Saint-Just

Un vol est un vol, en famille ou ailleurs. Imaginez, vous êtes en bisbille avec votre patron pour une raison ou une autre, eh bien, schpounk ! vous piquez dans la caisse ; le boss n'a que ce qu'il mérite ... Non, je ne comprends pas ce raisonnement.

Saint-Just a perdu son père assez tôt il est vrai, mais il n'était pas maltraité par sa mère, donc il a agit vraiment de manière spontanée...je pense qu'il ne fallait pas trop l'énerver le petit Saint-Justounet quand il était jeune

Citation :

Imaginez, vous êtes en bisbille avec votre patron pour une raison ou une autre, eh bien, schpounk ! vous piquez dans la caisse ; le boss n'a que ce qu'il mérite ...

                     

Vu comme ça, ça a quelque chose de jouissif...  

Oui pas con....j'yvais de ce pas  

Evidemment, Pim, si vous pensez à Robin des Bois, cela change tout !!!

C'est moins généreux que ça...   C'est juste que c'est jouissif d'imaginer la tête du boss... La justice à la Obélix, quoi !  

Voici comme promis des extraits d'Organt de Saint-Just :

"Le coeur humain est né pour la faiblesse
Et l'héroïsme est un joug qui l'oppresse."

"Je veux bâtir une belle chimère;
Cela m'amuse et remplit mon loisir ( ).
Pour un moment je suis Roi de la terre;
Tremble, méchant, ton bonheur va finir ( ).
Humbles vertus, approchez de mon trône...
(...) L'orphelin pleure : ah! je ne suis pas Roi!
Si je l'étais, tout changerait de face :
Du riche altier qui foule l'indigent,
Ma main pesante affaisserait l'audace,
(...) Et pèserait, dans sa balance égale,
Obscurité, grandeur, pauvreté, rang."

"L'honneur, la vertu, la raison
Valaient leur prix, sans le sceau du baptême."

Et un autre extrait où il se moque de Louis XVI et Marie-Antoinette :

"Cette heure-là, c'est l'heure des amours,
Dit Arouet. Sous le marbre et les chaumes,
En ce moment, tous les hommes sont hommes;
Le pâtre alors est souvent plus heureux
Entre les bras de sa brune Climène,
Qu'un Roi ne l'est dans les bras d'une Reine;
Et sous l'abri de son palais pompeux,
Souvent il tient des fesses surannées,
Presse un téton et des cuisses tannées,
Et bien souvent caresse même un cul,
Qui dans le jour l'a fait sept fois cocu."

Alors? Qu'en pensez-vous
J'avoue être surpris par le style, surtout vu son jeune âge. Il était clairement doué pour la littérature.
Par contre sur le contenu, Saint-Just est assez effrayant quand même, on dirait un fou

Il fit plus amples connaissance avec Robespierre courant 1790-1791. Bien plus tard que ce que je croyais donc.

Il commença à envisager d'être élu en Juin 1791 où l'Assemblée législative allait être renouvelée. Il débuta une campagne malgré sa jeunesse, à Blérancourt chez lui, à la campagne donc, où il était très apprécié des paysans. Voici ce qu'il dit à l'occasion de son premier petit discours de campagne :

"C'est sous vos yeux que j'aurai fait mes premières armes, c'est ici que mon âme s'est trempée à la liberté, et cette liberté dont vous jouissez est encore plus jeune que moi. La vertu a de nobles illusions qui la perdent."

Il avait alors environ 24 ans, il faut avouer que ça reste impressionnant. Il se souciat beaucoup de son jeune âge, et pour cause : il n'a pas été élu à Paris car il était trop jeune : il fallait avoir 25 ans
Il devait donc patienter au moins jusqu'en 1792...

Vous avez raison, c'est plutôt bizarroïde et malsain comme littérature ... ça me laisse perplexe ...

C'est fou comme son style n'a rien à voir avec celui de Robespierre. Saint-Just déborde de sentiments plutôt étranges et pas net, c'est difficile à dire. :s:
Il est clairement plus abordable psychologiquement que Robespierre dans le sens où il dégage quelque chose de sa personnalité, par contre sa logique reste difficile à cerner tant il part dans tous les sens

Moi, je dirais plutôt que Saint-Just apparaît plus complexe et plus tordu que Robespierre. L'Incorruptible se contente, lui, d'être inhumain tout d'un bloc ... enfin en tout cas , selon le portrait qui se dégage (péniblement) de l'ensemble de ses biographies.

Je me demande si Lautréamont ne s'en serait pas inspiré pour ses "Chants de Maldoror" presque un siècle plus tard : en tout cas, ça me rappelle énormément le genre...

Ah oui?  

Citation :

Moi, je dirais plutôt que Saint-Just apparaît plus complexe et plus tordu que Robespierre.   L'Incorruptible se contente, lui, d'être inhumain tout d'un bloc ...  enfin en tout cas , selon le portrait qui se dégage (péniblement) de l'ensemble de ses biographies.

Robespierre était aussi très complexe dans son genre, car justement il ne montrait quasiment rien donc il est très dur à cerner.
Pour Saint-Just, c'est un peu l'inverse, il montre beaucoup de choses, mais au final ce n'est pas forcément plus simple c'est vrai. Je m'attendais à un jeune homme très froid, très discrèt et très dur. Je retrouve pour l'instant ce dernier aspect, mais alors pour le reste...
Il a très vite sympathisé avec Robespierre donc ce dernier lui trouvait forcément quelque chose, et Saint-Just avait quelque chose : la motivation et le talent orateur. Mais selon moi il était un homme à calmer et à maîtriser...il faut croire que ça a été le cas, j'attends de voir  

Vous avez bien raison: prudence et circonspection !

Citation :

Vous avez raison, c'est plutôt bizarroïde et malsain comme littérature ... ça me laisse perplexe ...  

Je suis plutôt de cet avis-là. Franchement, ça ne me plaît pas. Ces vers me paraissent bien gratuits. J'ai pas mal d'élèves qui écrivent mieux que ça, avec plus de fond.

Fann2 a écrit:

Je me demande si Lautréamont ne s'en serait pas inspiré pour ses "Chants de Maldoror" presque un siècle plus tard : en tout cas, ça me rappelle énormément le genre...

Oh ?! Y'a pas photo !

Vieil océan, ô grand célibataire, quand tu parcours la solitude solennelle de tes royaumes flegmatiques, tu t’enorgueillis à juste titre de ta magnificence native, et des éloges vrais que je m’empresse de te donner. Balancé voluptueusement par les molles effluves de ta lenteur majestueuse, qui est le plus grandiose parmi les attributs dont le souverain pouvoir t’a gratifié, tu déroules, au milieu d’un sombre mystère, sur toute ta surface sublime, tes vagues incomparables, avec le sentiment calme de ta puissance éternelle. Elles se suivent parallèlement, séparées par de courts intervalles. A peine l’une diminue, qu’une autre va à sa rencontre en grandissant, accompagnées du bruit mélancolique de l’écume qui se fond, pour nous avertir que tout est écume. (Ainsi, les êtres humains, ces vagues vivantes, meurent l’un après l’autre, d’une manière monotone ; mais, sans laisser de bruit écumeux). L’oiseau de passage se repose sur elles avec confiance, et se laisse abandonner à leurs mouvements, pleins d’une grâce fière, jusqu’à ce que les os de ses ailes aient recouvré leur vigueur accoutumée pour continuer le pèlerinage aérien. Je voudrais que la majesté humaine ne fût que l’incarnation du reflet de la tienne. Je demande beaucoup, et ce souhait sincère est glorieux pour toi. Ta grandeur morale, image de l’infini, est immense comme la réflexion du philosophe, comme l’amour de la femme, comme la beauté divine de l’oiseau, comme les méditations du poète. Tu es plus beau que la nuit.

Réponds-moi, océan, veux-tu être mon frère ? Remue-toi avec impétuosité... plus... plus encore, si tu veux que je te compare à la vengeance de Dieu ; allonge tes griffes livides, en te frayant un chemin sur ton propre sein... c’est bien. Déroule tes vagues épouvantables, océan hideux, compris par moi seul, et devant lequel je tombe, prosterné à tes genoux. La majesté de l’homme est empruntée ; il ne m’imposera point : toi, oui. Oh ! quand tu t’avances, la crête haute et terrible, entouré de tes replis tortueux comme d’une cour, magnétiseur et farouche, roulant tes ondes les unes sur les autres, avec la conscience de ce que tu es, pendant que tu pousses, des profondeurs de ta poitrine, comme accablé d’un remords intense que je ne puis pas découvrir, ce sourd mugissement perpétuel que les hommes redoutent tant, même quand ils te contemplent, en sûreté, tremblants sur le rivage, alors, je vois qu’il ne m’appartient pas, le droit insigne de me dire ton égal.

C’est pourquoi, en présence de ta supériorité, je te donnerais tout mon amour (et nul ne sait la quantité d’amour que contiennent mes aspirations vers le beau), si tu ne me faisais douloureusement penser à mes semblables, qui forment avec toi le plus ironique contraste, l’antithèse la plus bouffonne que l’on ait jamais vue dans la création : je ne puis pas t’aimer, je te déteste. Pourquoi reviens-je à toi, pour la millième fois, vers tes bras amis, qui s’entr'ouvrent, pour caresser mon front brûlant, qui voit disparaître la fièvre à leur contact !

Je ne connais pas ta destinée cachée ; tout ce qui te concerne m’intéresse. Dis-moi donc si tu es la demeure du prince des ténèbres. Dis-le moi... dis-le moi, océan (à moi seul, pour ne pas attrister ceux qui n’ont encore connu que les illusions), et si le souffle de Satan crée les tempêtes qui soulèvent tes eaux salées jusqu’aux nuages. Il faut que tu me le dises, parce que je me réjouirais de savoir l’enfer si près de l’homme. Je veux que celle-ci soit la dernière strophe de mon invocation. Par conséquent, une seule fois encore, je veux te saluer et te faire mes adieux !

Vieil océan, aux vagues de cristal... Mes yeux se mouillent de larmes abondantes, et je n’ai pas la force de poursuivre ; car, je sens que le moment venu de revenir parmi les hommes, à l’aspect brutal ; mais... courage ! Faisons un grand effort, et accomplissons, avec le sentiment du devoir, notre destinée sur cette terre. Je te salue, vieil océan !

Rassures toi Pim, Organt n'a eu aucun succès à sa sortie

Ce qui m'inquiétait, c'était la comparaison faite avec le génial Lautréamont.

Organt n'était qu'un pétard mouillé ... et Saint-Just n'est pas cet autre salopard (mais lui génial) de Choderlos de Laclos !!!

Mais il faut aussi rappeler qu'à cette époque Saint-Just était très jeune. Camille Desmoulins avait convenu d'éditer dans son journal quelques extraots d'Organt, en bon camarade

Voilà ! C'était une facétie de potache !

Ne dit-il pas lui-même que ça occupe ses loisirs ? Il aurait d'ailleurs mieux fait d'en rester là, au lieu d'envoyer ses contemporains à la guillotine !

Oui certaines phrases de sa part sont assez inquiétantes en effet :s:

Saint-Just semblait déjà être une bombe à retardement...

Saint-Just est donc finalement élu à la Convention nationale le 21 Septembre 1792, à l'âge de 25 ans, ce qui faisait de lui le plus jeune des députés.
Bel hasard que d'être élu le jour même de la proclamation de la République

Presque 2 mois plus tard, il prononce son premier discours à la Convention, en rapport au jugement de Louis XVI. Je cite Jean-Jacques Lafaye :

"Après d'interminables débats entre les partisans de l'inviolabilité royale et ceux qui prétendent juger Louis Capet en simple citoyen, Saint-Just monte pour la première fois à la tribune. Devant lui des centaines de députés, dans les tribunes d'autres centaines de spectateurs. L'acoustique est mauvaise, il y a du bruit, lui est très pâle. Avec un aplomb stupéfiant, porté par son extrême conviction, il s'élève au-dessus du brouhaha et déclare le roi ennemi de la France. Inconnu jusqu'à cette minute, il obtient un succès inouï : la plupart des députés, nettement plus âgés que lui, sont enthousiasmés par sa hauteur de vue, cette clarté dogmatique, éloquente simplicité et distinction de pensée. Saint-Just avait écrit son texte avec beaucoup de soin et dû plancher plusieurs nuits à cet effet. Dans le tourbillon de la République naissante, sa froideur logique est comme une île où poser pied. Aucun n'osait, lui ose et s'impose."

Quant à ce qu'il a pu dire lors de ce discours, c'est malheureusement connu :

"On ne peut régner innocemment."
"Pour moi, je ne vois point de milieu, cet homme doit régner ou mourir."
"On cherche à remuer la pitié; on achètera bientôt les larmes; on fera tout pour nous intéresser, pour nous corrompre même. Peuple, si le roi est jamais absout, souviens-toi que nous ne serons plus dignes de ta confiance, et tu pourras nous accuser de perfidie."

En ce qui concerne l'accusation de perfidie, c'est fait malgré tout

Des slogans, quoi. Ce type aurait fait merveille dans la pub.

L'auteur ne cite que ces passages de son discours ?

Oui Saint-Just était finalement comme beaucoup d'autres révolutionnaires : il se contente de balancer des grandes phrases choc comme ça, juste pour attirer l'attention et se montrer...tout est fait pour l'apparence, car d'un point de vue du contenu ça reste hyper vague et bourré de maximes en tout genres complètement arbitraires

Citation :

L'auteur ne cite que ces passages de son discours ?

Si, il y a un autre petit passage, mais sans grand intérêt patr rapport à ceux que j'ai mis là, donc je vous l'ai épargné