Voltaire, Rousseau et ces femmes d'esprit

C'est curieux ! Il y a de petites différences !

Donc tu vois, il s'imposait !  

J’ai rarement lu portrait plus assassin !

Rivalité, voire peut être jalousie amoureuse ! Cela seul suffit à tailler la plume la plus accerée, et à sortir le vitriol !

Tu l'as dit, il est brossé par une femme jalouse !    Voilà comme nous pouvons être féroces !  

Moi, je ne suis pas prête à tuer, mais j'absous le crime passionnel  ...

Voici Emilie :

C'est un tableau de Nattier?
J'en reconnais (si c'est bien lui) le travail du velours de la robe...

Bien à vous.

Que l'on peut rapprocher de ma vieille bique préférée :

C'est bien à ce velours-là que je faisais allusion

Bien à vous.

Il semblerait que ce portrait soit de Marianne Loir, disciple de Nattier !

C'est exact !

Citation :

Que l'on peut rapprocher de ma vieille bique préférée :

Que lis-je ??? !!!!

C'est affectueux ! Je l'aime bien ma chère Madame Adélaïde !

Ah, ce n'est que cela ! Vous me rassurez ...........  
Ouf !  

princesse a écrit:

en tout cas, ils ont donnés les idees pour la fondation du monde nuveaux

Pas Saint Just, Danton, Robespierre, Marat & co ! Les premiers, ceux qui on reformer les poids et mesures... oui ! Mais ces rouleaux compresseurs, non. Les idées sortent de Rousseau, des encyclopédistes, Sièyes.... pas d'eux ! A moins que vous ne regardiez le systeme juridique de la Commune insurectionnelle, ou du Comité de Salut Public comme une avancée ?!

Sur ce forum, nous sommes nombreux à avoir lu Candide, Zadig, Micromégas ou L'ingénu. Mais pour Voltaire, ses romans philosophiques n'étaient que des "couillonnades", c'est-à-dire des choses sans vraiment d'importance, des petits divertissements. Ce pour quoi Voltaire aurait voulu rester dans les mémoires, c'est son théâtre. Bien peu de gens savent qu'il a écrit des tragédies ! De même, qui a vraiment lu sa correspondance ? Ou La Henriade ? Ou encore les Lettres philosophiques ?  Pas moi en tout cas, et je ne suis pas la seule. Voilà pourquoi j'ai dit que personne n'avait lu Voltaire.

Je conseille vivement les livres de Xavier Martin sur Voltaire, qui montre toute l'étendue de la méchanceté du personnage, au travers principalement de ses lettres.

Moi non plus je ne les ai pas lues

Bonjour,

Je vous invite à la lecture d'une méchante lettre adressée par le philosophe Voltaire à son rival Rousseau. Cette lettre, comme on dit, n'est pas piquée des vers.



Aux Délices, près de Genève (30 août 1755)

J'ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain; je vous en remercie; vous plairez aux hommes à qui vous dites leurs vérités, et vous ne les corrigerez pas. Vous peignez avec des couleurs bien vraies les horreurs de la société humaine dont l'ignorance et la faiblesse se promettent tant de douceurs. On n'a jamais employé tant d'esprit à vouloir nous rendre Bêtes. Il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. Cependant, comme il y a plus de soixante ans que j'en ai perdu l'habitude, je sens malheureusement qu'il m'est impossible de la reprendre. Et je laisse cette allure naturelle à ceux qui en sont plus dignes, que vous et moi. Je ne peux non plus m'embarquer pour aller trouver les sauvages du Canada, premièrement parce que les maladies auxquelles je suis condamné me rendent un médecin d'Europe nécessaire, secondement parce que la guerre est portée dans ce pays-là, et que les exemples de nos nations ont rendu les sauvages presque aussi méchants que nous. Je me borne à être un sauvage paisible dans la solitude que j'ai choisie auprès de votre patrie où vous devriez être. J'avoue avec vous que les belles lettres, et les sciences ont causés quelquefois beaucoup de mal.

Les ennemis du Tasse firent de sa vie un tissu de malheurs, ceux de Galilée le firent gémir dans les prisons à soixante et dix ans pour avoir connu le mouvement de la terre, et ce qu'il y a de plus honteux c'est qu'ils l'obligèrent à se rétracter.

Dès que vos amis eurent commencé le dictionnaire encyclopédique, ceux qui osaient être leurs rivaux les traitèrent de déistes, d'athées et même de jansénistes. Si j'osais me conter parmi ceux dont les travaux n'ont eu que la persécution pour récompense, je vous ferais voir une troupe de misérables acharnés à me perdre du jour que je donnai la tragédie d'Oedipe, une bibliothèque de calomnies ridicules imprimées contre moi, un prêtre ex-jésuite que j'avais sauvé du dernier supplice me payant par des libelles diffamatoires du service que je lui avais rendu; un homme plus coupable encore faisant imprimer mon propre ouvrage du Siècle de Louis XIV avec des notes où la plus crasse ignorance débite les impostures les plus effrontées, un autre qui vend à un libraire une prétendue histoire universelle sous mon nom, et le libraire assez avide et assez sot pour imprimer ce tissu informe de bévues, de fausses dates, de faits, et de noms estropiés; et enfin des hommes assez lâches et assez méchants pour m'imputer cette rapsodie. Je vous ferais voir la société infectée de ce nouveau genre d'homme inconnu à toute l'antiquité qui ne pouvant embrasser une profession honnête soit de laquais, soit de manoeuvre, et sachant malheureusement lire et écrire se font courtiers de la littérature, volent des manuscrits, les défigurent et les vendent. Je pourrais me plaindre qu'une plaisanterie faite il y a plus de trente ans, sur le même sujet que Chapelain eut la bêtise de traiter sérieusement, court aujourd'hui le monde par l'infidélité et l'infâme avarice de ces malheureux qui l'ont défigurée avec autant de sottise que de malice, et qui au bout de trente ans, vendent partout cet ouvrage lequel certainement n'est plus mien, et qui est devenu le leur; j'ajouterais qu'en dernier lieu on a osé fouiller dans les archives les plus respectables et y voler une partie des mémoires que j'y avais mis en dépôt, lorsque j'étais historiographe de France, et qu'on a vendu à un libraire de Paris le fruit de mes travaux. Je vous peindrais l'ingratitude, l'imposture et la rapine, me poursuivant jusqu'au pied des Alpes, et jusques au bord de mon tombeau.

Mais, Monsieur, avouez aussi que ces épines attachées à la littérature et à la réputation ne sont que des fleurs en comparaison des autres maux qui de tout temps ont inondés la terre. Avouez que ni Cicéron ni Lucrèce, ni Virgile ni Horace ne furent les auteurs des proscriptions de Marius, de Sylla, de ce débauché d'Antoine, de cet imbécile Lépide, de ce tyran sans courage Octave Cépias surnommé si lâchement Auguste.

Avouez que le badinage de Marot n'a pas produit la Saint-Barthélémy, et que la tragédie du Cid ne causa pas les guerres de la Fronde. Les grands crimes n'ont été commis que par de célèbres ignorants. Ce qui fait et ce qui fera toujours de ce monde une vallée de larmes c'est l'insatiable cupidité et l'indomptable orgueil des hommes, depuis Thamas Couli Can, qui ne savait pas lire, jusqu'à un commis de la douane qui ne sait que chiffrer. Les lettres nourrissent l'âme, la rectifient, la consolent; et elles font même votre gloire dans le temps que vous écrivez contre elles. Vous êtes comme Achille qui s'emporte contre la gloire, et comme le père Malebranche dont l'imagination brillante écrivait contre l'imagination. Monsieur Chapui m'apprend que votre santé est bien mauvaise. Il faudrait la venir rétablir dans l'air natal, jouir de la liberté, boire avec moi du lait de nos vaches, et brouter nos herbes. Je suis très philosophiquement, et avec la plus tendre estime, Monsieur, Votre très humble et très obéissant serviteur

Voltaire
http://www.huffingtonpost.fr/nicolas-bersihand/lettre-de-voltaire-a-rousseau-ignorance_b_5395844.html?utm_hp_ref=france

madame antoine

Merci   

C'est assez piquant en effet  , et je n'avais pas connaissance d'une légère animosité entre ces deux hommes de talents   

Dans un livre "Gazette d'un Parisien sous la Révolution" dans lequel Anne Vassal a pu rassembler la correspondance inédite de Nicolas Ruault, qui vivait à l'époque de la Révolution, et qui écrivit plus de 400 (et non 300 comme je l'ai indiqué dans des messages postés dans d'autres rubriques) lettres rédigées entre 1783 et 1796, adressés la plupart à son frère, Brice Ruault, curé à Évreux.

Avant-propos d'Anne Vassal :

"...Nicolas Ruault allie à une grande érudition une grande culture ; c'est un des meilleurs traducteurs de son temps de l’œuvre de Virgile...
Sa profession de libraire-éditeur, rue de la harpe, puis de rédacteur au journal "Le Moniteur" le fait participer à l'actualité littéraire.
pendant des mois, un travail assez long l'a accaparé : rassembler une grande partie de la correspondance de Voltaire, dispersée aux quatre coins de l'Europe.
C'est cette édition des œuvres de Voltaire appelée "édition de Khel" réalisée entre 1784 et 1789, reste une des plus complète et des plus remarquables..."

Et donc, dans ces lettres, Nicolas Ruault fait souvent allusion au travail qui l'occupe en ce moment, la recherches et la compilation des dites correspondances.

Dans la lettre à son frère :

Paris le 11 mars 1783

"...Vous voudriez que je vous fasse part des travaux littéraires qui m'occupent d'une manière si délicieuse ; vraiment mon cher ami je ne demanderais pas mieux que de contribuer ainsi à vos amusements et de vous faire passer quelques moments agréables ; mais cela est impossible, fata obstant (le destin s'y oppose). Ces matières sont incommunicables ; elles sont entre mes mains en dépôt sacré dont je ne puisse faire part à personne, même à vous mon cher frère, qui êtes mon meilleur ami. Cela me fâche beaucoup, mais il faut avoir un peu de vertu en ce monde. Je souffre de ne pouvoir jouir avec vous de ce que j'ai sous les yeux tout le long du jour ; je voudrais que tous les honnêtes gens qui ont droit à la chose fussent à mes côtés, je les régalerais de vive voix, mais par écrit, cela ne se peut, il faut attendre la publication générale. Quoi qu'il en puisse coûter d'argent à Monsieur de Beaumarchais (le commanditaire et financeur du projet) et d'impatience aux souscripteurs, il faut du temps pour mettre en ordre toute cette nombreuse correspondance que nous n'avons que depuis un mois, par les mauvaises humeurs et les défiances de Mr. Panckoucke  qui nous a vendu cher (cent mille écus) ce trésor de littérature et de philosophie que Madame Denis (nièce et héritière de Voltaire) lui a cédé pour très peu de choses (environ vingt mille livres). Cette correspondance se divise en 3 ou 4 parties : 1°) la correspondance générale avec tout le peuple des auteurs, gens de lettres, gens du monde, savants, princes, gentilshommes, dames à la mode etc... 2°) et isolément le Roi de Prusse, 3°) id, l'impératrice de Russie, 4°) id. d'Alembert. C'est vraiment le Siècle de Voltaire. Ces lettres commencent en 1715 et finissent à la mort de l'auteur en 1778, vous le verrez en relation avec avec presque toute l'Europe ; vous le verrez inquiet de de tout ce qui se passe dans le monde, donnant son jugement sur tous les événements, jugement presque toujours sûr. Vous verrez le style le plus gracieux, le plus clair, le plus fort, le plus rempli de charme, suivant la matière qui occupe l'auteur..."

23 juin 1783, à Paris

"... je tiens maintenant les Lettres du Roi de Prusse à Voltaire. Quel homme que ce roi ! Je n'en vois point chez les anciens, il n'y en a point chez les modernes que l'on puisse lui comparer. C'est un phénomène sur le trône. J'arrange toute cette correspondance qui fera je crois 3 volumes. Elle commence en 1736 et finit en décembre 1777. Elle fera époque et une époque mémorable dans l'histoire des lettres et de la philosophie. Bientôt vous lirez ces lettres mon cher ami et vous sentirez la trempe de l'âme de ce roi, vavant encore aujourd'hui, jam senior (déjà assez âgé), mais point du tout affaibli ; elle est plus forte à mon sens que n'était celle de Voltaire. Quel malheur si ce vandale de Frédéric Guillaume son père lui eût fait couper la tête à 20 ans. Quel grand spectacle de moins (dans l'histoire politique et littéraire) nous eussions eu !
Ce grand roi me donne un travail particulier à faire et que je ne puis confier à personne. Il faut que je fasse moi-même la copie de ses lettres pour l'imprimerie ; j'en ais pour trois mois au moins sans perdre un seul jour. C'est une espèce de traduction qu'il me faut faire car il ne sait point assez le mécanisme de la langue française. je ne parle pas de ses innombrables fautes d'orthographe, ce n'est rien que cela ; l'esprit est indépendant de l'orthographe ; mais des fautes de langue, des futurs pour des présents ; d'épithètes mal choisis ; des phrases lourdes et boiteuses de mots à supprimer où à remplacer par d'autres plus convenables etc... Et moi aussi, vous ne l'auriez jamais cru, je serai son blanchisseur. Il faut le mettre en état d'être lu par les Français et l'Europe savante et polie. J'aurai du plaisir à faire cette besogne, la philosophie de ce grand homme ne m'est pas étrangère. je ne sortirai point de chez moi en entrant chez lui. Je laisserai tout le germanisme qui me paraîtra clair et net car on doit le reconnaître à son cachet et ne rien dénaturer.
Il me faudra faire à peu près le même métier pour les lettres de la célèbre Catherine II, autre phénomène encore sur le trône de Russie ; mais celles-ci sont de peu d'importance ; cette correspondance se passe des deux parts en compliments ; ces deux esprits jouent au volant à qui mieux mieux..."


À propos de la signature du traité de Versailles qui confirma par l'Angleterre l'indépendance des Treize États-Unis d'Amérique, et la confirmation à la France de ses possessions en Amérique :

Paris le 21 décembre 1783

"... Enfin nous avons vu publier la paix ces jours derniers, ... paix fort désirée des deux parties et surtout très remarquable pour le démembrement d'une forte partie de l'empire britanique. Un peuple entier y a gagné la liberté. C'est un événement très rare sur la surface de ce globe et ce sera peut-être la seule action glorieuse du règne de Louis XVI.
Les Français espèrent que les Anglo-Américains en garderont longtemps le souvenir. Sans la France cette première République du Nouveau-Monde était étouffée dans son berceau. Mais les nations sont encore lus ingrates que les particuliers. Je ne serais pas étonné que la seconde génération de ce peuple méconnût le service que la France a rendu à la première. Ils sont anglais, c'est tout dire. Mais n'oublions pas ce beau principe du sage Salomon rendu en vers par Voltaire :

"Répandez vos bienfaits avec magnificence
Même aux moins vertueux ne les refusez pas
Ne vous informez point de leur reconnaissance
Il est grand il est beau de faire des ingrats."...

Paris le 16 septembre 1786

"...Vous trouverez jointe à cette lettre une copie des anecdotes que je vous ai promises l'an passé ; elles sont toutes de la main de Voltaire, extraites d'un memento qu'il a fait en différents temps, pour s'en servir probablement à l'occasion. Il y en a dix fois plus que je ne vous envoie : j'ai choisi les moins connues et celles que je ne connaissais point. Le reste est su de tout le monde.

Anecdotes extraites de Monsieur de Voltaire

1) Aujourd'hui 23 juin 1754, Dom Calmet, curé de Fénelon, m'a demandé des nouvelles. Je lui ai dit que la fille de Madame de Pompadour était morte. - Qu'est-ce donc que Madame de Pompadour ? a-t-il répondu.
2) Un provincial vient à Versailles, il voit Louis XIV dans ses jardins. je l'ai vu, dit-il, ce grand roi qui se promenait lui-même".
4) Le cardinal Le Camus disait de la duchesse de Lesdiguières qui vendait son lit  : Quand les ouvriers vendent leurs outils, c'est qu'ils veulent quitter le métier".
6) Un curé que ses paroissiens avaient volé dit un jour à son prône : "Allez, Jésus-Christ a été bien bon de mourir pour des canailles comme vous".
Madame de Staël ayant fait le portrait de ses mœurs, répondit à quelqu'un qui lui demandait s'il n'y avait point d'omissions : "Je ne me suis peinte qu'en buste."
13) Un écolier reprochait à Dagoumer (depuis recteur de l'Université) en pleine classe, d'avoir fait un en enfant à une fille. "Eh, butor, que voulais-tu que je lui fisse ? Un veau ?".
15) Un aveugle des Qunze-Vingts, enlevé pour aller faire un enfant à une femme dont le mari était impuissant, criait depuis ce temps-là à la porte de l'église : Messieurs, n'y a-t-il plus personne qui ait besoin de moi ,."
47) Les femmes ressemblent aux girouettes , quand elles se rouillent, elles se fixent."

Voila quelque lignes tirées d'un livre plein d'enseignements, qui, je l'espère vous auront intéressées, ou tout au moins divertis.

Jean-Marc

Très savoureux !