humain. Pour peindre un roi dans toute sa laideur, je n'aurai recours ni à l'histoire ancienne, ni aux longues horreurs dont la monarchie que vous avez brisée, offre l'enchaînement désastreux, j'en saisirai seulement le dernier anneau. Je nommerai Louis XVI : ce mot renferme tous les forfaits, il rappelle un prodige de scélératesse et de perfidie (il faut oser!). A peine il sortait de l'enfance qu'on vit se développer en lui le germe de cette féroce perversité qui caractérise un despote. Ses premiers jeux furent des jeux de sang, et sa brutalité croissant avec son âge, il se délectait à l'assouvir sur tous les animaux qu'il rencontrait (je n'aime pas la chasse mais là je trouve légèrement exagérés les propos du citoyen Peyssard). On sait le parti qu'il a tiré d'un tel apprentissage ; on sait combien les pages de la révolution ont été rougies du sang versé par ses mains homicides (mais oui, c'est la faute de Louis XVI!) ; mais on avait ignoré le dernier procédé de sa barbarie. On le connaissait cruel, traître et assassin (t'es bien le seul!). L'objet de ce rapport est de le montrer à la France entière, présentant de sang-froid un verre de vin empoisonné à un malheureux artiste qu'il venait d'employer à la construction d'une armoire destinée à recéler les complots de la tyrannie. Vous penserez peut-être que ce monstre avait jeté les yeux sur une victime inconnue ; c'est au contraire un ouvrier employé par lui depuis vingt-six ans, c'est un homme de confiance (!), c'est un père de famille qu'il assassine (Louis XVI aussi était un père de famille!), avec un air d'intérêt et de bienveillance. (Capet était l'élève de Gamain dans l'art de la serrurerie). Etres affreux qui récompensez ainsi ceux qui vous servent, quel cas faites-vous donc du reste des hommes ? Quel sort leur est réservé par vos caprices ? La France le sait, elle a donné l'exemple à la terre, et la terre sera bientôt déroyalisée.
Un vomitif violent conserve Gamain à sa famille [...]

Disons pour finir que Gamain meurt en 1795 des suites d'une maladie de l'estomac chronique, qu'il a eu bien avant ce soi-disant empoisonnement.

Merci Olivia de nous rafraîchir la mémoire, je me souviens que ce chapitre était particulièrement instructif....sur Gamain et ses rancœurs qui ont pesé lourd dans le procès du roi ...
Je me rappelle aussi que beaucoup de versaillais qui avaient bénéficié de certaines largesses de la part de la famille royale ont été plus qu'ingrats, prompts à les calomnier dès leur départ de la ville le 6 octobre...

En effet, un exemple connu est l'enfant adopté par Marie-Antoinette qui deviendra un révolutionnaire féroce. Il me semble qu'il participe au massacre des anciens gardes constitutionnels du roi, transférés de la cour de justice d'Orléans à Versailles et enfermés en attendant à l'Orangerie. Me tromperais-je ?
Ou il y a le cas de madame Campan qui cherche tant bien que mal à se donner le beau rôle mais dont l'attitude à la Révolution n'est pas très nette.

Merci d'avoir pris la peine de réécrire votre message

Je ne connaissais pas ce François Gamain et je le découvre Un homme peu recommandable en effet

Cet extrait du Testament de Louis XVI lui convient parfaitement :
Je sais qu'il y a plusieurs personnes de celles qui m'étaient attachées, qui ne se sont pas conduites envers moi comme elles le devaient, et qui ont même montré de l'ingratitude, mais je leur pardonne, (souvent, dans les moment de troubles et d'effervescence, on n'est pas le maître de soi) et je prie mon fils, s'il en trouve l'occasion, de ne songer qu'à leur malheur.

Malheureusement il ne devait pas être le seul. Bande d'ingrats!

Merci, chère Olivia !
Ce Gamin est une belle ordure !
Les documents compromettants de ladite armoire de fer étaient essentiellement les correspondances privées de Louis XVI avec la Fayette, Dumouriez, Mirabeau .....
C'est en pleine préparation du procès du Roi , en novembre 92, que Gamain révèle l'existence de l'armoire secrète . Pour le récompenser de sa forfaiture, on le gratifie d'une pension de 12 000 livres .
Les documents sont publiés sur ordre de la Convention sous le titre : Pièces imprimées d'après le décret de la Convention nationale du 5 décembre 1792. Inutile de préciser comme le public se rue dessus !!!

Les documents ne prouvaient nullement une trahison du Roi, mais leur dissimulation puis leur découverte firent le plus grand tort à la cause royale dans l'opinion . ( Tulard, Fayard, Fierro )

Et à cause de ces correspondances, Mirabeau a été renvoyé du Panthéon.

Ouste ! du balai !!!

Lui le méritait je pense, non?

Plus spécialement pour Chou qui s'intéresse au côté scientifique de Louis XVI.

Dans sa galerie de géographie appelée également galerie d'électricité, il avait rassemblé des machines capables de produire par frottements de violentes décharges électriques accompagnées de gerbes d'étincelles.
Dangereux mais vraiment à la pointe! Il avait suivi les cours du célèbre abbé Nollet.

Voici le lien Wikipédia sur ce savant :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Antoine_Nollet

Et son portrait :

Dans son laboratoire de physique, on trouve des baromètres dans leur cadre sculpté et doré fabriqués par l'ingénieur Périca (rien trouvé sur lui), des thermomètres de 10 pieds de haut (je crois que ça doit faire environ 2m50 si je me fie au pied du roi de Wikipedia).
Des armoires grillagées enfermaient des maquettes : un corps de chaloupe sur quatre roues, un moulin en bois peint, un grand nombre de modèles réduits de matériel militaire.

Dans la pièce du tour pour le bois, on trouve des modèles de grues pour décharger les vaisseaux, dont l'une à deux branches, munie de ses poulies, de sa roue en fer pour le tambour et montée sur des roulettes à pivot, fabriquée en 1786 par Laval et aujourd'hui au CNAM.

En mathématiques, il résolut âgé de 11 ans (1765) ce problème que mes élèves et moi-même serions incapables de résoudre:
Sachant que sur vingt-quatre heures la durée des études est de sept heures, la durée du sommeil (s) est égale à cinq fois la durée des repas (r) et que la durée des récréations (j) est égale à la moitié de la durée du sommeil, quelles sont les durées du sommeil, des repas et des récréations ?
-s = 5r
j = s/2
r + j + s = 17
Ce qui donne : s = 10 ; j= 5 ; r= 2

Je suis restée coincer avec 5r + 5r/2 = 17

En 1770, son professeur de mathématiques Le Blond lui fait travailler sur les travaux de Léonard et d'Euler pour le calcul intégral et différentiel (?).

Franchement c'est une tronche.

Allons allons ce n'est qu'un système de 3 équations à 3 inconnues, si je me souviens bien c'est du programme de fin de collège

Par contre résoudre ça à 11 ans et pratiquer les calculs différentiels à 16 ans, là respect en effet

Je ne le connaissais pas merci à vous! Si Louis XVI a suivi de tels cours, alors il devait vraiment être au taquet

Chou d'amour a écrit:

Allons allons ce n'est qu'un système de 3 équations à 3 inconnues, si je me souviens bien c'est du programme de fin de collège

Jamais vu de toute ma scolarité. Pourtant je n'étais pas trop nulle en maths encore en Troisième.

Prochainement, si ce n'a pas été déjà fait, je posterai l'inventaire de sa bibliothèque. Impressionnant!
Au Temple, il lisait 11 livres par semaine!

Pourtant si vous êtes coincée à 5r + 5r/2 = 17, vous l'êtes sur une équation du premier degré, programme de 4ème. Mais cette équation n'est pas cohérente avec le résultat car alors r=2,46. Il manque un r.
Si vous injectez j et s en fonction de r dans la 3ème équation ça donne plutôt r + 5r/2 + 5r = 17 et donc 17r/2 = 17. Donc oui r =2, s = 10 et j = 5

Je vous le dis histoire que vos élèves et vous ne soyez pas bloqués la dessus ce serait dommage

Citation :

Prochainement, si ce n'a pas été déjà fait, je posterai l'inventaire de sa bibliothèque. Impressionnant!
Au Temple, il lisait 11 livres par semaine!

Louis XVI était un grand lecteur c'est vrai, et en plus il faut reconnaître qu'au Temple il n'avait presque que ça à faire...

Chou d'amour a écrit:

Pourtant si vous êtes coincée à 5r + 5r/2 = 17, vous l'êtes sur une équation du premier degré, programme de 4ème. Mais cette équation n'est pas cohérente avec le résultat car alors r=2,46. Il manque un r.
Si vous injectez j et s en fonction de r dans la 3ème équation ça donne plutôt r + 5r/2 + 5r = 17 et donc 17r/2 = 17. Donc oui r =2, s = 10 et j = 5

Je vous le dis histoire que vos élèves et vous ne soyez pas bloqués la dessus ce serait dommage

Je ne comprends rien du tout! Je ne savais même pas qu'il y avait des injections en mathématiques. Et comment ça r=2,46 ?

Je doute fort que je donnerai ce problème à mes élèves.

Si vous avez de l'avance sur leur programme pourquoi pas, mais oui sinon c'est sûr qu'ils sont un peu jeunes je pense

Citation :

Je ne comprends rien du tout! Je ne savais même pas qu'il y avait des injections en mathématiques. Et comment ça r=2,46 ?

Si on prend 5r + 5r/2 = 17 (il manque le premier r mais ce n'est pas grave), alors ça équivaut à 10r/2 + 5r/2 = 17. Et donc 15r/2 = 17. Donc r = (17/15)x2 = 2,46.
Ce sont des additions de fractions, avec r comme inconnue. Et pour être juste il faut bien rajouter un r, le premier de l'équation r + j + s = 17.
On a donc 2r/2 (=r)+ 10r/2 (=j) + 5r/2 (=s) = 17. Donc 17r/2 = 17 donc r = 2.

En traduisant l'énoncé en équations (qui sont exactes) vous aviez fait le plus dur

Ah mais oui, j'ai oublié de mettre au même dénominateur!

Louis XVI nous aura même servi à rappeler cette règle, piégieuse il est vrai
Quel homme ce Louis XVI

Chou d'amour a écrit:

Quel homme ce Louis XVI

Je suis bien d'accord avec vous!
Et franchement je ne crois pas qu'il y est beaucoup de forums (d'histoire en plus) qui s'adonnent à des équations à onze heures passées du soir.

Chou d'amour a écrit:

Si vous avez de l'avance sur leur programme pourquoi pas, mais oui sinon c'est sûr qu'ils sont un peu jeunes je pense

Citation :

Je ne comprends rien du tout! Je ne savais même pas qu'il y avait des injections en mathématiques. Et comment ça r=2,46 ?

Si on prend 5r + 5r/2 = 17 (il manque le premier r mais ce n'est pas grave), alors ça équivaut à 10r/2 + 5r/2 = 17. Et donc 15r/2 = 17. Donc r = (17/15)x2 = 2,46.
Ce sont des additions de fractions, avec r comme inconnue. Et pour être juste il faut bien rajouter un r, le premier de l'équation r + j + s = 17.
On a donc 2r/2 (=r)+ 10r/2 (=j) + 5r/2 (=s) = 17. Donc 17r/2 = 17 donc r = 2.

En traduisant l'énoncé en équations (qui sont exactes) vous aviez fait le plus dur

Bigre !!! J'ai bien fait d'aller me coucher !

olivia a écrit:

Plus spécialement pour Chou qui s'intéresse au côté scientifique de Louis XVI.

Dans sa galerie de géographie appelée également galerie d'électricité, il avait rassemblé des machines capables de produire par frottements de violentes décharges électriques accompagnées de gerbes d'étincelles.
Dangereux mais vraiment à la pointe! Il avait suivi les cours du célèbre abbé Nollet.

L'abbé Jean-Antoine Nollet prodiguait son enseignement de la physique , science très à la mode, en quinze leçons . La dernière en était le clou : elle portait sur les merveilles de l'électricité .
Un jeune-homme était étendu sur une sorte de plateau que l'on tenait suspendu en l'air à des cordes de soie . Ce jeune-homme chargé d'électricité à l'aide d'un tube de verre, faisait preuve des plus curieuses propriétés : on pouvait lui tirer des étincelles des narines, et sa main attirait et repoussait des boulettes de parier .
Cela confirmait l'affirmation de Gray par laquelle l'homme, comme le fer, le charbon ou le coton, est bon conducteur de l'électricité .

Nollet faisant sa démonstration devant un auditoire attentif et émerveillé :



Une dame, au premier plan à droite, désigne du doigt les étincelles jaillissant des narines du sujet dont le main gauche attire et repousse les boulettes de papier que Nollet a disposées auparavant sur un petit guéridon proche . Sur le pouf est ouvert un gros livre de physique . Sur les étagères qui recouvrent les murs du cabinet sont disposés quantité d'appareils servant aux expériences savantes de l'abbé ...

Et a l'occasion tirer sur le chat de Mme de Maupas.

Est-ce que quelqu'un aurait (ou pourrait me dessiner? ) un petit plan des appartements de Versailles avec les appartements de la Reine, du Roi, de Mme du Barry et de Mme de Pompadour, éventuellement ceux de Mme de Montespan et de Mme de Maintenon? Chaque fois j'ai du mal à m'en souvenir quand je m'y rends!

Je me disais aussi! Je connaissais leur gourmandise légendaire et j'étais étonnée d'une telle situation pour leurs cuisines.

Excellent bouquin que Les aprés midi de Louis XVI, j'ai appris beaucoup de choses surtout sur l'expédition de La Pérouse.
Je regrette de ne pas être allé voir l'expo consacré à cette expédition au musée de la Marine (je crois), il y a quelques années.

En 2008. J'y ai eu droit le lendemain de l'expo sur Marie-Antoinette au Grand Palais. Un pierre deux coups !