Voltaire, Rousseau et ces femmes d'esprit

..... un peu ironique, surtout !

Un trait qui m'a toujours impressionné chez Rousseau, est qu'il ne se déplaça jamais qu'à pied ! Alors même qu'il a parcouru l'Europe !

Pour en revenir à Jean-Jacques (    ) n'est-ce pas, voici comment Mme du Deffand l'assaisonne dans une lettre à .... Voltaire :

Avez-vous lu la dernière lettre de Rousseau où il parle de M. de Luxembourg ? J'ai fait lire à Mme de Luxembourg ce que vous m'avez écrit pour elle; cela a été reçu " cosi cosi "; vous êtes, dit-elle, le plus grand ennemi de Jean-Jacques, et elle se pique d'un grand amour pour lui .
On vient de donner le recueil de ses ouvrages en huit volumes, je ne ferai point cette emplette ; il applique sans instruire, et l'utilité de tout de qu'il dit est zéro .

Citation :

Citation :

Pour en revenir à Jean-Jacques (    ) n'est-ce pas, voici comment Mme du Deffand l'assaisonne dans une lettre à .... Voltaire :

[...] il applique sans instruire, et l'utilité de tout de qu'il dit est zéro .

Je suis outrée !  
D'autant que la postérité de Rousseau en science politique est immense !

Elle dit pire un peu plus loin    :

Nos auteurs révoltent par leur orgueil, leurs bravade; et quoique presque tout ce qu'ils disent soit vrai, on est choqué de la manière, qui sent moins la liberté que la licence; et puis ils tombent souvent dans le paradoxe et dans les sophismes, et c'est mon horreur .
Jean-Jacques m'est antipathique, il remettrait tout dans le chaos; je n'ai rien vu de plus contraire au bon sens que son "Emile", rien de plus contraire aux bonnes moeurs que son "Héloïse", et de plus ennuyeux et de plus obscur que son "Contrat social" .

Dites-le avec des fleurs !  

Je m'étonne de ce jugement bien sévère, alors que Héloïse fut ze succès littéraire, du XVIIIe, et de très loin.

Citation :

Rousseau est un larmoyant. Et il m’ennuie.

Tu n'es pas le seul apparemment :

Que dites-vous du procès de Jean-Jacques et de M. Hume?  Avez-vous lu la lettre de dix-huit pages de celui-ci à celui-là ? Existe-t-il dans le monde un aussi triste fou que ce Jean-Jacques ? C'est bien la peine d'avoir de l'esprit et des talents, pour en faire un pareil usage ! C'est une plaisante ambition que de vouloir se rendre célèbre par les malheurs; il n'aura bientôt plus d'asile qu'aux Petites Maisons.  Ses protectrices sont bien embarrassées .......

...... écrit toujours ta marquise à son pote Voltaire !  

Citation :

...... psychologue, notre Frédéric !!!!  

En effet.  
Magnifique lettre !

Citation :

....... il n'aura bientôt plus d'asile qu'aux Petites Maisons.

Eh bien non, justement ! Et qui lui en offre un ?  ...... Charles Joseph !

Le prince de Ligne, qui est un assez bon garçon et me paraissait assez simple (  ), vient de lui écrire pour lui offrir un asile chez lui en Flandre; son intention ce me semble, a été de faire quelque chose d'aussi bon que la lettre du roi de Prusse, avec un sentiment différent; il veut marquer un bon coeur, de la compassion, de la générosité, et il ménage toutes les faiblesses de cet homme en lui montrant qu'il les connaît toutes .


( Mme du Deffand )

De mieux en mieux...  

Citation :

[Le prince de Ligne, qui est un assez bon garçon et me paraissait assez simple (  ), ( Mme du Deffand )

je pense qu'elle veut dire simple dans ses manières, pas simple d'esprit !

Y'a intérêt !!!  

Citation :

Tu n'es pas le seul apparemment :
...... écrit toujours ta marquise à son pote Voltaire !

Hé ! Tu sais combien j’apprécie cette vieille bique...
Elle est trop pur jus XVIIIème pour apprécier Rousseau ; et elle adore Voltaire. Cqfd.  

Citation :

Je m'étonne de ce jugement bien sévère, alors que Héloïse fut ze succès littéraire, du XVIIIe, et de très loin.

On imagine pas la furie que déclencha ce roman !

L'année de sa publication, les imprimeurs ne pouvant pas suivre la demande, on en est venu à louer les livres au jours, puis par heures !
Les dames pleuraient à chaude larmes sur chacune des lettres.

Et les autres écrivains considéraient que Rousseau avait atteint la perfection, et qu'on en pouvait pas le dépasser. Il fallait donc changer de style, si l'on voulait faire quelque chose qui soit remarqué ; d'où le roman réaliste, plus tard naturaliste.

Rousseau est à l'origine des deux mouvements majeurs du XIXe siècle; le romantisme à la suite de son oeuvre, et le réalisme par opposition à son oeuvre.

Je sais que tu apprécies les vieilles biques !                      

Citation :

Citation :

Tu n'es pas le seul apparemment :
...... écrit toujours ta marquise à son pote Voltaire !

Hé ! Tu sais combien j’apprécie cette vieille bique...

Je lui préfère Mme du Châtelet, avec son Discours sur le Bonheur.

Citation :

Et les autres écrivains considéraient que Rousseau avait atteint la perfection, et qu'on en pouvait pas le dépasser. Il fallait donc changer de style, si l'on voulait faire quelque chose qui soit remarqué ; d'où le roman réaliste, plus tard naturaliste.

A posteriori,à posteriori,  pas ses contemporains plus ... circonspects pour ne pas dire septiques ( ou envieux, peut-être ? ) .  

Citation :

Rousseau est à l'origine des deux mouvements majeurs du XIXe siècle; le romantisme à la suite de son oeuvre, et le réalisme par opposition à son oeuvre.

Action, réaction !!!  
Le réalisme naturaliste viendra s'opposer au romantisme, certes, mais ne brûlons pas les étapes !  

Je veux dire que les germes sont posés dès cette époque, avec comme premier déclencheur La Nouvelle Héloïse.

Citation :

Je sais que tu apprécies les vieilles biques !

C’est vrai !  

C’est à elle que Voltaire écrit en premier lorsqu’il revient à Paris, en 1778.
Il lui fait parvenir ce mot : J’arrive mort, et je ne veux ressusciter que pour me jeter aux genoux de Mme la marquise du Deffand.

Pas dupe pour autant, la marquise notera à la suite de leur entrevue :
J’eus enfin hier la visite de M. de Voltaire ; je le mis à son aise, en ne lui faisant aucun reproche ; il resta une heure, et fut infiniment aimable.
Il a quatre-vingt-quatre ans, et en vérité je le crois presque immortel ; il jouit de tous ses sens, aucun même n’est affaibli : c’est un être bien singulier, et en vérité fort supérieur.
S’il me voit souvent, j’en serai fort aise ; s’il me laisse-là, je m’en passerai.
Je ne me permets plus ni désir, ni projet...

Eh ! le coq à l'âne n'est pas le moindre des charmes du Boudoir !  

Citation :

Je lui préfère Mme du Châtelet, avec son Discours sur le Bonheur.

J’aime beaucoup aussi !
Connaissez-vous le portrait de la dame par la marquise du Deffand ?
Si non, je vous conseille sa lecture...

Le voici !!!  

Représentez-vous une femme grande et sèche, le teint échauffé, le visage maigre, le nez pointu, de petits yeux vert de mer, sans hanches, la poitrine étroite, de gros bras, de grosses jambes, des pieds énormes. Le rire glapissant, la bouche plate, les dents clairsemées et extrêmement gâtées. Comme elle veut être belle en dépit de la nature, et qu'elle veut être magnifique en dépit de la fortune, elle est obligée, pour se donner le superflu, de se priver de bien du nécessaire, tels que chemises, mouchoirs. Et sans talents, sans mémoire, sans goût, sans imagination, elle s'est faite géomètre pour paraître au-dessus des autres femmes, ne doutant pas que la singularité ne donnât la supériorité. On la regarde comme une princesse de théâtre et l'on a presque oublié qu'elle est femme de condition. [...] On dit qu'elle étudie la géométrie pour parvenir à entendre ses livres. La science est un problème difficile à résoudre : elle en parle comme Sganarelle parlait latin devant ceux qui ne le savaient pas...[...] Quelque célèbre que soit madame du Châtelet, elle ne serait pas satisfaite si elle n'était pas célébrée, et c'est encore à quoi elle est parvenue en devenant l'amie déclarée de M. de Voltaire ; c'est lui qui donne de l'éclat à sa vie et c'est à lui qu'elle devra l'immortalité .......

Féroce ! Saint Simon n'aurait pas mieux fait !

Il faut l’excuser, n’est-ce pas !
Vous ignorez peut-être encore ce qu’une femme intelligente et jalouse peut dire de sa « rivale ».
Admirable méchanceté de ce portrait :

"Représentez-vous une femme grande et sèche, sans cul, sans hanches, la poitrine étroite, deux petits tétons arrivant de fort loin, de gros bras, de grosses jambes, des pieds énormes, une très-petite tête, le visage aigu, le nez pointu, deux petits yeux vert-de-mer, le teint noir, rouge, échauffé, la bouche plate, les dents clair-semées et extrêmement gâtées.  
Voilà la figure de la belle Émilie, figure dont elle est si contente qu'elle n'épargne rien pour la faire valoir: frisure, pompons, pierreries, verreries, tout est à profusion; mais, comme elle veut être belle en dépit de la nature, et qu'elle veut être magnifique en dépit de la fortune, elle est souvent obligée de se passer de bas, de chemises, de mouchoirs et autres bagatelles.

Née sans talents, sans mémoire, sans goût, sans imagination, elle s'est faite géomètre pour paraître au-dessus des autres femmes, ne doutant point que la singularité ne donne la supériorité.
Le trop d'ardeur pour la représentation lui a cependant un peu nui. Certain ouvrage donné au public sous son nom, et revendiqué par un cuistre, a semé quelques soupçons ; on est venu à dire qu'elle étudiait la géométrie pour parvenir à entendre son livre. Sa science est un problème difficile à résoudre.
Elle n'en parle que comme Sganarelle parlait latin, devant ceux qui ne le savaient pas.

Belle, magnifique, savante, il ne lui manquait plus que d'être princesse ; elle l'est devenue, non par la grâce de Dieu, non par la grâce du roi, mais par la sienne. Ce ridicule a passé comme les autres. On la regarde comme une princesse de théâtre, et l'on a presque oublié qu'elle est femme de condition.

On dirait que l'existence de la divine Émilie n'est qu'un prestige ; elle a tant travaillé à paraître ce qu'elle n'était pas qu'on ne sait plus ce qu'elle est en effet.
Ses défauts mêmes ne lui sont peut-être pas naturels, ils pourraient tenir à ses prétentions ; son impolitesse et son inconsidération, à l'état de princesse ; sa sécheresse et ses distractions, à celui de savante ; son rire glapissant, ses grimaces et ses contorsions, à celui de jolie femme.

Tant de prétentions satisfaites n'auraient cependant pas suffi pour la rendre aussi fameuse qu'elle voulait l'être : il faut, pour être célèbre, être célébrée ; c'est à quoi elle est parvenue en devenant maîtresse déclarée de M. de Voltaire. C'est lui qui la rend l'objet de l'attention du public et le sujet des conversations particulières ; c'est à lui qu'elle devra de vivre dans les siècles à venir, et en attendant elle lui doit ce qui fait vivre dans le siècle présent."

Ah zut ! Je n’avais pas vu.
Le mien n’est pas tronqué.