La Comtesse Jeanne du Barry

Trois portraits de Madame du Barry .   

Louise Elisabeth Vigée Le Brun va réaliser trois portraits de Madame du Barry, l’ancienne favorite de Louis XV, interdite à la Cour depuis la mort de ce roi et qui vivait retirée dans son château de Louveciennes.

Les deux premiers portraits ont été faits à la demande du duc de Brissac, le nouvel ami de la comtesse, vraisemblablement à Paris, le dernier a été partiellement exécuté à Louveciennes, dans des conditions troublées et ne sera terminé que bien après la mort, tragique, du modèle.

Voici comment Madame Vigée Le Brun évoque dans ses Souvenirs sa rencontre avec Madame Du Barry : « C’est en 1786 que j’allai, pour la première fois, à Louveciennes, où j’avais promis de peindre Madame Dubarry, et j’étais extrêmement curieuse de voir cette favorite, dont j’avais si souvent entendu parler. Madame Dubarry pouvait avoir alors quarante-cinq ans environ. Elle était grande sans l’être trop ; elle avait de l’embonpoint ; la gorge un peu forte, mais fort belle. Son visage était encore charmant, ses traits réguliers et gracieux ; ses cheveux étaient cendrés et bouclés comme ceux d’un enfant ; son teint seulement commençait à se gâter. Elle me reçut avec beaucoup de grâces, et me parut avoir fort bon ton ; mais je lui trouvai plus de naturel dans l’esprit que dans les manières : outre que son regard était celui d’une coquette, car ses yeux allongés n’étaient jamais entièrement ouverts, sa prononciation avait quelque chose d’enfantin qui ne seyait plus à son âge. »  - Souvenirs – (Lettre X)

On aura noté une certaine incohérence dans les dates puisqu’il est vrai que si le premier séjour à Louveciennes de Madame Le Brun date de 1786, sa première rencontre avec la comtesse était antérieure.

Dans le premier portrait, Madame du Barry apparaît en buste, légèrement de trois-quart, et avec un chapeau de paille. Elle est vêtue d’un déshabillé blanc.



Vigée LeBrun -
Portrait de Madame du Barry
1781

Huile sur panneau
69,2 x 51,4 cm
Philadelphia Museum of Art

Le portrait donnera lieu à une réplique autographe et à plusieurs miniatures.

Dans le second portrait, Madame du Barry est vêtue d’une robe en satin blanc, garnie de perles aux manches. A la main elle tient une couronne de fleurs, l’un de ses bras est appuyé sur un piédestal. Sa coiffure s’orne de d’une couronne de fleurs et de plumes d'autruche.



 Vigée LeBrun -
Portrait de Madame du Barry
1782
Huile sur toile
45 ¼ x 35 ¼ inches
Corcoran Gallery of Art, Washington, DC

Il ne faut pas être grand expert pour voir que ce tableau a été massacré.
Comme l’écrit Madame Vigée Le Brun :

« J’ai fait ce tableau avec le plus grand soin ; (…) je l’ai revu dernièrement. Le vieux général à qui il appartient a sans doute fait barbouiller la tête, car ce n’est point celle que j’ai faite ; celle-ci a du rouge jusqu’aux yeux, et madame Dubarry n’en mettait jamais. Je renie donc cette tête qui n’est point de moi ; tout le reste du tableau est intact et bien conservé. Il vient d’être vendu à la mort de ce général. »  – Souvenirs – (Lettre X).

Il reste aujourd’hui à espérer qu’avec les techniques modernes, on pourra restaurer ce portrait.

Le troisième portrait, « je l’ai commencé vers le milieu de septembre 1789. De Louveciennes, nous entendions des canonnades à l’infini, et je me rappelle que la pauvre femme me disait : «Si Louis XV vivait, sûrement tout cela n’aurait pas été ainsi.» J’avais peint la tête et tracé la taille et les bras, lorsque je fus obligée de faire une course à Paris ; j’espérais pouvoir retourner à Louveciennes pour finir mon ouvrage ; mais on venait d’assassiner Berthier et Foulon. Mon effroi était porté au comble, et je ne songeais plus qu’à quitter la France ; je laissai donc ce tableau à moitié terminé. Je ne sais pas par quel hasard M. le comte Louis de Narbonne s’en trouva possesseur pendant mon absence ; à mon retour en France, il me l’a rendu, et je viens de le terminer. »  – Souvenirs -  (Lettre X). Il a en effet été achevé en 1814, soit 25 ans plus tard.



Vigée LeBrun -
Portrait de Madame du Barry
1789
Huile sur toile
Collection privée

Merci pour ces détails accompagnant ces trois tableaux, j'adore particulièrement le troisième!
Sur le premier et le troisième portraits, Jeanne du Barry semble porter tout de même une légère touche de rouge...
Ou peut-être n'est-ce seulement que du rose?  
Je n'avais jamais songé qu'on puisse altérer comme l'est le deuxième portrait l'oeuvre d'un maître...  

Citation :

Il ne faut pas être grand expert pour voir que ce tableau a été massacré.
Comme l’écrit Madame Vigée Le Brun :

« J’ai fait ce tableau avec le plus grand soin ; (…) je l’ai revu dernièrement. Le vieux général à qui il appartient a sans doute fait barbouiller la tête, car ce n’est point celle que j’ai faite ; celle-ci a du rouge jusqu’aux yeux, et madame Dubarry n’en mettait jamais. Je renie donc cette tête qui n’est point de moi ; tout le reste du tableau est intact et bien conservé. Il vient d’être vendu à la mort de ce général. »  – Souvenirs – (Lettre X).

Il reste aujourd’hui à espérer qu’avec les techniques modernes, on pourra restaurer ce portrait.

Il est assez facile de détecter des repeints à la lumière noire. Je me demande si cela a été fait pour ce tableau? Dans l'ancien temps, les restaurateurs  avaient une fâcheuse tendance à repeindre les tableaux à leur goût, plutôt qu'à les restaurer à proprement parler.

Citation :

[ « ...outre que son regard était celui d’une coquette, car ses yeux allongés n’étaient jamais entièrement ouverts, sa prononciation avait quelque chose d’enfantin qui ne seyait plus à son âge. »  - Souvenirs – (Lettre X) .

Il est bien connu que Jeanne zézeillait, croyant se donner ainsi un air mutin et juvénile .  
( même devant le tribunal révolutionnaire, la pauvrette ! )

Ah ze vois !!  

Tu en prends de la graine ?  

Zi l'on peut dire.

Elle parlait vraiment comme ça?!

  

Mirabeau eut ce joli mot :
Si ce ne fut pas une vestale, la faute en fut aux dieux qui la firent si belle.

Joli !

Je profite de l’absence du comte Axel pour poster, ici, un passage du portrait de Mme du Barry par les frères Goncourt. Une plume, comme souvent, (bien) trempée dans le vinaigre.
Aïe, aïe, aïe ! Ils auraient pu ajouter ce smiley à leur prose :  

Citation :

Je profite de l’absence du comte Axel pour poster, ici, un passage du portrait de Mme du Barry par les frères Goncourt. Une plume, comme souvent, (bien) trempée dans le vinaigre.
Aïe, aïe, aïe ! Ils auraient pu ajouter ce smiley à leur prose :  

Comme tu dis !  Oui franchement, là ils y vont fort !   
Tout le monde sait que Jeanne n'était pas une flèche mais de là à la déglinguer autant ...
Elle était bonne, c'est déjà beaucoup .

Oui pas cool !!!
Heureusement qu'on a plus objectivité aujourd'hui... C'est que tout simplement elle n'avait pas d'ambition politique !!!
C'est Louis XV qui a fait son choix et sûrement un choix de cœur...

Osterreich a écrit:

C'est Louis XV qui a fait son choix et sûrement un choix de cœur...

IL en avait peut-être ras le bol des femmes de tête ?   

Exactement !
 C'était une femme de cœur et il est compréhensible que ce vieux blasé de Louis XV eut besoin au soir de sa vie, après tant de deuils, d'une femme "reposante". Elle aurait été de la cour que personne ne se serait avisée de la critiquer autant.
Les frères Goncourt font à la fois preuve de misogynie et de mépris envers ceux n'appartenant pas à la bonne caste.

Moi, c'est le manque de compassion des Goncourt qui ne laisse de me surprendre !
Ils se permettent même un trait d'humour noir (   ) lorsqu'ils tracent le récit du calvaire final :

Le peuple se pressait pour regarder passer la courtisane du ci-devant tyran .
Celle qu'on regardait ne voyait rien, n'entendait rien; elle ne faisait que soupirer, sangloter, étouffer. Ses compagnons de route, qui devaient être ses compagnons d'arrivée, les Vandenyver, cherchaient à la soutenir de leurs paroles ...

Bah oui, c'est tellement facile de se moquer de ceux qui montent à l'échafaud !  

Et ils réitèrent :

On l'entendait sur l'escalier de l'échafaud, éperdue, désespérée, folle d'angoisse et de terreur, se débattre, supplier, demander grâce à l'exécuteur, demander : " Encore une minute , monsieur le bourreau ! " puis, sous le couteau, crier : " A moi !  à moi ! " comme une femme assassinée par des voleurs .

Comment faut-il, non pas comprendre, mais interpréter ce comme une femme assassinée par des voleurs ?
Cela me laisse perplexe ...

Quels mufles !

Ils pensaient rendre la justice tels des dieux !!!    
Ils sont abjects !!!    
La peur est humaine, il y aurait fallu aussi qu'elle les remercie !!!    

Sur cette réflexion s'achève leur biographie de Jeanne du Barry .
C'en est la dernière phrase .

Les Goncourt étaient, comme qui dirait, très vaguement misogynes sur les bords .   
Que l'on en juge :

La femme a été constituée par Dieu la garde-malade de l'homme.

La femme : la plus belle et la plus admirable des pondeuses et des machines à fécondation
La nature l'a ravalée à la matrice .

On parle à une femme, on lui dit des phrases en sachant bien qu'elle ne comprend pas, comme on parle à un chien ou à un chat.

La femme excelle à ne pas paraître stupide.

Au fond, la femme, je le vois partout, n'est occupée que de l'homme et de l'humanité de l'homme. La femme : deux paires d'ailes autour d'un phallus.

Et pourtant, nous dit Elisabeth Badinter, cette grande hyper-féministe devant l'Eternel  ,  personne n'a su mieux qu'eux décrire la grandeur des femmes du XVIIIème siècle et leur extrême misère .
Ben, bon dious, qu'est-ce que ce serait sinon !!!  

C'est gratiné  

Encore plus fort :

Mauvaise, impudique, superficielle dans la conversation, intrigante, moralement méprisable, dépourvue de sens littéraire, sa pensée moud dans le vide, son sexe est son gagne-pain. Dans le meilleur des cas, ces jolis animaux atteignent à l'intelligence du singe .

En fait, comment nous étonner des quelques pages postées plus haut sur Jeanne du Barry ?